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15 avril 2021 4 15 /04 /avril /2021 03:11

Congés payés ou non ?

Zelda POPKIN : Congés pour meurtre.

Phyllis Knight, avocate, n'assiste pas au repas mensuel organisé par Contempora, une association de femmes indépendantes. Son amie Mary Carner, inspectrice dans un grand magasin, s'inquiète.

Struthers, le secrétaire de Phyllis, tout en avouant ne pas avoir de nouvelles de l'avocate, se retranche derrière le secret professionnel. Quant au père de Phyllis, il ne possède guère plus de renseignements sur cette prétendue fugue. Une disparition qui à la limite le réjouit, n'ayant jamais accepté le fait que sa femme soit morte en mettant au monde leur fille.

Il se résigne à faire appel à la police au bout de quinze jours et Mary participe à la conférence de presse en tant qu'amie et enquêteuse. D'après son carnet de rendez-vous Phyllis a reçu le jour de sa disparition Nils Peterson, un petit propriétaire, et Sophie Duda, une jeune femme d'origine polonaise dont les démêlés avec Rockey Nardello, proxénète et organisateur de loteries, avaient conduit l'avocate chez le district attorney.

Phyllis avait également exprimé le désir d'aller au cinéma. Le milliardaire Saxon Rorke, affirme avoir eu rendez-vous lui aussi avec Phyllis, alors qu'elle était soi-disant fiancée à un industriel, Van Arsdale.

Mary fouille parmi les affaires de Phyllis en compagnie de Johnny Reese, un jeune inspecteur familier et sans-gêne. Quelques jours plus tard Rorke et Struthers, en qui Reese reconnait un individu ayant eu maille à partir avec la police, reçoivent une lettre signée Phyllis demandant qu'on cesse de la rechercher.

Le 1er avril de l'année suivante, le cadavre de Phyllis est découvert dans la cave d'un immeuble promis à la démolition. Elle a été tuée d'une balle de revolver et son corps déposé dans une chaudière. Un meurtre qui remonte à plusieurs mois. Les policiers trouvent un pistolet de fête foraine, une paire de lunettes, une torche, une table et quatre chaises, des jeux de cartes et des mégots de cigares dont un taché de rouge à lèvres. Il s'avère que l'immeuble appartient à Nils Peterson mais l'homme a disparu. Quant à l'immeuble contigu, c'est une ancienne maison de passes dirigée par Flo Gordon, une maquerelle de la bande à Nardello. Les soupçons pèsent sur le truand or celui-ci était en prison le jour de la disparition de Phyllis. L'enquête est confiée au commissaire Heinsheimer mais Mary préfère poursuivre ses investigations en solitaire, malgré ou à cause de la présence de Reese.

Un policier du nom de MacKinoy se tire une balle dans la tête et laisse une lettre par laquelle il nie avoir participé au meurtre de Phyllis. Contrairement au commissaire, Mary pense que MacKinoy est effectivement innocent et que sa mort n'est qu'un suicide maquillé. Elle rencontre Rorke bouleversé par l'annonce de la découverte du cadavre de Phyllis. Les pérégrinations de Mary l'amènent à rencontrer Sophie Duda bernée par Nardello et Flo Gordon. Cependant un homme est au dessus de Nardello et si elle ne connaît pas son nom, elle l'a vu aux actualités cinématographiques six mois auparavant. Mary demande à un ami d'organiser une séance de projection privée qui confirme ce qu'elle pensait.

 

L'intrigue construite par Zelda Popkin est conventionnelle et repose trop sur les coups de théâtre.

Ainsi le père de Phyllis s'accuse publiquement d'avoir tué sa fille pour venger la mère décédée en couches. Un faux coupable que le lecteur détecte, il y encore trop de pages à lire !

Et l'on pourrait reprocher également une traduction par trop argotique et elliptique dans certains dialogues sans compter sur les coquilles dues à l'imprimerie ou la photocomposition.

Seulement ce roman désuet et charmant possède un certain attrait dans la description de personnages pour l'époque peu conformistes et le premier chapitre se révèle l'apologie de la liberté de la femme sans que celle-ci tombe dans le travers de la caricature.

Zelda POPKIN : Congés pour meurtre. (Time of murder - 1940. Traduction de Hervé Denès). Collection Troubles. Editions Métailié. Parution février 1993. 262 pages.

ISBN : 9782864241423

Réédité dans la collection Le Masque N°2312. Librairie des Champs Elysées. 1996.

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14 avril 2021 3 14 /04 /avril /2021 03:32

Un titre de circonstance ?

Jean-François COATMEUR : La danse des masques.

Face aux enjeux économiques, l’avenir de La Source, une communauté de repris de justice fondée par un prêtre quelque peu marginal, se trouve fortement compromis.

Dans ce petit village breton, à mi-route de Quimper et de Lorient, les passions se déchaînent, attisées par le meurtre du propriétaire d’une biscuiterie.

Le fils, névropathe, s’insurgeant contre la férule d’un père trop autoritaire et coureur impénitent de jupons, a minutieusement chronométré son parricide.

Et c’est Roger Malinche, un repris de justice employé comme nettoyeur dans l’usine, qui servira de bouc émissaire. Accusé, Roger a le tort de s’enfuir, drainant derrière lui la maréchaussée.

Vatel, le prêtre responsable de la communauté, et Desforges, le maire du village, se trouvent en butte aux attaques qui fusent de partout. Les apparences sont contre eux et contre leur protégé, et les passions s’exaspèrent.

La vérité toute nue finira bien par sortir du puits mais au prix de nombreuses souffrances et de morts innocents.

 

Il est difficile de vouloir faire œuvre d’humanisme lorsque l’on vit parmi des aveugles et des sourds aux préjugés tenaces.

La vindicte populaire s’acharne surtout sur le pauvre hère qui a fauté une fois. On ne voit en lui qu’un dangereux récidiviste.

Une solution de facilité que dénoncent quelques hommes épris de justice et de liberté. Mais qu’il est donc malaisé de se faire entendre et surtout comprendre.

Jean-François COATMEUR : La danse des masques. Collection Spécial Suspense. Editions Albin Michel. Parution octobre 1989. 300 pages.

ISBN : 9782226038326

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13 avril 2021 2 13 /04 /avril /2021 03:56

Quand le Saint naviguait chez les éditeurs !

Leslie CHARTERIS : La tragédie du Louxor

Mollement allongé sur un rocher plat, Simon Templar s’adonne au bronzage intégral sur une plage de la baie de l’île de Tresco.

Il avait reçu quelques temps auparavant une lettre de son ami Smithson Smith, et à sa lecture, Simon avait décidé de quitter Londres engoncée par la chaleur.

Il était notamment question de l’arrivée de deux yachts dont l’un appartenant à Abdul Osman. Or Simon avait déjà rencontré Abdul Osman quelques années auparavant et il lui avait laissé sur le visage deux marques dont l’homme avait eu du mal à se débarrasser. C’est dire si leurs relations n’étaient pas au beau fixe, contrairement au temps.

Soudain Simon aperçoit une jeune fille qui manœuvre telle une débutante son canot et tombe par-dessus bord. Aussitôt il plonge à sa rescousse et sauve Laura de la noyade, la ramenant sur le yacht appartenant à son beau-père, Galbraith Stride. Non loin, il distingue que du yacht voisin, le Louxor, un homme le surveille à l’aide de jumelles. Il s’agit d’Abdul Osman.

De retour sur la terre ferme, Simon se rince le gosier en compagnie de son ami Smithson Smith, qui tient l’auberge locale. Soudain deux jeunes hommes entrent, se désaltèrent aux aussi puis l’un des deux s’en va. Il se blesse à la cheville et son ami le rejoint le ramenant à l’établissement. Cet épisode ne serait qu’une banalité si Simon ne s’était aperçu qu’ils en avaient profité pour lui glisser un poison ou un soporifique dans son verre de bière.

Naturellement Simon n’apprécie pas cette atteinte à son intégrité physique et il se lance dans une enquête qui le ramène à Abdul Osman, son ennemi. Or Galbraith Stride et Abdul Osman sont en cheville, se partageant le marché de la cocaïne et le trafic de Blanches au niveau mondial. Et Abdul Osman souhaite se débarrasser de son soi-disant partenaire dans ces affaires juteuses. Laura ne sait rien des affaires louches que traite son beau-père et encore moins de l’accord conclu entre les deux hommes. Car Osman veut épouser la jeune fille.

Mais Simon Templar est toujours là au bon moment pour remettre les choses en bon ordre et châtier, d’une manière ou d’une autre, légalement ou non, les coupables et les malfaisants.

Simon Templar est surnommé le Saint.

On n’était pas fixé exactement sur l’origine de ce surnom. Etait-ce parce que les initiales de Simon Templar – S.T. – faisaient penser à l’abréviation du mot « saint » : St ? ou bien parce que l’homme laissait toujours derrière lui, son crime accompli, une sorte de signature, un dessin linéaire, tel qu’en pourrait tracer un enfant, représentant un bonhomme dont la tête était surmontée d’une auréole symbolique ?

 

Publié en France par Fayard en 1933 dans le recueil Ici le Saint (The Saint and Mr. Teal ou Once more The Saint), cette nouvelle originellement titrée Galbraith Stride fut pendu, était accompagnée de L'Homme qui pouvait faire de l'or ou Le Secret du Professeur Quell (The Gold Standard) qui parut indépendamment dans la collection Crime et Police N°30 chez Ferenczi, rééditée dans la collection Le Verrou N°9.

Quant au titre ici proposé, il a été recueilli en France dans : Ici le Saint ! en 1933, réédité en 1934 dans la collection Crime et Police N°58 des éditions Ferenczi sous le titre La Tragédie du Louxor puis dans cette nouvelle édition en 1950.

Cette dernière précision est importante aux yeux des chercheurs et collectionneurs pour un raison toute simple : la seconde version parue chez Ferenczi semble avoir été remaniée pour coller à la date de parution.

En effet, on peut lire dans l’ouvrage paru dans la collection Le Verrou :

La maison qu’il avait choisie à son retour en Angleterre était encore aux mains des décorateurs qui réparaient fébrilement les dégâts causés par une puissante bombe explosant dans une pièce contiguë (page 5).

Comme la plupart des habitants du minuscule archipel (Les îles Scilly), il connaissait bien mieux l’Orient et les ports lointains que la moindre ville d’Angleterre. Cela avait frappé Templar dès ses premières visites à l’hôtel Tregarthen. Sur ces écueils, groupés à une quarantaine de milles du cap Land’s End, où l’on pouvait s’attendre à rencontrer des hommes n’ayant jamais quitté leurs îles, il avait retrouvé des gens qui connaissaient par leurs noms les rues de Bagdad et de Damas. Et quand on poussait un peu Mr. Smithson Smith sur ce sujet, il se recueillait un moment, ses yeux semblaient regarder très loin, sa voix s’adoucissait encore comme s’il revoyait plus nettement les déserts d’Arabie que la baie et les flots qui dansaient sous les fenêtres de l’hôtel… Simon sentait que, pour cet homme, tout l’intérêt de la vie tenait dans ces jours passés. La guerre avait pris des soldats dans tous les hameaux du Royaume-Uni pour les jeter à la mort, dans des lieux étranges, à l’autre bout du monde, puis les avait ramenés dans leurs villages endormis où ils se souvenaient (Page 24).

Doit-on attacher ces deux passages à des épisodes de la Seconde Guerre Mondiale ou tout simplement à la Grande Guerre ? Seul un collectionneur possèdant l’édition originale française dans la collection Crime et Police pourrait nous renseigner. Avis aux amateurs.

 

Leslie CHARTERIS : La tragédie du Louxor (The Death Penalty – 1933. Traduction de Claude Merry). Collection Le Verrou N° 5. Editions Ferenczi. Parution 3e trimestre 1950. 128 pages.

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8 avril 2021 4 08 /04 /avril /2021 04:25

Veuillez la fermer, afin d’éviter les courants d’air !

 

Jean-François COATMEUR : La porte de l'enfer.

S'ils te mordent, mords-les, telle est la fière devise de la bonne ville de Morlaix, dans le Finistère, nichée au fond de l'estuaire du Dossen.

Son précédent roman, dont la cité servait de décor, ayant connu le succès, Gilbert Valois, alerte sexagénaire et auteur renommé de romans policiers, s'est retiré dans la petite cité bretonne pour la seconde année consécutive afin d'y achever son nouveau manuscrit.

Il a lié des amitiés, avec Pierre Le Dérouet notamment ou encore Nathalie la journaliste qui est devenue sa maîtresse. Or Le Dérouet est décédé dans un accident d'auto avec son fils de onze ans dont il avait la garde pour une semaine, fait exceptionnel depuis sa séparation d'avec sa femme.

Même un ancien garagiste, ruiné il est vrai, peut rater une courbe et se planter dans le décor. Mais ce qui choque Valois, ce sont ces divergences qui entourent cet accident. Alors tel un chien de chasse il cherche, glane et accumule les informations, souvent contradictoires.

Le Dérouet parlait, sans qu'on y prêta vraiment attention, de sectes, il avait triché avec sa comptabilité et le reste à l'avenant. Seulement Valois découvre que malgré ses dénégations premières Génia possède un amant, l'énigmatique et cynique baron de Kergloff dont le manoir est situé dans le cœur des marais des Monts d'Arrée, cette Montagne Noire imprégnée de mystère et de légendes. De Kergloff est assisté d'un homme de confiance, un certain Steinert, et de deux Malinois dont les aboiements résonnent la nuit dans les tourbières au grand dam du voisinage.

 

Dans ce roman Jean François Coatmeur nous offre non seulement une histoire à l'atmosphère trouble issue des arcanes de la Bretagne profonde et mystérieuse, mais il s'amuse - ou passe ses états d'âme et ses crispations - avec les affres de l'écrivain lors de séances de dédicaces.

Contrairement au titre de la collection, il n'y a pas de véritable suspense dans ce livre puisque le lecteur se doute dès les premiers chapitres de l'identité du ou des coupables. Mais Coatmeur joue dans le registre du véritable roman noir, le Pourquoi primant sur le Qui et le Comment du roman policier traditionnel.

 

Jean-François COATMEUR : La porte de l'enfer. Collection Spécial Suspense. Editions Albin Michel. Parution octobre 1997. 344 pages.

ISBN : 9782226095138

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7 avril 2021 3 07 /04 /avril /2021 03:28

Méfiez-vous des monstres légendaires !

Christian JACQ : Le monstre du Loch Ness.

Après quelques années de mutisme, Nessie vient de faire parler d’elle, et pas en bien.

Deux cadavres ont été découverts sur les berges du Loch Ness, lacérés comme si une bête monstrueuse aux ongles acérés s’était acharnée sur ces profanateurs de son antre liquide.

Pour tout le monde il ne peut s’agir que de l’habitante des profondeurs du lac le plus célèbre d’Ecosse, de Grande-Bretagne, et peut-être du monde. Pourtant cette rescapée antédiluvienne n’avait pas habitué le petit monde des médias, de la police et des autochtones à semblable méfait.

De temps à autre, l’un des habitants de cette région sauvage et aride avait bien affirmé l’avoir aperçue, s’élevant hors des ondes, mais, soit c’était un privilégié, soit il était sous l’emprise du whisky, boisson nationale des Highlanders, une boisson aux vertus thérapeutiques incontestables.

Ces cadavres, cela fait désordre dans une région à vocation touristique, jettent le discrédit sur la population fortement ancrée dans la conservation des traditions et du mysticisme.

Scott Marlow, superintendant à Scotland Yard, est chargé de l’enquête et aussitôt, il s’empresse de solliciter l’aide de son ami l’ex-inspecteur chef Higgins, dont la compétence, les qualités en matière de réflexion, de perspicacité, de pondération, ne sont plus à démontrer.

Les deux policiers vont se trouver confrontés à un mur de silence, et il leur faudra s’infiltrer avec douceur mais détermination dans les failles que présentent chacun des suspects : Tullibardin Zohar, une jeune fille vierge désirant consacrer sa vie au monstre ; Grampian Mac Duncan, le chef du clan local, véritable seigneur despotique ; Mary Kincraig, sa sœur, une sorcière dont l’énorme chien, Lucifer, s’entiche d’Higgins ; Macbeth, le libraire, l’érudit, le gardien des vieux grimoires ; Gwendolin Hosh, le conservateur d’un musée consacré à Nessie ; et quelques autres dont Napton Norbury, un jeune paléontologue qui veut démontrer scientifiquement la présence de Nessie dans le lac ou l’affabulation entretenue par les autochtones.

Higgins enquête, ne se laissant pas démonter ou influencer par les divers témoignages teintés de mensonges. Il va, vient, imperturbable, recueillant dans son petit carnet d’innombrables anecdotes.

 

Une enquête policière qui flirte avec le fantastique, le surnaturel, la magie, mais qui malheureusement s’enlise un peu en cours de route.

Il est vrai qu’il n’y a rien de transcendant pour un enquêteur d’accumuler les versions des différents protagonistes.

Heureusement Higgins sort à son avantage dans ce bourbier et il aura même droit à une agréable surprise.

 

Ce roman a connu une première publication sous le pseudonyme de J.B. Livingstone, avec pour titre Les disparus du Loch Ness, dans la collection Dossiers de Scotland Yard, aux éditions du Rocher, en novembre 1991.

J.B. LIVINGSTONE : Les disparus du Loch Ness. Collection dossiers de Scotland Yard. Editions du Rocher.

J.B. LIVINGSTONE : Les disparus du Loch Ness. Collection dossiers de Scotland Yard. Editions du Rocher.

Christian JACQ : Le monstre du Loch Ness. Collection Les enquêtes de l’inspecteur Higgins N°39. XO Editions. Parution le 11 mars 2021. 242 pages. 13,90€.

ISBN : 978-2374483085

Première édition J.B. LIVINGSTONE : Les disparus du Loch Ness. Collection dossiers de Scotland Yard. Editions du Rocher. Parution 5 novembre 1991. 200 pages.

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2 avril 2021 5 02 /04 /avril /2021 04:21

Je ne sens plus
Ma différence
Quelque chose me drape
Quelque chose me tue
Quelque chose m'attaque
Je ne la sens plus
Ma différence…

Daniel CARIO : Le sourire du lièvre.

Leur première rencontre, c’était dans la cour de l’école privée de Saint-Mériac, dans les environs de Quimper, en cours préparatoire.

Pourtant c’était comme si elles s’étaient regardées dans une glace, seule la couleur de cheveux les différant l’une de l’autre. Sinon on aurait pu dire qu’elles étaient jumelles, tellement elles se ressemblaient. Jusqu’au bec-de-lièvre qui ornait leur lèvre supérieure.

Marie est la fille adoptive d’un riche notable, qui dirige une entreprise de pompes funèbres, qui ne connait pas la crise, vivant dans un grand manoir situé à la lisière de Saint-Mériac. Hubert Lesvêque et sa femme ont un fils âgé de quatre ans de plus que Marie. Maurice est un fourbe, un être chafouin, qui n’a de cesse d’importuner Marie. Hubert est colérique tandis que sa femme se laisse embobiner par son mari. Marie a été adoptée par madame Lesvêque, malgré l’avis de son mari, parce qu’ils ne pouvaient avoir d’autres enfants, mais elle est un peu la souffre-douleur du foyer. Elle a été recueillie alors qu’elle n’avait que quelques jours, n’ayant pas été déclarée, et ne possède que pour seul bagage une petite médaille en argent qu’elle garde précieusement par devers elle.

Jeanne est la fille d’un vannier qui vit seul dans une maison isolée, dans les bois, mais assez proche toutefois du manoir des Levesque. La mère est décédée trop tôt, et le vannier a reporté toute son affection et son amour sur sa fille. Il n’est pas riche même s’il a trouvé un petit pécule caché dans cette fermette.

Entre les deux gamines, aussitôt, s’élève comme une bulle dans laquelle elles sont enfermées, n’écoutant pas les railleries des autres élèves. Seule leur institutrice les affectionne, ainsi que la directrice dans un moindre sentiment toutefois. Elles deviennent deux sœurs inséparables, au grand plaisir du vannier, tandis que le père Lesvêque et sa femme s’offusquent de cette alliance qu’il juge hors norme. Sa fille ne doit pas frayer avec la fille d’un romanichel, ainsi considère-t-il le vannier. Tandis que Maurice continue à taquiner, à harceler Marie. Les Lesvêque préférant ne rien voir, le gamin ayant toujours raison selon eux.

Jusqu’au jour où le père Lesvêque, dont l’entreprise de pompes funèbres prend de plus en plus d’importance, décide de séparer les deux gamines, envoyant sa fille dans un institut privé catholique dans une ville voisine. En réalité il s’agit d’une usine à fabriquer des religieuses. Les deux fillettes correspondent et les années passent jusqu’au jour où Marie s’évade de cette institution qu’elle exècre, six ans après y avoir été enfermée.

Marie et Jeanne, qui ont alors treize ans, vont pouvoir se retrouver mais le drame éclate, d’une part à cause d’une ronce enfoncée dans la main de Jeanne, et d’autre part par un nouvel harcèlement de Maurice, qui à dix-sept ans veut se prouver qu’il est un homme auprès de Marie.

Marie est portée manquante et Lesvêque, qui n’est pas charitable, accuse le vannier de cacher sa fille. Les années passent, la guerre est déclarée et la soldatesque nazie envahit la Bretagne. Le petit village n’est pas épargné et le manoir de Lesvêque sert alors de quartier général.

 

Ce roman, qui comprend cinq parties, aurait pu être scindé en deux tomes, tellement la première partie, axée sur l’amitié des deux gamines, aurait suffit pour alimenter l’intrigue. La seconde partie, qui est plus orientée sur les démêlés du vannier et de sa fille face à la haine qu’entretient Lesvêque qui s’adonne de plus en plus à la boisson, plonge le lecteur dans les affres de la guerre, l’Occupation et la Résistance.

La première partie est titrée La rencontre, la troisième et la quatrième L’Occupation et La Résistance, et la dernière La révélation. Et la deuxième me demanderez-vous ? Son titre est trop révélateur pour que je le dévoile, mais vous pouvez toujours compulser cet ouvrage chez votre libraire préféré, puisqu’il est considéré, et ce n’est que justice, comme commerce essentiel.

Certains passages sont poignants, notamment lorsque la Résistance entre en conflit avec l’Occupant, des hommes considérés comme des terroristes par les Nazis, des Résistants par les Bretons, du moins la plupart, car d’autres trouvent leur compte dans la présence de la soldatesque allemande. Comme quoi les actions sont interprétées différemment selon que l’on se place d’un côté ou de l’autre des belligérants. Et la versatilité des individus est conditionnée par les avis des uns et des autres.

Si ce roman est l’éloge de l’amitié et du droit à la différence, sociale et physique, c’est aussi celui du secret qui souvent prévaut dans les campagnes profondes. Secret familial évidemment avec l’origine indéterminée des enfants abandonnés. S’y ajoute un petit côté fantastique lorsque la fille du vannier est reconnue comme une guérisseuse par l’imposition des mains. Mais il est vrai que l’influence des guérisseurs, des rebouteux, était forte dans la population, à tort ou à raison.

Un roman que l’on ne peut lâcher en cours de lecture tant l’intrigue est habilement élaborée, réservant de nombreuses surprises et sautillant de rebondissement en rebondissement.

Daniel CARIO : Le sourire du lièvre. Collection Terres de France. Editions Presses de la Cité. Parution le 11 mars 2021. 542 pages. 21,00€.

ISBN : 9782258192829

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31 mars 2021 3 31 /03 /mars /2021 04:35

Meilleur que le bain du même nom ?

Max-André DAZERGUES : Le cocktail de minuit.

La fête bat son plein à l’Elyséeum, un luxueux music-hall de l’avenue des Champs-Elysées, et surtout dans les coulisses. Le spectacle mis en scène par Maxime Frémy, le directeur, vient d’être joué pour la deux-centième fois et la vedette principale, Gladys Damour, est ovationnée. Elle doit se produire pour les Etats-Unis.

Naturellement Maxime Frémy est aux anges, mais il n’est pas le seul. L’amant de la charmante chanteuse, le banquier Abel Berhmann, ne peut que se réjouir, car le succès enregistré par sa maîtresse rejaillit sur lui. Seul peut-être Mimi d’Olso, le chanteur florentin, un individu chafouin, ressent une pointe de jalousie.

Berhmann invite chez lui à une petite fête quelques-uns des participants à cette prestation qui vient de se terminer. En sortant il remarque une des danseuses, une des Darling Girls, et elle lui tape dans l’œil. Et il se renseigne auprès de Mimi d’Olso. Comme à son habitude, à minuit, délaissant ses invités, Berhmann se rend dans son bureau afin de déguster son cocktail de minuit qu’il ingurgite quotidiennement à la même heure.

Ignorant l’attrait qu’elle suscite, Colette Denis rentre chez elle, dans sa mansarde où elle vit avec sa mère souffrante. Leur jeune voisin, Georges Serrières, s’enquiert de leur santé. Il est si prévenant avec Colette.

Dans un journal, il repère une petite annonce dans laquelle il est précisé qu’on recherche un secrétaire particulier. Pas de nom mais un numéro. Il se rend au journal, puis au domicile du particulier qui n’est autre que le banquier Berhmann. Celui-ci engage le jeune homme mais à une condition, que Georges soit à sa disposition vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Comme Georges a besoin de se refaire une santé financière il accepte, mais ne peut prévenir immédiatement son amie Colette.

Berhmann demande à Mimi d’Olso de lui organiser une entrevue avec Colette, et la jeune fille, confiante se présente au domicile du banquier. Elle accepte une coupe de champagne puis Berhmann tente de la prendre dans ses bras. Quoiqu’elle soit un peu grise, Colette se défend. C’est à ce moment que Georges entre inopinément dans la pièce et surprend Colette dans les bras de son patron.

Aussitôt il imagine que son amie cède aux avances de son patron alors qu’il n’en est rien, au contraire. Il coupe les ponts avec la pauvre Colette. Un peu plus tard, la banque Berhmann connait de sérieuses difficultés de trésorerie, mais Berhmann n’en a cure. Il continue à déguster son cocktail de minuit. Jusqu’au jour où il est découvert mort dans son fauteuil. Empoisonné. Crime ou suicide ? Georges est soupçonné de meurtre.

 

Comme souvent, un roman sentimental peut cacher une histoire policière.

Le cocktail de minuit est une œuvre de jeunesse, avec ses défauts et ses qualités, et malgré certaines coïncidences troublantes, l’intrigue tient la route, avec un épilogue dont on se doute mais qui est toutefois bien amené.

Par la suite Max-André Dazergues rédigera des intrigues plus abouties, toujours dans le registre sentimentalo-policier, mais en se renouvelant.

Max-André DAZERGUES : Le cocktail de minuit. Collection Mon livre favori. Editions Ferenczi. Parution 5 août 1929. 64 pages.

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26 mars 2021 5 26 /03 /mars /2021 04:50

Sans conservateur !

Henri CHRISTIAN : Sorbet au sang.

Il neige sur Oléron, La Tremblade et Marennes. Un temps peu propice pour sortir en 4L. N’est-ce pas messieurs les gendarmes qui vous retrouvez les roues en l’air, au fond d’un ravin, groggys comme si vous aviez percuté une moissonneuse-batteuse-lieuse. Voiture et, plus embêtant, radio inutilisables.

Que faire dans ce cas ? Tout simplement rentrer à la gendarmerie à pied.

En cours de route nos deux pandores rencontrent bien des motards mais ceux-ci sont également en panne. Ils continuent leur promenade forcée en espérant trouver âme qui vive, mais en hiver, toutes les habitations, essentiellement des résidences secondaires, sont désertes. Pourtant un téléphone serait le bienvenu, afin de prévenir les collègues et sortir de la panade dans laquelle ils sont plongés.

Pendant ce temps, Albert Simin, dit le Cow-boy, procède à une attaque en règle en compagnie d’autres malfrats. Tout avait été pensé, conçu de main de maître et l’attaque de la diligence, pardon, du fourgon blindé, a lieu comme prévu.

Quelques balles sont échangées, des corps restent sur le tapis enneigé, mais ce sont les aléas du métier. Ce qui n’était pas prévu, c’était ce fameux accident qui favorise des rencontres avec la maréchaussée, rencontres non souhaitées.

Ce roman dû à deux journalistes, Henri Bovet et Christian Gonzalès, est mené rondement et se lit rapidement. Un roman au style qui mêle lyrisme d’avant-garde et argot désuet. Déconcertant mais pas dénué d’intérêt.

Henri CHRISTIAN : Sorbet au sang. Collection Beretta 9 mm N°4. Editions Fleuve Noir. Parution octobre 1989. 160 pages.

ISBN : 9782265041783

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25 mars 2021 4 25 /03 /mars /2021 05:39

Pourtant ils ne sont pas sur la paille !

Richard Martin STERN : La moisson de la violence

Tout comme son prédécesseur en littérature, John Steinbeck, Richard Martin Stern est né en Californie, et c’est tout naturellement qu’il prend pour décor de l’intrigue dans certains de ses romans cet état de l’ouest des Etats-Unis.

La moisson de la violence est tout proche des thèmes développés par Steinbeck dans A l’est d’Eden et dans Les raisins de la colère, quoique selon Richard Martin Stern ce dernier roman fut dénigré par la plupart des Californiens qui ne s’y reconnaissaient pas. Et qui ne reflétait pas la stricte vérité, ce qui est évidemment un point de vue subjectif. Des analogies évidentes foisonnent entre ces ouvrages mais le développement, l’écriture, ainsi que la période au cours de laquelle ces événements sont narrés, s’avèrent différents.

La crise économique ensuite, et un livre Les raisins de la colère qui exaspéra agriculteurs et industriels dans toute la vallée. Un tas de mensonge, à les entendre, les choses n’allaient pas si mal, pour personne. Peut-être.

 

En 1849, la ruée vers l’or provoque l’arrivée de nombreux pionniers en Californie. Ces migrants désirent s’enrichir le plus rapidement possible mais bien souvent il ne s’agit que d’un miroir aux alouettes. Les familles Meyer et Stanfield font partie de ces nouveaux venus dans l’état qui a proclamé son indépendance en 1846, interdit l’esclavage et s’est doté d’une constitution en 1849, intégrant l’Union américaine en 1850.

La famille Stanfield préfère investir dans le foncier et lorsque nous faisons la connaissance de ces deux familles, George Stanfield est à la tête d’un immense domaine agricole tandis que Karl Meyer dirige une banque prospère. Ils sont cousins par leurs ancêtres et leurs enfants suivent un parcours différent des parents.

Peter, âgé de vingt ans et le fils de George, est animé d’idées plus ou moins révolutionnaires, anarchistes. Il vit seul en ville dans un taudis, et fréquente très souvent son cousin Paul, le fils de Karl. Sa sœur Ellen, dix-sept ans, est désignée comme la maîtresse de maison, sa mère étant décédée lors de l’accouchement. Elle est plus raisonnable, la tête sur les épaules, mais cela ne l’empêche pas de rejoindre son frère et son cousin, s’ébattant nue dans les eaux du canal d’irrigation.

George possède ses bureaux à San Francisco mais grâce à son frère Scott, le domaine agricole est en pleine expansion. Fruits et légumes sont récoltés, le raisin étant traité, selon son espèce, en consommation de table ou transformé en raisin sec.

Les ouvriers agricoles sont payés avec un lance-pierre, mais sont assez nombreux pour que les patrons refusent d’embaucher même pour une paye au rabais.

Mais l’orage gronde parmi la population et les autres petits exploitants. Outre le domaine agricole, la famille Stanfield possède des puits de pétrole et surtout des forages hydrauliques. Et les fermiers sont ulcérés que leur eau soit détournée au seul profit des Stanfield.

Le bâtiment abritant la déshydrateuse pour fruits séchés est incendié et l’appareil est détruit. Plus grave, il est à déplorer la mort d’un des gardiens, tandis que l’autre est blessé mais incapable décrire les agresseurs. Le shérif est chargé de l’enquête mais d’autres faits se sont déroulés précédemment et se produisent par la suite.

Le père de George, sénateur à Washington, et Jane, sa sœur célibataire et sexagénaire qui vit en Europe, s’installent au domaine. Peter pendant ce temps recueille une routarde, Benji, dix-sept ans, qui paie en nature son hospitalité.

 

Drames en tous genres et problèmes sentimentaux ponctuent cette intrigue, un peu longuette, d’une saga familiale. La description de l’ascension d’une famille de migrants qui arrive à s’imposer en Californie lors de la ruée vers l’or et à dominer fermiers et hommes politiques. Naturellement, ces parvenus ont empiétés sur leurs concitoyens, moralement, financièrement, sociologiquement non sans laisser de traces indélébiles. Ils règnent en maître sur la Vallée, étant à l’origine de la ville de Stanhope qu’ils contrôlent via des pressions, des dessous de table et des largesses.

Pourtant alors que des attentats sont perpétrés, que des grèves traduisent les revendications des cueilleurs, les tensions familiales enveniment cette union de façade.

Ce roman, cette intrigue, qui n’est pas sans rappeler d’autres ouvrages, dont ceux de Steinbeck déjà évoqués, est proche également dans l’esprit des séries télévisées qui passionneront des millions de téléspectateurs, Dallas et Dynastie à la fin des années 1970 et courant 1980. Le rêve américain dans toute son ampleur et ses méfaits.

Richard Martin Stern a été publié en France en Série Noire, dans la collection L’Aventure Criminelle et  aux Presses de la Cité.

Richard Martin STERN : La moisson de la violence (Standfield Harvest - 1972. Traduction Alexandre Ralli). Collection Toison d’or N°26. Editions Jean Goujon. Parution 2e trimestre 1980. 448 pages. Première édition : Editions de Trévise 1975.

ISBN : 286291099

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24 mars 2021 3 24 /03 /mars /2021 05:46

Mais parfois le jeu tourne au drame !

Maurice PERISSET : Les maîtresses du jeu.

Immobilisée dans un fauteuil roulant depuis l’accident qui coûté la vie à son mari, le docteur Pascal Delorme, Marie-Laure a décidé de se lancer dans l’écriture de romans policiers.

Une de ses nouvelles a été publiée, ce qui constitue un encouragement notable. Pour écrire ce roman, elle met en scène ses familiers, ses proches. Mais prémonition ou hasard, elle est sujette à des visions qui malheureusement se réalisent.

Par exemple, son ami Félix, son ex-amant, est retrouvé mort, la tête dans la vase dans un canal d’irrigation. Une mort qui arrive fort mal à propos, ou bien, c’est selon, puisque de nombreux projets deviennent ainsi caducs.

Gilles, le fils de Marie-Laure, ne pourra pas passer quelques jours en mer à bord du yacht de Félix, tandis que d’autres se frottent les mains. Le lotissement Les vergers du Lez ne sortira pas de terre et l’harmonie de la nature ne sera donc pas détruite.

 

Maurice Périsset nous livre ici un très beau livre de mœurs provinciales, à l’atmosphère étouffante, proche du style de Simenon, mais à l’intrigue plus travaillée et à l’écriture plus soignée.

Ce roman a d’ailleurs permis à son auteur d’obtenir le Prix de la Ville de Reims, prix qui s’ajoute à ceux déjà obtenus : Prix du Quai des Orfèvres, Prix du Suspense français, Prix Moncey.

A signaler que Maurice Périsset est également l’auteur de quelques biographies consacrées à Gérard Philippe, Jean Gabin ou encore Simone Signoret.

Maurice PERISSET : Les maîtresses du jeu. Collection J’ai Lu Policier N°2570. Editions J’ai Lu. Parution avril 1989. 320 pages.

ISBN : 9782277225706

Première édition : Editions du Rocher. 1984.

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Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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