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16 juin 2018 6 16 /06 /juin /2018 08:01

A sec ? Mais faut mouiller le maillot les p’tits gars !

Jean-Bernard POUY : A sec !

Match N°2 !

Jean-Bernard POUY : A sec !

Le football, c’est un jeu pratiqué par Vingt deux abrutis, sélectionnés qui plus est, suffisamment si peu sûrs d'eux-mêmes qu'ils s'entourent de remplaçants pour pallier leurs béances, et d'arbitres pour éviter les fautes.

Ce n'est pas moi qui le dis, c'est J.-B. Pouy.

Surenchère : Ils n'étaient pas loin de penser que ce sport de dégénérés du bulbe était le pire marigot dans lequel le corps social pouvait être plongé.

Afin de mieux enfoncer le crampon, Pouy fait appel à certaines connaissances, philosophes émérites dont l'opinion ne peut être mise en doute et ayant pour nom Keelt, Malebranche, Wittgenstein et consorts. D'accord, c'est pour la bonne cause.

Spinoza, alias Julius Puech, se repose sur ses lauriers à Bombay. Mais lorsqu'il apprend qu'Hegel est de retour, il ne tergiverse pas et reprend du service. Là-bas à Paris et province, la baston règne, surtout autour des stades. Commandos primaires fanatiques.

On ne fera pas de dessins. Bottes mauves en lézard contre chaussures de foot. Balle au centre.

Pouy se fait plaisir ou plutôt fait plaisir à ses fans qui attendaient la confrontation bis entre spinozistes et hégéliens.

Plus qu'une histoire, mi-polar déglingué mi-SF allumée, avec le foot comme tête de Turc, ce roman joue finement le tacle, échappe au carton jaune et propose les prolongations.

Une récréation pour Jean-Bernard Pouy entre deux romans plus épais, et qui se lit le temps d’un match de football.

 

Première édition : Canaille/Revolver N°111. Editions Baleine. Parution le 31 janvier 1998.

Première édition : Canaille/Revolver N°111. Editions Baleine. Parution le 31 janvier 1998.

Jean-Bernard POUY : A sec ! Première édition : Canaille/Revolver N°111. Editions Baleine. Parution le 31 janvier 1998.

ISBN : 978-2842191252

Réédition : Collection Folio Policier N°149. Parution 22 février 2000. 160 pages.

ISBN : 978-2070409617.

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15 juin 2018 5 15 /06 /juin /2018 08:34

La principale préoccupation des anciens est de vérifier dans les avis de décès de leur journal si leur nom d’y figure pas !

Maurice GOUIRAN : L’Irlandais.

C’est ce que pense Clovis, le journaliste, en apercevant Biscottin, l’octogénaire, attablé et compulsant les pages nécrologiques de son canard préféré. Mais contrairement à ce qu’il croyait, Biscottin recherche tout simplement le nom de L’Irlandais qui a été assassiné six jours auparavant.

Zach Nicoll, dit l’Irlandais, était devenu une figure locale comme graffeur puis artiste-peintre. Il était arrivé à Marseille vingt ans auparavant et avait débuté comme artiste de rue avant de s’établir dans un atelier. Ce qui n’avait pas plu à tous ses confrères qui l’avaient traité de lâcheur.

Des toiles ont été dérobées dans son atelier, ce qui pourrait laisser penser à un simple vol avec dommage collatéral. Emma Govgaline, et son binôme Sami sont chargés de cette enquête. Après avoir délaissé Emma, sa policière punkette favorite, durant ses trois mois d’hibernation, Clovis essaie de la contacter par téléphone. Peine perdue, elle ne daigne pas répondre. Elle est en colère après lui, à cause de sa défection, mais, tout à fait entre nous, elle aurait pu se déplacer et le rejoindre à La Varune.

Ceci ne nous regarde pas, et retrouvons Clovis chez Zach, où il rend une visite de courtoisie à Aileen, son épouse devenue veuve, en compagnie de Biscottin et de Raph, un ancien agent des RG. Elle leur demande de l’accompagner à Belfast afin de pouvoir enterrer Zach chez lui, dans la terre de ces ancêtres. Seul Clovis est disponible et accepte de l’escorter.

Clovis avait déjà effectué quelques reportages sur le sol irlandais, notamment dans la prison où Bobby Sands fut interné, et il propose au directeur du magazine Les Temps Nouveaux des articles dont il détaille les grandes lignes. Cela lui permettra de se renflouer quelque peu, il faut concilier l’utile à l’agréable.

Aileen n’est pas vraiment accueillie à bras ouverts par la famille de Zach, la mère, la sœur, et quelques autres dont Ghetusa, la veuve du fils aîné abattu par un snipper alors qu’il était sur un échafaudage avec Zach en train de taguer. Clovis va retrouver d’anciennes connaissances, recueillir des témoignages sur les années de guerre, ceux qui ont participé de près ou de loin aux Troubles.

Certains témoignages se contredisent, aussi bien sur les agissements de certains membres de l’IRA, que sur ceux de Zach. Si les hommes jouent une part active, celle des femmes n’est pas à négliger. Car outre Aileen, la femme de Zach, Ghetusa la belle-sœur qui n’accepte pas d’être reléguée comme la veuve un point c’est tout, des égéries ont parfois bousculé cette prédominance machiste. Ainsi Breena, combattante féministe au sein de l’IRA, une figure difficile à cerner, d’autant plus qu’elle est décédée dans des conditions troubles, mais qui n’acceptait pas de rester mère, ou femme, au foyer.

 

Plus qu’une histoire doublée d’une enquête sur la mort de Zach, du vol des tableaux, qu’Emma et Sami pensent avoir résolu en arrêtant des vendeurs à la sauvette qui en possédaient quelques exemplaires, c’est un nouveau coup de poing, ou de pied, que Maurice Gouiran donne dans des dessous historiques.

Finalement, les Troubles n’avaient été qu’une guérilla de pauvres, exploitée par les riches.

Une diatribe, non seulement envers l’ignominieuse Miss Maggie, mais également envers ceux qui se sont affrontés, aussi bien Anglais, que Catholiques, Nationalistes divisés, Protestants aussi, ceux qui s’érigent en intégristes. Maurice Gouiran met également l’accent sur la condition féminine bafouée en Irlande, un sujet qui ne fait pas la Une des médias, alors que les pays du Proche et Moyen Orient sont très souvent critiqués négativement pour leur concept machiste. Avant d’aller balayer devant chez les autres, il faudrait regarder si son porche n’est pas crasseux.

Face à mon étonnement, il soutint que la femme irlandaise ne pesait pas lourd dans la communauté catholique et républicaine. Elle était là pour pondre des gosses, les élever, prier Dieu et obéir à son mari.

 

Mais l’Irlande et ses déboires, ses combats politiques et religieux, n’empêchent pas Maurice Gouiran d’émettre des réflexions sur l’être et le paraître. Montrer ce qui est beau aux touristes, dans les médias, et délaisser les quartiers défavorisés marseillais.

Ici, on ne gère pas le problème. On se contente de regarder ailleurs. Ce quartier est pourri, qu’importe : on focalisera les caméras sur le Mucem, la corniche ou l’ombrière du vieux port. Les stades de foot des quartiers sont à l’abandon, on montrera le stade vélodrome refait à neuf mais qui n’appartient même pas à la ville. Les piscines se délitent et ferment mais on s’en fout, on a la mer…

 

Un jour le projet Euroméditerranée s’étendra jusque là, expliqua-t-elle avec de grands gestes. Alors des messieurs bien habillés viendront nous expliquer qu’il est urgent de détruire ces logements insalubres et dangereux pour construire du beau, du neuf, du confortable afin d’accueillir de jeune cadres propres sur eux, imposables et sans accent qui ne viendront jamais. Mais entre temps on aura viré toute la populace. Pour la repousser où ? Plus loin, toujours plus loin.

 

Alors que reste-t-il ? Que peut-on faire ? Que ce soit en Irlande, à Marseille, ou ailleurs ? Se réfugier dans des bars et déguster des bières brunes ou des mauresques.

L’alcool, c’est quand même ce qu’on a fait de mieux pour, l’espace d’une ivresse, oublier les misères du monde et croire en la fraternité.

 

Maurice Gouiran trempe son pinceau dans l’encrier de l’Histoire et peint une grande fresque humaniste en vert et rouge, avec chaleur.

 

Maurice GOUIRAN : L’Irlandais. Editions Jigal. Parution le 15 mai 2018. 240 pages. 18,50€.

ISBN : 978-2377220366

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14 juin 2018 4 14 /06 /juin /2018 11:10

Ils sont foot, ces auteurs !

Spécial coupe du monde de foot, vu à travers la

littérature !

Match d’ouverture !

Jean-Michel RIOU : Le Mille-pattes.

Qui ne se souvient de "A mort l'arbitre" d'Alfred Draper, paru en Série Noire (N°1560) et adapté au cinéma en 1983 par Jean-Pierre Mocky sous le titre éponyme avec Michel Serrault, Eddy Mitchell et Carole Laure dans les principaux rôles. Ou encore de Kop de Dominique Manotti chez Rivages en 1999. Moins connu peut-être "Un tueur dans la foule" de George Lafountaine qui fut également adapté par Larry Peerce en 1977 avec Charlton Heston et John Cassavetes.

En cette période où le ballon rond est promu hostie du supporter, où les stades sont les nouvelles chapelles édifiées en l'honneur du football, où les matchs seront les messes largement retransmises par la télévision entièrement vouée à ce culte, il fallait bien que quelques iconoclastes sacrifient à la mode tout en s'en gaussant.

 

En lever de rideau Jean-Michel Riou avec Le mille-pattes.

Jean-Michel RIOU : Le Mille-pattes.

César National, l'avant-centre de l'équipe de France reconverti dans le journalisme pour cause de blessure grave à la jambe, doit commenter le match inaugural en compagnie de son ami Thierry Zachs, le grand prêtre des ondes de Channel A.

C'est en rendant visite à ses ex-coéquipiers qu'il apprend que la France doit perdre ce match qui l'oppose à une sélection mondiale. Un chantage exercé à l'encontre de certains de ses amis, ce qui le révolte et le pousse à enquêter.

En compagnie de Bill Rey, un jeune journaliste aux dents longues et à la caméra fouineuse, il se lance dans une course contre la montre car si les supporters apprennent cette défection, obligée, des joueurs français, cela risque d'entraîner une émeute susceptible de tourner en carnage.

 

Ce n'est pas le ballon rond qui est au centre de ce roman telle l'hostie présentée en offrande mais les agissements nébuleux des officiants, hommes politiques, responsables de clubs de supporters créés à l'occasion de cette manifestation et course à l'audimat, qui sont la cible de Jean-Michel Riou. Mais l’on sait bien que ceci n’est qu’une fiction. Dans la vie réelle, cela n’arrive jamais. Si ? oh, si peu…

A propos, le mille-pattes évoqué par le titre n'est autre que les onze joueurs piétinant avant d'entrer sur le terrain. Vingt deux joueurs si l'on additionne les deux équipes. Plus les arbitres.

Jean-Michel RIOU : Le Mille-pattes. Collection Sueurs froides. Editions Denoël. Parution le 6 janvier 1998. 240 pages.

ISBN : 978-2207247006

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12 juin 2018 2 12 /06 /juin /2018 07:55

T’as le bonjour d’Alfred ?

Renée BONNEAU : Meurtres chez Sir Alfred.

De chaque côté de l’estuaire de la Rance, deux villes se font face, attirant les touristes, mais pas pour les mêmes raisons.

Saint-Malo, la cité corsaire, célèbre pour ses remparts, le Grand Bé où est enterré Chateaubriand, sa gloire locale, Robert Surcouf et son salon littéraire Etonnants voyageurs.

En face Dinard, la ville qui fut la station balnéaire préférée des touristes britanniques depuis le milieu du XIXe siècle, avec ses villas Belle époque, et surtout, depuis 1990, son festival du film britannique. Avec Alfred Hitchcock qui se dresse tel un Monsieur Loyal dresseur de goélands. Une référence au film Les Oiseaux, dont le scénario était signé Evan hunter, plus connu en France sous le nom d’Ed McBain, d’après une nouvelle de Daphné du Maurier.

En ce mercredi 4 octobre, le festival débute sous d’heureux auspices pour les nombreux festivaliers. La présence de Sean Connery et d’Hugh Grant est annoncée dans le cadre de présentation du nouveau James Bond, Bons baisers d’Egypte, du réalisateur Charles Hamilton. Des animations, non prévues au programme, se déroulent sur la voie publique. Un homme, déguisée en Charlot, arborant une pancarte amuse la galerie. Ce n’est pas méchant, mais il ne faudrait pas qu’il perturbe le bon ordonnancement de la manifestation justement par une manifestation inappropriée. Et un briquet a été collé sur la statue d’Alfred Hitchcock, l’on se demande bien pourquoi.

Toutefois un incident jette le froid au cours de la soirée. Guy Brandon, un scénariste, accuse la productrice et le réalisateur de l’avoir évincé lors du tournage de Bons baisers d’Egypte, et Simon Leigh, le scénariste qui l’a remplacé au pied levé de l’avoir plagié. Le lendemain, un cadavre est découvert sous un manège. Il s’agit de Simon Leigh et il ne s’agit pas d’un suicide, les marques de pneu relevées sur son corps en attestent.

Le commissaire Le Goff est en charge de cette affaire de meurtre, ainsi que ses deux adjoints Hébert et Corre. Un juge d’instruction rennais doit venir en compagnie d’un lieutenant nommé Bertrand afin de les aider dans l’enquête.

Naturellement Brandon est soupçonné. Le lendemain la statue d’Alfred Hitchcock est protégée de la pluie par un rideau de douche. Une attention délicate pense-t-on de la part de Charlot, mais celui-ci se défend d’avoir placé l’objet. Seulement l’annonce d’un autre meurtre détourne l’attention qui s’était focalisée sur le comédien amateur ainsi que sur Brandon. Norma Gray, agent d’assurance, est retrouvée sur les rochers au pied de la tour Solidor à Saint-Servan.

Il ne s’agit pas d’un accident, et le présumé coupable du premier meurtre possède un alibi qui le dédouane. Alors il faut trouver ailleurs, et les meurtres se suivent et ne se ressemblent pas. Tout comme les objets qui sont apposés sur la statue d’Alfred. A quoi cela peut-il bien correspondre ?

Heureusement que le festival ne dure que quatre jours sinon combien de morts y aurait-il à déplorer ? Et Le Goff, ses adjoints, le juge d’instruction qui effectue la navette, ou encore le lieutenant Bertrand, naviguent entre les présumés coupables, les soupçons se déplaçant ou se focalisant au fur et à mesure que les cadavres se récoltent.

Parmi les nombreux protagonistes qui évoluent dans ce roman-hommage, on notera que, pour une fois, les acteurs célèbres qui gravitent dans ce roman sont réduits au rôle de figurants, mais ils font, au moins pour l’un des deux, de la figuration intelligente.

Figuration moins intelligente de la part de certains individus, tel Robert Davis, le jeune amant de la productrice quinquagénaire, qui s’amuse à jouer au casino et perdre de l’argent qu’il n’a pas, et se moque publiquement de sa maîtresse qui saura le remettre à flot en compensation de quelques prouesses. Il ne faut jamais se moquer d’une femme qui vous prend sous son aile, sinon elle peut vous voler dans les plumes. D’autres personnages jouent un rôle plus ou moins prépondérant dans cette intrigue, ainsi ce journaliste du quotidien régional qui est également membre du jury, ou cette jeune starlette qui débute mais ne cherche pas à coucher pour faire carrière.

Un roman habilement concocté, un peu comme aurait pu le réaliser Sir Alfred, avec son lot d’angoisse, de suspense, d’humour, de tergiversation et de fausses pistes.

 

Une première version a été publiée chez Alain Bargain en 2000 sous le titre Séquence fatale à Dinard.

Une première version a été publiée chez Alain Bargain en 2000 sous le titre Séquence fatale à Dinard.

Renée BONNEAU : Meurtres chez Sir Alfred. Collection Bande à part. Editions Cohen & Cohen. Parution le 3 mai 2018. 244 pages. 21,00€.

ISBN : 978-2367490496

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11 juin 2018 1 11 /06 /juin /2018 06:35

Allongés sur la plage

Les cheveux dans les yeux

Et le nez dans le sable

On est bien tous les deux…

Alexis AUBENQUE : La fille de la plage.

Dès les premières pages, le lecteur quinquagénaire ou plus se retrouve plongé dans des images issues de son passé de téléphage amateur de séries américaines. Des séries qui comme Happy Days ou Santa-Barbara ont marqué leur imaginaire, à cause de leur ambiance, leur atmosphère, leurs décors.

En ce samedi 6 juin, quatre amis se préparent pour la petite fête organisée pour la fin de l’année universitaire. Jason, riche et beau, Keith, beau mais pas riche, Nathan, riche mais qui à la place des tablettes de chocolat abdominales de ses amis possède des rondeurs de pâtes à tartiner, et Sandy, le garçon manqué. Tous quatre ont gravé leur amitié lorsqu’ils avaient douze ans dans leurs mains et les cicatrices sont encore présentes. Maintenant, à vingt ans, ils se protègent, se conseillent, s’encouragent toujours, sans une once de jalousie entre les uns et les autres.

Jason a une petite amie, Tiffany, un peu peste. Keith aussi a une petite amie, mais comme elle est en voyage, on la délaissera. Nathan aimerait bien, mais il est timide et il n’ose pas avouer à Laura qu’il est fort attiré par elle. Quant à Sandy, elle redoute cette épreuve de la fête, car il va lui falloir s’habiller en robe, elle qui néglige sa touche de féminité.

Pourtant, au cours de la soirée, elle se laisse entraîner par Peter, et au grand étonnement de ses amis, elle danse merveilleusement. Elle a pratiqué la danse quelques années auparavant, mais elle s’est détournée de cette pratique pour diverses raisons. Bref, à part un accrochage avec Victor, le mauvais garçon, et une interruption momentanée dans les toilettes alors que Tiffany avait entrepris une gâterie à Jason, mais ceci ne nous regarde pas, tout se passe bien.

Nathan et Laura se sont trouvé des affinités réciproques et ils décident de comparer leurs atomes crochus sur une plage à l’écart de Santa-Barbara. Alors qu’ils sont entrain de batifoler et Nathan conclure ce qu’il n’avait jamais osé espérer, il aperçoit une ombre sur un rocher. Comme si quelqu’un les épiait. Nathan, n’écoutant que son courage, et peut-être pour épater sa copine va voir. Il s’agit d’une jeune fille, vivante, ayant probablement échappé à la noyade et ayant reçu un coup sur la tête. Et lorsqu’elle reprend ses esprits, cette jeune fille déclare ne se souvenir de rien, s’appeler Chelsea, et puis c’est tout. De tout ce qu’il s’est déroulé avant, elle ne se souvient plus. C’est quand même embêtant, d’autant qu’elle ne possède pas de pièces d’identité.

Nathan fait appel à ses amis et en attendant décide de la cacher dans son yacht, pardon, le yacht de son père. L’un des plus beaux du port. Et durant quarante huit heures, nous assistons à cette histoire qui développe plusieurs intrigues, car tour à tour les actions de chacun des quatre amis sont développées.

Ainsi Jason se voit remettre les clés d’un petit appartement en ville et il ne va plus subir la famille à son grand soulagement. Mais en même temps il va accueillir sa grand-mère Dodi, qui malade s’est échappée d’une clinique. Elle est atteinte d’un symptôme rare, se déclare en rémission et veut profiter d’un week-end au soleil.

Keith va tomber amoureux de Chelsea, tandis que Nathan se voit rabrouer par Laura. Elle reçoit des photos, via son téléphone, la montrant nue sur la plage, avec des messages d’intimidation. Elle en est toute déboussolée et se retranche dans sa chambre. Quant à Sandy, sa prestation comme danseuse a laissé des traces et Peter la conjure de venir rencontrer un professeur de danse qui a connu bien des vicissitudes familiales.

Dans un commissariat où Chelsea se rend accompagnée, elle distingue au mur la photo d’un délinquant recherché par la police. Des images l’agressent, des souvenirs qu’elle ne peut canaliser, mettre en concordance, jusqu’à ce que tout se mette en place, peu à peu grâce à des événements extérieurs.

Quarante huit heures dans la vie de quatre amis et de leurs compagnons, de leur famille, parents, sœurs, qui vont les marquer, et qui se déroulent à un rythme effréné, sans aucun temps morts. Quarante huit heures intenses qui mêlent amour, humour, tension, angoisse, peur, et qui pourraient se révéler dramatiques, voire tragiques.

 

La fille de la plage aurait pu être une romance, mais l’auteur joue avec les sensations, les sentiments, entraîne le lecteur dans un tourbillon qui s’emballe peu à peu pour devenir une véritable tornade infernale. Une nouvelle réussite à mettre à l’actif d’Alexis Aubenque, quelque soit le domaine qu’il aborde.

Avec un pincée de drogue, quelques caresses érotiques, une larme d’alcool (les moins de vingt et un ans aux USA n’ont pas le droit de boire des boissons éthyliques dans les bars et lieux publiques), et une grosse dose de suspense et d’angoisse assaisonnée d’humour, d’émotions et de nostalgie, telle est recette pour écrire un bon roman. Encore faut-il que le maître queux soit à la hauteur et réussisse à marier tous ces ingrédients et leur exhausser la saveur. Alexis Aubenque mérite amplement ses quatre étoiles. Il est encore un peu jeune pour en obtenir cinq.

Quelque chose me dit qu’on devrait retrouver tout ou partie des différents personnages de ce roman dans un prochain ouvrage.

 

Ne cherche jamais à comprendre les filles, tu auras plus vite fait d’apprendre le chinois.

Les flics sont parfois des abrutis, mais pas des assassins.
Va dire ça à tous les Noirs qui se font tirer comme des lapins chaque année.

Je te l’ai dit, il n’y a rien de plus apaisant qu’un cimetière. Il n’y a plus de souffrance, plus de violence, plus de guerre. Il n’y a que de la paix et de la sérénité.

Alexis AUBENQUE : La fille de la plage. Editions Hugo. Parution le 16 mai 2018. 480 pages. 17,00€.

ISBN : 978-2755637021

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9 juin 2018 6 09 /06 /juin /2018 10:55

Le désir, un cas rosse ?

Frédéric LENORMAND : Un carrosse nommé désir

Dès le titre, le ton est donné. De nombreuses références littéraires sont nichées dans le texte, un peu comme ces images-devinettes qui nous invitaient à découvrir où était caché le lapin, l’écureuil ou tout simplement le petit garçon dessiné sur une branche.

Ainsi, Voltaire s’interpose dans une querelle s’écriant : A moi, comte, deux mots. Ce qui clôt immédiatement, ou presque, l’algarade.

Et alors qu’il se promène sur l’Ile Saint-Louis, il ne peut s’empêcher de s’exclamer :

C’est un pic ! C’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? C’est une péninsule !

Mais ce ne sont pas les seuls exemples disséminés dans ce roman et vous pourrez vous amuser à en découvrir d’autres, tous de bon aloi, évidemment.

Si Voltaire tombe amoureux de la vue plongeante sur la Seine, c’est surtout par l’hôtel Lambert qu’il est attiré. Une demeure un peu délabrée mais qui lui conviendrait parfaitement et il en fait part à son amie Emilie, marquise du Châtelet. Elle lui promet de le lui acheter et pour cela elle doit emprunter auprès de son banquier Charles Michel, sieur de Roissy, en attendant de toucher un héritage providentiel. L’homme est un financier qui a gagné sa fortune dans diverses affaires, notamment dans la traite de ce que l’on appelait pudiquement Bois d’ébène comme armateur de bateaux servant à la traite des Nègres.

Seulement ce brave homme a disparu, alors qu’il se rendait en fiacre de chez lui jusqu’à sa garçonnière. S’il est bien monté dans le véhicule, à l’arrivée le cocher n’a pu que constater qu’il n’y avait plus personne ! Comme à son habitude le financier Michel était imbibé mais quand même cela n’explique pas tout. D’autant qu’il est (était ?) volage et rencontrait très souvent des femmes de petite vertu. Alors disparition, fugue ou enlèvement ?

Emilie doit se rendre auprès de Madame de Richelieu qui vit une grossesse difficile. Mais Voltaire ne restera pas seul puisqu’il hérite comme compagnon la nouvelle coqueluche de la marquise, le mathématicien Samuel König qui a remplacé Leibnitz. Car Voltaire est bien décidé de retrouver le financier, le palais Lambert lui tenant à cœur.

Il se rend donc chez le financier Michel où il est accueilli par sa femme qui n’est guère affligée par la disparition de son dépravé de mari. Il fait la connaissance également de sa fille Justine qui n’est toujours pas mariée malgré son âge avancé (pour l’époque). Il y a également un secrétaire qui fait partie de la famille, Béranger, et pour la bonne bouche Apariciỏn, la cuisinière. Il découvre que madame Michel est une fervente d’astrologie et qu’elle possède une lunette lui permettant d’examiner les étoiles, et éventuellement son mari lorsqu’il sort d’une maison close ou d’un cabaret sis sur le quai qui fait face à leur hôtel particulier.

Voltaire entame donc son enquête, entraînant avec lui, malgré ses réticences, son rival König, et va se rendre en toute bonne foi et ingénuité dans des endroits mal famés dont il ignorait l’existence, le cabaret La Sphynge par exemple, un lupanar régulièrement fermé mais rouvert tout aussitôt ou presque. Ses multiples avatars le conduiront à fréquenter, en tout bien tout honneur quand même, la plantureuse comtesse Virginia de Cougourdan, une jolie pastelliste nommée Rosalba, de belles femmes légères, des énergumènes vindicatifs, le tout épicé et assaisonné d’horions. Mais il n’oublie de se protéger par la présence de König. Il se rendra même dans la résidence de Michel à Roissy, dans des conditions peu avantageuses pour sa personne à laquelle il tient fort.

Et pendant ce temps-là, Paris s’amuse. Le mariage de Louise-Elisabeth, douze ans, la fille de Louis XV, avec l’Infant d’Espagne, donne lieu à des fêtes et joutes nautiques, ce qui ne manquera pas d’éclabousser notre philosophe qui n’hésite pas à se mouiller.

 

Au-delà de l’enquête voltairienne dans laquelle, au cours des nombreuses discussions qu’il peut entretenir avec les divers protagonistes de cette histoire, c’est l’humour qui prédomine et imprègne avec saveur l’intrigue. Il se réfère souvent à ses ouvrages, notamment Les éléments de la philosophie de Newton, récemment paru, et à ceux qu’il envisage de rédiger dont Micromégas. Un peu imbu de lui-même, il n’hésite pas à déclarer :

Mes livres ont le défaut de la perfection.

Voltaire n’est pas toujours décrit à son avantage, mais il est vrai que les représentations picturales ou écrites, ne plaident pas toujours en sa faveur :

Voltaire se tortillait façon « parade nuptiale du ver à soie », un invertébré doté de longs poils sur le crâne.

Une petite réflexion en passant qui peut s’adresser à tout auteur, d’hier et d’aujourd’hui, pourquoi pas de demain :

Les grands livres ne sont pas faits pour plaire à tout le monde. Seuls les petits le sont.

Un roman qui incite à la bonne humeur et se révèle une introduction amusante à la philosophie.

 

Frédéric LENORMAND : Un carrosse nommé désir. Voltaire mène l’enquête. Editions Jean-Claude Lattès. Parution le 9 mai 2018. 334 pages. 19,00€.

ISBN : 978-2709661720

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8 juin 2018 5 08 /06 /juin /2018 08:11

Bon anniversaire à Sara Paretsky née le 8 juin 1947.

Sara PARETSKY : Angle mort.

L'emploi du temps de Vic Warsharwski, détective privée à Chicago, est particulièrement chargé.

Elle est menacée d'être expulsée de son bureau par ses propriétaires qui veulent abattre l'immeuble. Elle doit finir sa comptabilité pour envoyer sa feuille d'impôt. Elle doit découvrir pourquoi Lamia, une entreprise publique composée exclusivement de femmes qui devait construire un immeuble pour les sans-abris, se voit refuser les crédits bancaires dont la société a besoin. Elle doit trouver un emploi à un jeune homme, Ken, condamné à deux cents heures de travail au service de la communauté, pour avoir piraté les ordinateurs du ministre de la Défense.

Une femme accompagnée de ses trois enfants s'est réfugiée dans la cave de son immeuble. Elle tente de la raisonner mais en vain. La femme disparaît avec ses mômes. Vic contacte un employé de la municipalité afin qu'il se renseigne sur le refus de la banque. L'homme, soumis à des pressions, décline le travail. Vic participe à une soirée organisée par un professeur de droit, Fabian Messenger, en l'honneur de l'un de leurs anciens professeurs. Au cours du repas, Deirdre, femme de Fabian et membre avec Vic d'une association caritative, est particulièrement éméchée. Elle lâche quelques phrases perfides à l'encontre de certains des invités dont Alec Gantner, fils du sénateur, Blakely, président de la Gateway Bank.

Emily, la fille des hôtes, est considérée comme la bonne d'enfants, s'occupant de ses deux frères. Vic assiste à des scènes violentes au cours desquelles Fabian bat sa femme. Elle soupçonne aussi Fabian d'exercer un droit de cuissage sur sa fille. Fabian fort en colère lui conseille de s'adresser à Heccomb, responsable de Home Free, une œuvre de charité.

Le cadavre de Deirdre est retrouvé dans le bureau de Vic qui est soupçonnée du meurtre. Le disque dur de son micro-ordinateur est totalement effacé. Emily disparaît avec ses frères et Fabian accuse Vic de les cacher. Vic ne trouve aucun appui auprès des policiers dont Conrad son amant. La batte de base-ball appartenant à Fabian est retrouvée dans la chambre d'Emily, tâchée de sang. La jeune fille est accusée du meurtre de sa mère mais Vic est persuadée que le meurtrier est Fabian.

De l'eau s'infiltre dans les caves du quartier du Loop. Vic aidée de son voisin s'infiltre dans les tunnels souterrains et parvient à sauver Emily, ses frères et la jeune femme toujours accompagnée de ses enfants dont l'un décèdera peu après. Ken se fait entreprenant auprès de Vic et celle-ci lui demande de réinitialiser son ordinateur. Il récupère les fichiers de comptabilité et un message sibyllin de Deirdre. Vic est éconduite par Heccomb de Home Free mais elle s'obstine et s'introduit nuitamment dans les locaux. Elle découvre dans un classeur cinq millions de dollars. En compagnie d'un journaliste elle visite un chantier de Home Free et s'aperçoit que les ouvriers sont des Roumains en situation irrégulière. Peu après elle se sent suivi dans ses déplacements. Son bureau est visité, elle est assommée ce qui lui vaut un stage à l'hôpital.

 

Pas de temps morts dans cet ouvrage de près de quatre cent cinquante pages. Les scènes d'action défilent, Sara Paretsky ne lésinant pas sur les moyens. Elle dénonce la collusion entre les hommes d'affaires et les hommes politiques, la protection dont ils jouissent.

La police ferme l'œil, préférant accuser des innocents ne possédant pas de relations. Vic se bat contre les machos battant leurs femmes, violant leurs enfants.

Une sorte de Don Quichotte moderne face à des moulins qui ne sont pas en voie d'extinction d'après ce roman où les personnages féminins subissant les mauvais traitements leur conjoint sont légion.

Réédition Collection Points. Editions Le Seuil. Parution 15 janvier 2003. 496 pages.

Réédition Collection Points. Editions Le Seuil. Parution 15 janvier 2003. 496 pages.

Sara PARETSKY : Angle mort. (Tunnel vision – 1994. Traduction de l'anglais par Annie Hamel). Le Masque grand format. Parution 18 octobre 1995. 442 pages.

ISBN : 978-2702426043

Réédition Collection Points. Editions Le Seuil. Parution 15 janvier 2003. 496 pages.

ISBN : 978-2020542364

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7 juin 2018 4 07 /06 /juin /2018 09:54

Une bonne résolution ?

Franck MORRISSET: La Résolution Andromède.

La Terre fait partie de la Confédération et ses habitants vivent en compagnie des Hittites, des Chivas et des Echidnédésius surnommés les Ratons, venus d'autres planètes.

Seulement les Terriens supportent mal cette cohabitation et des collectifs dont notamment La Terre est à vous prônent par tous les moyens le retrait de ces envahisseurs.

En cette année 2342, le lieutenant Alex Green se remet doucement de ses blessures contractées lors de l'arrestation d'un voyou, sauvant la vie de sa coéquipière Nalïn. Il pense à Chadwick, un de ses hommes aliénophobe tué peu avant, à son amie Sarah et à Cindy, une Ratonne qu'il aime bien quoiqu'il n'apprécie guère en général les extraterrestres.

Alex se plonge dans le dossier Chadwick et découvre que le policier, un être brutal, était aussi un amoureux de poésie et avait écrit un essai La résolution Andromède. Lorsqu'il veut se renseigner sur l’agresseur de Sarah, incident qui s’est déroulé quelques mois auparavant, il apprend que l'homme, David Orlovsky, serait mort en prison mais son fichier est inaccessible.

Pendant ce temps, le même Orlovsky est conditionné par Stadler et son adjoint Lamarre pour devenir un commando et combattre les envahisseurs. Orlovsky est un refoulé, un psychopathe, se prenant pour un Surhomme. Il doit mener à bien le programme Lune morte, contre projet de la Résolution Andromède qui prévoit une manifestation de sympathie envers les envahisseurs. Il tue une infirmière intérimaire puis d'autres individus, clochards, marginaux, qu'il croit être des Hittites. Nalïn annonce la disparition de l'infirmière laissant Jerry, un petit garçon atteint d'une maladie grave. Alex n'y prête pas attention. Une agression est perpétrée envers un Hittite.

Orlovsky, quoique son instructeur ne le juge pas prêt mentalement et physiquement, est convoyé sur Moon XVIII, plaque tournante de l’immigration, où il est réceptionné par Laetitia, la nièce du Consul. Laetitia, sous des dehors de fofolle, joue le jeu des extrémistes.

 

Ce roman à la trame simple mais qui est écrit d’une façon assez distordue pour mieux la compliquer, est une parabole sur un futur qui ressemble à notre monde.

Le racisme y est dénoncé, mais expliqué également. Les motivations des Terriens à rejeter les extraterrestres, soit par la manière forte, soit en les méprisant, rappellent le racisme exacerbé ou ordinaire d’aujourd’hui.

La technique narrative de Franck Morrisset est spéciale. Il utilise à profusion les italiques, interpose des personnages pour leur donner un développement plus ou moins important au fil de l’histoire, et surtout joue avec les à-côtés.

Intéressant à plus d’un titre, ce roman mi polar, mi S.F. joue avec les genres.

 

Franck MORRISSET: La Résolution Andromède. Collection SF Polar N°27. Editions Fleuve Noir. Parution décembre 1997. 256 pages.

ISBN : 2-265-06098-4

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6 juin 2018 3 06 /06 /juin /2018 08:42

Monet, monnaie…

Renée BONNEAU : Nature Morte à Giverny.

En août 1908, le célèbre jardin de Monet est le théâtre d’un drame.

Dans le bassin aux célèbres nymphéas est retrouvé le cadavre d’une jeune fille.

Elle séjournait en compagnie de son père, acheteur japonais qui essayait de fléchir le peintre dans sa décision de ne plus produire de toiles et désirait acheter quelques tableaux afin de les exporter au Pays du Soleil Levant. Ophélia, tel se prénommait la jeune morte, s’était liée d’amitié avec quelques rapins américains et leurs amies venus demander conseils au maître de Giverny.

A la même auberge tenue par une accorte tenancière, logent un vieil acteur et sa compagne, modèle dans sa prime jeunesse. Un apprenti jardinier est même renvoyé à cause de la dévotion jugée trop arrogante qu’il professe envers Ophélia. Elle n’avait réussi qu’à attiser rivalités, jalousie et inimitiés. Qui a pu engranger tant de haine envers la jeune fille au point de la noyer ?

 

Au delà de cette enquête classique qui nous offre toutefois le bon goût de ne pas étaler sur plusieurs pages les ratiocinations du policier chargé de résoudre ce meurtre lors de l’épilogue, c’est la reconstitution d’une époque du début du siècle qui prime : Monet reclus à Giverny alors que perdant peu à peu la vue il ne souhaite plus toucher à ses pinceaux ; les jeunes peintres Américains désirant ardemment obtenir des conseils du maître ; l’acteur déclamant lors de soirées spéciales des tirades empruntées au répertoire classique ou de sulfureux poèmes.

Et bien entendu le jardin, décor somptueux et personnage à part entière de cette histoire, et les nymphéas qui feront le tour du monde.

Première édition : Collection Pol’Art. Editions Alain Bargain. Parution 1999.

Première édition : Collection Pol’Art. Editions Alain Bargain. Parution 1999.

Renée BONNEAU : Nature Morte à Giverny. Editions Nouveau Monde. Parution le 17 avril 2015. 218 pages. 17,00€.

ISBN : 978-2369421832

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29 mai 2018 2 29 /05 /mai /2018 07:49

Une affaire pas très Claire !

Patrick TUDORET : Printemps acide.

A quarante six ans et quelques broquilles, le commissaire divisionnaire Le Stang Roch, responsable du DIPJ de Bordeaux, peut s’estimer satisfait de sa carrière dans les forces de l’ordre. Côté marital, c’est un peu moins bien car il est divorcé, mais on ne réussit pas tout dans la vie.

Aussi la nomination comme contrôleur général, signification émanant des instances supérieures sans passer par la voie hiérarchique, le gêne aux entournures. Il ressent cette promotion comme une mise au placard.

Une même impression ressentie par son ancien patron Keller, lorsqu’il lui fait part de cette décision. Roch est monté à Paris afin de lui en parler et il prend une chambre à l’hôtel, dans le quartier de Montparnasse-Bienvenüe. Et dans le métro, alors que sa rame est à l’arrêt, il remarque dans le wagon qui lui fait face une femme aux yeux cernés, pas par la police, qui écrit sur la vitre son prénom et SOS.

Cette femme lui dit vaguement quelque chose, comme un souvenir enfoui dans les limbes de sa mémoire. C’est le soir, alors qu’il cherche à s’endormir, qu’il se remémore un épisode amoureux qui s’est déroulé vingt ans environ auparavant.

Claire ! C’est Claire, qu’il a fréquenté durant quelques semaines et qu’il avait perdu de vue lorsqu’il avait été muté en province. Il n’avait pas répondu à ses lettres, et la vie avait fait qu’il s’était marié avec Marie et depuis divorcé.

Son séjour va être mouvementé, riche, si l’on peut dire, en événements troublants, car outre cette nomination surprise qu’il n’accepte pas de bon cœur, son passé ressurgit apportant son lot de stupéfactions.

Cinq jours dans la vie d’un homme, c’est court, et c’est long. Cela dépend de ce qu’il se passe, et Le Stang les trouvera très longs ces jours qui défilent pourtant à toute vitesse, ponctués d’incidents en tous genres, dont une tentative de meurtre par balle à laquelle il échappera. Et les questions fusent encore plus. Surtout lorsqu’une affaire bordelaise dont il s’est occupé quelques mois auparavant ressurgit inopinément, établissant un lien ténu avec ce qu’il lui arrive. Mais par quel bout prendre ce lien.

Comme c’est un membre bien placé dans la Grande maison, et qu’il sera secondé activement par des collègues, aussi bien à Bordeaux qu’à Paris, il peut fouiner dans les archives, établir des écoutes téléphoniques, accéder à certains dossiers, tous privilèges dont ne bénéficie pas le commun des mortels.

 

Breton pure souche, Roch Le Stang s’érige comme un roc, un menhir, ne laissant que peu de place aux émotions. Pourtant au cours de ces cinq journées, il passera par de nombreux sentiments qui l’amèneront à réfléchir et à étaler des troubles qui lui étaient inconnus, ou enfouis au plus profond de lui-même.

Patrick Tudoret décrit avec réalisme les tenants et aboutissants de la maison Poulaga comme aimait à décrire San-Antonio la fonction policière, mais en haut de l’échelle. Et comme il ne peut y avoir une histoire sans méchants, sans flic pourri, il en met un en scène, mais ce n’est pas le principal. Tout tourne autour du ministère de l’Intérieur et des différents organismes qui régissent le système policier.

Et comme apparemment il connait bien la boutique de l’intérieur, il ne peut s’empêcher de dénigrer les séries et fictions policières françaises, les jugeant peu réalistes, voire peu crédibles. Là-dessus, je n’émettrai aucun jugement, n’étant pas téléphage. Mais les séries américaines sont-elles tout autant crédibles ? Il faut du sensationnel pour attirer le téléspectateur, et moi, je n’adhère pas du tout. Je préfère les bons vieux flics à la Maigret, c’est plus reposant, mais ceci n’est qu’une question de sensibilité. Et l’on sait que ce qui est peu crédible approche souvent de la réalité que l’on ne veut pas voir ou nous montrer.

Patrick TUDORET : Printemps acide. Collection Marge Noire. Editions De Borée. Parution le 19 avril 2018.

ISBN : 978-2812923470

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Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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