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28 septembre 2020 1 28 /09 /septembre /2020 04:07

Entre le rêve et la réalité, il n’y a que l’épaisseur d’une paupière…

Sylvie HUGUET : Rêve de Licorne.

Depuis quelques temps, la jeune Louise n’est plus assidue dans son travail scolaire, pour des raisons qui échappent à madame Dorgueil, son enseignante. Mais lorsque celle-ci fait remarquer à son élève, qu’elle a prise en affection, les erreurs disséminées dans ses rédactions aussitôt Louise les corrige sans difficulté.

Madame Dorgueil a effectué sa petite enquête mais à première vue, rien dans sa vie familiale ou autre n’a pu conduire la jeune Louise à ce comportement inhabituel et bizarre. Alors, elle lui propose de relire un manuscrit qu’elle vient d’achever, car elle écrit des livres pour adolescents, et de lui donner ses impressions. Une occupation que Louise accepte avec plaisir. Et c’est ainsi que nous découvrons en même temps que l’adolescente cette histoire intitulée Rêve de Licorne.

Diane est une gamine qui vit dans un élevage de chevaux et elle s’épanouit dans ce paradis de vallons et de bocages, au domaine de la Châtaigneraie. Mais c’est bien connu, les châtaignes sont enfermées dans des bogues protégées par des piquants. Et les piquants sont ce que l’on pourrait appeler les réactions de sa mère lorsqu’elle a ses nerfs. Pourtant le père est prévenant, mais la mère est une forte femme qui sait s’y prendre pour que ses envies ou ses refus soient satisfaits sans barguigner de la part de sa fille ou de son mari.

Diane a appris à monter sur un poney toute jeune puis elle a eu droit de posséder un magnifique poulain qu’elle nomme Brume de Neige à cause de sa robe. Elle a assisté à l’accouchement de la jument, qui en est décédée, a élevé le poulain au biberon, couchant même dans le box la nuit, au grand dam de sa mère. Entre Brume de Neige et Diane, c’est une entente parfaite, presque ou autant qu’avec le père. Quant à la mère elle a toujours ses nerfs, et cela va se compliquer le jour où le père décède dans un accident.

Près d’un an après, la mère se remarie avec Alex le palefrenier embauché du vivant du père. Et Alex ne trouve rien de mieux que de complimenter Diane sur sa féminité naissante, de l’importuner par des propos inconvenants et d’effectuer des gestes déplacés trop bien placés. Diane veut en parler à sa mère qui réfute ses allégations, et les confidences avortent dans des crises de nerfs maternelles. Il ne faut pas dire du mal d’Alex en qui elle a trouvé un bel étalon. Alors Diane se réfugie dans ses rêves, dans un pays qu’elle découvre peu à peu, l’Outre-Monde.

Elle est subjuguée par un animal magnifique qui ressemble un peu à Brume de Neige mais portant au front un rostre en ivoire : une Licorne. Cet animal fabuleux est accompagné de Vif-Argent, un cheval qui mène une harde, ainsi que d’autres animaux qui vivent, malgré leur antagonisme ancestral, en bonne intelligence. Il y a Vent-d’Orage, le loup, et sa meute, Lame de Saphir, le tigre, Œil-de-Silex, l’aigle, et surtout Vieux Cerf, le vieux sage qui explique à Diane qu’ils sont toutefois sous la menace des Ténébriens, vivant de l’autre côté et les pourchassant impitoyablement. Mais bientôt cette douceur va connaître des heures sombres. Car le rêve devient cauchemar à cause d’un épisode réel vécu avec peine par l’adolescente.

 

Cette histoire, Rêve de Licorne, est enchâssée entre le prologue et l’épilogue, ce qui est normal me direz-vous avec juste raison, et seule elle aurait pu constituer un aimable conte bucolique rédigé sur le thème de la Fantasy.

Seulement, les deux barrières qui l’entourent donnent toute la saveur à ce court roman, une saveur amère et très actuelle. L’auteur retombe ainsi sur ses pieds tout en fournissant une histoire familiale qui se tient, trop bien, et le lecteur navigue entre rêve et cauchemar, dans ce que l’on pourrait définir comme une réalité virtuelle.

De beaux moments de poésie, une ode à la nature, et une dégringolade dans un concept dont malheureusement il est question tous les jours depuis la nuit des temps. Et la présence des loups et des chevaux n’est pas dénuée d’innocence, car ces animaux alimentent l’actualité malgré eux. Une coïncidence ?

Sylvie HUGUET : Rêve de Licorne. Editions Assyelle. Parution 15 septembre 2020. 140 pages. 12,00€.

ISBN : 9782378550219

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24 septembre 2020 4 24 /09 /septembre /2020 03:20

Auprès de mon arbre,
Je vivais heureux,
J'aurais jamais dû m'éloigner de mon arbre...

Etranges floraisons. Anthologie de Fantastique botanique.

L’Homme a besoin de la nature. La réciproque est-elle vraie ?

La Flore existait avant l’Homme, et malgré tout ce que celui-ci invente pour la « dénaturer », il est probable qu’elle lui survivra.

Mon propos n’est point d’établir une tribune sur la déforestation au Brésil, sur l’emploi de produits phytosanitaires préjudiciables, sur la nouvelle façon de procéder dite permaculture, écologique pour certains, paresseuse pour d’autres, sur les nouvelles pratiques urbaines qui est de laisser pousser dans les rues les herbes dites adventices, et autres recherches de légumes anciens. Non, mon souhait est juste de présenter comme un bouquet de fleurs ces nouvelles dues à des auteurs habitués des éditions Clef d’Argent, mais pas que.

 

Mon amie la rose de Philippe Gontier occupe la première place de ces nouvelles, et elle est peut-être celle que je préfère.

Flore n’aurait jamais dû annoncer à son mari qu’elle désirait divorcer. Résultat il l’a étranglée. Puis il simule un accident de voiture mais enterre le corps de sa femme dans la serre, une roseraie dont elle était fière. Et dont elle pourrait être fière de là-haut car ce sont bien ses fleurs qui dénonceront l’assassin. Naturellement, le titre de ce texte m’a remémoré la chanson de Françoise Hardy.

Pierre Brulhet nous entraîne dans une région de l’Afrique qu’il connait bien pour y avoir vécu. D’où l’origine peut-être de Le Kulu-Néré.

Le jeune Seydou attend son tour devant la case du sorcier, mais il y a tellement de monde qu’il renonce et se promet de revenir le lundi suivant. Au bout de la troisième fois et en se levant de très bonne heure, il peut enfin accéder dans la case du sorcier qui lui annonce qu’il faut être courageux. Et sans prévenir, le sorcier lui coupe une main. Lorsqu’il sort de son évanouissement, Seydou se rend compte qu’il n’a pas mal, et que son poignet cicatrise déjà, une mousse verte au moignon. Et des plaques brunâtres s’étalent sur sa peau.

Dans quelques dizaines d’années, ou quelques siècles, cela dépend des avancées technologiques, peut-être seront nous confrontés aux personnages de Canopée de Patrick Mallet. Terra IV est au bord de l’épuisement, et il faut pour que l’humanité survive découvrir une autre planète. Terra V, une exoplanète habitable, est entièrement recouverte de végétation. Elle accueille déjà quelques nouveaux pionniers mais une navette, qui devait patrouiller dans des endroits encore inexplorés, s’écrase au sol. Les deux survivants cherchent à regagner Ourobor, une cité construite grâce à la déforestation intensive, mais malgré leurs cartes, ils s’aperçoivent que quelque soit le chemin suivi, ils tournent le dos à leur destination, et que des Canopéens poursuivent le même chemin ou les précèdent vers un arbre immense. Naturellement, ceci rappelle la déforestation intensive du Brésil, de l’Indonésie, du Canada, et quelques autres pays, bouleversant la biodiversité au profit d’hommes politiques ou d’industriels qui ne voient pas plus loin que le bout de leur portefeuille.

Confinée dans un abri souterrain, une petite fille se réveille grâce à la lumière artificielle. Son père est sorti la veille mais il n’est pas revenu. Il voulait savoir si la vie au grand air était possible, alors que cela fait si longtemps qu’ils sont tous deux confinés. Alors malgré les objurgations de son père, la gamine monte l’échelle et sort de cet abri. Elle se retrouve dans la cour de leur maison, mais le père n’est nulle part en vue. La bâtisse est en ruine, le vent souffle. Alors la gamine se dirige vers une sorte parc. Tel est le thème de Automne de Jérôme Sorre.

 

Ce ne sont que quelques fleurs, vénéneuses ou non, odoriférantes ou non, que je vous propose, mais sachez que les préoccupations actuelles, les nouvelles façons de procéder, comme étreindre un arbre entre ses bras afin de communier avec la nature par exemple, font partie des sujets d’inquiétude des auteurs et par voie de conséquence de nous-mêmes.

Des nouvelles qui se veulent optimistes mais se révèlent la plupart du temps pessimistes, et abordent aussi bien le roman policier que le fantastique, la science-fiction que l’horreur, et autres thèmes qui servent de support aux préoccupations actuelles.

Ces auteurs là ont la main verte !

 

Sommaire :

GONTIER Philippe : Mon amie la rose. Illustration de Léo et Philippe Gontier.

BRULHET Pierre : Le Kulu-Néré. Illustration de Soxara.

MALTERE Céline : Sexburge. Illustration Audrey Faury

FIEROBE François : Fantaisies botaniques de Mirgance et d'Aiquose. Illustration de Léo Gontier.

SORRE Jérôme : Automne. Illustration de Okiko.

MALLET Patrick : Canopée. Illustration Patrick Mallet.

MOURET Stéphane : La grande offensive du printemps. Illustration Inès Cherraben.

MANTESE Laurent : L'homme qui se prenait pour un arbre. Illustration Ferdinand Springer.

FAVARD Jean-Pierre : Une belle plante. Illustration Inès Cherraben.

Etranges floraisons. Anthologie de Fantastique botanique. Testes réunis par Jean-Pierre Favard, Philippe Gontier et Patrick Mallet. Introduction de Jean-Guillaume Lanuque. Couverture Léo Gontier. Editions de La Clef d’Argent. Parution le 8 septembre 2020. 180 pages. 13,00€.

ISBN : 979-1090662599

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8 septembre 2020 2 08 /09 /septembre /2020 03:59

Romanciers, attention : ceci peut vous arriver !

Michel PAGEL : Désirs cruels.

Toute jeune voleuse, Marilith s’introduit nuitamment dans une propriété afin de dérober une toile de maître. Seulement elle ignore qu’une caméra dissimulée dans une boiserie filme ses faits et gestes. Et elle est toute surprise lorsqu’un homme armé l’arrête dans son élan. Il n’est pas seul, étant suivi par son patron, le romancier Marbœuf.

Après l’avoir complimentée sur sa jeunesse, sa joliesse, ses yeux verts, Marbœuf lui intime de se déshabiller. Pas de quoi déstabiliser le domestique nommé Baptiste, tranquille comme son prénom l’indique, ni la jeune femme qui se défait de son collant intégral. Alors qu’elle s’apprête de se débarrasser de ses sous-vêtements, l’écrivain l’arrête dans son élan. Ce n’est pas un individu lubrique. C’était juste pour vérifier qu’elle n’est pas armée.

Il sort de l’ombre dans laquelle il était resté et Marilith distingue alors un homme âgé, décrépit, le visage rongé comme s’il y avait eu projection d’acide. Marbœuf a connu son heure de gloire et a même loupé le Prix Goncourt quinze ans auparavant. Mais depuis, non seulement il est atteint d’une sorte de maladie qui le ronge physiquement, mais de plus, il ne produit plus rien. Son inspiration s’est épuisée. Lui aussi d’ailleurs est épuisé. Alors il propose un étrange marché à sa visiteuse nocturne.

Elle doit lui narrer quatre histoires, complètes et inédites, durant quatre nuits. Une par nuit. Et Marilith ne manque pas d’imagination, se renouvelant à chaque fois, abordant des thèmes différents.

 

La première nuit, Marilith raconte Rosie, nouvelle dédiée à Richard D. Nolane et S.K. Sheldon. Une histoire de routier légèrement éméché qui prend en stop une jeune femme trempée par la pluie. A bord deux petits personnages sèment la perturbation, Séraphin et Adonides, ange et démon. Castaing, le routier, sympa, sauve un vieux couple qui se défend, en pleine nature, comme il peut des attaques de deux loubards. Un couple bizarre qui roule à bord d’un vieux véhicule, une voiture vivante qui se délecte de chair et de sang.

L’île des révélations, c’est l’île d’Yeu qui sert de décor. Ou plutôt de lieu d’arrivée prévu pour quelques touristes d’horizons divers qui empruntent la navette qui relie le continent à l’île. Mais au cours du voyage, le ferry est victime d’un naufrage et les rescapés échouent sur une île inconnue. Chacun d’eux va peu à peu révéler sa véritable nature.

Les mains de Farah Yole met en scène une femme peintre qui œuvre dans le surréalisme morbide. Cette nouvelle est dédiée à Clive Barker et il n’est donc point besoin de décrire plus l’ambiance qui règne dans ce récit.

Enfin quatrième nuit, La balade de Luna Park nous entraîne dans un parc d’attractions un peu, voire beaucoup, spécial. Et cette promenade monstrueuse met en scène, entre autre, Imma, une Noire qui se métamorphose, devant les yeux ébaubis du public, en gorille. Une nouvelle dédiée à Roland C. Wagner.

 

Peu à peu, au fil des nuits, Marbœuf se régénère, rajeunit. Le vieil homme scrofuleux reprend des forces et guérit, physiquement et psychiquement. Mais il existe un revers à la médaille.

Calqué sur le principe des Contes des mille et une nuits, mais avec toutefois une notable différence : une nuit, une histoire complète, ce roman de Michel Pagel qui contient non pas quatre nouvelles mais cinq, le fil conducteur pouvant être considéré comme une nouvelle également, est un exercice de style qui conforte tout le bien que l’on pensait de l’auteur comme romancier et nouvelliste accompli. Même si certaines de ces nouvelles sont un peu faibles, l’univers décrit est captivant, souvent surréaliste, et lorgne aussi bien vers le romantique, sans que cela soit pour autant une bluette, que vers le gore.

 

Réédition dans La Comédie inhumaine. Bibliothèque du Fantastique. Editions Fleuve Noir. Parution novembre 1998. 640 pages.

Réédition dans La Comédie inhumaine. Bibliothèque du Fantastique. Editions Fleuve Noir. Parution novembre 1998. 640 pages.

Réédition : La comédie inhumaine volume 1. Les Moutons électriques. Parution mai 2020. 960 pages.

Réédition : La comédie inhumaine volume 1. Les Moutons électriques. Parution mai 2020. 960 pages.

Michel PAGEL : Désirs cruels. Collection Anticipation N°1725. Editions Fleuve Noir. Parution décembre 1989. 192 pages.

ISBN : 2-265-04232-3

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1 septembre 2020 2 01 /09 /septembre /2020 03:51

Loft story…

Luis ALFREDO : Téléréalité.

Pour le commandant René-Charles de Villemur, cette soirée aurait dû se dérouler comme les autres. Dans le calme et la sérénité, avec ses pensées vagabondes et mortuaires.

A partir de 19h30, la télévision est éteinte, et il préfère choisir un livre au hasard dans sa monumentale bibliothèque, placer un CD dans le lecteur, déguster un verre et un cigarillo. Et ses idées vagabondent, revoyant les morts qui jalonnent son parcours amoureux. Christian, son ami-amant avec lequel il a vécu deux ans, leur séparation et la découverte de son cadavre sur une plage landaise, ou encore Patricia dont il avait fait la connaissance lors de la traque d’un serial-qui-leurre, Patricia qui s’est suicidée. Il pense également à Joan Nadal, le détective parti à Lourdes pour régler une affaire de cocufiage confiée à lui par un mari jaloux.

Le téléphone l’arrache à ses pensées négatives. D’abord Patrick, le journaliste, qui l’informe qu’il se rend immédiatement à Lourdes, un reportage sur un mort tombé du haut de la Basilique et retrouvé parmi les cierges une dizaine de mètres plus bas. Les cierges ont-ils résisté à cette chute, l’histoire ne le dit pas.

Nouvel appel téléphonique, émanant cette fois-ci de son adjoint Octave avec lequel il fait ses gammes depuis dix ans. L’affaire est sérieuse. Une concurrente d’une émission de téléréalité a été découverte morte, un poignard dans le cœur. Dwelling s’appelle cette émission culturelle suivie par des millions de téléspectateurs qui se délectent à regarder les évolutions d’une bande de jeunes au physique hollywoodien confinés dans une demeure aménagée exprès pour cette étude sociale.

Cette demeure (dwelling en français) se situe à une dizaine de kilomètres de Toulouse (pour la candidate, c’est to loose !) aux portes de Muret, dans un ancien restaurant. Géraldine, la concurrente, a été retrouvée morte dans les toilettes, un poignard dans le cœur. Et les cabinets d’aisance n’étaient pas fermés de l’intérieur !

 

Débute pour le commandant Villemur, une enquête en local clos avec tout ce que cela implique d’interrogations et de démarches parfois inutiles.

René-Charles de Villemur se fait d’abord expliquer les règles du jeu auprès de la productrice déléguée, du réalisateur, du psychiatre de service, de quelques concurrents. Géraldine aurait dû depuis longtemps quitter cette résidence, mais le vote des téléspectateurs l’avait à chaque fois repêchée. Et il apprend également que les séquences montrées à la télévision ne reflètent pas forcément la réalité, car il faut du gratiné pour entretenir le suspense et surtout capter l’attention du public, sinon c’est la désaffection, et donc une perte irrémédiable de recettes publicitaires.

Et il hésite entre conclure à un meurtre, certains des candidats n’appréciant guère leur compagne de réclusion, volontaire au départ, ou à un suicide. Mais le suicide n’est guère envisageable car la poignée du couteau a été soigneusement nettoyée. De plus certaines séquences enregistrées ont été effacées, et d’autres caméras, dont celle placée dans les WC, sont factices.

Une enquête résolue en quelques heures par le commandant et son adjoint, mais cette intrigue n’est pas le seul intérêt de cette histoire. Le lecteur découvre les coulisses de ce genre d’émission de téléréalité suivie par des millions de téléspectateurs-voyeurs et se rend compte que le sensationnel prime sur la vérité.

Il est dommage que Luis Alfredo se complaise à cette mode abêtissante de l’utilisation d’un vocabulaire anglo-saxon, le mot dwelling et ses déclinaisons étant assénés à longueur de pages alors qu’il possède ses équivalents en français. D’autant que Villemur se montre quelque peu vieille France avec son nœud papillon, son couvre-chef mitterrandien et ses cigares dont il se délecte dès la nuit tombée, ses vis-à-vis profitant souvent des émanations fumigènes nocives.

Luis ALFREDO : Téléréalité. Itinéraire d’un flic. Saison 2, épisode 1. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Parution 24 août 2020. 96 pages. 2,99€.

ISBN : 9791023408256

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5 août 2020 3 05 /08 /août /2020 03:05

Désormais, je ne réponds plus aux invitations, on ne sait jamais…

Christian JACQ : Meurtre sur invitation.

Pour se faire pardonner de quelques indélicatesses perpétrées à leur encontre, le comte Brian de Lechtworth envoie des cartons d’invitations à ses meilleurs ennemis, tous collectionneurs comme lui d’objets hétéroclites mais précieux.

Pourtant l’intitulé et surtout les deux PS ne manquent ni d’originalité, ni d’interrogations. Il promet à ces collectionneurs un cadeau qui devrait les satisfaire et contenter leur soif de recherches, en leur offrant à chacun une pièce rarissime. Seulement, selon le premier PS, ils doivent se présenter avec quelques-unes de leurs pièces de collection, les plus remarquables. Ensuite, dans le petit deux, il précise que cette rencontre sera sans précédent et sera accompagnée d’un meurtre.

Sont donc invités à cette réunion extraordinaire : Lady Jane Berwick, une veuve à laquelle on ne donnerait pas ses soixante printemps, qui collectionne entre autres les canes-épées ; la belle Kathlyn Amwell, qui à vingt-cinq ans s’est forgée une solide réputation de portraitiste et dont la passion se fixe pour les lunettes anciennes et d’ailleurs elle en arbore une paire aux verres teintés en permanence ; Lord Tennyson Buzzard, grand amateur de Bugatti anciennes ; le jeune érudit Emmett Barkway, chercheur scientifique à Oxford, qui s’est entiché de tanagras ; enfin le couple John Kintbury, lui banquier à la collection impressionnante de chaussons de danse, et sa femme Margaret, conseillère conjugale et adepte des bouteilles de vin historiques.

Tous entretiennent une profonde animosité, pour ne pas dire une haine, envers leur hôte qui à un moment donné de leur existence leur a mis des bâtons dans les roues dans leurs quêtes de l’objet convoité. Pourtant l’accueil qui leur est réservé est plutôt chaleureux, surtout de la part de Despina, la jeune et unique domestique du comte. Invité surprise de dernière heure, l’ex-inspecteur chef Higgins, qu’un de ses amis a contacté, lui demandant de veiller sur Emmett Barkway.

Au cours de la séance de remise des cadeaux prévus par Brian de Lechtworth, dans une mise en scène théâtrale, le comte s’excuse des méfaits qu’il a ou aurait pu provoquer à l’encontre de ses invités. Réfutant toutefois d’avoir agi délibérément dans l’intention de leur nuire. Ainsi Lord Tennyson Buzzard a été victime d’un accident de la circulation occasionné malencontreusement par le comte, le privant de compétitions sportives automobiles alors qu’il était un conducteur accompli. Depuis il boîte et porte en permanence un foulard jaune autour du cou afin de cacher une cicatrice. Mais les autres éléments du groupe sont sujets eux aussi à leurs petites manies, à leurs tocs, à leurs défauts et autres problèmes.

Deux tentatives de meurtre à l’encontre du comte Brian de Lechtworth attisent la curiosité de Higgins qui ne peut malgré tout en empêcher une troisième qui elle sera fatidique. Plus de comte à rendre.

Des indices sont disposés à des endroits stratégiques mais il semblerait que ce ne soient que des leurres. Et les motifs pour se venger du comte ne manquent pas chez les uns et les autres. Alors Higgins se résout à demander à son ami le superintendant Scott Marlow de venir le rejoindre au château avec quelques hommes qui procéderont à des perquisitions tandis que le légiste devra examiner le cadavre.

 

Ce roman résolument ancré dans le genre fort prisé durant un certain temps et de nos jours négligé, le roman de détection, fait penser un peu à ce qu’auraient pu écrire Agatha Christie et John Dickson Carr pour l’ambiance et la mise en scène, et à P.G. Wodehouse pour l’humour subtil et toujours présent dans certaines situations, descriptions et dialogues.

Comme souvent la vérité se niche dans le passé et heureux qui comme Higgins a fait de longs voyages, en Inde notamment. Ce qui lui permet de découvrir une partie de la solution et l’identité du ou de la coupable parmi les sept personnes qui gravitaient autour du comte. Car il ne faut pas oublier la jeune domestique Despina parmi les prétendants au meurtre.

Les nombreux couloirs secrets qui mènent d’une pièce à une autre et la disposition des différents bâtiments du château autour d’une cour, le caractère des intervenants, tout est bon pour mener le lecteur dans un labyrinthe énigmatique.

L’on découvre une facette cachée de l’ex-inspecteur-chef Higgins, qui outre ses nombreux voyages à l’étranger, est atteint d’arthrose, ce qui arrive à tout un chacun arrivé à un certain âge mais de plus il n’est pas fier de lui. Il est perturbé et se reproche constamment de ne pas avoir pu éviter le drame. Mais dans ce cas, l’histoire aurait tourné net et n’aurait pu donner lieu à un roman.

L’art des grands criminels, souligna Higgins d’une voix douce, consiste parfois à commettre leur forfait en pleine lumière pour mieux aveugler les témoins.

Première édition : J.B. Livingstone. Meurtre sur invitation. Les dossiers de Scotland Yard. Editions du Rocher. Parution 15 mai 1991. 238 pages.

Première édition : J.B. Livingstone. Meurtre sur invitation. Les dossiers de Scotland Yard. Editions du Rocher. Parution 15 mai 1991. 238 pages.

Christian JACQ : Meurtre sur invitation. Les enquêtes de l’inspecteur Higgins N°5. Editions XO. Editions Limitée. Parution 2 juillet 2020. 218 pages. 6,90€.

ISBN : 978-2374482507

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21 juillet 2020 2 21 /07 /juillet /2020 03:53

L'amour, l'amour, l'amour
Dont on parle toujours
À l'amour, c'est un printemps craintif
Une lumière attendrie, ou souvent une ruine…

Mouloudji.

Alexandre DUMAS : Une aventure d’amour.

Si ses romans historiques et de cape et d’épée ont fait sa renommée, Alexandre Dumas se mettait volontiers en scène dans des courts et charmants romans ou contes et nouvelles.

Une aventure d’amour ne déroge pas à la règle et ce texte aurait pu être incorporé dans les Mémoires de Dumas ou dans les nombreuses Causeries qu’il affectionnait.

Un matin de l’automne 1856, Théodore, le valet de Dumas, introduit dans le salon où se tient le romancier et homme de théâtre une jeune visiteuse, Lilla Bulyowski. Elle se recommande d’un ami commun, Saphir, et n’a que vingt-trois ans. Elle est artiste dramatique et parle couramment quatre langues, l’anglais, l’allemand et le français, outre sa langue natale le hongrois. Tout de suite elle prévient Dumas qu’elle a un mari qu’elle aime et un fils qu’elle adore.

Elle désire découvrir Paris et Dumas lui sert volontiers de chaperon, l’emmenant au théâtre, lui présentant ses amis et dînant avec elle deux ou trois fois par semaine. Se noue une amitié amoureuse et lorsque Lilla annonce qu’elle doit partir pour Bruxelles, Dumas qui connait fort bien cette ville pour y avoir séjourné, lui propose de l’accompagner.

Ils partiront ensuite pour Spa, et Lilla se sent souffrante. Dumas qui se prétend doué de magnétisme, la soulage efficacement par l’apposition de ses mains, en tout bien tout honneur. Puis ils vont descendre le Rhin, de Coblence jusqu’à Mayence, et sur le navire ils font la connaissance d’une Viennoise avec laquelle ils sympathisent.

Dumas leur raconte alors une aventure amoureuse qui lui est arrivée alors qu’il était en Italie, en 1836, avec Maria D. qui est accompagnée de Ferdinand, fou amoureux d’elle. Ne pouvant en faire sa maîtresse, Ferdinand a demandé à Maria de l’épouser. Mais sur le spéronare qui les conduit de Naples jusqu’en Sicile, Dumas va faire connaissance intimement sous la tente située sur le pont avec Maria lors d’une bourrasque, alors que Ferdinand atteint du mal de mer se tient à l’autre bout de l’embarcation. Fin d’un épisode et Dumas ne reverra jamais Maria, pas plus que Lilla qu’il présente à Mme Schroeder, grande artiste allemande qui l'accueillera comme élève.

 

C’est ainsi que se termine cette histoire d’amour platonique avec Lilla mais dont Dumas garde un souvenir ému. Deux femmes qu’il ne reverra jamais mais au moins il n’y a aucun regret, les deux histoires se terminant brutalement mais sans heurt. Maria pourrait être la cantatrice Caroline Ungher lors de son voyage en Sicile.

 

Ce court roman, qui conte deux épisodes de la vie amoureuse de Dumas ne manque pas d’humour et le romancier s’attarde volontiers sur la description des paysages rhénans ou des prestations musicales dont Maria gratifie les marins et les deux voyageurs lors de la traversée, car avant la bourrasque c’état calme plat et le navire était encalminé.

A noter également que Dumas se complait aussi à évoquer la nourriture et la boisson lors de ses différentes étapes de Bruxelles à Mayence. Et il ne manque pas de citer son ami Gérard de Nerval.

Quant au valet Théodore, il est qualifié de sot, d’idiot. Mais un défaut que Dumas préfère à ceux de deux autres valets qui eux étaient fripons.

Au reste, l’idiotisme a un grand avantage sur la friponnerie : on voit toujours assez tôt que l’on a un domestique idiot ; on s’aperçoit toujours trop tard que l’on a un domestique fripon.

 

Vous pouvez télécharger ce texte, gratuitement et en toute légalité, en vous rendant sur le site de la Bibliothèque électronique du Québec :

Alexandre DUMAS : Une aventure d’amour. Première édition 1860. Réédition Editions d’Art Athos. Parution 1947. 128 pages.

Réédition numérique : La Bibliothèque électronique du Québec. Collection A tous les vents.

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18 juillet 2020 6 18 /07 /juillet /2020 04:00

Un engrenage infernal.

Jan THIRION : Ego Fatum.

Tout a commencé à cause d’un adorable arachnide velu. Enfin, pas tout à fait. Tout a commencé par un coup dans la tronche de l’inspecteur Cédric alors qu’il cuisinait, à l’huile ou au beurre, on ne sait pas, un dangereux récidiviste réputé pour être violent. Un nommé Grégorioux dit le Gaulois. L’individu suspecté d’avoir tué un vieil homme a profité d’un moment d’inattention de Cédric pour lui balancer un coup de pied magistral en pleine tête. Résultat un arrêt de travail suite à un coma provoqué dans l’exercice de ses fonctions.

Et c’est comme ça qu’il se retrouve dans l’appartement de sa maîtresse, la fine Delphine, à zapper les films ou séries policières. Car un flic, même lorsqu’il est en congé forcé, s’instruit afin de parfaire ses connaissances. Et ce n’est pas parce que c’est la période d’Halloween et que le Beaujolais nouveau se profile qu’il faut se laisser aller.

Il pense soudain que dans la pièce du dessus, se repose Milly, la fille de Delphine, treize ans. Une idée qui lui procure une réaction qui déforme son pantalon. Il monte et naturellement, elle est là, jambes nues, un long T-shirt noir cachant le haut du corps. Elle veut bien discuter un moment avec lui, mais il a trop bu de boisson gazeuse sucrée, et inévitablement le trop plein demande à être évacué dans les toilettes proches.

Alors qu’il satisfait une miction bienfaisante pour sa vessie, il entend hurler Milly. Il se précipite, se demande ce qui lui arrive, et aperçoit une énorme araignée qui a profité que la fenêtre soit ouverte alors que le radiateur chauffe, pour s’immiscer dans la pièce. Milly qui est arachnophobe, encore fallait-il le savoir, enjambe la balustrade de la mezzanine et tombe malencontreusement. L’araignée, elle, se cache et Cédric est affolé. Milly gît en bas et elle ne criera plus lorsqu’elle apercevra une épeire en train de déambuler.

Cédric se demande bien comment se dépatouiller de cette situation lorsque Delphine entre. Horreur, malheur, ce qu’elle voit en premier, c’est Cédric, le vermisseau sortant de son pantalon, tenant dans ses bras Milly allongée à terre. Une situation qui prête à confusion. Elle n’accepte pas le début d’une explication, crie, le traite de tous les noms et s’engage une lutte entre les deux amants, lutte qui se termine par le retentissement du gong. Au revoir, ou plutôt adieu, Delphine.

Une tragédie dont il est l’acteur involontaire, mais ce n’est pas fini, comme les séries à épisodes qu’il aurait mieux fait de continuer à visionner au lieu de monter voir sa belle-fille. Car une petite vieille, une voisine, passe la tête par la porte restée entrouverte et naturellement voit le carnage. Elle repart vers son appartement, il la suit, elle entre chez elle et n’a pas le temps de fermer sa porte qu’elle est bousculée. Qu’elles sont bousculées. La porte et la petite vieille qui était derrière et qui ne pourra pas établir un compte-rendu de la situation à son mari arrimé à une bouteille d’oxygène.

La série continue…

Alors Cédric balance entre deux solutions : se suicider ou faire appel à quelques-unes de ses connaissances qui lui doivent un petit service, lui qui les a aidés lorsqu’ils étaient dans le besoin.

 

Araignée du matin, chagrin ; araignée du soir, espoir. Les dictons sont parfois, souvent, mensongers.

Comme un mantra, qui est l’une des phrases favorites de son chef, tourne dans sa tête cette évidence, cette lapalissade : Tant qu’on n’est pas mort, on est vivant.

Mais Cédric pourrait tout autant chanter Ô Toulouse comme Nougaro. To lose surtout serait plus approprié. Mais il n’a pas le cœur à fredonner ce texte, ode à la ville où il travaille et vit. Il pense surtout à se dépatouiller de cet engrenage infernal dans lequel il est entraîné à son corps et son esprit défendant.

Un engrenage infernal qui se produit à cause d’une confusion, qui pourrait prêter à sourire, comme l’escalade de mauvaises nouvelles dans la chanson Tout va très bien madame la marquise de Ray Ventura. Sauf que Cédric n’a vraiment pas le cœur à fredonner, plutôt à s’extirper de cette spirale infernale qui continue, encore et encore.

Jan Thirion manipule ses personnages et le lecteur par une histoire baroque, insolite, biscornue, se jouant des situations avec une écriture fouillée, travaillée, parfois ciselée au scalpel. Il œuvre dans la dérision tout en construisant une intrigue dont l’épilogue ne peut être qu’un pied de nez au destin.

 

 

Les chaussures de luxe n’empêchent pas de marcher de temps à autre dans la merde.

Première parution : Editions Krakoen. Parution 7 décembre 2006. 188 pages.

Première parution : Editions Krakoen. Parution 7 décembre 2006. 188 pages.

Jan THIRION : Ego Fatum. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Parution 3 juillet 2020. 135 pages. 3,99€.

ISBN : 9791023408201

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11 juillet 2020 6 11 /07 /juillet /2020 04:07

Le chiffre et les lettres : C.T.H.U.L.H.U. !

Brian STABLEFORD : Le chiffre de Cthulhu

Même s’il possède son propre appartement parisien, Dupin se rend souvent chez le narrateur et ils passent leurs soirées ensemble. Ce soir là, un troisième personnage dîne en leur compagnie. Il se nomme Chapelain et est hypnotiseur à Bicêtre où il soigne, comme adjoint de Leuret, l’éminent spécialiste de la psychiatrie, les déficients mentaux. Ou, plus prosaïquement, les fous.

Chapelain a l’air abattu. Il s’est disputé avec Leuret à cause d’une patiente qui est à l’article de la mort. Cette femme, à l’aspect vieillot, atteinte de syphilis, probablement dû à son passé de prostituée, prétend s’appeler Ysolde Léonys, et a souvent des hallucinations. Pourtant elle est sensible aux séances d’hypnose pratiquées par Chapelain, qu’elle appelle Merlin. Elle se réfère à un certain Tristan, mais surtout, elle possède gravé sur le dos comme un tatouage. Une sorte de cryptogramme que Chapelain a recopié sur un bout de papier.

Il s’agit de symboles inconnus, quarante-neuf au total, disposés en carré de sept lignes sur sept. Pour Dupin, il s’agit d’un carré magique dit aussi Sceau ou Clé de Salomon. Or le nom d’Ysolde Léonys, Dupin l’a entendu récemment. Le père France, libraire fort respecté des bibliophiles, lui avait raconté qu’un bibliotaphe de province qui se fait appeler Breizh s’intéressait à un cryptogramme, et plus précisément au cryptogramme de Levasseur.

Dupin narre alors l’histoire d’Olivier Levasseur était un corsaire devenu pirate et qui allié à John Taylor, un flibustier anglais, s’est emparé d’un immense trésor en s’emparant d’un vaisseau portugais ainsi que d’un vice-roi. Il est mort pendu le 17 juillet 1730 à Saint-Paul de la Réunion, mais son trésor n’a jamais été retrouvé.

Après toutes les explications concernant la vie, l’œuvre et la mort de ce pirate et ses accointances avec d’autres forbans de son acabit, mais également des entourloupes faites, Dupin demande à examiner Ysolde Léonys à Bicêtre. Ce qu’acceptent volontiers Chapelain et Leuret. Ysolde est réveillée et lorsqu’elle aperçoit le narrateur, elle l’appelle Tom. Tom Linn, le Rimeur. Quant à Dupin, pour elle il s’agit de Tristan.

Elle prononce enfin une phrase étrange qui est en rapport avec le cryptogramme que Dupin examine sur son dos.

Ph’nglui mglw’nat Cthulhu R’laiyeh wgah’ngl fhtaign.

Dupin demande alors s’il est possible de transporter cette malade chez le narrateur, offrant comme garde-malade sa concierge, madame Lacuzon, dite la Gorgone à cause de son aspect rébarbatif.

Puis le narrateur reçoit un message l’invitant à se rendre à l’église Saint Sulpice. Il s’y rend et retrouve le Comte de Saint-Germain, lequel lui remet un petit paquet contenant une sorte de pendentif en bois sur lequel sont gravés les mêmes symboles que sur le dos d’Ysolde Léonis. Seulement leur aparté est interrompu par l’arrivée des Shoggoths qui désirent s’emparer de l’objet. Un combat terrible s’engage entre ces démons mi-humains mi-monstres gélatineux.

Puis ce sera le départ vers la Bretagne, avec le Comte de Saint-Germain devançant la petite troupe constituée du narrateur, de Dupin, d’Ysolde Léonis et madame Lacuzon, à la recherche du trésor du pirate Olivier Levasseur.

 

Les personnages ayant réellement existés fourmillent dans ce roman qui reste une fiction, mais les parties qui leurs sont consacrés, sont remarquablement documentées, offrant un aspect vivant non dénué d’intérêt dans cette intrigue de piraterie et de fantastique.

Parmi les références littéraires qui émaillent ce récit, on ne manquera pas de souligner la compétition entre Dumas et Sue, et surtout le rapport singulier de cette histoire avec Le Comte de Monte-Cristo. Egalement est évoqué le père France, qui fut bouquiniste notamment sur le Quai Malaquais, et n’était autre que le père d’Anatole France, le célèbre écrivain Pris Nobel de Littérature en 1921. Ainsi que le frère puîné de Victor Hugo qui est atteint de démence.

Si les créatures imaginaires et monstrueuses nées de l’esprit pessimiste de Howard Philips Lovecraft, sont citées alors qu’elles n’avaient pas encore été créées, d’autres sources littéraires issues de légendes arthuriennes imprègnent ce roman, dont Tristan et Iseut ou Isolde.

Un roman hypnotique qui doit beaucoup à la psychiatrie dont les docteurs Leuret et Chapelain en furent les importantes personnalités de l’époque, mais aussi de l’hypnotisme, du mesmérisme, de l’ésotérisme et du somnambulisme.

Si le début démarre en mode diesel, au fur et à mesure que le lecteur entre dans cette intrigue, l’action prend le pas sur la narration un peu verbeuse parfois, surtout axée sur les discussions entre les principaux protagonistes concernant l’état d’Ysolde Léonis ou sur les tribulations d’Olivier Levasseur et ses nombreuses pérégrinations et conflits avec d’autres pirates de nationalités différentes.

Didactique et en même temps (oui, le en même temps est à la mode) truffé de trouvailles littéraires mêlant habilement fiction et réalité. L’hommage à Howard Philips Lovecraft est évident, même si son nom n’est pas cité, et pour cause, puisqu’à l’époque à laquelle se déroule l’histoire, le célèbre fantastiqueur n’était pas encore né et donc n’avait pas encore imaginé ses monstrueuses créatures.

 

J’imagine fort bien Catherine Rabier, la traductrice, avoir été excitée à l’idée de traduire ce roman mais au cours de l’avancée dans le texte, se tirer les cheveux (métaphoriquement) afin de trouver les mots justes dans un texte parfois complexe afin de rester au plus près de l’idée de l’auteur.

 

A noter une petite coquille : Olivier Levasseur n’est pas mort pendu en 1830 mais en 1730. Mais il ne devrait pas faire de réclamation.

Brian STABLEFORD : Le chiffre de Cthulhu (The Cthulhu encryption : A romance of piracy- 2011. Traduction de Catherine Rabier). Les Saisons de l’Etrange. Les Moutons Electriques éditeur. Parution le 15 mai 2020. 254 pages. 17,00€. La version numérique : 5,99€.

ISBN : 978-2361836191

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8 juillet 2020 3 08 /07 /juillet /2020 03:40

Pour le plaisir…

Raffaele PAPARELLA : Le secret de Silly Bill.

Longtemps, les bandes dessinées dites Petit Format, inondèrent les étalages des maisons de la Presse, des librairies, chez les marchands de journaux qui proposaient également jouets et confiseries, et ces bandes dessinées, qui s’échangeaient dans les cours de récréation, ne comportaient pas les noms des scénaristes et des dessinateurs, contrairement aux Grands Formats.

Et ces petits formats avaient pour titre la plupart du temps le nom du héros principal tels que Buck John, Kit Carson, Blek le Rock, Akim, Kiwi, Pecos Bill, ou encore Zembla. Mais à l’intérieur, étaient nichées d’autres histoires dont la mémoire collective n’a pas retenu les noms sauf auprès des amateurs et des spécialistes.

Ainsi Benny des marais fut publié dans les Spécial Zembla (voir la liste ici) et les signataires en étaient, pour les dessins Raffaele Paparella et pour le scénario Maurizio Torelli. Et il est évident que le succès enregistré par ces petits formats et par leurs héros, le doit souvent grâce au graphisme des dessins, souvent très travaillé, fouillé, nettement supérieur, à mon avis, aux bandes dessinées actuelles.

 

Raffaele PAPARELLA : Le secret de Silly Bill.

Benny des marais narre les aventures d’une famille Cajun en Louisiane, composée de Benny, de sa mère, de sa sœur, de Popescu et du comédien Silly Bill, sans oublier le cochon Oreste. L’implantation de ces épisodes, qui ne manquent pas d’humour, en Louisiane change des nombreux westerns qui se déroulaient au Texas et autres états Nord-américains.

Dans Le secret de Silly Bill, la famille de Benny et Popescu s’activent à la préparation de la petite fête organisée pour l’anniversaire de Silly Bill. Au programme, gâteau et cadeaux. Au dehors la tempête fait rage. Mais de Silly, point. Puis tout le monde décide d’aller se coucher. Popescu qui dort dans la même chambre que Silly Bill est importuné par de sonores ronflements. C’est Oreste, le cochonnet de Silly Bill qui dort dans le lit de son maître.

Par le temps qu’il fait, Silly n’a pas eu le cœur de laisser son animal favori dehors par le froid qu’il fait, avec la pluie qui tombe. Popescu n’en a cure et il met dehors manu militari Silly Bill et Oreste.

Le lendemain, Silly Bill est effondré. Le sheriff Morgan arrive à la ferme pour les prévenir que quatre dangereux criminels se sont évadés de la prison d’Alverton à bord d’un canot volé. Ils faisaient partie de la bande Bonner. Silly Bill qui a couché dehors affirme n’avoir rien vu, rien remarqué. Puis il sort.

Popescu le suit et il l’aperçoit pleurant, geignant, déclarant qu’il ne veut pas révéler son secret. Rentré à la ferme, il est bien obligé d’avouer que désirant se réfugier dans la grange, il s’était retrouvé nez-à-nez avec les quatre évadés. Ceux-ci ont pris Oreste en otage.

C’en est trop. Popescu et Benny des marais se lancent sur la trace des quatre malfrats, mais ils vont connaître de terribles péripéties, dans les bayous, affrontant les bandits mais pas que. Un puma, des alligators qui rôdent et aimeraient bien déguster Oreste qui s’est échappé, vont se trouver sur leur chemin. Sans oublier les bandits qui veulent éviter la prison et donc se débarrasser des importuns.

Une histoire qui ne manque pas de péripéties ni d’humour. Une histoire simple, destinée aux enfants à l’origine mais que reliront avec plaisir les adultes.

Raffaele PAPARELLA : Le secret de Silly Bill.

Pour tous les nostalgiques de ces petites histoires, les éditions Rivière Blanche/Black Coast Press ont réédités les aventures de Benny en trois recueils comportant chacun onze ou douze épisodes.

 

Préface: Jean-Marc Lofficier

Couverture: Eduardo Garcia

TABLE DES MATIERES:

12 - Le Secret de Silly Bill

13 - La Reine de la Louisiane

14 - Le Rapt de la Mariée

15 - Terreur dans les marais

16 - Un Prix pour Oreste

17 - L'Alligator Blanc

18 - Jalousie

19 - La Fille d’Oscian

20 - L’Homme de feu

21 - Drame à Lake River

22 - Les Gitans

23 - Chantage

 

Raffaele PAPARELLA : Le secret de Silly Bill. Scénario de Maurizio Torelli. Spécial Zembla N°79. Editions LUG. Parution décembre 1983.

Réédition dans Benny des marais Tome 2. Hexagon Comics. 560 pages. 40,00€.

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7 juillet 2020 2 07 /07 /juillet /2020 03:54

Elle file, file, file, file
La route qui va vers toi…

Franck Alamo.

Jean-Hugues OPPEL : Ciel rouge.

Au volant de sa Fuego, Maurice G. avale les kilomètres tout en écoutant du rock country, mais pas que, déversé dans l’habitacle par son autoradio coûteux.

Maurice G. commence à sentir le poids des ans peser sur ses épaules, peut-être à cause des extras en tout genre. En parlant d’extra, celui qui est dans le coffre de sa Fuego, ne l’est plus tout à fait. Du frais refroidi.

Max la Mascotte opine du chef, coincé entre les baffles rugissants sous les riffs d’une Rickenbaker. Bien chargée la mascotte, qui a du chien. Chien-loup à la fourrure synthétique mais au contenu prohibé. Des produits illicites convoyés à la petite semaine qui assurent la pitance quotidienne de Maurice G.

En parlant de pitance, il lui faut trouver la première station-service de l’autoroute, histoire de se dégourdir les jambes et procéder à une miction bienfaisante pour sa vessie. Même s’il n’a pas de gros besoins dans l’existence, parfois il faut quand même satisfaire ses besoins dans des endroits adéquats, avec papier prédécoupé à dérouler. On n’entrera pas dans les détails.

Justement, une sortie se profile avec des lumières au bout. Une station-service mais aussi une épicerie, un pis-aller routier. Maurice G. n’est jamais trop prudent, et son arme à feu à la ceinture, très cow-boy country, il vérifie les lieux, les quelques véhicules parqués, surtout la caméra cachée reliée à la gendarmerie sise non loin. Dans une voiture deux jeunots qui se bécotent.

Seulement les jeunots débarquent dans le petit édifice et braquent la caissière avec des armes qui vraisemblablement ne sont pas des pistolets à eau. Ce n’était pas prévu dans le scénario.

 

Bizarrement, ou non, des images me sont remontées à la surface, me chatouillant les neurones de la mémoire (ça existe ?). J’ai pensé immédiatement à Tchao-Pantin, avec Coluche dans le rôle du pompiste.

Cela n’a rien à voir, mais pourtant des analogies se glissent, interfèrent, se propulsent, et le visage de Coluche est imprimé. Mais sur qui ? Pas la caissière, ni les jeunots… Maurice G. ? Pourquoi pas, quoique lui il pourrait vaguement et nominativement se confondre avec un certain Dantec.

Oppel déroule son histoire comme la Fuego sur le bitume, à toute allure, jusqu’à l’anicroche. Un final logique, percutant quoique non prévu.

 

A noter que le premier interprète musical dont le nom est signalé au début de cette nouvelle est Moon Martin, qui a fait ses débuts à la fin des années 1960 dans un groupe de rockabilly, puis est devenu musicien de studio, travaillant avec de nombreux artistes dont Del Shannon ou Linda Ronstadt. Il est décédé le 11 mai 2020. Une coïncidence avec cette réédition d’une nouvelle parue dans la revue Polar N°16 en 1995.

 

L’écologie dans les carburants, c’est comme l’argent propre dans les tirelires des partis politiques : il faut y croire sans le voir.

Jean-Hugues OPPEL : Ciel rouge. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Parution 25 mai 2020. 19 pages. 2,99€.

ISBN : 9791023408140

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Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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