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24 septembre 2014 3 24 /09 /septembre /2014 13:15

Disons-le tout de suite, toute ressemblance avec des événements qui se seraient déroulés à New-York dans une suite hôtelière serait fortuite, quoi que...

Maxime GILLIO : Anvers et Damnation.

En effet Hubert Molas (vous pouvez prononcer intérieurement Molasse !) la soixantaine gaillarde, vise le rôle très prisé de Président de la République Française. Ce qui ne l'empêche pas de succomber à quelques débordements charnels, souvent tarifés, histoire d'entretenir sa libido et de penser à l'érection au sommet du pouvoir. Il a commandé auprès de son fournisseur habituel, un certain Dominique (suivez mon regard...), lorsqu'il est en déplacement dans cette région, la possibilité de lui envoyer une jeune femme qui saura le dérider. Seulement, sa petite affaire réglée au mieux, malgré son aversion pour la couleur de peau de sa partenaire, une ravissante Black qui lui démontre que la valeur n'attend pas le nombre des préjugés, il se met en colère lorsqu'il s'aperçoit que celle-ci a subtilisé le condom protecteur. Il lui administre une correction qui dégénère car la jeune femme extirpe de son sac une longue tige métallique qu'elle plante dans le cœur de son ex-partenaire d'un soir.

Alors qu'il rêve tout en buvant son café, le téléphone de Luc Mandoline l'interrompt dans ses pensées. Il ne s'agit pas d'Elisa, sa chère Elisa, mais de son pote Maxime Claeneboo, copain d'enfance devenu flic ce qui n'est pas incompatible, qui lui demande un tout petit service. Et voilà le repos de Luc est gâché car il lui faut rejoindre Anvers de toute urgence, si possible en compagnie de Sullivan, pour procéder à une intervention en toute discrétion. Luc râle mais Luc obtempère. Sullivan et Luc ont longtemps baroudé ensemble comme mercenaires puis ils se sont installés comme thanatopracteurs indépendants, effectuant des remplacements mais là cela promet quelques ennuis en perspective. D'abord parce que Sullivan et Claeneboo ne sont pas vraiment en bons termes, ensuite parce que ce genre de travail qui demande doigté et mutisme sent louche.

En effet, munis des sacrosaints papiers qui leur permettent d'exercer leur art en Belgique, ils se rendent à Anvers. Le commissaire Joos Van der Kuyp les accompagne jusqu'à la chambre froide où les attendent déjà Claeneboo et le cadavre. Les premières réparations peuvent enfin être effectuées. Officiellement Molas est décédé d'un infarctus, mais les deux experts raccommodeurs de cadavres se rendent immédiatement compte qu'un objet violent non identifié mais pointu a été enfoncé entre les côtes et de plus le cœur est manquant parmi les organes internes. Affirmer que Molas n'avait pas de cœur serait présomptueux mais force est de constater que celui-ci manque à l'appel.

Dans un petit café Van der Kuyp met les choses au point. La Belgique et la France exigent que l'affaire soit étouffée. Et d'autres hommes influents ont connu le même sort quelques semaines auparavant. Si Mandoline et son ami pouvaient s'investir dans la résolution de ces énigmes, cela l'arrangerait car lui-même est trop pris par son enquête sur un réseau international de prostitution. Il leur présente son adjoint qui pourra éventuellement les aider dans leurs recherches, une jeune femme qui semble toute dévouée à son chef, peut-être même en être amoureuse. Et voilà Mandoline et Sullivan au cœur d'un imbroglio qui sera ponctué de batifolages, de découverte sanglante dans un zoo et d'une sombre histoire de sorcellerie venue tout droit d'une ancienne possession belge en Afrique.

Maxime Gillio manie l'humour et l'horreur avec un plaisir évident. Certes il n'est guère aisé de mettre en scène un réseau de prostitution, constitué ou non de jeunes femmes Noires, sans tomber dans le graveleux, ni des séances de sorcellerie africaine sans abuser du sanguinolent. Alors l'un compense l'autre. Je reproche tout au plus certains dialogues dans lesquels, surtout Sullivan, se montre un peu raciste ou fait preuve d'ostracisme envers (fallait bien que le place celui-là !) une partie de la population dont l'appétit charnel va à l'encontre de ses préférences sexuelles. Traiter par exemple quelqu'un de tarlouze, même dans un roman, ne fait pas bon effet et ne fait pas honneur à celui qui prononce ce mot. A moins que je fasse partie des vieux qu'on de l'âge (vous notez la subtilité?) que des déviances sémantiques dérangent.

Il faut donc opérer quelques abstractions dans le texte et ne s'en tenir qu'à l'histoire, souvent loufoque, parfois émouvante, surtout lorsqu'il s'agit des travaux... d'insertion et de réinsertion de la part de jeunes femmes malmenées, bousculées, abaissées et qui sont contraintes à exécuter leur petite besogne, ou corvée, par besoin matériel, sous la pression d'êtres malsains ou par vengeance. Mais Maxime Gillio a écrit, malgré mes quelques petites réserves, un roman plus profond qu'il y parait tout en l'entourant d'humour caustique, tout comme le faisait Frédéric Dard lorsqu'il signait San-Antonio, un romancier que Maxime Gillio vénère tout particulièrement.

Dans cette même collection L'Embaumeur vous pouvez découvrir :

Harpicide de Michel Vigneron

Ainsi fut-il d'Hervé Sard (mon préféré)

Le label N de Jess Kaan.

 

Maxime GILLIO : Anvers et Damnation. L'Embaumeur N°5. Editions L'Atelier Mosesu. Parution le 13 septembre 2013. 256 pages. 9,95€.

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24 septembre 2014 3 24 /09 /septembre /2014 09:37

Une road-story… déroutante !

Pascal THIRIET : J’ai fait comme elle a dit.

Depuis leur rencontre dans la cour de récréation, Pierre et Sahaa jouent à Je t’aime, moi non plus ! Comme les vagues qui arrivent à l’assaut de la plage puis repartent vers l’horizon, indéfiniment, souvent houleuses, la relation entre Pierre et Sahaa est perturbée en permanence, enregistrant des hauts et des bas. Faut avouer que Sahaa n’y met vraiment pas du sien, traitant son ami, ancien amant, de Noun, qui signifie verge insignifiante. Enfin ce n’est pas tout à fait ainsi qu’elle s’exprime mais vous m’aurez compris. Et Pierre n’apprécie pas du tout cette appellation désobligeante.

Alors comment se comporter lorsque la jeune femme vient pleurer par le truchement du téléphone sur l’épaule de son ami ? Surtout que ce n’est pas pour reprendre une union interrompue sur quelques points de divergence, mais parce que Sahaa a besoin de se cacher. Quoi de plus normal que de venir embêter Pierre au moment où il s’apprête à déguster un Tuc coincé entre deux tranches de pain de mie. Ce n’est pas son régal mais il n’avait que ça à se mettre sous les dents. Donc Sahaa n’est pas en manque d’affection mais est effrayée.

Son copain actuel, Tom-Tom, est une brute qui la tape volontiers, et elle est couverte de bleus qui deviennent jaunes. Comme Sahaa est d’origine asiatique, le changement de couleur c’est moins grave, mais quand même se faire tabasser parce que monsieur est jaloux et qu’il veut toujours savoir ce qu’elle fait, ça lui porte sur les nerfs. Alors elle a loué un studio en catimini, tout en continuant à vendre la drogue. Elle a réalisé deux belles ventes, et maintenant elle s’adresse à Pierre parce qu’un individu a voulu la voir.

Les ennuis commencent pour Pierre, alors que Sahaa n’a pas encore débarqué chez lui. Alors qu’il pense que son amie rapplique, suite à la sonnerie de la porte qui gémit et des coups assenés avec force, il n’a pas le temps de dire ouf qu’il se ramasse un coup de poing qui le laisse à terre. Tom-Tom le jaloux investigue l’appartement à la recherche de sa dulcinée évaporée puis repart, n’étant que de passage. Le moment choisi par la voisine, une vieille qui fantasme, de s’enquérir des événements bruyants. Elle a interverti les noms sur les boites aux lettres, car si un violeur, on ne sait jamais, il y en a qui sont en manque ou préfère les femmes couguars, les vieilles couguars, décidait de procéder à un batifolage, ce serait chez Pierre qu’il se dirigerait. Elle lui propose par la même occasion de lui garder Fibo, le gentil petit lapin qui n’en pose pas, le cas échéant. Sahaa débarque fraîche et dispose comme si de rien n’était et entame le récit de ses avatars, dans le restaurant de Mo, le seul ami de Pierre rescapé de son enfance.

Outre le fait qu’elle a dérobé la boite à coke de Tom-Tom, un paquet d’argent, elle est devenue une bio-clé, celle d’Albert (une référence à Einstein). Un truc bizarre imaginé par cinq collègues de labo, un machin qui se termine en ium, susceptible de détrôner le pétrole, et des papiers cachés avec un bout de métal dans un coffre en Suisse. Cela aurait pu être marrant sauf qu’un jour, alors qu’elle était en voiture compagnie d’Albert, un motard ne s’était pas arrêté à côté d’eux et avait abattu le pauvre chercheur d’une balle dans la tête.

Lorsqu’ils regagnent l’appartement en toute confiance, un lapin les nargue sur le palier. Fibo ! Fibo qui s’est échappé ? Non, la porte est ouverte, et les pieds de la vieille gisent sur le tapis de son salon. C’est pratique parfois un couteau électrique. Ce meurtre fait la une des journaux, et bien entendu le voisinage est suspecté. D’autres aussi comme Tom-Tom qui a été aperçu dans les environs. Il ne leur reste plus qu’à fuir, tenter de gagner la Suisse, attendre qu’une autre bio-clé se présente afin d’ouvrir le coffre, et bonjour la compagnie. Facile à dire ou à écrire mais dans la réalité cela ne se déroule pas toujours avec cette aisance. Sahaa, qui dispose de pas mal d’argent, propose à Pierre de lui servir de garde du corps et éventuellement de réchauffe-pieds. Seulement, outre Tom-Tom, deux individus sapés façon Mormons sont à leur trousses. Alors direction la Belgique, Anvers et contre tout, Francfort, Berne, Zurich, puis Venise… Entre temps Tom-Tom qui a perdu son GPS passe par-dessus la rambarde du toit d’un immeuble aidé par Sahaa, un de moins à les embêter, mais les autres continuent à les pourchasser, ils sont tenaces.

Cette cavale transfrontière, cette road-story en français châtié (et non road-movie comme je l’ai lu quelque part, puisque ce terme est cinématographique) nous ramène aux plus belles heures d’un duo de héros s’évertuant à échapper à un danger connu ou non, ou à un besoin irrépressible de liberté. On peut penser à Sailor et Lula de Barry Gifford et à quelques autres classiques du genre, mais mâtiné de cet aspect antinomique dans les relations entre nos deux routards. Une succession de gags tragico-comiques, narrés avec humour et désabusement, dans un style personnel qui permet à l’auteur de se démarquer de ses prédécesseurs ou confrères actuels. Vouloir Comparer Pascal Thiriet à tel ou tel romancier, à tel ou tel situation ou personnage fictif, lui apposer une pancarte, serait, à mon sens, mal venu et peut-être même offensant. Sauf si le rédacteur d’un article désire se faire mousser en écrivant une phrase choc, et soi-disant humoristique, récoltant les éloges au détriment de l’auteur du roman. Thiriet fait du Thiriet et c’est très bien !

Pascal THIRIET : J’ai fait comme elle a dit. Collection Jigal Polar. Editions Jigal. Réédition Poche : 256 pages. 9,00€.

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23 septembre 2014 2 23 /09 /septembre /2014 10:57

69, année érotique susurrait d'une voix aigrelette Jane Birkin.

Marc VILLARD : Sharon Tate ne verra pas Altamont.

1969, c'est également l'année pendant laquelle un homme a posé pour la première fois le pied sur la Lune. Tandis que d'autres posaient leurs mains sur les hémisphères tentateurs de jeunes filles en fleurs et en pleurs.

Car vous ne vous en souvenez peut-être pas, mais le 3 juillet 1969 se noyait accidentellement Brian Jones, l'ex-guitariste des Rolling Stones, dans sa piscine de Cotchfarm dans le Sussex (ça ne s'invente pas !).

Le 9 août 1969, des membres de la Famille, communauté crée par Charles Manson, assassinent Sharon Tate, la femme de Roman Polansky enceinte de huit mois, et quatre de ses amis au 10 050 Cielo Drive à Hollywood. Charles Manson qui avait fondé cette communauté en prônant la drogue, l'amour libre, et le viol si des récalcitrantes ne voulaient pas abandonner leur corps, le meurtre et la domination du monde, s'était autoproclamé le Nouveau Messie, en détournant le sens prétendu des textes de l'album Double Blanc des Beatles et imposant sa propre interprétation toute particulière en justification des meurtres dont il sera reconnu coupable même s'il ne participe pas physiquement à ces assassinats.

Le 6 décembre 1969, le concert programmé sur le circuit automobile d'Altamont organisé par les Rollins Stones avec en première partie des groupes célèbres et mythiques tels que Carlos Santana, Grateful Dead, Jefferson Airplanes, Crosby, Stills, Nash & Young, enregistre la mort d'un Noir, Meredith Hunter à quelques mètres de la scène sur laquelle se produisent les Stones, poignardé par un membre du service d'ordre, Alan Passaro. Service d'ordre composé de Hells Angels et qui organisa le désordre de ce festival qui se voulait un pendant à celui de Woodstock, sous l'influence de la drogue et de l'alcool.

Marc Villard a imaginé un lien entre les deux derniers événements en la personne de Sheryl. Sheryl est une adolescente qui a fui la maison et le garage paternel de Gallup pour Los Angeles, sa faune, et sa flore qui s'étale sur les chemises des hippies. C'est ainsi qu'elle a rejoint la Famille de Charles Manson et qu'elle est invitée voire contrainte à participer à l'invasion du 10 050 Cielo Drive. Elle doit aider à l'aide d'une cisaille les fils téléphoniques mais lorsqu'elle se rend compte du massacre perpétré par ses compagnons, elle décide fuir. Commence un périple de quelques mois dans toute la Californie, Sheryl devenant stripteaseuse pour bouseux mal dégrossis en quête de chair fraîche, subissant les affronts et s'entichant d'un jeune Noir, participant avec lui à ce festival catastrophique d'Altamont.

Marc Villard sacrifie à ses obsessions, à ses vieux démons que sont l'alcool, la drogue (sous toutes ses formes), le sexe, le sang... mettant en scène des personnages faibles, perdus, entourés d'individus malsains. La description du festival d'Altamont est assez édifiante à ce sujet, festival au cours duquel les Hells Angels, sensés organiser le service d'ordre mais se montrent sous l'emprise de l'alcool et de la drogue des bêtes malfaisantes et malveillantes. La musique adoucit, parait-il, les mœurs, mais ce n'est pas toujours le cas.

Ce roman-document met en scène de nombreux personnages qui ont réellement existés. Seule Sheryl et d'autres figurants sont issus de l'imagination de Marc Villard. Et encore, Sheryl pourrait avoir été inspirée par deux figures, Linda Kasabian qui faisait le guet et obtint l'immunité pour avoir témoigné contre la Famille, et Patty Bredahoff, la petite amie de Meredith Hunter qui assista à l'assassinat de celui-ci à Altamont.

Les plus de cinquante ans se souviennent sûrement de ces événements longuement décrits aux informations radiophoniques et aux affrontements sauvages des Hell's Angels dans des reportages à la télévision à cette époque.

Marc VILLARD : Sharon Tate ne verra pas Altamont.

Cette longue nouvelle a déjà été publiée chez Biro en 2010 dans la collection Les sentiers du crime.

Ce roman a également été chroniqué par Claude Le Nocher sur Action Suspense

Marc VILLARD : Sharon Tate ne verra pas Altamont. Editions Cohen & Cohen, collection Bande à part. Parution 18 septembre 2014. 106 pages. 13,00€.

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23 septembre 2014 2 23 /09 /septembre /2014 07:58

Bon anniversaire à Julia Benech, née un 23 septembre...

Julia BENECH : Histoire du Pyroflamme et Rose.

Rose se confie à Jude, surnommé le Pyroflamme : sur sa gorge, à la naissance des seins, une lumière s’est tout à coup mise à briller. Ce n’est pas grave mais il faut vivre avec. Et puis elle a une envie, avoir un bébé.

Alors Jude se dévoue, sans trop savoir comment faire, n’ayant vu à l’œuvre que des animaux. Jude et Rose vivent au sein d’une petite communauté, et chacun ne peut cacher grand chose aux autres. Toutefois certains possèdent leurs petits secrets, et comme dans toute communauté, des tensions existent parfois entres les différents membres.

Rose est un peu naïve, et à la demande de Jo, dont la promise a eu elle aussi une tâche de lumière sur la poitrine, elle le console. Dans ses draps. Sa vocation est toute trouvée : elle console les hommes, d’abord ceux de la petite communauté puis ceux de la ville proche. Seulement Zé est retrouvé mort, les tensions gagnent la communauté, d’autres décès sont enregistrés. Accidents ou meurtres. Jude va enquêter, un peu en dilettante, pensant d’abord à Rose et au bébé.

Ce roman est une parabole qui débute le 18 mars puis se décline de mois en mois jusqu’en décembre. Un livre onirique, rafraîchissant, bizarre, à la limite du merveilleux et de la féerie, de l’enchantement et du sordide, qui se déroule en un endroit imaginaire, et dont l’épilogue n’est pas sans rappeler des événements lointains. Le lecteur se laisse emporter par l’écriture poétique, qui utilise souvent la symbolique pour décrire l’Histoire du Pyroflamme et Rose de Julia Benech.

 

Julia BENECH : Histoire du Pyroflamme et Rose. Collection Hors Noir N°26. Editions Hors Commerce. Parution 22 juin 2001. 224 pages.

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22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 16:40

Bon anniversaire à P.-J. Hérault Né le 22 septembre 1934 à Paris dans le quatorzième arrondissement.

P. - J. HERAULT : Un portrait.

Michel Rigaud qui n’avait pas encore adopté le pseudonyme de P.J. Hérault, écume successivement les lycées Fontane à Niort, des Feuillantines, Montaigne et Michelet à Paris et Vanves, se retrouve élève de la Faculté de Droit puis de l’Ecole Supérieure de Journalisme de Paris et enfin l’Ecole des Hautes Etudes Sociales et Internationales. Il devient Officier de Renseignements en Zone opérationnelle durant la guerre d’Algérie et en ramène une technique du Renseignement qu’il exploitera plus tard avec des romans d’espionnage.

De retour à la vie civile, il réalise un vieux rêve : voler. Il devient pilote de planeur puis d’avion et en même temps il entre comme reporter à Paris-Presse et collabore à Candide. Ensuite il travaillera à l’Aurore, Paris-Jour et sera chroniqueur à RTL. Enfin à TéléStar en tant que rewriter puis chef des informations. En 1972 il participe à la création d’un mensuel aéronautique, Aviation 2000. Regrettant de ne pouvoir exploiter la mine d’informations que représentent les reportages, il trouve bientôt la solution en écrivant des romans d’espionnage. Lecteur du Fleuve Noir depuis un certain après-midi de septembre 1953, à Madrid, il se met au travail et porte son premier manuscrit au Fleuve Noir. Ce sera Réseaux sommeil en 1971 suivi par deux autres romans, Stratégie Détonateur et Le barrage maudit.

Mais il découvre la science-fiction et s’y plonge avec délectation et écrit pour la collection Anticipation vingt quatre titres, de 1975 à 1996. Il en garde une petite anecdote : « L’une des dernières, et très jeune directrice littéraire, m’a dit que j’étais un dinosaure du Fleuve. Je ne suis toujours pas convaincu que c’était gentil ».

A ma question, Comment vous est venu le besoin, l’envie, le plaisir d’écrire et pourquoi de la littérature populaire, il m’a répondu : « Au début pour l’argent. J’étais journaliste. Je ne savais qu’écrire ou faire la guerre. Ensuite parce que je ne trouvais pas les histoires qui me plaisaient. Alors je me les suis racontées. La S.F. parce que c’est un genre où l’on peut tout écrire, dans n’importe quel domaine. La littérature populaire parce que c’est la seule qui soit un reflet de son époque ». Peut-être est-ce pour cela qu’il apprécie surtout les ouvrages sur l’aviation, l’une de ses passions, et ses auteurs préférés sont Pierre Clostermann et Nicolas Montserrat. Il ne lit guère la littérature générale, sauf exception, parce qu’elle l’ennuie. « Ça ne bouge pas assez, beaucoup d’auteurs se regardent le nombril ». Il a pratiqué, régulièrement, des sports aussi différents que la voile, la plongée en scaphandre autonome, le ski, l’escrime et l’aviation sous toutes ses formes, à l’exclusion du parachutisme et du vol libre qui le terrorisent. Enfin il passe ses vacances d’été dans les îles grecques du Dodécanèse.

Il s’explique sur son « métier » d’auteur mais aussi pourquoi il écrit des romans de science-fiction ainsi : « Nous avons besoin de critiques. D’encouragements, à un moindre degré. Alors nous avons tous nos trucs. Le mien est terriblement égocentrique. Si des personnages sont vivants dans mon crâne, si je vois une scène, si je me sens bien, si j’ai envie d’être dans un engin spatial, au milieu des commandes des voyants de contrôle, alors je pense que cela plaira à d’autres. Mais si une histoire m’ennuie, alors je recommence, ou je laisse tomber. Je ne suis pas capable d’écrire pour aligner des lignes. Il faut que j’y prenne plaisir, que je m’y amuse, que je rêve. C’est pourquoi j’ai laissé tomber l’espionnage, il y a bien longtemps. Je travaillais, à l’époque, pour Paris-Presse et mes confrères du service de politique étrangère me racontaient des anecdotes qui n’avaient pas leur place dans le journal. J’en tirai un roman. Mais j’ai été vite lassé. Je connaissais les techniques de renseignement pour les avoir apprises dans l’armée. Mais tous ces romans se ressemblaient à mon avis. Je me sentais prisonnier. L’Anticipation, au contraire, représentait la liberté totale pour un auteur. Et le Space-opéra était le genre où je me sentais le plus à l’aise. Peut-être parce que j’ai piloté pendant vingt-neuf ans et que j’aime voler, en planeur ou en avion. Un poste de pilotage m’est familier. Ceci explique cela ».

P. - J. HERAULT : Un portrait.P. - J. HERAULT : Un portrait.P. - J. HERAULT : Un portrait.

Dans ces romans il existe une forme d’antimilitarisme, mais il modère toutefois cette prise de position dans ses propos : « Une armée n’est que le reflet, parfait, de la nation qui la génère. Rien de plus. Elle peut avoir une grande conscience ou être un ramassis de brutes infâmes, à l’image du pays. Donc l’antimilitarisme systématique me parait primaire. Il faut savoir de quoi l’on parle, ne pas avoir passé ses vingt ans dans un fauteuil… Ni être une féministe qui discourt de ce qu’elle ignore. C’est l’esprit militariste, le goût du combat pour le combat et la férocité, la perte de son âme, que je ne supporte pas. De même que la violence, que je déteste. Mais il arrive toujours un moment où l’on ne peut pas faire autrement que l’employer. On peut reculer, accepter, jusqu’à un certain point où la liberté, la dignité, peut-être, impose de se battre, défendre des grands principes, plutôt. En revanche je hais, peut être parce que je les ai approchés, professionnellement, les politiciens. Menteurs par fonction et ne faisant pas honneur à la race humaine ». P.J. Hérault ne manie pas la langue de bois, c’est tout à son honneur.

Aujourd’hui il continue d’écrire et Rivière Blanche accueille ses romans inédits (six pour l’instant), mais c’est la marque de fabrique de Rivière Blanche : publier d’anciens auteurs du Fleuve Noir, des romans oubliés de la fin du XIXème siècle, et découvrir de nouvelles pousses, dans tous les domaines de l’Anticipation et du Fantastique. J’y reviendrai. Cependant il est un roman traitant d’uchronie qui jusqu’à peu tenait à cœur à P.J. Hérault et qui est resté longtemps dans ses tiroirs mais, n’étant pas publié pour diverses raisons. « Un gros livre de 1600 pages non publié en raison de sa taille, essentiellement, et du fait de ma nationalité non américaine ! » déplorait-il. « C’est une uchronie sur l’Europe où j’ai mis beaucoup de moi-même, des personnages qui ont une conscience, ce qui importe beaucoup à mes yeux ». Depuis ce gros roman a été édité chez Interkeltia, sous le titre Millecrabe, en trois volumes. Enfin oserai-je dire, et P.J. Hérault peut être fier de s’être obstiné et d’avoir eu foi en lui et en son œuvre. Et je ne serais pas complet (cet article a été écrit en juin 2011) si j'oubliais de signaler que des romans inédits et des rééditions sont publiés aux éditions Critic.

P. - J. HERAULT : Un portrait.P. - J. HERAULT : Un portrait.
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22 septembre 2014 1 22 /09 /septembre /2014 07:54

Moi aussi j'ai toujours aimé sa ma la femme !

Gilles BORNAIS : J'ai toujours aimé ma femme.

Il existe un subtil distinguo entre J'ai toujours aimé ma femme et J'aime toujours ma femme. De même que ce mot laissé sur le comptoir dans la cuisine et sur lequel est déposé un Laguiole : Je ne rentrerai pas. Faut-il le prendre au sens de Je ne rentrerai plus (du tout) ou Je ne rentrerai pas (ce soir) ? Et le couteau est-il un symbole de séparation ?

Le narrateur, Jean-Baptiste Rolant, ne s'embarrasse pas de problèmes grammaticaux en découvrant ce vendredi soir ce message laconique et lapidaire Je ne rentrerai pas. Mylène et lui sont mariés depuis vingt-quatre ans, ont deux enfants, fille et garçon, et il n'a pas souvenance d'accrochages, de scènes de ménage, d'assiettes cassées.

Alors il tente de la joindre sur son téléphone portable, en vain. Il laisse des messages, des interrogations. Il téléphone également à son ami Max, son copain de toujours avec qui il a fondé une boite de communication qui a réussi à s'imposer dans la jungle des publicitaires. Mais Max n'a aucune nouvelle de Mylène. Jean-Baptiste est perdu dans cet appartement vide d'Issy-les-Moulineaux, les minutes passent et toujours pas de nouvelles. Il téléphone à Jessica sa fille qui est mariée et vit en Irlande. Pour l'heure elle ne sait rien. Quant à Jonathan le fils, il est trop occupé avec ses copains, ses pizzas, pour s'inquiéter.

Le seul moyen de se changer les idées, c'est de se rendre au journal où travaille Mylène. Elle est journaliste et peut-être a-t-elle un article à finir de boucler impérativement. Il préfère revenir à Paris, retourner sur les lieux qu'ils ont l'habitude de fréquenter, de poser ici et là une question, Avez-vous vu ma femme ?, enfin il entre au Café des Sciences, où Mylène prend régulièrement un café ou autre boisson. Il aborde deux femmes qui d'après leurs propos appartiennent à Paris Monde, le canard où Mylène est reporter.

Elles ne connaissent pas véritablement Mylène qui n'est qu'une collègue parmi tant d'autres. Pourtant elles essaient de le faire parler, de s'intéresser à son problème matrimonial. Jean-Baptiste est peut-être un peu trop imbu de lui-même car il n'hésite pas à déclarer que sa femme a des copines mais pas d'amies, pas de confidentes. Son confident, c'est moi depuis vingt quatre ans. En continuant d'explorer les possibilités, les probabilités, les endroits où Mylène aurait pu se réfugier, chez ses parents peut-être, à Etretat où ils ont acheté et retapé une maison, à Deauville que Mylène préfère à Etretat à cause des falaises trop dangereuses et pour les peintres aussi, car Mylène peint, mais sûrement pas là où Caroline, l'une des jeunes femmes, suggère : Mylène n'a pas d'amant.

Jean-Baptiste traîne sa solitude tout le week-end, explore son ordinateur, lit les messages qu'elle a reçu, fouille ses comptes bancaires, à l'affût du moindre indice. Découvre qu'elle se rendait chez une psy, obtient ou plutôt quémande un rendez-vous, mais cette rencontre ne le satisfait pas. Alors qu'il attendait des réponses il repart avec des questions. Il va même à Deauville sur les traces du professeur de dessin de Mylène mais avait-il besoin d'aller si loin.

Car ce qui le turlupine est sous ses yeux. Il est vrai qu'il est myope, 3 à chaque œil. Mais pour lire en lui-même, point n'est besoin de lunettes, ou de lentilles. Simplement de se regarder en lui, courageusement, sans faux-fuyants, sans concession, en enlevant sa carapace d'homme imbu et d'explorer vingt-quatre années de mariage. Une route de la vie empruntée ensemble mais il a peut-être oublié qu'il avait une passagère avec lui.

 

Le titre qui pourrait faire penser à un roman destiné à une collection dite à l'eau de rose, résonne comme un mantra tout au long du livre. Comme si le narrateur voulait absolument se persuader et persuader son entourage, et le lecteur par la même occasion, qu'il aime effectivement, réellement sa femme et qu'il l'a toujours aimé. Ce qui est vrai, certes, mais n'est-ce point qu'une façade destinée à cacher ce qu'il ne veut pas s'avouer, ce dont il pourrait éventuellement avoir honte, s'il plongeait en lui-même, s'il s'auto-psychanalysait, s'il s'autopsiait, s'il voulait être véritablement sincère avec lui, engoncé qu'il est dans son petit confort égoïste. Il ne s'agit pas de disséquer la vie d'un couple qui sort de l'ordinaire, mais bien d'un ménage banal, comme nous en formons tous plus ou moins, avec ses petits travers, et de les mettre en valeur, disons plutôt sous la lumière, comme un entomologiste qui essaie de comprendre, d'analyser le comportement de deux insectes qui crapahutent alors que nul aspérité semble se dresser sur leur chemin.

Ce roman est destiné à tous ceux qui veulent éclaircir le mystère du couple, solide en apparence mais fragile de l'intérieur, c'est à dire nous tous même si j'entends des dénégations par-ci par-là.

A lire également du même auteur : 8 minutes de ma vie, Le trésor de Graham ou encore Le diable de Glasgow.

Vous pouvez retrouver également l'avis de Claude Le Nocher sur Action-Suspense

Gilles BORNAIS : J'ai toujours aimé ma femme. Editions Fayard. Parution le 27 août 2014. 256 pages. 18,00€.

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21 septembre 2014 7 21 /09 /septembre /2014 06:35

Un Pascal Garnier émouvant qui met toujours la plume où ça fait mal !

Pascal GARNIER : Vieux Bob.

Le point commun entre toutes ces nouvelles qui composent ce recueil, c'est le couple. Le couple qui se forme, qui se cherche, qui se désagrège, qui se supporte, le couple qui vit par et pour lui-même.

Le couple, c'est l'homme et la femme, bien évidemment, mais c'est également l'homme et son chien ou plutôt le chien et son maître. C'est la mère et son fils. C'est le jeune homme solitaire, secrètement amoureux. Et le lien qui unit ces couples est lâche, dans le sens de desserré ou celui de couard, près de la rupture. Tendu ou serpentin, effiloché ou solide comme un fil de nylon qui se plie, se tord mais ne rompt pas.

Des couples éphémères, qui vivent, qui meurent, un moment intense d'où la solitude est exclue mais pourtant veille comme une augure pessimiste. Des couples pour qui la vie de couple devient comme une entrave à une liberté choisie délibérément à deux. Des couples où seul l'un des deux a son mot à dire, l'autre subissant passivement la loi. Des couples que pas même la mort parviendra à scinder, déchirer, car l'habitude et l'amour sont plus forts que tout.

Tout seul, c'est pas drôle, on n'est plus qu'une moitié qui passe son temps à chercher l'autre...

Des tranches de vie, comme prises au hasard, mais qui illustrent bien ce besoin de parcourir l'existence à deux, ce rejet de la solitude, tout en jetant parfois un regard nostalgique derrière soi. Comme la quête de son double.

J'avoue professer toutefois un attrait particulière pour Vieux Bob, nouvelle éponyme du recueil, qui narre la vieillesse d'un vieux chien dans un bistrot. Un chien qui se traîne près du frigo, dehors il fait trop chaud, et gêne le passage du patron servant les clients. Un vieux chien qui désire juste un peu de fraîcheur mais est rejeté justement parce qu'il est vieux. C'est pas beau de vieillir et de subir une vie de chien. Pathétique.

 

A signaler que Cabine 34, l'une des nouvelles de ce recueil, avait figuré dans L'anthologie des meilleurs nouvelles de l'année 88/89 parue chez Syros, une anthologie concoctée avec soin par Christine Ferniot.

Pascal Garnier nous a quitté le 5 mars 2010, et je salue l'excellente initiative des éditions Atelier In8 et le directeur de cette collection, Marc Villard, qui viennent de rééditer ce recueil initialement paru chez Syros/Alternative en 1990 sous le titre de Cas de figures.

Pascal Garnier fait partie de ces figures incontournables des écrivains méritant le respect et sa mémoire doit être entretenue grâce à la réédition de ses œuvres.

 

Pascal GARNIER : Vieux Bob. Collection Polaroïd; éditions Atelier In8. Parution le 9 septembre 2014. 112 pages. 12,00€.

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20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 12:36

La vie est comparable à une pièce de monnaie qui roule sur la tranche. La moindre aspérité et la voilà qui tombe, du bon ou du mauvais côté.

Olivier KOURILSKY : Le 7e Péché.

Médecin néphrologue, Christian Arribeau se voit promis à un bel avenir. Enfin il va atteindre son but, devenir professeur avec tous les honneurs qui en découlent. Il est vrai qu'il s'est donné les moyens pour arriver à cette distinction. Travailleur possédant toutefois des facilités, mais surtout arriviste, opportuniste, n'hésitant pas à marcher sur les pieds des autres afin de passer devant, il arrive enfin sur la dernière marche, la plus traîtresse. Il a un jeune patron, ami avec le doyen de la faculté, qui vient d'ouvrir un service dans un CHU de la proche banlieue parisienne et il s'est marié avec Céline, la propre du fille du dit doyen. Tous les éléments sont réunis pour qu'il obtienne le poste mirifique de Professeur des Universités et Praticien Hospitalier.

Juste un petit point noir, comme un comédon irréductible chez un acnéique, a failli ruiner sa carrière quelques années auparavant. Il devait procéder à une trachéotomie en réanimation en compagnie de Delphine qui était chef de clinique dans le service où Christian entamait sa dernière année d'internat. Seulement une manipulation malheureuse a entraîné une complication qui a conduit le patient au cimetière. De toute façon celui-ci serait décédé quand même étant gravement atteint, mais au moins cela aurait été de maladie. Delphine et Christian étaient très proches, pour une fois sans arrière pensée de sa part, et elle avait endossé toutes les responsabilités. La famille, qui était plus près du banditisme que du gratin parisien même si parfois les deux se confondent, avait porté plainte, plainte qui avait été étouffée. Seulement quelques mois après, Delphine avait perdu non seulement l'équilibre sur le quai du métro mais également l'usage de ses membres inférieurs, échappant à l'accident mortel de justesse. Depuis elle travaille à un poste important au ministère de la Santé mais elle n'avait pas voulu qu'ils se marient, lui conseillant même d'aller trouver ailleurs une femme susceptible de l'aider dans sa carrière.

Malgré son mariage, qui d'ailleurs est légèrement branlant, Christian continue à rendre visite à Delphine. En catimini, ayant toujours un alibi prêt à dégainer. Et ce soir là il est heureux d'apprendre à la belle Delphine qu'il est quasiment parvenu à son but, son passage devant le Conseil national des Universités s'étant déroulé parfaitement. Il ne manque plus que les signatures ministérielles afin de valider sa promotion. Après avoir vidé quelques flûtes de Champagne en compagnie de Delphine, il quitte la jeune femme qui habite dans le XVe et s'apprête à regagner le domicile conjugal. Et c'est à ce moment que le destin bascule comme le piéton qui s'apprête à traverser la rue.

Il tangue le piéton, il traverse et Arribeau n'a pas le temps de freiner, la voiture passe dessus. Affolement complet à bord. Personne dans la rue, aux fenêtres, alors Arribeau traîne le corps entre deux voitures et s'en va. Mais le destin veille. A un carrefour, alors qu'il a la priorité, Arribeau se fait percuter par une voiture folle. Les policiers qui pourchassaient le véhicule sont immédiatement sur place, tandis qu'Arribeau est légèrement sonné. Il est emmené à l'hôpital et prévient sa femme. Celle-ci n'est pas dupe et devine immédiatement qu'il venait de sortir de chez Delphine. Lorsqu'il veut récupérer sa voiture placée à la fourrière, prête à être compactée, la collision l'ayant rendue inutilisable, il regarde sous le capot afin de vérifier qu'il n'y a pas de trace de son accident avec le SDF.

Car il s'agit bien d'un SDF connu dans le quartier qu'Arribeau a percuté et tué. Le commissaire serait prêt à laisser tomber l'affaire mais le lieutenant Pougnisky a comme qui dirait des antennes. Il sent quelque chose de louche et lorsqu'il fouille dans les affaires du défunt il est fort étonné, non pas de trouver une douzaine de bouteilles de vin vides, mais de constater que celles-ci sont nickel. Pas de traces d'empreintes ou de poussière. Et l'analyse révèle que l'homme avait dépassé les trois grammes d'alcool dans le sang, alors qu'il n'était pas réputé pour être un poivrot, et que de plus une drogue avait été mélangée au pinard. Un mélange rédhibitoire. Cette fois-ci, c'est à la criminelle d'enquêter et l'enquête échoue au 36 quai des Orfèvres sur le bureau du commandant Claude Chaudron. La jeune femme et son groupe prennent au sérieux cette affaire, à la plus grande joie de Pougnisky qui rêve d'intégrer la brigade.

Arribeau qui pensait pouvoir reléguer cet accident dans la case pertes et profits commence à recevoir des photos explicites montrant la voiture passer sur le clochard, puis mettre en évidence le numéro minéralogique de son véhicule et quelques autres dont l'intérêt n'est pas moindre. Et il faut que des tueurs entrent dans la danse.

 

Olivier KOURILSKY : Le 7e Péché.

Olivier Kourilsky dans Le 7e péché, dont par ailleurs c'est le septième roman, nous invite à découvrir un personnage malsain, imbu de lui-même, carriériste, arrogant, persuadé de réussir dans la vie en se servant des autres pour accéder plus facilement et plus rapidement au Graal. Ce genre d'individu, la société en compte beaucoup, nous en avons malheureusement la preuve tous les jours soit professionnellement et plus encore en politique. Mais c'est à dessein que l'auteur a choisi un membre de la profession médicale, parce qu'étant lui-même médecin, il connait les arcanes des différentes professions qui composent son sacerdoce et qu'il a dû rencontrer au cours de sa carrière un ou plusieurs éléments de cet acabit. Mais je vous rassure tout de suite, Olivier Kourilsky ne se met pas en scène même si les parties narratives effectuées par Arribeau le sont à la première personne. Le reste de l'histoire, notamment les recherches de Pougnisky puis de la brigade du Commandant Claude Chaudron, le sont à la troisième personne.

Habilement construit, ne cherchant pas à ériger en victime Christian Arribeau, le personnage principal, Le 7e péché est un roman de suspense et psychologique à la fois. Psychologique dans la description de l'attitude négative d'Arribeau, et de suspense car le dernier chapitre nous révèle une dernière inconnue. Et cela m'a fait penser aux romans des grands maîtres qu'étaient Boileau-Narcejac et surtout à Louis C. Thomas qui savaient construire des énigmes puissantes en mettant en scène des personnages ordinaires. Le machiavélisme de l'intrigue mis en valeur par la fluidité de l'écriture !

A lire également d'Olivier Kourilsky : Dernier homicide connu, aux mêmes éditions.

Voir également l'article de Claude Le Nocher concernant ce roman sur Action-Suspense.

Olivier KOURILSKY : Le 7e Péché. Editions Glyphe. Parution le 1er septembre 2014. 208 pages. 15,00€.

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20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 08:04

Profitant de la rentrée littéraire les éditions SKA proposent en ce mois de septembre une nouvelle fournée de romans et nouvelles publiées dans les collections Mélanges et Cullissime.

Au menu de cette chronique vous pouvez déguster un assortiment digne d'un buffet froid garni de petits fours sucrés et salés.

Au hasard du piochage voici quelques amuse-bouches :

Et SKA les littéraires.

Roland SADAUNE : vue sur le cimetière.

Robert Marsouin a depuis sa prime jeunesse été attiré par les cimetières et par la mer. Enfant il jouait aux osselets sur les pierres tombales, endroit de circonstance et aucun mort ne serait venu le gronder à cause du bruit provoqué sur les dalles. Ensuite ce fut la mer, et il admire les mâts, les coques, les embarcations tout en rêvant, sous le parasol, d'Hélène se bronzant au soleil, brunette en bikini affolant la plage et ses occupants. Les rêves sont ainsi faits qu'ils peuvent se confondre avec la réalité. En excellent artiste peintre Roland Sadaune joue avec les couleurs comme avec les sensations.

Collection Mélanges. 1,49€.

Et SKA les littéraires.

Jan THIRION : Visa pour le 7ème ciel.

Sally traîne son chariot de ménage tout en surveillant sa fille Yolande qui est installée dans le sas avec ses animaux. Un merle, c'est facilement apprivoisable paraît-il, surtout lorsqu'on l'a recueilli jeune et soigné une patte blessée. Et peu de choses suffisent pour lui faire un nid, une culotte par exemple. Yolande dans le sas attire les animaux qui se désagrègent ensuite. Et puis il y a aussi Julien son frère, et tous deux font l'apprentissage de l'amour charnel tout en philosophant sur les étoiles, de l'évolution cosmique dans la salle des combinaisons. Sally ne veut pas les déranger, d'autant que d'autres pensées accaparent son esprit, celles de l'inconnu par exemple qui alimente ses phantasmes. Ceci est-il vraiment réel, n'est qu'un rêve érotique de la part de Sally ? Comme d'habitude avec Jan Thirion, nous entrons dans un univers déconcertant.

Collection Cullissime. 1,49€.

Et SKA les littéraires.

Jérémy BOUQUIN : L'Archange.

L'homme se décrit comme assistant sexuel. Ce n'est qu'une partie de sa multi-profession puisqu'il exerce également la pratique de kiné, masseur et chiropracteur et donne des cours de yoga et de sophrologie. Son client, qui lui a demandé de passer chez lui, n'est guère convaincu et le prend presque pour un gigolo. Faut bien gagner sa vie mais la manipulateur affirme qu'il est hétéro, qu'il ne couche pas mais masse et caresse. Tout est dans la nuance. Au fait sa cliente se prénomme France, est âgée de quatre-vingt quatre ans et est clouée au lit par de multiples AVC. Alors Gabriel, oui c'est le nom du kiné, commence sa thérapie manuelle, avec douceur et doigté, réveillant la vieille France. Même si c'est pour la bonne cause, tout le monde ne comprend pas ses motivations, surtout sa femme, ou encore le fils de France. Il faut dépoussiérer les esprits et ne pas placer des pensées erronées dans des urnes.

Collection Mélanges. 1,49€.

 

Vous pouvez découvrir toutes les nouvelles parutions des éditions SKA, ainsi que les anciennes, sur le site de leur librairie, l'entrée est gratuite et n'engage à rien. Le plaisir de la découverte ne se refuse pas.

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19 septembre 2014 5 19 /09 /septembre /2014 13:34

Bon anniversaire à Jean-Pierre Andrevon

né le 19 septembre 1937.

Jean-Pierre ANDREVON : Aubes trompeuses.

Trompeuses les aubes ? Oui à en croire Jean-Pierre Andrevon qui dans ce recueil composé de neuf nouvelles, nous propose plutôt des crépuscules.

Neuf nouvelles parues dans des magazines parfois confidentiels, disparues aujourd'hui, ou revues et remaniés, enrichies, et même une inédite.

L'inspiration et l'imagination de Jean-Pierre Andrevon sont sans limites, et s'adaptent au support pour lesquelles ces nouvelles étaient destinées.

Ainsi la nouvelle destinée à Chorus N° 6 de 1998, revue aujourd'hui défunte consacrée à la musique et qui avait été crée et dirigée par Fred Hidalgo, grand amateur de Frédéric Dard, Jean-Pierre Andrevon nous propulse dans un avenir plus vieux de quelques décennies. Le jardin extraordinaire est le titre de cette nouvelle dans laquelle le narrateur voit des chanteurs des années cinquante, Jacques Brel, Georges Brassens, Guy Béart, Félix Leclerc et autres auteurs-compositeurs-interprètes sur scène chantant à leurs débuts leurs œuvres, des chansons à texte qui trifouillent l'âme. Un héritage provenant d'un arrière-grand-oncle et composé de disques vinyles, d'un électrophone, et autres reliques. Des artistes qui viennent en lui, grâce à une morphogénèse presque parfaite. Seulement il y a Clare, qui apparait sous la forme d'un fantôme transparent, perturbe son environnement et dissipe le charme. C'est d'abord un hommage à ces artistes qui ont peiné pour se faire un nom et qui restent les grands maîtres de la chanson francophone auquel Jean-Pierre Andrevon rend. Mais il n'est pas seulement romancier, nouvelliste ou dessinateur, il est également chanteur et a enregistré quelques disques. Voir à ce propos mon article consacré à l'un de ses albums ici .

Némésis, la première des nouvelles du recueil, se décline comme un compte à rebours, dans une Zone où règne la chaleur. Une petite voix s'infiltre dans les neurones du narrateur, implorante. Ne me laisse pas... Ne pars pas... Une voix de femme qui le stigmatise, envahissant son esprit : Alors, tu t'es bien amusé ? Une parabole sur ce que certaines personnes peuvent être amenées à ressentir en s'adonnant inconsidérément à un univers virtuel. Première publication dans Khimaira N° 14, 2008.

Il se sent bien nous entraîne à la suite d'Olivier Charmeyrois dans le TGV de 17h08 en partance de Marseille pour Paris. Il lit en diagonale Le Monde, les infos étant répétitives et catastrophiques. Sa voisine est une jeune femme, belle, expansive, et bientôt ils se connaissent comme s'ils avaient toujours voyagé ensemble dans le train de la vie. Soudain un éclair violent et intense se produit et le temps défile à une vitesse incroyable, en faisant marche arrière. Publié dans Bifrost N° 6, 1997 sous le titre plus évocateur de Big Bang.

Je ne mourrai jamais, souhait que beaucoup d'entre nous effectue en regardant tous les livres contenus dans leur bibliothèque et que jamais ils ne pourront lire, Je ne mourrai jamais est une sensation ressentie par un personnage aux multiples identités. Il se balance dans un berceau, se confronte en une joute navale avec un adversaire planté sur un radeau, se retrouve sur une terrasse à l'ombre d'une palmeraie clonée, devient prospecteur de météorites, se débranche puis se rebranche à un jeune homme, à un lion cloné... Une vie interminable. Nouvelle inédite.

Dans Les ailes ne poussent qu'une fois, le narrateur vit avec Béni dans un vaste appartement qui devient bientôt une ruche. Au début naquit Farida, qui eut droit à sa chambre à part, puis vinrent Nahoum suivit de Aïch qui partagèrent une autre pièce. Mais inexorablement les enfants naissent, la famille s'agrandit de plus en plus, et comme dans les autres foyer le phénomène se produit de la même façon, la place vient à manquer dans la ville. Dans les rues il devient difficile de se déplacer et la solution arrive comme par miracle : des ailes leur poussent dans le dos et ils peuvent migrer et trouver un autre endroit où s'installer. Est-ce vraiment la fin d'un périple ? Publié dans la défunte revue Faërie N° 7, 2002.

Aube trompeuse, nouvelle éponyme du recueil, nous propulse dans un monde où pour la première fois depuis longtemps le ciel est vide. Reflétant toutes les nuances ou presque de l'arc-en-ciel sans que l'une empiète vraiment sur l'autre. Hommes et femmes émergent des trous de la montagne, nus et respirant à pleins poumons. Un retour à la nature en foulant l'herbe mouillée mais craquante. Mais la nuit tombe inexorablement. Le narrateur retrouve son cher ami Sergio mais ayant aperçu par trois fois une belle jeune fille, il le frappe. Le début ou la fin d'un monde, d'un cauchemar ou d'un rêve ? Nouvelle parue dans la défunte et éphémère revue Gandahar N° 2 en 1973 mais dans une mouture inédite.

 

L'univers fantastique ou science-fictionnesque de Jean-Pierre Andrevon est résolument noir. Catastrophes, cataclysmes parsèment son œuvre mais en même temps, il se montre onirique. Désabusé, pessimiste sur l'avenir de notre monde, l'auteur le décrit sous formes de paraboles, et il n'est guère d'espoir d'en imaginer une véritable aube radieuse. Il se mue en prophète mais comme l'écrivit Rémy de Gourmont : Il y a deux voies pour le prophète : ou annoncer un avenir conforme au passé, ou se tromper. Dans quelle catégorie ranger Jean-Pierre Andrevon ?

Jean-Pierre ANDREVON : Aubes trompeuses. Editions La Clef d'Argent, collection KholekTh N°27. Parution le 4 septembre 2014. 152 pages. 12,00€.

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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