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29 avril 2014 2 29 /04 /avril /2014 08:18

Bon anniversaire à Pascale Fonteneau née le 29 avril 1963.

 

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Ce n'est vraiment pas une vie de rester coincé‚ des heures, des journées entières, dans une boîte entre une grenade et une kalachnikov, même l'on est un couteau. Car le héros de cette histoire est un poignard. Une lame qui possède sa fierté, et ne veut pas être reléguée au rang d'ustensile de cuisine.

L'Homme de goût, son propriétaire, prête l'arme à l'Homme sauvage qui s'en sert pour occire un couple, signant son double meurtre des initiales P.R. Retour à la case départ pour le poignard qui vit enfermé durant quelques jours dans un tiroir.

Puis nouveau voyage dans une mallette en compagnie de liasses de billets et nouvelles retrouvailles avec l'Homme sauvage. Le poignard revit à l'air libre, au milieu de terroristes appelés la Rouquine, l'Erudit, ou encore le Rigolo. Une petite troupe de révolutionnaires dont l'homme sauvage est implicitement le chef. Leur première opération est dirigée contre une station de pompage d'eau desservant une caserne et une gendarmerie. Ils se contentent d'ajouter un colorant au liquide puis s'en vont en badigeonnant des P.R. sur les murs.

La deuxième opération du commando dans une boite de nuit se solde par quelques victimes, chez les assaillis. La virée se termine par des séances de bombages, toujours signées P.R. Lorsqu'ils rentrent dans leur cabane en pleine forêt, l'argent a disparu. La suspicion règne dans le groupe, mais déjà ils pensent à une prochaine action.

etat-de-lame2.jpgCe roman ne serait qu'une banale histoire de terroristes si Pascale Fonteneau n'avait voulu ajouter un certain piquant à l'intrigue en prenant comme héros un objet, en l'occurrence un poignard et en le faisant parler à la première personne. Impressions, relations avec l'être humain, répulsions, obsessions même, toute la gamme des sentiments défile et se trouve exposée en premier plan à l'instar d'un personnage de sang et chair confronté à une coexistence imposée. Tout comme dans son premier roman, elle privilégie l'exercice de style un peu au détriment de l'intrigue mais en même temps apportait un ton nouveau à la Série Noire.

Les initiales P.R. dont se réclament les terroristes peuvent aussi bien signifier Parti Révolutionnaire que Patrick Raynal qui était à l’époque directeur de collection à la Série Noire.


Pascale FONTENEAU : Etats de lame. (Première édition Série Noire N°2325 - Septembre 1993). Réédition Le Masque Poche janvier 2008. 188 pages. 6,10€.

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28 avril 2014 1 28 /04 /avril /2014 13:27

Entrez dans l'univers onirique et musical des fantômes de Manhattan...

 

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Certains métiers se transmettent de père en fils, ou filles : maçons, cuisiniers, ébénistes... La famille Kilpatrick ne déroge pas à cette tradition, depuis la fin du XIXème, lorsqu'un ancêtre irlandais avait débarqué à Staten-Island. Pourtant c'est un peu par hasard que Lisa est devenue policière. Car elle se destinait à une carrière de musicienne, un débouché artistique encouragé par ses parents. Mais la mort de son père, poignardé par un petit truand, a changé la donne. Sa mère n'étant pas fortunée, Lisa a dû interrompre ses études. Faire bouillir la marmite, c'est facile, à condition que les ingrédients nécessaires à l'alimentation quotidienne soient déposés dedans.

Grâce à ses relations elle est entrée elle aussi dans la police new-yorkaise et depuis quatorze ans elle traque les assassins. Et souvent des images de femmes mortes viennent squatter son esprit comme ce soir là. Celle de la jeune fille sauvagement assassinée et retrouvée la veille avec dessinés sur le ventre deux immeubles et entre les seins un soleil.

Sa journée n'est pas finie, car Lisa a une double vie. Lors d'un anniversaire, sa mère lui a fait la surprise en lui offrant un piano. Sa passion pour la musique s'est réveillée et un soir, alors qu'un piano dans un bar lui tendait ses touches noires et blanches, elle s'est prise au jeu. Et depuis, une fois ou deux par manhattan3.jpgsemaine, à la plus grande joie des consommateurs de plus en plus nombreux, elle se produit dans un bar. C'est justement sur le chemin de son rendez-vous musical que Lisa va connaître un moment fort de son existence. Car elle a oublié qu'en ce 28 mai se produit un phénomène qui n'a lieu que deux fois par an. Le Manhattanedge, c'est à dire lorsque le soleil à son couchant est juste dans l'axe entre deux rangées d'immeuble dans le prolongement de la 14ème rue. Tout d'abord elle ne comprend pas cet attroupement de personnes et pense à une manifestation. Elle ressent comme un étourdissement et lorsqu'elle revient à elle, la foule s'est clairsemée et le soleil a disparu. Derrière elle entend : Bonjour Lisa. Ce n'est juste que Peter Monaghan qui vient de la saluer. Sauf que Peter est décédé trois ans auparavant.

Et ce qu'il lui demande relève de l'incompréhension la plus totale. Il l'emmène en taxi au Madison Square Garden et en cours de route lui explique qu'il a besoin, lui et ses compagnons, des services de Lisa. John Lennon a disparu depuis deux ou trois jours !

 

Cette nouvelle superbement illustrée des photos de Mickaël Laguerre, dont texte et iconographie sont en parfaite adéquation, à se demander si la nouvelle n'a pas été rédigée d'après justement les photos, cette nouvelle donc devrait pouvoir fournir une ébauche de roman. En effet ce ne pourrait être qu'un épisode dans la vie de Lisa Kilpatrick, et bien d'autres pistes juste évoquées devraient être plus profondément développées. Par exemple l'enquête sur la mort de cette jeune femme dont le ventre est orné de dessins étranges. Quoi qu'il en soit, cette nouvelle est agréable, flirtant entre roman de déduction et fantastique musical puisqu'on y retrouve des figures célèbres, dont les fantômes de John Lennon, Charlie Parker, Billie Holiday et quelques autres dont je préfère taire le nom afin de vous laisser la surprise de la découverte.

Voir également ma présentation avant parution.


Philippe WARD & Mickaël LAGUERRE : Manhattan Ghost. Collection Art Book N°8. Editions Rivière Blanche. Parution avril 2014. 60 pages. 10,00€.

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27 avril 2014 7 27 /04 /avril /2014 12:41

Bon anniversaire à Dider Daeninckx né le 27 avril 1949.

 

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Ancien journaliste, François Novacek s'est reconverti comme détective privé. Deux professions qui comportent bon nombre de similitudes: investigations, recherches, dénonciations de magouilles et de turpitudes. Novacek est un peu comme le chien de chasse à renifler et à débusquer les petites saloperies émises par ceux qui se sentent forts, détournant la loi à leur profit.

Nina, une vieille amie qui autrefois a travaillé avec lui à Libération, fait un jour sa réapparition dans le bureau de Novacek. Son mari, Frédéric Doline, qui œuvrait dans la littérature de fiction et dont le talent émergeait enfin, a disparu lors d'un voyage en République Tchèque. Pour Novacek, c'est un peu le retour aux sources, puisque son père a émigré en France en 1954, alors qu'il jouait au football dans l'équipe de la police politique.

boheme3.jpgUn sien ami, handicapé, spécialisé dans le piratage informatique, interroge les micro-ordinateurs, visitant le passé de Doline.

Novacek visite Prague et se renseigne, notamment dans une boutique confite en anciens dans le Prague séculaire. De vieux fanzines de 1989 révèlent que Doline possédait des attaches avec une nébuleuse association internationale des écrivains de mystère, présidée par un Russe. Seulement un inconnu s'attache à ses pas. Il obtient le concours d'un ancien stagiaire de Libération, journaliste à la nouvelle presse libre de Tchéquie, mais il finit par se demander s'il peut lui faire confiance.

 

Au delà de l'histoire, ce roman de Didier Daeninckxpermet à l'auteurbohême2 de fouiller dans le passé. La transition politique s'est effectuée en douceur, mais l'est-elle en profondeur ? C'est aussi l'occasion pour Didier Daeninckx de clarifier certains points obscurs qui ont été soulevés quelques années auparavant sur l'existence d'une internationale des écrivains de romans policiers et qui avait tenu une réunion justement à Prague.

Enfin il nous propose une balade dans les rues de Prague, avec pour décor les manifestations d'un néo-capitalisme voyeur. Et la jubilation de lire quelques maximes inscrites sur les urinoirs, telle celle-ci: "Si le communisme est la réponse, je me demande bien qu'elle était la question."

 

A lire également de Didier Daeninckx : Voiles de mort, On achève bien les disc-jokeys, La prisonnière du Djebel et La sueur d'une vie.

Didier DAENINCKX : Un château en Bohême. (Première parution éditions Denoël - septembre 1994). Réédition Folio Policier. Parution le 24 juin 1999. 222 pages. 6,20€.

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26 avril 2014 6 26 /04 /avril /2014 14:46

Et c'est arrivé aussi hier et demain...

 

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Correspondant français à Pékin pour l'hebdomadaire parisien Temps Moderne, Marc B. est en poste depuis 1981, juste après le décès de ses parents. Il s'est même fait un nom grâce à un reportage, signé sous un pseudonyme anglo-saxon afin de préserver son identité. Jusqu'en 1989 il a envoyé régulièrement des papiers sur la vie quotidienne des Chinois, mais aussi des articles de fond sur la campagne de lutte contre la criminalité et la pollution spirituelle. Son heure de gloire est arrivée lorsqu'il réussi à prendre des photos d'exécutions publiques dans un stade.

Sa vie va basculer en couvrant les événements du Printemps de Pékin en 1989. Il rencontre deux étudiants, Jade et son ami Peuple, qui manifestent. Tous deux sont petits, rondouillards, portent des lunettes rondes noires et épaisses. Bref pas de quoi s'affoler le cœur. D'autant que Jade possède la particularité deux doigts de la main gauche, l'annulaire et l'auriculaire, palmés. Pourtant ils sympathisent. Marc B. connait le chinois et le coréen tout comme Jade, et cela leur permet de s'exprimer en public sans être compris par des intrus. Elle se destine à une carrière de juriste, tandis que Peuple étudie la médecine.

Le 13 mai 1989, les étudiants entament une grève de la faim. Peuple y participe mais pas Jade. Elle est chargée par son organisation de collecter des fonds d'aide et coordonner les étudiants en province. Le rédacteur en chef de Marc B. lui conseille de la suivre. Le 17 mai direction Chongqing, puis direction Canton. Et Marc B. rate le massacre de Tiananmen du 4 juin 1989, et par la même occasion sa passion pour le journalisme se fane. Ils ne peuvent pas rentrer à Pékin, le père de Jade, qu'elle a réussi à avoir au téléphone, l'affirme. Quant à Peuple, il est parvenu à s'échapper et est à une distance raisonnable des autorités policières.

Marc B. et Jade vont donc séjourner à Canton, puis se réfugier sur l'île de Hainan. Jade transporte avec elle une fortune, récoltée auprès des sympathisants étudiants, mais elle ne veut pas y toucher. Marc B. possède un petit pécule, il renouvelle son visa à Hong-Kong et ils vont ainsi patienter sur l'île en attendant des jours meilleurs. Leur cohabitation, même s'ils ne logent pas au même endroit, n'est pas sans conséquence. Marc B. se rend compte brusquement que la Jade qu'il côtoie n'est plus la même. Elle a coupé ses cheveux et porte des lentilles de contact au lieu de ses grosses lunettes, depuis le début de leur cavalcade. Mais surtout elle s'est affinée, a perdu une vingtaine de kilos, et est devenue très séduisante. Bref, leurs sentiments amoureux sont réciproques et ils vont se marier grâce à l'entremise bienveillante d'un policier, car en Chine, on ne couche pas ensemble avant d'avoir un certificat prouvant leur union. Et le nom de Jade est légèrement transformé.


boulet3.jpgCommence une nouvelle ère de voyages, qui les emmèneront jusqu'à Lhassa, avec en cours de route des impondérables qui prennent corps sous la forme de chauffeurs de camions, qu'ils ne reverront pas, puis retour à Pékin le 20 juillet 1990. La loi martiale a été levée, ils se marient officiellement et malgré le pécule de Jade, auquel elle ne veut pas toucher, Marc B. travaille chez un petit trafiquant en tout genre. Les années passent, Marc B. découvre Internet et en 2001 Peuple les contacte. Lui aussi a bien changé. Il est devenu chirurgien à Shenyang. Il leur propose de venir le rejoindre car il a n travail à leur proposer. Jade se chargera de la partie administrative et comptable, Marc B. créera un site internet et lui opérera.

Il leur présente son projet : fournir aux Européens et aux Américains la possibilité de se faire transplanter des organes, pour un prix relativement élevé mais moins cher que chez eux, avec un bon de garantie. Les organes vitaux, cœurs, foies, reins, poumons ne manquent pas. Bien sûr il peut prélever ces organes sur des personnes accidentées, mais aussi sur des condamnés à mort. Et la manne est conséquente, les clients affluent, le magot de Marc B. et de Jade grossit à vue d'œil.

Seulement Marc B. grâce à Internet s'est trouvé un point d'abcès qu'il veut crever le plus rapidement possible. Il y pense sans cesse jusqu'au jour où il va réaliser son dessein qui est pour lui une obsession. Se rendre à Shambhala, dont il a découvert l'existence en farfouillant sur son ordinateur. Shambhala est un lieu mythique, qui donnerait accès au monde de la Terre Creuse, seulement il lui faut trouver ce trou de ver qui lui permettra d'y accéder. Marc B. est persuadé de son existence, d'ailleurs sa phrase fétiche n'est-elle point : Jusqu'à preuve du contraire.

 

Le personnage de Marc B., c'est un peu Marc Boulet lui-même,boulet1 puisqu'ils possèdent de nombreux points communs. Journaliste indépendant, Marc Boulet a vécu en Chine, se faisant d'abord passer pour un Chinois au milieu des années 80 puis vivant au sein de sa belle-famille chinoise dans les années 1990. Aussi il se sert de son expérience pour narrer les aventures de son double, qui apparaît également dans Le Roi de Pékin et Contrebandiers mais sous une forme différente. Toujours le même et pourtant à chaque fois différent. Dans Le Roi de Pékin, Marc Boulet met en scène un personnage féminin qui se prénomme Jade. Les interférences sont nombreuses d'ailleurs entre ces deux romans qui pourtant divergent dans le fonds.

Le souci de Marc Boulet est de montrer, démontrer l'évolution de la société chinoise depuis la révolution culturelle, évolution politique, économique, mais également des mœurs. De prendre à revers ce que Alain Peyrefitte avait écrit dans son essai Lorsque la Chine s'éveillera, et mettre en évidence tous les changements qui se sont produits sans que nous Européens, nous en rendions compte vraiment. Evidemment l'idée que nous nous en faisons est dictée par les images qui nous en sont retransmises, celles des grandes cités qui concurrencent les mégapoles occidentales. Mais il revient également sur le Printemps de Pékin, dont l'image forte qui a marqué nos rétines est celle de ce jeune homme arrêtant à lui seul les chars sur la place Tiananmen. Et Marc Boulet pose le problème des transplantations d'organes.

boulet2Roman double comportant de nombreuses parties documentaires, mais également roman initiatique avec cette soif de découvrir un lieu mythique nommé Shambhala, qui par ailleurs fait l'objet d'une notice que vous pouvez découvrir ici. Et vous pouvez également rechercher Annunaki statue par exemple. Un peuple d'extraterrestres qui aurait colonisé la Terre afin d'y extraire du minerai d'or pour des raisons de survie. Mais cela se passait il y a déjà quatre cent cinquante mille ans.

Ce nouveau roman de Marc Boulet est original à plus d'un titre et sa lecture est envoûtante.

 

 

Marc BOULET : C'est arrivé en Chine. Rivages/Noir N°965. Editions Rivages. Parution le 2 avril 2014. 384 pages. 8,50€.

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25 avril 2014 5 25 /04 /avril /2014 13:36

Pour quelques bêtises de plus !

 

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Avait-il senti le vent du boulet passer sur la profession de juge d’instruction, nul ne peut le dire, car l’action se déroule en 1983, mais Robert Delarue avait démissionné de sa charge et s’était reconverti comme critique littéraire sept ans auparavant.

Il avait quitté Paris pour rejoindre Cambrai d’où est originaire sa femme Mireille, exerçant la profession de dentiste. Delarue s’occupe donc, modestement, de tenir la maison et de préparer les repas. Le mardi soir, alors que Mireille se détend à la piscine, il promène Jules (référence à Maigret ?), le chien, papote avec l’une de ses voisines, Danièle, avocate, ce qui les rapproche un peu plus, en tout bien tout honneur cela va de soi, qui fait également le tour du pâté de maison afin de dégourdir les pattes de son corniaud Héloïse, de la gente canine également, ne vous méprenez pas.

Depuis quelques temps Delarue a remarqué l’étrange manège d’une autre voisine, belle blonde élancée, qui rejoint un homme l’attendant dans une voiture blanche. Sans nul doute un rendez-vous galant. Delarue est de plus en plus intrigué lorsqu’il se rend compte qu’une fourgonnette suit le véhicule des amants supposés. Une diversion dans la vie calme et rangée de Delarue qui bientôt va s’atteler à une tâche qui ne lui déplait pas : enquêter sur un meurtre. Celui du conducteur de la voiture blanche dont le corps est retrouvé dans le coffre de son véhicule. Alors qu’il était encore juge d’instruction, Delarue avait eu parmi ses « clients » l’homme qui a pour résidence, à son corps défendant, l’habitacle arrière de son véhicule, ce qui le conforte dans cette envie de se plonger dans des recherches peut-être aléatoires.

Entre histoire d’amour contrariée et coup de griffes à la société bourgeoise représentée par des industriels et des entrepreneurs, ce roman pourrait être catalogué comme une revisite des univers de Barbara Cartland et d'Emile Zola. D’accord j’exagère, mais il y a un peu de ça. Le côté fleur bleue interdit, l’homme, le père s’étant depuis des siècles et jusqu’en 1980 érigé en tyran du foyer.

Et ce n’est pas une caricature, c’est une réalité rurale et provinciale, un dogme qui persiste encore aujourd’hui. « Tu devrais dire ce qu’a décidé mon père, à ma place et sans me consulter » mais il existe heureusement des rébellions tardives : « Partager ton lit me donnerait l’impression de dormir avec mon père ! ».

Celui qui montré du doigt c’est l’homme qui s’insurge contre les progrès sociaux, qui enfreint allègrement le droit du travail, et s’indignait encore en 1970 « scandalisé qu’on ait accordé le droit de vote aux femmes ». Le pater familias dans toute sa splendeur, gérant la vie de sa femme et de sa fille comme si elles étaient ses esclaves, des potiches placées pour le décor et qu’on manipule comme de vulgaires objets. Des chefs de PME qui se réunissent en petites associations fascisantes, dénués de tout scrupule, et ne comprenant pas que des employés, et les membres de leur famille ont envie de se rebeller. Un livre qui sous des dehors gentillets soulève le coin du voile, là où l’ordure pousse.


Marc FOUREZ : Retour à Cambrai. Collection Polars en nord N° 57. Parution janvier 2010. Editions Ravet-Anceau. 224 pages. 9,00€.

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24 avril 2014 4 24 /04 /avril /2014 12:53

Un roman pas si Bénin que ça !

 

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Les consommateurs du bar Kama Sutra de Porto Novo tirent tous la langue comme le loup de Tex Avery devant la prestation de Pati, la danseuse-effeuilleuse. Stéphane n'est pas le dernier à avoir les yeux montés sur ressorts horizontaux. Et il n'hésite pas à demander une faveur complémentaire, celle de pouvoir échanger avec Pati leurs phéromones chez lui à Tokpota, un quartier de la capitale béninoise.

A la sortie du bar, un véhicule qui semblait les attendre, mais n'est pas un taxi, fonce, pile, et malgré les jambes de Pati qui déroulent sur l'asphalte, des hommes s'emparent de la danseuse qui n'a plus envie de s'exhiber. Stéphane, en homme galant, veut s'interposer et pour récompense reçoit quelques gnons qui l'envoient au pays des rêves. Pourtant c'est un ancien judoka.

musaraigne1.jpgLorsqu'il revient à lui, sa première pensée va à son portefeuille. Non, il n'est pas abîmé par les coups reçus, il n'a pas été vidé non plus. C'est alors qu'une voix rauque s'inquiète de son sort. Une jeune femme qui lui propose de l'aider. Elle se nomme Déborah Parker, et prétend avoir été aide-soignante dans une autre vie. Arrivés chez lui, elle bichonne ses plaies, et Stéphane, toujours galant et honnête, veut la rétribuer. Non, elle refuse. Au contraire c'est elle qui va lui donner quelques coupures, en dollars américains s'il vous plait, pour pouvoir être hébergée. Donc ils partagent l'appartement spacieux de Stéphane, chacun chez soi, car malgré les massages prodigués ils ne sont pas encore arrivés au stade de l'intimité où un seul lit suffit. Profitant par inadvertance que Déborah est absente, il jette un œil sur ses affaires. Elle possède une peluche, une tigresse, au ventre rebondi. La tigresse est enceinte de beaux et bons billets de banque !

Déborah pensant faire plaisir à Stéphane en ramenant Pati, quelque peu délabrée, revient donc avec la danseuse mais Stéphane n'est plus d'accord. Déborah reconduit sa copine et c'est le moment choisi par des individus pour s'infiltrer chez le Breton. Il a encore droit à quelques massages fortement appuyés, genre crochets du droit, uppercuts et manchettes, mais il a du répondant. Cela sert de biberonner parfois car grâce à deux bouteilles qui traînaient sous son lit, et tant pis pour la consigne, il se défend vaillamment. Tant et si bien que l'un des assaillants retourne au pays de ses ancêtres plus vite qu'il le pensait. Alors Déborah prend la décision définitive et sans appel, sans tergiverser, de partir à bord d'une voiture déglinguée mais roulante, avec Stéphane à bord. Direction là-bas, plus loin. Car elle a une idée en tête Déborah, sauver sa peau, sauver sa tigresse, et se marier avec Stéphane. Lorsque le vrai faux certificat de mariage, un mariage blanc, sera établi il se verra offrir une consommation gratuite à déguster sur place avec renouvellement si affinité.


Stéphane est natif de Guingamp, il a déjà roulé sa bosse un peu partout et il a débarqué un beau jour à Cotonou avec comme bagages le statut de poète reconnu par ses pairs. Il n'est pas riche mais pas pauvre non plus. Il se débrouille et ça lui suffit. Mais pour le moment le voilà embarqué (ça se dit quand on est en voiture ?) avec Déborah.


Jésus Light est un Ghanéen qui a dû fuir son pays car il est recherché. Il a fait une grosse bêtise. Il a dévalisé un établissement bancaire, déjà c'est grave car ces gens là n'aiment qu'on leur prenne l'argent qui leur est confié et qu'ils savent dilapider comme des grands sans avoir besoin d'aide extérieure. Seulement les compagnons de Jésus Light se sont retrouvés avec du plomb dans le corps en guise d'or, et sa compagne, son amie, sa femme, sa musaraigne (sa muse à règne ?) Paméla leur a fait faux bond. Vraiment pas sympathique de sa part puisqu'elle s'est envolée avec la part de tous. Et Jésus Light s'est retrouvé tout nu comme au premier jour de sa naissance. Alors il recherche activement Paméla pour lui apprendre à vivre et récupérer son bien indûment subtilisé.

Ce pourrait s'arrêter là, mais un groupuscule djihadiste, issu d'une mouvance proche de Boko Haram et en provenance du Nigéria, s'est mis en tête de prendre en otages des ressortissants européens pour des raisons qui leur sont propres.

 

Les lecteurs compulsifs de romans policiers, penseront comme moi, musaraigne2.jpgque ce genre de situations, un pauvre gars naïf dépassé par les événements et en cavale avec une femme entêtée et sublime, un truand qui s'est fait truandé par une compagne partie avec son argent malhonnêtement gagné, ont déjà été traités moult fois et même plus. Je pense notamment à des auteurs américains comme Day Keene et quelques autres. D'ailleurs il est à noter que 1275 âmes de Jim Thompson a été adapté au cinéma par Bertrand Tavernier sous le titre Coup de torchon, le réalisateur déplaçant l'intrigue originale du Sud des Etats-Unis pour la situer en Afrique Noire. Mais je digresse. Donc se greffe dessus cette histoire de preneurs d'otages qui apporte le sel qui irrite les plaies africaines déjà bien ouvertes.

Plus que l'histoire, intéressante en soi, c'est le langage narratif nimbé de poésie de Florent Couao-Zotti, barde trublion, qui envoûte le lecteur. L'emploi de métaphores harmonieuses, de maximes et proverbes usuels ou inventés, de titres de chapitres savoureux, de dialogues huilés et épicés, et de néologismes si évidents que lorsqu'on les découvre, on se demande pourquoi personne n'y a pensé avant, est à déguster comme une friandise.

Florent Couao-Zotti est un griot, racontant une histoire déjà connue mais en l'enjolivant. Elle n'est plus la même, semblable et identique et différente tout à la fois. C'est ainsi que l'on retrouve les vrais conteurs électriques.


Voir également l'avis de Claude Le Nocher sur Action Supense, ainsi que celui de YV

 

Florent COUAO-ZOTTI : La traque de la musaraigne. Collection Polar Jigal, éditions Jigal. Parution le 15 février 2014. 216 pages. 17,00€.

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24 avril 2014 4 24 /04 /avril /2014 09:02

Bon anniversaire à Franck Pavloff né le 24 avril 1940.

 

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Ancien photographe à l'agence Sygma, Julien Garec troque sa boîte noire pour un stylo. Il est chargé d'écrire un papier sur les travaux des Olympiades d'Athlétisme de Grenoble pour le compte d'un journal sportif dirigé par son copain Paulo. Il crèche dans un troquet tenu par des jumeaux Libanais, rendez-vous des accros de la course à pied.

Un semi-marathon des berges est organisé et les concurrents grognent contre la participation de Kényans, arrivage direct de Londres et même pas affiliés à la FFA. Une demi-heure après le départ, l'un des Africains qui était en tête, tombe à la baille.

Certains l'ont vu s'affaisser sur le parapet, d'autres pensent à une bousculade. C'est un cadavre que les pompiers repêchent et dirigent sur une clinique privée. Dans les relents sulfureux crachés par les cheminées des usines chimiques, Garec renifle des odeurs de paris clandestins, de suspicion de dopage.

Dans le chantier du nouveau stade, il repère d'autres Kényans, parqués dans une baraque, immigrés sans papiers surveillés par un de leurs frères, un ancien champion. Le journaliste est prié de dégager, mais il a mis le bras dans l'engrenage. D'autant qu'il aggrave son cas en recueillant un adolescent blessé que ses hôteliers refusent d'héberger. Garec pensait donner un coup de pied dans la fourmilière, c'est un nid de frelons qui lui tombe sur le crâne.


pavloff2Utilisant son stylo comme d'un Laguiole (un vrai, pas un succédané fabriqué en Chine), Franck Pavloff taille dans le vif, d'une écriture incisive. Les mots sont catapultés sur le papier, mais le tout ne manque pas de poésie. Il est dommage que Franck Pavloff se sert plus du langage parlé que du langage écrit, car certaines tournures grammaticales vont faire hérisser les cheveux d'enseignants. Et s'ils étudient le texte dans les lycées, ils risquent plus de s'attarder sur la forme que sur le fond.

 

 

 

Franck PAVLOFF : Foulées noires. Collection Instantanés de Polar, Editions Baleine. 182 pages. 9,00€.

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23 avril 2014 3 23 /04 /avril /2014 12:20

Ecologique ? Echo logique !

 

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Dépanneur en tout genre, installé à son compte comme auto-entrepreneur, Julien Robert, plus communément surnommé Bob, sait aménager son temps afin de privilégier ses autres passions que sont la photographie, la musique et la lecture. En ce chaud jour de juillet il est parti à la chasse aux images sur les bords de la Moselle non loin du petit village de Gerville aux Miroirs, surnommé ainsi à cause des étangs qui reflètent le ciel comme un... miroir.

Il découvre à moitié enfouie sur les berges de la rivière une mallette qui contient un tas de papiers salis et à moitié effacés ainsi qu'une clé USB.

Quatre mois auparavant, le corps d'un homme noyé a été retrouvé sur les berges de la rivière, à Chalons sur Moselle, en amont de Gerville. Le cadavre a été emmené à Nancy aux fins d'identification. Il semblerait qu'une fois de plus le légiste se trouve en face d'un suicide, sauf que le noyé n'a pas d'eau dans les poumons. Un meurtre alors ? Après vérifications l'homme est décédé d'une crise cardiaque puis est tombé à l'eau. Il reste toutefois à déterminer dans quelles conditions. Ce qui sera établi un peu plus tard. Mais qui est cet homme ?

Léna, journaliste à la Fraternité, l'un des deux journaux de la région qui se faisaient concurrence mais qui depuis leur rachat par une banque (des institutions qui l'air de rien possèdent beaucoup d'argent) délivrent les mêmes marronniers, puisés dans les agences de l'AFP. Léna est encore jeune, et croit en son métier de reporter. Son ami Marc, lieutenant de police à Nancy, lui apprend que le noyé se nomme Benjamin Durand. Il émargeait comme ingénieur à la DREC, Direction Régionale de l'Environnement et des Conservatoires. Léna se souvient l'avoir rencontré l'année précédente à Avrimont, bourgade sise non loin de Chalons sur Moselle. Il était intervenu lors de l'assemblée générale d'une association de défense contre un centre de traitement des déchets.

Impulsive Léna se rend immédiatement à Metz dans les locaux de la DREC et à défaut de pouvoir rencontrer le directeur parlotte avec une jeune fille aux yeux rouges devant la machine à café. La collègue de Benjamin, visiblement attristée par cette disparition, lui apprend que Benjamin, spécialisé en hydrologie, n'avait pas le caractère suicidaire mais surtout que passionné d'environnement et syndicaliste, il était sans concession envers ceux qui, ce sont ses propos, n'hésitent pas à contourner les règlements pour s'enrichir au détriment de la planète, et qui ne paient même pas d'impôts.

Pendant ce temps Bob essaie de percer le mystère de la clé USB qui ne veut rien dire. Il compulse également un carnet d'adresse ainsi que les papiers. Parmi ceux-ci un article découpé dans le journal la Fraternité. Aussitôt sa décision est prise. Il va se renseigner auprès de la journaliste qui n'est autre que Léna. Tous deux sont intrigués par ces papiers et les imbrications possible entre la DREC et la société Delaware Environnements. Delaware veut transformer une clairière en site d'enfouissement des déchets et des études ont été réalisées. Apparemment tout semble en règle sauf que des anomalies suscitent leur attention. Des carottes de prélèvement ont bien été effectuées afin de déterminer si l'endroit choisi était apte être creusé puis à recevoir des déchets de toutes sortes. Mais selon les documents de l'ingénieur, quelques carottes auraient été... carottées. Il en manquerait une dizaine qui n'ont pas été répertoriées par la DREC. Le début d'une enquête de terrain qui va laisser des traces.

Le mystère du noyé n'est qu'un prétexte pour l'auteur à explorer des pratiques contraires à l'écologie. Tout est bon pour falsifier ou enterrer des preuves afin qu'une société puisse se faire son beurre sans grand investissement. Ou, si investissement il y a c'est de la poudre aux yeux. Et la plupart du temps, les autorités compétentes sont roulées dans la farine. Comme le dit si bien un des protagonistes: La corruption est un très vilain mot qui a de moins en moins court dans nos chers pays civilisés. Désormais il faut parler de lobbying, un combiné de cynisme, d'influence de la part du porteur de projet et de complaisance du côté des représentants des décideurs, voire des élus eux-mêmes puisqu'il s'agit souvent de dossiers d'intérêt public... Pour finir, le lobbying coûte aussi cher que la corruption pour aboutir au même résultat, mais il est, comme on dit, politiquement beaucoup plus correct.

Et la démonstration concernant les liens étroits entre les journaux de province et nationaux et le poids financier de leurs annonceurs n'est plus à démontrer. C'est ainsi que Lena se voit refuser son article par la direction du média papier, car elle met en cause la société Delaware. Or cette société est le plus gros support financier du journal et donc il serait indécent d'écrire des articles qui ne soient pas louangeurs.

Selon la mise en garde rituelle, Ce livre est une fiction, toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes ou ayant existé seraient fortuites.

Or ces situations fortuites ne sont pas une invention, je les ai rencontrées. Et pour le lecteur curieux il peut taper sur son moteur de recherche Site d'enfouissement des déchets de Nonant le pin (Orne). Une polémique concernant la création d'un site d'enfouissement par la société GDE oppose manifestants écologiques à l'administration, maire et préfet en tête. Or il semblerait que l'enquête ait été bâclée, que toutes les règles n'aient pas été respectées. Moi, ce qui m'étonne, c'est que les déchets produits par des zones urbaines soient envoyés pour traitement ou enfouissement dans des zones rurales. Ou alors, il n'y a plus qu'à cultiver les champs et laisser paître le bétail dans les villes.

La trame policière est mince, mais le lecteur est prévenu en quatrième de couverture : ce roman est avant tout un roman d'alerte écologique révélateur.


J.M. BRICE : Infiltration. Collection Borderline. Editions Territoires Témoins. Parution 2 avril 2014. 160 pages. 15,00€.

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23 avril 2014 3 23 /04 /avril /2014 09:35

Bon anniversaire à Pascal Quignard né le 23 avril 1948.

 

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A la fin des années 40 la petite ville de Meung est dominée par la présence des forces américaines de l'Otan et du Shape.

Patrick Carrion, le fils du vétérinaire, et Marie José Vire, la fille du quincaillier-épicier de la bourgade, sont tous deux plus ou moins délaissés par leurs parents. Ils conjuguent leur solitude dans leurs jeux d'enfants, se réfugient sur une petite île de la Loire, se jurent de s'aimer.

Ils récupèrent dans les poubelles américaines des bouteilles vides de Coca Cola, des bandes dessinées qu'ils déchiffrent avec peine, de petits trésors qu'ils emportent sur leur îlot. Au fil des ans Marie José prend l'ascendant sur Patrick que sa libido commence à travailler. Mais elle se refuse à se prêter aux jeux interdits.

Un soir de février 1959 - Patrick a 18 ans - il hante à vélo les environs de Meung. Sa première expérience sexuelle a avorté et Marie José dégouttée de son aide manuelle déclare que ce n'est pas cela l'amour.

Il se frotte aux communistes qui badigeonnent de peinture blanche d'un US GO HOME rageur les murs de la maison paternelle. Au cours de l'algarade qui s'ensuit il est blessé et recueilli par deux GI'S. Lorsqu'il sort de son évanouissement son premier regard est pour Trudy, la fille de l'un des militaires.

Sa vie change au contact des Américains. Il se passionne pour le jazz et ses relations avec Marie José se délitent peu à peu. Un conflit permanent d'autodestruction les anime et leur amour se confond entre sentiment et refus de la part de la jeune fille de céder à la pression charnelle de Patrick.

 

Cette chronique est une étude de mœurs provinciales et l'affection juvénile entre deux enfants qui s'engluent dans une adolescence étriquée. L'espérance, le rêve viscéral de découvrir les USA et les désirs contrariés de Patrick, le dégoût de Marie José pour le sexe cadence leur adolescence. Un roman qui suinte la nostalgie.


Pascal QUIGNARD : L'occupation américaine. Première parution Editions du Seuil décembre 1994. Réédition Point Seuil. Février 1996. 210 pages. 5,60€.

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22 avril 2014 2 22 /04 /avril /2014 12:08

Quatre boules de cuir...

 

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Certains sports semblent réservés aux cabossés de la vie, à ceux qui doivent démontrer qu'ils existent, ou à ceux qui veulent combattre le mauvais sort qui s'acharne sur une catégorie de petites gens, de rejetés de la société, de relégués aux oubliettes. Ces personnes, des adolescents en général, pensent devoir faire leur preuve en combattant, en se servant de leur poings, mais en toute légalité et selon un code préétabli possédant ses règles écrites.

Ainsi la boxe, qui est un sport pratiqué depuis que l'homme sait se servir de ses poings, et dont le marquis de Queensberry a édicté les règles en 1865, même si lui a été conférée l'appellation de Noble art, est plus souvent réservé aux représentants des couches dites défavorisées.

Ali Mestara fils de harki, français de nationalité, doit affronter ce soir-là un adversaire réputé comme un puncheur redoutable. Ce sera son troisième combat comme indépendant et l'avenir lui tend les bras. Car Ali possède des atouts indéniables, tel qu'un jeu de jambes que ne renierait pas une danseuse étoile et l'art de l'esquive comme l'anguille qu'on ne peut tenir dans un main. Et sans oublier que ses coups peuvent aussi être destructeurs. Ce soir là, lorsque le narrateur arrive en vue de la salle où doit se dérouler le combat, les spectateurs passionnés et en grande majorité acquis à la cause d'Ali, se pressent déjà aux guichets. L'affiche est alléchante et la recette devrait permettre au club de conforter ses finances. Seulement quelque chose ne va pas.

Le combat vedette entre Ali et son adversaire semble compromis. Ali, d'après un des dirigeants, ne veut plus boxer. Hugo son entraîneur et le président du club ont beau essayer de l'infléchir dans sa décision, Ali est catégorique. Il ne veut pas combattre ce soir. Pour la simple et bonne raison qu'il s'inquiète pour son père. Ali est touché avant le gong dans son cœur, dans son âme, dans sa raison, dans son honneur, dans ses croyances, dans sa naïveté. Jamais il n'aurait pu imaginé ce qui est arrivé à son père. Candide il pensait être à l'abri de ce genre de démonstration de violence. Son père a été agressé par des légionnaires. C'est plus qu'un affront, c'est un monde qui s'écroule.

 

baglin.jpgEn peu de mots, qui cinglent, qui fouettent, qui font mal sans avoir l'air d'être assénés, Michel Baglin met en scène ce que l'on appelle un fait-divers. Une information devenue banale que relatent avec complaisance et fausse commisération parfois des journaux. Que dénoncent des hommes politiques qui pensent plus à leur image de marque qu'à exprimer le fond de leur pensée. Une indignité de façade. Le racisme aveugle perpétré par ceux qui justement ne le sont pas aveugles et qui s'en prennent sans cause, uniquement pour le plaisir, à des personnes dont la tête ne leur revient pas. Ce que l'on nomme le délit de faciès.

Et Michel Baglin sans effets de phrases tordues, sans déclaration tonitruante, mais avec retenue et pudeur montre la réalité, la dénonce à travers un jeune qui espérait en son pays et qui se sent trahi. Il écrit une parabole à méditer et non pas à lire comme une simple historiette. Le désir et l'idée de l'intégration sont mises à mal et il n'est pas anodin que ce soit des légionnaires qui soient à l'origine de ce qui est appelé communément ratonnade. Mais il aurait pu mettre à la place des légionnaires, tout autre corporation au service l'état comme... Je vous laisse remplir les blancs.


A lire également de Michel Baglin : La balade de l'escargot.

 

A commander si vous le voulez sur le site de la librairie SKA


Michel BAGLIN : Le dernier combat. Nouvelle. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Ebook 0,99€.

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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