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11 décembre 2014 4 11 /12 /décembre /2014 17:27
François  DARNAUDET : Un portrait.

Né le 16 juin 1959 à Auch dans le Gers, François Darnaudet est marié avec Catherine Rabier (02 mars 1960 Pessac – Gironde), professeur agrégée de lettres classiques, et avec qui il cosignera deux ouvrages. Il a également un fils, Boris, né en 1990 qui prend allègrement le chemin de ses parents puisqu'il a signé ou cosigné quatre romans. Ancien ingénieur des Travaux Publics (1981), ancien chercheur en mécanique des fluides, ancien journaliste technique, Darnaudet décide durant son service militaire (1984/1985) de tenter l’écriture à plein temps jusqu’en 1990.

Son premier livre, un roman noir et étrange (Le Taxidermiste en 1985) est écrit en collaboration avec Thierry Daurel, avec lequel il signera également des nouvelles notamment pour Hitchcock Magazine ou Professeur Choron. Il gravite dans la bande à Mosconi dans les années 85/87 mais c’est grâce à Juliette Raabe qu’il fait une apparition éphémère au Fleuve Noir dans la collection Gore pour un roman écrit en collaboration avec sa femme : Collioure Trap en 1985. Ensuite il publie de nombreuses nouvelles pour des supports divers allant de Fluide Glacial à Hara-Kiri en passant par Femme Actuelle et Hitchcock démasque.

En 1990, se rendant compte que ses diplômes non utilisés ne valent quasiment plus rien dans le privé, il devient maître auxiliaire en physique, puis en maths et passe le CAPES de math en 1992. Depuis il enseigne en tant que prof certifié de maths mais le démon de l’écriture ne l’ayant pas abandonné, il trouve ses bonnes fées avec Alain Dorémieux qui lui ouvre les portes de Territoires de l’inquiétude N°6 chez Denoël et Francis Valéry qui le remet en selle en lui proposant d’écrire un opus de la série Agence Arkham : Daguerra, un roman fantastique, son genre de prédilection.

François  DARNAUDET : Un portrait.

Il continue sur sa lancée, alternant roman noir et roman fantastique avec bonheur tout en variant les plaisir. Il signe ainsi trois essais sur la peinture dont Art et artistes en pays catalan au 20ème siècle pour la jeune chambre économique de Perpignan Roussillon en 2000 et L’Après Terrus en Roussillon (avec Arthur Conte et F. Coste) publié par le Musée Terrus Elne.

Sud Express, publié en 2001 narre avec humour les mésaventures et les galères d’un écrivain. Dans Le Fantôme d’Orsay qui sera suivi de Les Dieux de Cluny (Un volume aux éditions Nestiveqnen), François Darnaudet conjugue ses passions. Ce sont deux thrillers dont l’action se situe à Paris et qui allient le fantastique à l’art. Paraîtra ensuite Le Papyrus de Venise (Nestiveqnen) et un épisode du Poulpe, Boris au pays Vermeil.

Plus noir, ancré dans sa région, L’or du Catalan (éditions Le Passage) nous entraîne à la suite de Chloé, thésarde et pigiste à la revue d’histoire Prométhée et qui s’est mise dans de beaux draps à cause de Francis, son amant du moment. La lagune des mensonges (Rivière Blanche) nous emmène à Venise dans une histoire totalement débridée à la suite de personnages qui endossent les traits de héros mythiques tels que Fantômas, Bob Morane et Bill Balantine, le Professeur Flax et bien d’autres. Un roman dans lequel Darnaudet multiplie les effets loufoques, incroyables, invraisemblables, comme dans tout bon roman d’aventures qui se respecte, tout en respectant un épilogue scientifique. Il écrit également les scénarii d’une bande dessinée, Les affreuses histoires du cousin Paulo, pour le magazine de B.D. Yéti.

Vont suivre Le regard qui tue (écrit en collaboration avec Pascal Metge - Rivière Blanche), Au Château d'alcool (Rivière Blanche), Trois guerres pour Emma (Rivière Blanche), Les ignobles du Bordelais (signé Darnaudet-Malvy et publié chez Baleine dans la collection Le Poulpe), Les ports ont tous la même eau et Le dernier Talgo à Port-Bou (tous deux aux éditions Mare Nostrum), Zombie Gore avec Catherine Rabier reprend Collioure Trap et Andernos Trap (Rivière Blanche) plus un roman dédié à son maître Boris Vian : Bison Ravi et le Scorpion Rouge publié chez Mare Nostrum, ainsi qu'une étude sur les éditions du Scorpion sur Kindle.

Le Glaive de justice et De Barcelona à Montsegur écrit en collaboration avec Gildas Girodeau et Philippe Ward constituent la saga de Xavi El Valent (Rivière Blanche) dont d'autres épisodes sont prévus.

Enfin, François Darnaudet vient signer une bande dessinée illustrée par Elric : Harpignies, éditée chez Paquet.

Oscillant entre noir et fantastique, puisant parfois dans le domaine historique, ces romans sont de petits bijoux que devraient apprécier même les lecteurs les plus exigeants. Mais François Darnaudet a d'autres projets en vue dont il sera question le moment venu.

Il lui manque juste d'un peu de médiatisation pour son travail d'écrivain soit reconnu. Comme c'est un homme timide qui n'aime pas être placé sous les feux des projecteurs, qu'il ne participe guère aux salons, contrairement à certains de ses confrères qui les écument, il reste un romancier confidentiel mais au combien attachant.  

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11 décembre 2014 4 11 /12 /décembre /2014 10:16

Un seul être vous manque et la scène est dépeuplée !

Franck MEMBRIBE : Kérosène.

Ce devait être la fête, avec spectateurs en délire assuré. Seulement il aurait fallu que la chanteuse, accompagnée d'un quadra à queue de cheval, soit présente. Mais elle n'est pas au rendez-vous, de même que son ami ou quel qu'il soit pour elle.

Elle c'est Béatrice, lui Samuel, mais n'en parlons pas, il ne compte pas. Béatrice, la voix, celle que tout le monde attend, la vedette du spectacle qui rassemble quelques groupes de musiciens théoriquement en devenir. Pour la narrateur, c'est la déception. Il était venu attendre sur le quai Béatrice et accessoirement Samuel, il repart gros-jean comme devant. Et au téléphone il n'arrive à atteindre que la messagerie qui débite à chaque fois le même message.

Mais comme il est de coutume de le déclarer, le spectacle continue. Alors les répétitions s'enchainent, pas forcément dans la bonne humeur. Le batteur se bat avec ses baguettes, le guitariste se gratte avec sa gratte, les bières s'enfilent, faut pas qu'elles réchauffent. Non, c'est à eux de chauffer la salle.

Description d'une répétition larvée, de musiciens à la dérive quand la vedette de la soirée fait faux bond, états d'âme et blues assuré, Franck Membribe nous décrit tout ça et bien plus dans cette nouvelle musicale entre rock attitude et blues lancinant.

Et l'épilogue nous réserve bien évidemment une petite surprise, mais ce n'est pas le principal. Tout est dans la complainte du texte qui nous fait planer, et l'on compatit à cette forme de désespérance, d'accablement, de déception, de solitude ressentis par les protagonistes.

Et il parait que tout se termine en chanson. C'est vrai, mais cela dépend du style musical qui en découle. Révolutionnaire, triste, intimiste, revendicatrice, enjouée ou le tout à la fois.

A commander sur Ska librairie et profitez-en pour consulter le catalogue :

Franck MEMBRIBE : Kérosène. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Nouvelle numérique. 1,49€.

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10 décembre 2014 3 10 /12 /décembre /2014 14:39

A la Bastille on aime bien...

Emile GABORIAU : Le Diable de la Bastille.

Tout premier roman, inachevé, de Gaboriau, paru en feuilleton en 1861 sous le titre de La Marquise de Brinvilliers, retitré Les Amours d'une empoisonneuse en 1881 lors de sa parution posthume chez Dentu, voici qu'il renait de ses limbes grâce à Thierry Chevrier, pour la préface, et Pascal Galodé, éditeur amoureux de la littérature populaire qui a déjà quelques titres de Gaboriau et de ses confrères de la même époque à son catalogue. Le changement de titre est justifié comme on le verra dans cette chronique.

Les personnages qui évoluent dans cette œuvre ont véritablement existé, que ce soit Exili, alchimiste et expert en poisons surnommé Le Diable de la Bastille, Gaudin de Sainte-Croix, l'amant de la Brinvilliers, La Chaussée, son valet, Marie-Madeleine Dreux d'Aubray, marquise de Brinvilliers, Reich de Penautier, trésorier des états du Languedoc, Adrien Hanyvel, receveur général du clergé de France. Mais comme il s'agit d'un roman, à l'instar d'Alexandre Dumas, Gaboriau joue avec la réalité des faits historiques et la durée de l'intrigue pour établir une œuvre, de jeunesse certes, qui lui permet de se faire la plume et rédiger des livres plus ambitieux, plus personnels et plus innovants par la suite.

Dans l'établissement de bains tenu par La Vienne, barbier-baigneur-étuviste, les jeux vont bon train. Comme à son habitude Gaudin de Sainte-Croix, capitaine dans le régiment de Tracy-Cavalerie, gagne au détriment du sieur Hanyvel. Autour d'eux les jeunes femmes s'agglutinent, comédiennes ou marquises, toutes sensibles à la prestance du militaire et à sa bonne fortune. Et toutes lui offriraient bien leurs corps. Ce qui ne l'empêche de discuter avec son entourage et de déclarer que pour le moment la science, et plus particulièrement la toxicologie, est sa seule maîtresse. L'heure du rendez-vous sonne et sur un quitte ou double le chevalier perd tous ses gains, au grand désappointement d'une représentante de la noblesse qui avait jeté sur le tas d'écus la clé de son boudoir.

Une parole malheureuse de son adversaire met en colère le chevalier qui sort son épée. Heureusement pour le financier le valet de Gaudin arrive fort à propos pour lui signifier qu'il est attendu. Aussitôt il se rend à l'Hôtellerie du More-qui-trompe, un établissement qui ne paie guère de mine mais les somptueux appartements du premier étage sont aménagés pour les amours adultères. Gaudin retrouve avec fièvre la marquise de Brinvilliers, sa maîtresse qu'il a connu alors qu'ils sortaient de l'adolescence, environ vingt ans auparavant. Si son mari n'est guère troublé par ce cocufiage, le père de la marquise ne l'entend pas de cette oreille. En compagnie de ses deux fils et d'un lieutenant de police, il investit les lieux, afin de surprendre les amants.

Lorsque le policier et le père de la marquise entrent dans la pièce, seul le chevalier de Sainte-Croix les reçoit. L'amante s'est enfuie grâce aux bons offices de Penautier, l'ami du chevalier qui l'a faite passer par une porte secrète. Le chevalier est emmené à la Bastille et comme les places manquent, déjà, il est enfermé en compagnie d'Exili, un Italien réputé pour sa science des poisons. Et c'est ainsi qu'en attendant l'heure de sa délivrance, Gaudin de Sainte-Croix s'initie un peu plus à la toxicologie, tout en échafaudant en compagnie de son codétenu un stratagème pour jouer les filles de l'air.

Dans Paris, vivant dans une mansarde donnant sur les jardins d'Hanyvel, un jeune homme soupire. Il se prénomme Olivier, a été placé en bas âge chez une famille d'accueil puis a été recueilli par le marquis de Florenzi. Mais obligé de s'exiler Florenzi a placé sous les bons soins de son valet Cosimo le jeune Olivier qui s'avère très bon élève et entre au service du Sieur Mondeluit, conseiller au Châtelet et membre du Parlement. Le jeune Olivier s'éprend d'Henriette, la fille de Hanyvel, et c'est réciproque et tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes sauf que... Sauf que Olivier ne connait pas son ascendance et qu'il n'est guère riche et que le père d'Henriette a jeté son dévolu sur un autre prétendant pour sa fille.

 

Comme on se peut se rendre compte, ce roman oscille entre deux tons, deux histoires qui vont se rejoindre et il emprunte beaucoup à des ressorts qui faisaient florès à l'époque. Les deux prisonniers de la Bastille, le vieil Exili et le jeune chevalier ne sont pas sans ressembler à l'abbé Faria et à Edmond Dantès emprisonnés dans la forteresse du château d'If. Ensuite le parcours suivit par Olivier, placé en bas-âge chez des parents nourriciers, enfant abandonné avant que ses géniteurs puissent le récupérer, est un thème qui souvent été traité par les romanciers populaires de l'époque. Xavier de Montépin en tête.

Ce roman aurait demandé à être plus épais (pour une fois voilà que je me plains) car l'histoire ne met pas en évidence ce que le titre originel promettait. En effet le personnage de la marquise de Brinvilliers est effacé n'apparaissant qu'au début du récit et un peu sur la fin. Tout est axé sur Exili et sur Olivier. Donc il n'est pas vain de penser que si Gaboriau avait mené à terme ce roman historique celui-ci eut été plus complet. Mais comme nous l'apprend Thierry Chevrier dans sa préface, des problèmes de santé ont obligé l'auteur à sursoir dans son écriture puis une fois remis, il avait d'autres idées en tête qui donneront notamment l'Affaire Lerouge, roman qui inspirera bon nombre d'auteurs et dont se réclamait Sir Arthur Conan Doyle.

Publié en feuilleton inachevé, Le Diable de la Bastille fut édité chez Dentu en 1881, après qu'un inconnu eut rédigé les derniers chapitres. Personnellement, je me demande si la plume de Paul Féval ne serait pas passée par là, et ce pour de bonnes raison. D'abord Gaboriau fut le secrétaire du créateur du Bossu. Ensuite, Paul Féval sur ces dernières années n'avait plus rien produit depuis la parution en 1879 des Merveilles du Mont-Saint-Michel. De plus il s'est tourné vers la religion catholique. Or dans la dernière partie du Diable de la Bastille, l'auteur se réfère souvent à la religion. Je citerai juste cette phrase, afin de ne pas déflorer l'intrigue et le dénouement, mais elle est assez significative à mon sens : La science lui montre Dieu, seule la prière peut l'atteindre

Emile GABORIAU : Le Diable de la Bastille. Emile GABORIAU : Le Diable de la Bastille.

Emile GABORIAU : Le Diable de la Bastille. Editions Pascal Galodé. Parution le 29 octobre 2014. 206 pages. 20,00€.

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10 décembre 2014 3 10 /12 /décembre /2014 10:47

Ne prenez pas froid, restez couvert...

Serge BRUSSOLO : Les Ombres du jardin.

Martine, treize ans, vit seule avec sa mère, dans le quartier huppé du Trocadéro. En réalité elles ne sont pas si riches que ça, et elles ne vivent pas seules, mais il faut apprécier les nuances. A vingt huit ans, Jeanne, la mère de Martine, après avoir débuté dans la traduction de romans policiers américains, s'est tournée vers la littérature, écrivant des livres sulfureux pour l'époque et qui remportent un grand succès populaire. Seulement son éditeur la paye au compte-gouttes.

Ensuite, si Martine n'a pas de père officiel, sa mère reçoit dans son lit des hommes, l'un après l'autre, faut pas non plus la prendre pour ce qu'elle n'est pas. Et ça fait jaser. Pensez donc, l'action se passe à la fin des années cinquante, et en ce temps là, fallait pas badiner avec l'amour et la morale. C'était une affaire d'hommes.

Cette petite vie tranquille commence à se dégrader lorsqu'une femme se fait vitrioler, puis une deuxième. Une certaine ressemblance existe entre Jeanne et les victimes. L'angoisse s'installe. Est-ce à cause de ses romans qui n'ont pas l'heur de plaire aux âmes bien pensantes, ou une émanation de son passé, un passé trouble qu'elle raconte à Martine en l'enjolivant au fur et à mesure. Alors c'est le début de la débandade. D'abord le départ pour la banlieue ouest, dans une cité ouvrière.

Mais Jeanne et Martine n'ont pas l'habitude de vivre ainsi, d'autant qu'une troisième victime est recensée. Jeanne se résigne à partir pour la Bretagne, dans l'île où habite son père qu'elle n'a pas revu depuis des années à cause d'un contentieux sur sa naissance.

Serge BRUSSOLO : Les Ombres du jardin.

Dans ce roman Serge Brussolo nous plonge dans la nostalgie d'une époque révolue, celle de l'après guerre, où tout n'était pas rose, mais pas noir non plus. Les gens appréciaient et se contentaient de ce qu'ils possédaient. Brussolo joue avec les nerfs, distillant l'angoisse, mais de manière diffuse, sans forcer, sans rameuter l'arrière-ban de la grande artillerie des effets spéciaux. Un ton simple mais attachant, avec un premier chapitre qui replongera bon nombre de lecteurs au cœur de leur jeunesse.

 

D'autres titres de Serge Brussolo ?

Serge BRUSSOLO : Les Ombres du jardin. Editions Denoël. Parution Août 1996. 416 pages. Réédition Folio le 2 février 1999. 392 pages.

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9 décembre 2014 2 09 /12 /décembre /2014 14:24

Avec dignité...

Malcolm MACKAY : Comment tirer sa révérence

Après une opération de la hanche dont il ne ressent quasiment aucune séquelle, Frank MacLeod reprend du service à l'instigation de Peter Jamieson et de son bras droit John Young. Durant son indisponibilité, près de six mois, les deux hommes ont eu recours à Calum MacLean, mais le suppléant de Frank est grièvement blessé aux mains et ne peut donc pas assurer une nouvelle mission. De plus Frank est peut-être un peu vieux, de l'ancienne école, mais il est fiable tandis que Calum travaille en indépendant.

Tommy Scott, un jeune revendeur de drogue de Glasgow, vient d'être embauché par Shug, un concurrent de Jamieson. Scott se débrouille bien, même si pendant quelques années il livrait à domicile en bicyclette. Il est toujours accompagné d'un condisciple, Balourd surnommé ainsi à cause d'une certaine niaiserie. Et Scott fait de l'ombre à Jamieson qui confie la tâche, assez facile, à Frank de s'en débarrasser. Franck a de l'expérience mais il se fait vieux. Il se rend au domicile de Scott dans un immeuble délabré, promis à la démolition et dont la plupart des appartements sont inoccupés. Mais il ne se méfie pas assez et, après un premier repérage, tandis qu'il toque à la porte de Scott, Balourd l'assomme en sortant de l'appartement qui est en vis à vis.

Frank se demande si sa vie n'est pas en train de se terminer dans un logis minable. Scott téléphone immédiatement au bras droit de Shug car il ne sait que faire de son prisonnier. Après concertation entre Shug et son homme de main, ceux-ci décident d'envoyer un tueur finir le travail. Shaun Hutton, accepte, peut-il vraiment refuser, mais auparavant il prévient Jamieson qu'il va devoir se débarrasser de Frank. Il lui donne une heure avant de passer à l'acte.

Young et Jamieson pensent à Calum MacLean pour débrouiller la situation. Celui-ci dort lové dans les bras de sa compagne, et aussitôt, prétextant un problème avec son frère, il se rend chez Scott, et délivre Frank après avoir abattu Scott et Balourd et maquillé les lieux du crime. Lorsque Hutton se pointe sur les lieux, il n'a plus qu'à constater les dégâts et prévenir Shug que la mission s'est terminée en eau de boudin.

Le temps des questions est arrivée. Pourquoi Frank s'est-il laissé surprendre comme un bleu malgré son expérience ? Des erreurs n'ont-elle pas été commises ? Calum MacLean, son sauveur, celui qui l'avait suppléé lors de l'affaire Lewis Winter, n'a-t-il pas lui aussi commis quelques égarements ? Tout d'abord le fait d'avoir une fille couchée dans le même lit chez lui, n'aurait jamais dû se produire. Il sait qu'il peut être appelé à toute heure et la nuit il est plus compliqué de donner des explications même vaseuses à quelqu'un qui n'est pas au courant de sa profession.

Calum MacLean est un indépendant et Jamieson aimerait pouvoir l'intégrer à son équipe et qu'il ne dépende que de son organisation. Frank lui se demande comment il peut se retirer dignement de la circulation, prendre impunément sa retraite sans que cela lui soit préjudiciable, agir en finesse en sachant que dans ce milieu on ne peut pas partir sans dépôt de garantie. Et un échec peut être rédhibitoire.

Le lecteur, sans ressentir une empathie envers Frank MacLeod et Calum MacLean, est attiré par ces personnages. Il veut en toute inconscience leur dire, attention, tu fais une bêtise, cela va se retourner contre toi. L'écriture de Malcolm Mackay y est sûrement pour beaucoup, faisant partager au lecteur les pensées de ses "héros". Il les suit à la trace, il déambule avec eux, il s'immisce dans leurs pensées, il les partage et ce sont les autres, les truands de l'autre camp qui sont montrés comme les malfaisants de l'histoire. Il est vrai que nos deux tueurs ne s'attaquent pas à n'importe qui mais à d'autres personnages malfaisants, plus malfaisants qu'eux. Même les flics amenés à enquêter sur le double meurtre ne sont pas forcément sympathiques.

 

Malcolm MACKAY : Comment tirer sa révérence (How a gunman says goodbye - 2013. Traduit par Fanchita Gonzales Batlle). Première édition Liana Levi. Octobre 2013. Réédition Livre de Poche Policier/Thriller. Parution le 29 octobre 2014. 336 pages. 7,10€.

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8 décembre 2014 1 08 /12 /décembre /2014 14:33

Plus sombre que dans l'œil noir d'un beau corps...

Sophie LOUBIERE : Dans l'œil noir du corbeau.

Avant de confectionner son copieux repas littéraire, Sophie Loubière nettoie la planche de travail, puis dispose les ustensiles à portée des mains, épluche et prépare les ingrédients qui entreront dans la composition du plat principal.

D'abord les légumes et la viande. Anne Darney pour les légumes et Bill Rainbow pour la viande. Anne Darney, animatrice à la télévision pour une émission culinaire, suggérée dans les légumes, cela n'est pas usurpé à cause de son cœur d'artichaut, mais elle n'a pas toujours été comme ça. Bill Rainbow, pour un bon morceau de viande légèrement grasse, c'est meilleur pour le bouillon, à cause de sa corpulence, mais tendre grâce à l'alcool qui l'imprègne. Ensuite les aromates, indispensables pour le liant et exhausser la saveur et le goût, les personnages secondaires dont Donovan Western, un clochard qui empeste, prodigue en métaphores et aphorismes.

Anne Darney, la quarantaine, est animatrice culinaire sur TV5 et propose ses fiches de cuisine qu'elle réalise elle-même. Fin cordon-bleu, elle a un estomac en vrac, à mettre sur le compte de divers affections morales et physiques. En ce mois de décembre, alors qu'elle a assisté au remariage de son ex, et qu'elle a rendu tout ce qu'elle avait ingurgité, un invité lui propose de la reconduire à Paris. Au petit matin il n'est plus entre les draps, reparti avec le dossard 42. Cœur d'artichaut qui lorsqu'elle était adolescente Anne ressemblait plus à une asperge avec quelques rembourrements aux endroits adéquats. A seize ans, cette fille de libraire nancéien a connu Daniel et son frère. Les deux garçons dont le père était d'origine française ont été élevés à San Francisco, et ils passent quelques jours de vacances dans la station de ski de Bussang. Entre Daniel et Anne le coup de foudre a fondu la glace et après s'être échangé de menus objets ils se sont promis de se revoir. Mais Daniel après avoir écrit une ou deux fois n'a plus jamais donné de ses nouvelles. Et Anne porte encore au cœur les cicatrices d'une déchirure qu'elle n'a jamais digérée. Sur un coup de tête elle décide de s'envoler pour San Francisco et de retrouver son amour d'enfance.

Bill Rainbow, ancien policier de Frisco, vit seul dans une maison flottante. Sa propension à ingurgiter moult breuvages alcoolisés a détruit sa cellule familiale. Sa femme est partie depuis longtemps et ses relations avec ses jumelles sont une courroie extensible. Seule l'une d'elle accepte de lui téléphoner de temps en temps. Il se rend parfois dans un hôpital spécialisé afin de voir sa mère qui a des problèmes de mémoire et de santé. Mais il possède en Joey un ami sur lequel il peut compter, un ancien coéquipier. Il rencontre également de temps en temps le fils d'un ancien partenaire, décédé ou encore le chef de la police lui aussi en retraite. Et il est amené lorsque les événements se bousculent, à temporiser les actions véhémentes de Donovan Western, qui place des pierres pour conjurer le sort jetant des anathèmes envers des mouettes ou des corbeaux. C'est surtout un amoureux de la bonne chère, et il est un fervent admirateur d'Anne Darney dont les émissions sont retransmises à la télé américaine. Enfin il fréquente un établissement de massages réservé aux hommes et dont la propriétaire lui facilite l'accès, lui étant redevable.

 

Arrivée à San Francisco, Anne s'installe dans un hôtel quelque peu décrépit, mais dont elle possède l'adresse. Puis elle se rend chez les parents de Daniel pour se faire rabrouer par la mère. Celle-ci semble avoir non pas une dent mais tout un râtelier à son encontre. Elle crache que son fils se trouve à Coma. Anne a mal compris, il s'agit de Colma, un cimetière où sont enterrées de nombreuses personnalités. Et Daniel. Depuis 1986. Alors elle entame des recherches et c'est ainsi que vont se rencontrer la cuisinière française et l'américain gourmand et gourmet. Et lorsque Bill Raibow voit Anne se présenter devant lui, aussitôt son cerveau, son cœur et son estomac tombent amoureux de son idole des fourneaux.

Sophie LOUBIERE : Dans l'œil noir du corbeau.

Sophie Loubière nous propose un plat roboratif, loin des sempiternels hamburgers américains, mais plus léger qu'un cassoulet ou une choucroute. C'est fin, préparé avec amour, c'est délicat, composé avec des ingrédients qui changent de l'ordinaire. Par exemple, pour la viande, osez les volatiles, une mouette ou un couple de corbeaux. Cette histoire demande à mijoter longtemps, et il faut que le feu de temps en temps soit réactivé afin d'éviter que la sauce fige et forme de petits bouillons odorants. N'hésitez pas à touiller. En fin de cuisson, vous ajoutez quelques cuillerées d'alcool et vous faites flamber. Servez chaud.

Et comme tout bon cuisinier qui recherche la perfection, Sophie Loubière nous a concocté la même recette que lors de sa précédente prestation, mais en revoyant et corrigeant sa copie pour cette réédition.

 

Sophie LOUBIERE : Dans l'œil noir du corbeau. Première édition Le Cherche-Midi, 2009. Réédition Pocket Thriller N° 15970. Parution le 13 novembre 2014. 432pages. 7,30€.

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8 décembre 2014 1 08 /12 /décembre /2014 10:25

Bon anniversaire à Jacques Vettier né le 8 décembre 1959.

Jacques VETTIER : Juge et partie. Jacques VETTIER : Juge et partie.

Etre l'objet d'une tentative de viol sur un parking, c'est d'un goût douteux, surtout lorsqu'on est juge d'instruction. Carole l'apprend à ses dépends.

Cet essai non transformé sciemment par l'inconnu ne se révèle pas sans lendemain. Il lui téléphone, lui fait livrer un bouquet de fleurs avec un mot d'excuses.

Perturbée Carole décide de se confier à une amie et à l'un de ses collègues, mais sans ébruiter l'affaire. Son téléphone est mis sur écoute, mais sans résultats tangibles. Mystérieusement, un dossier au nom de Solange est exhumé des archives. Solange avait été tuée et éventrée deux ans auparavant et le juge d'instruction d'alors avait prononcé un non-lieu par manque d'informations.

Carole est abordée un soir à la sortie d'une boîte de nuit par son agresseur. Au cours de la conversation décousue qu'ils ont, l'homme appelle Carole Solange. Un lapsus qui incite la jeune femme à reprendre l'enquête par le début. Elle contacte tous ceux qui ont eu un rapport plus ou moins direct avec la victime lors de cette affaire. Témoins, juge d'instruction, policier.

Carole se pose de nombreuses questions dont la primordiale est : comment son inconnu peut-il si facilement avoir accès au palais de justice et détenir des informations théoriquement secrètes? Tandis que Carole s'évertue à trouver des indices, les témoins qu'elle a contacté tombent comme à Gravelotte. L'homme la suit comme son ombre...

 

Jacques Vettier, dont Juge et partie fut le premier roman nous entraîne dans un quête vertigineuse. Il sait ce dont il parle, ou plutôt écrit, puisque sa femme est elle-même juge d'instruction. Ce qui renforce l'esprit d'authenticité de ce livre agréable à lire et dont l'épilogue est surprenant. Un roman qui nous permet de découvrir une autre facette de la justice.

A conseiller à tous ceux qui pensent que les dés sont pipés. Le personnage de Carole est attachant et il on la retrouve dans deux autres aventures qui constituent une trilogie: Tueuse sans gages et Le rendez-vous de Barbuda.

Jacques VETTIER : Juge et partie. Jacques VETTIER : Juge et partie.

Jacques VETTIER : Juge et partie. Collection Troubles, Editions Métailié. Parution le 01/01/1994. 252 pages. 12,96€. Réédition Métailié Poche le 01/01/1998. 248 pages. 6,10€.

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7 décembre 2014 7 07 /12 /décembre /2014 14:14

L'as des fantômes...

Revue Rocambole N° 54 : Spécial FANTÔMAS.

2011 fut l’année Fantômas. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’en février 1911 la première des aventures du génie du Mal paraissait chez Arthème Fayard, au prix promotionnel de 35 centimes au lieu des 65 habituels. Signé Souvestre et Allain, cet inquiétant personnage connaitra 32 aventures.

Le placard publicitaire précisait, les 17 et 18 février dans Le Petit Journal, Le Petit Parisien et Le Matin : Plus inquiétant que Cartouche, Plus subtil que Vidocq, plus fort que Rocambole… De quoi appâter les lecteurs qui tout de suite furent au rendez-vous. Et il était normal, logique, indispensable que la revue le Rocambole, consacrée à la Littérature Populaire, lui consacra un numéro entier.

Alfu, dont on connait l’attachement à ce genre littéraire, entame les débats en ardent défenseur, avec un article intitulé Fantômas et la critique. Il regrette que peu d’études aient été consacrées à ce « héros », et fustige quelque peu des universitaires qui « pompent » sur des textes écrits par des passionnés, sans citer leurs sources, et qui reproduisent les erreurs sans avoir vérifié auparavant les données.

Jean-Luc Buard se penche, avec sa minutie et sa précision habituelle, sur La Royalda, feuilleton paru du 14 juillet au 24 septembre 1910 dans le quotidien Cœmedia, écrit par les créateurs de Fantômas. Et bizarrement, ce feuilleton n’a jamais été repris en volume, pourtant deux personnages faisaient leur apparition, ou plutôt revenaient puisqu’ils avaient été créés pour un précédent roman, L’Empreinte, je nomme Juve et Fandor.

L’article de Daniel Compère, L’étrange retour de Fantômas en 1926, soulève quelques points litigieux d’histoire littéraire et de paternité. Les assertions de Marcel Allain concernant cette saga faites en public et publiées dans les années 60, sont recoupées par l’article d’Alfu : Marcel Allain est-il l’auteur de Fantômas ?

Marc Georges dissèque en trois articles le personnage de Fantômas hors romans : Le roman-photo mystérieux, Marcel Allain scénariste de bandes dessinées et Fantômas au cinéma. Mais il ne faut pas oublier un homme qui est peut-être aussi à l’origine de l’engouement des lecteurs envers la série des Fantômas et plus généralement de la collection 65 centimes chez Arthème Fayard : l’illustrateur Gino Starace, qui connut également les honneurs des couvertures en Italie.

Ce numéro, qui est tout autant un dossier, qu’une étude et une mise au point, est complété par les chroniques habituelles. Le trio d’archéologues du roman populaire, Jean-Paul Gomel, Paul J. Hauswald et Claude Herbulot, effectue un retour sur d’anciennes collections et maisons d’éditions, parfois éphémères, de la littérature populaire, éditées par les trop connus et mystérieux Dermée et Guerber, les recherches, les suppositions, les postulats concernant certains pseudonymes qui pour le moment sont encore des nébuleuses et le resteront peut-être tant que rien ne pourra étayer les présomptions d’attribution à tel ou tel auteur, soulignant les approximations, le tout accompagné de reproductions de couvertures.

Et comme les bonus deviennent indispensables, quatre contes de Pierre Souvestre, parus dans le quotidien L’Auto, l’ancêtre de notre Journal l’Equipe, dont il était un fidèle collaborateur, nous sont proposés.

 

Le Rocambole, c’est un outil de travail, d’étude, d’approfondissement des connaissances, de découvertes, sur la littérature populaire française des décennies passées, des auteurs et des collections dédaignées par certains mais qui font partie de notre patrimoine culturel.

Par exemple, pour les curieux et les chercheurs et les fouineurs avides des vide-greniers, et grâce à notre trio précédemment cité, saviez-vous que Charles Frémanger emprunta le nom de Jean Froissard, le célèbre chroniqueur du Moyen-âge, lors de la fondation de sa maison d’éditions, et que dans l’une de ses collections intitulée Mélusine, Jacques Laurent alias Cecil Saint-Laurent, écrivit sous le pseudo de Roland Jarnaise, et qu’Antoine Blondin sous celui de Patrick Lawrence. Charles Frémanger publia aussi des romans de guerre à tendance érotique et Jean Lartéguy, récemment décédé, y fit ses débuts, sous pseudonyme.

 

Vous pouvez vous abonner au Rocambole, 48,00 euros par an pour trois numéros dont un double, en dirigeant le curseur de votre souris ci-dessous:

Revue Rocambole N° 54 : Spécial FANTÔMAS. Parution printemps 2011. 176 pages. 16,00€ le numéro.

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7 décembre 2014 7 07 /12 /décembre /2014 10:40

Bon anniversaire à Xavier-Marie Bonnot né le 7 décembre 1962.

Xavier-Marie BONNOT : La première empreinte.

Michel De Palma, commandant au SRPJ de Marseille, surnommé Baron par ses amis et ses collègues, réputé comme un policier sérieux et efficace, se voit confier une enquête sur le décès d’une préhistorienne retrouvée noyée dans la calanque de Sugiton.

Le fils d’un ancien chimiste de morphine, reconverti comme limonadier est lui aussi découvert noyé, un accident semble-t-il, au même endroit. Cette calanque de Sugiton recèle, par 38 mètres de profondeur, une grotte préhistorique dans laquelle ont été découvertes des reproductions de bisons et autres animaux, ainsi que celles de mains en négatif ou l’effigie sommaire de l’homme tué, sensée représenter l’image du premier meurtre de l’histoire.

Une main en négatif, comme celle retrouvée auprès de corps de jeunes femmes assassinées apparemment sans raison. Pourtant il existe un lien entre ces meurtres, un lien ténu que De Palma rembobine avec obstination, comme un fil d’Ariane fragile et prêt à casser à tout moment. Mais le policier, féru de musique classique et principalement d’opéra, est têtu et même s’il traîne derrière lui un boulet, cela ne l’empêche pas de persévérer, contre vents et marées.

Xavier-Marie BONNOT : La première empreinte. Xavier-Marie BONNOT : La première empreinte.

Malgré quelques longueurs, La première empreinte de Xavier–Marie Bonnot est un roman remarquable autant par l’écriture que par la maîtrise du sujet, son sens du détail précis et minutieux (trop peut-être) et par le décor, lieux magiques chargés d’histoire. Il faut signaler aussi que ce livre, même s’il possède un glossaire, parfois superfétatoire, est expurgé d’un exotisme marseillais qui actuellement fait florès.

 

Xavier-Marie BONNOT : La première empreinte. Spéciales N°6; Editions L’écailler du Sud; 2002. Réédition Pocket Thriller N°13206. Parution 31 Aout 2007. 472 pages

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6 décembre 2014 6 06 /12 /décembre /2014 10:46

Les limaces adorent la bière, autant que les amateurs foot. Elles sont moins bruyantes, mais pas moins dangereuses quand elles sont en bandes.

Jan THIRION : 20 manières de se débarrasser des limaces.

Sous ce titre énigmatique, se cache la comparaison entre ces petits gastéropodes sans coquilles et les êtres humains. Mais il trouve toute sa justification dans le corps du texte, grâce à quelques digressions et l'épilogue. En général je n'aime pas trop les digressions dans un roman policier, elles ralentissent le rythme de lecture mais ici elles sont fort bien venues et aèrent justement l'intrigue et permettent un final qui pourrait être une parabole.

Et puisque nous parlons de limaces, disposons nos bestioles, qui ne se gênent pas pour courir dans les travées afin de grignoter à notre barbe nos salades cultivées biologiquement, sur un plateau de jeu de petits chevaux ou de l'Oie et attardons-nous sur leurs déambulations visqueuses.

Le premier à s'élancer fougueusement de sa stalle se prénomme Sami, avec un I et non un U. Journaliste fait-diversier il rêve d'écrire un roman qui serait publié. Pour l'instant cette utopie reste en l'état de manuscrit. Il en va de même pour ses collègues et amis, Ben et Santiag. D'ailleurs ils se sont surnommés pompeusement les Ecrivains du Montana, persuadés de leur talent. Ils sont comme Charles Aznavour qui chantait Je m'voyais déjà... Sami a encore son père, un acharné de la chasse à la limace, employant toutes sortes de pièges et d'astuces pour se débarrasser de ces bestioles, mais proprement. Sans utilisation de produits chimiques nocifs à l'environnement. Sami se déplace toujours avec un enregistreur, récoltant les conversations des uns et des autres, et les délires de son père. Conversations qu'il partage au téléphone avec sa sœur Malika et qu'il sauvegarde précieusement dans un coffre-fort informatique. Première digression : La comparaison entre limaces et humains. Deuxième digression les difficultés rencontrées par les pigistes, les localiers et la non reconnaissance de leur statut.

Ensuite s'élance Marc. Il est séparé de sa femme et peut de temps en temps voir ses gamins dans une Maison de l'Enfance. Il leur achète des jouets, mais cela leur fait-il vraiment plaisir, il en doute. Marc n'est pas souvent chez lui, son travail le requiert un peu partout. C'est un tueur à gages qui se déplace souvent. Marc possède son point faible, il est atteint d'apotemnophilie. Je suis content, je suis parvenu à placer ce mot, dont je vous laisse le soin de découvrir la signification dans votre dictionnaire préféré, sachant que je n'aurais guère le loisir de l'employer dans une discussion.

Troisième limace, pardon, personnage, Président. En ce moment il écoute ses deux enfants, des gamins adoptés, jouer du piano. C'est que sa femme, la nouvelle car la précédente il s'en est débarrassé avec une statuette, la nouvelle donc est bien. Elle aime la musique, d'ailleurs il va la regarder traverser Abbey Road, comme les Beatles, pieds nus entourée de trois autres personnes. Président entretient sa jeunesse physique à l'aide d'injections d'HGM, et il se confie à Interlocuteur. Il est un peu parano Président, et il se demande si Blu, qui fut son conseiller et confident, ne va pas le trahir. Il paraîtrait que Blu pencherait vers le parti d'opposition, or Blu constitue une épée de Damoclès sur la tête de Président : c'est lui qui s'est débarrassé du corps de l'ancienne épouse.

Bela est Basque, et elle prépare une mission d'importance qui doit se dérouler à Castets, dans les Landes. Un enlèvement d'enfant, une gamine qui est la fille d'un notable, car Bela et ses amis, ceux qui vont l'aider dans cette opération, ont des revendications. A Mourenx première bavure. Bela et ses sbires abattent deux policiers un peu trop curieux. Ensuite, si l'opération enlèvement est menée de main de maitre, à cause d'une robe rouge et d'une robe bleue le résultat escompté n'est pas au rendez-vous. Il y avait bien deux fillettes, se ressemblant presque comme des jumelles, et bien évidemment Bela et ses lascars se sont trompés de gamine.

Sami participe à un stage de préparation militaire afin de pouvoir entrer dans la presse des armées. Il n'est pas seul, il est accompagné de Ben et de Santiag. Mais les examens tournent en eau de boudin, il sait qu'il va être recalé. La note technique ne va pas être bonne, puisqu'ils n'ont pas réussis à échapper à leurs poursuivants, une guérilla modèle réduit qui tourne en fiasco. Justement c'est le Colonel Blu, responsable du GIGN, qui doit valider les résultats des heureux vainqueurs.

C'est le moment de présenter Isora, l'amie du Blu, qui a réintégré le groupe du GIGN. Elle est devenue sourde et muette à la suite d'une opération qui a tourné en bavure, comme souvent, mais personne ne s'en vante. Surtout pas Hugo, son amant qui a morflé une grenade, grenade dont la déflagration a ôté deux sens à la jeune femme. Elle n'aura plus le plaisir d'écouter le Carnaval des animaux, à la rigueur Danse macabre, d'un certain Camille qui avait ses cinq sens.

 

Le meurtre des deux policiers et l'enlèvement de la gamine sont deux événements qui au départ, dans l'esprit des policiers, sont à dissocier. Mais bientôt ils réalisent que tout se tient, et commence la chasse à l'homme, à la femme dans ce cas, et aux activistes d'une branche séparatiste basque.

Et c'est comme ça que les limaces vont se rencontrer, sans s'être donné le mot, sans se concerter.

Jan Thirion nous livre une fois de plus un roman jubilatoire, ancré dans une certaine actualité, jouant avec les situations, les personnages, leurs défauts, plus que leurs qualités, surtout pour certains d'entre eux, leurs tics, leurs TOC, leurs faiblesses, leur arrogance, le tout englué dans l'humour. Car la parabole de la limace, animal Sans Domicile Fixe contrairement à son cousin l'escargot qui, paranoïaque, se trimbale continuellement avec sa bicoque sur le dos, tient une grande place dans ce roman vertueux. La limace ne sert pas uniquement de ressort pour un titre, ou à des divagations d'un vieillard à la fibre écologique, elle justifie la fin et les moyens.

La dérision et la causticité n'arrivent pas à masquer la gravité du propos et une fois de plus on ne peut que s'ébaubir, s'ébahir et s'esbaudir devant le talent de Jan Thirion.

 

Quelques suggestions de lecture :

Jan THIRION : 20 manières de se débarrasser des limaces. Editions Lajouanie. Parution le 9 octobre 2014. 364 pages. 18,00€.

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Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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