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12 juin 2012 2 12 /06 /juin /2012 13:54

  rennes le chateau1


Les amateurs d’énigmes, de mystères, de légendes de trésors cachés, ont tous lus des articles ou des ouvrages concernant le trésor caché de Rennes-le-Château et de l’abbé Bérenger Saunière, notamment le document de référence signé par Gérard de Sède publié aux éditions J’ai Lu, collection L’Aventure Mystérieuse, en 1969. Un ouvrage sérieux, documenté, argumenté, mais qui se révélera issu d’un canular mais continue à alimenter l’imaginaire des chercheurs de trésors.

Bouquiniste à Quillan, dans l’Aude, Jean-Pierre Lamasse surnommé Jipé est surpris par sèdel’entrée d’un éventuel client qu’il ne connait pas dans son échoppe. La saison est morne et en général peu de personnes se pressent pour venir dégotter un des ouvrages qu’il propose à la vente. L’homme s’intéresse aux livres, aux bijoux, aux cartographies que recèle l’antre de Jipé. Lequel propose aussi à la vente des tabourets en bois sculpté, réalisés par Patrick dit le Dahu. Mais il est encore plus médusé lorsqu’un couple de gendarmes fait irruption lui demandant son livret de police, un document qui permet à la maréchaussée de vérifier les entrées et les sorties de marchandises. Les deux pandores en profitent pour signaler la disparition de deux marginaux vivant dans la région : Luc dit le Chevalier et Aurore.

saunier1.jpgOr la fourgonnette de Jipé a été signalée quelques jours auparavant stationnant au domicile des deux étrangers. Le bouquiniste s’explique facilement, sans réticence, il n’a rien à cacher. Luc Schaeffer désirait se débarrasser de tous les ouvrages qu’il possédait, des livres sur l’ésotérisme, sur l’histoire de Rennes-le-Château et autres, neufs pour la plupart, ainsi que de bijoux runiques et même de meubles. Les gendarmes désirent également rencontrer Stéphane, l’associé de Jipé. Mais celui-ci est, comme à son habitude, sur un des marchés de la région.

Dans un bar, alors que Jipé assiste à un mini concert de jazz, il aperçoit André, son client reparti les mains vides lors de la visite des gendarmes. André est accompagné d’une jeune femme, Solange, qu’il présente comme sa sœur, ou plus exactement sa demi-sœur. Elle porte autour du cou un pendentif runique. Elle exerce le métier d’astrologue et se définit comme voyante et psychothérapeute, mais ses amis la considèrent comme un peu folle. Du moins c’est ce qu’elle avoue. Un verre en entraînant un autre, Jipé se réveille le lendemain avec une gueule de bois carabinée. Lorsqu’il ouvre les yeux, il est allongé dans les vignes du Seigneur et chez Solange et Jean BodinAndré. Et complètement réveillé lorsque Stéphane lui apprend par téléphone que les gendarmes sont à l’échoppe qui a été cambriolée. Par vraiment cambriolée en réalité, puisque rien n’a été emporté. Seulement tout est chamboulé et dans sa chambre un mannequin de couturière est allongé sur son lit affublé d’une culotte sur laquelle est inscrit le prénom d’Aurore. Et sur le mur un texte en latin a été tagué, texte issu d’un ouvrage du XVIème siècle, dû à la plume d’un certain Jean Bodin, un extrait d’un traité sur l’Inquisition. Un qui n’est pas content, c’est Charlène, surnom de Charles, un homosexuel qui procède au ménage chez le bouquiniste parce qu’il va se taper le boulot à remettre tout en ordre.

Jipé retourne à Bursac, là où logeaient Luc et Aurore afin de procéder au reliquat de déménagement. Il rencontre De Brigoles, le propriétaire de la maison qui lui affirme que certains des ouvrages vendus par Luc lui appartiennent. D’ailleurs Jipé peut vérifier, un ex-libris au nom du comte est apposé dessus.

Tous ces personnages se retrouvent peu à peu enfermés dans un cercle infernal, aspirés comme dans un entonnoir, et plus dure sera la chute. Eric Maneval nous invite à un voyage mêlant aujourd’hui, l’histoire en elle-même, hier, le point de départ avec la rencontre entre Luc et Aurore deux ans auparavant, et avant-hier, la vie de Béranger Saunière puis les pseudos révélations concernant le fameux trésor de Rennes-le-Château.

Un roman qui met en scène, et ce n’est pas si fréquent pour que cela mérite d’être la-tour-Magdala-13.jpgsouligné, un héros bouquiniste. Les références littéraires sont nombreuses, savoureuses, mais jamais pédantes. Et comme Eric Maneval fut durant quinze ans bouquiniste lui-même sur les marchés de la vallée de l’Aude, il connait fort bien son sujet et le traite agréablement. Mais de plus il nous gratifie de quelques digressions fort bien venues, concernant entre autres les pratiques de ses confrères en la profession. A voir le classement impeccable, les reliures, j’étais conscient qu’il faudrait jouer serré si je voulais emporter le tout pour pas trop cher. Plus loin, parlant d’un des fournisseurs attitrés, il écrit : Il nous amenait parfois de vieilles éditions de Cœurs Vaillants ou des Pieds Nickelés qu’on lui achetait une misère et revendait au prix fort sur Internet. Un roman qui n’aurait pas dépareillé, au contraire, dans la fameuse et trop tôt abandonnée collection Pierre de Gondol créée par Jean-Bernard Pouy aux éditions Baleine. J’en redemande !

 

N'hésitez pas à compulser le site Polars et Grimoires, il vaut le coup !


Eric MANEVAL : Rennes-le Château, tome sang. Collection Polars et Grimoires. Editions Terre de Brume. 250 pages. 13,80€. 

challenge régions

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11 juin 2012 1 11 /06 /juin /2012 09:34

pobi

Près de trente ans que Jake Cole n’était pas revenu sur les lieux de son enfance. Il était parti à dix-sept ans du domicile familial, devenant alcoolique, drogué, un petit voyou, se retrouvant à purger des peines de prison. Puis s’amendant, il est devenu enquêteur indépendant, travaillant pour le FBI. Il possède une particularité : il revoit, il reconstitue en pensée des scènes de crimes et peut s’immiscer dans l’esprit de psychopathes.

S’il revient chez son père, c’est parce que celui-ci est atteint d’Alzheimer. Dans un subit accès de démence, il s’est gravement brûlé et a passé par une fenêtre. Depuis il est soigné dans un hôpital. Jacob Coleridge est un peintre reconnu qui a fréquenté Andy Warhol et Picasso, mais son style est assez particulier comme le démontrent les fresques répétitives sur les murs et les plafonds. Des représentations noires, sanguinolentes, de silhouettes sans visage. En visitant la maison Jake Cole découvre déposés un peu partout des centaines de cutters, disposés comme prêts à être saisis quelque soit l’endroit où il se trouve. Des bouteilles de whisky jonchent le sol. Dans le réfrigérateur il découvre des clés, des livres de poche et même du gazon.

Des milliers de tableaux qui sont empilés dans le garage, ne représentent à première vue rien, des couleurs sombres. Il rend visite à son père, mais celui-ci ne le reconnait pas. Ou ne veut pas le reconnaitre. Dans un accès de fureur, le peintre dessine sur les murs de sa chambre une silhouette, à l’aide de ses moignons, un personnage rouge et noir.

Jake retrouve l’un de ses anciens camarades de jeu, Spencer. Un meurtre vient d’être commis, et comme Jake est non loin des lieux, il a été désigné pour apporter son aide. Le shérif Hauser aussi est sur place. Toutes personnes qu’il a fréquentées jeune. L’horreur les attend. Deux corps sont découverts, une femme et son fils, entièrement écorchés. Et il faut avoir les nerfs solides pour accepter ce tableau. Mais leur identité ne peut être établie. Ils étaient venus en touristes, avaient loué la maison, c’est tout ce que les enquêteurs apprennent.

La police scientifique est dépêchée sur place le lendemain, mais dans la nuit, Jake a eu des flashes, des fulgurances, reconstituant des éléments, se souvenant d’indices qui avaient échappé lors des premiers relevés. Ce qui a pour conséquence de perturber son régime cardiaque, car il possède un pacemaker afin de réguler son rythme cardiaque, et son cœur a tendance à s’emballer lors d’événements tragiques et stressants. Et lorsque cela arrive, il a des pertes de connaissance.

Kay et Jeremy, la jeune compagne de Jake et leur fils de trois ans, le rejoignent pour le week-end. Kay est violoncelliste mais elle a connu le même parcours que Jake dans l’enfer de la drogue. Et ils possèdent en commun d’autres particularités. Si sur son corps figurent quelques tatouages, celui de Jake en est entièrement recouvert jusqu’en haut du cou et des métacarpes. Un tatouage peu banal : un texte extrait de La divine comédie de Dante.

La mère de Jake est décédée alors qu’il n’avait que douze ans, un événement qui a déclenché le début de la rupture avec son père. Partie chercher quelques bricoles en voiture, le père étant une fois de plus trop saoul pour conduire, elle a été retrouvée morte peu après.

D’autres meurtres sont perpétrés, et les cadavres sont retrouvés écorchés, comme les deux premières victimes. Jake est persuadé que son père est au milieu de ces drames. Son père ou lui ?

Mais les éléments météorologiques s’immiscent dans cette tragédie, se mettant au diapason. Dylan, un ouragan en provenance du Cap-Vert, est annoncé. Hauser est chargé d’inviter, d’obliger même les habitants de la presqu’île à déménager, à s’éloigner de la tempête dont l’œil se dirige inexorablement vers cette langue de terre. Un déchaînement furieux de vent, de pluie, qui contrarie les déplacements des policiers surchargés.

L’intrigue de ce bon roman, qui parfois use de clichés (mais n’est-ce pas le lot des thrillers ?) et joue avec les nerfs du lecteur, est située à Montauk à l’extrême pointe de Long Island. Si l’auteur ne s’appesantit pas trop sur les descriptions de paysage, toutefois il s’attarde sur quelques digressions sans intérêt, notamment les relations charnelles entre Kay et Jake qui relèvent du sadomasochisme. Ceci n’apporte rien de plus à la psychologie perturbée des protagonistes. Mais je retiens des images fortes : le garage dans lequel est stationnée une Mercédès décapotable de 1966, une petite fille autiste, une croisière en yacht près des Bermudes, la confrontation entre David Finch, le galeriste de Jacob Coleridge et véritable requin, et Jake, ou encore le portrait signé Chuck Close dont les yeux ont été découpés. L’impression d’angoisse va crescendo.

Et lorsque le livre est refermé, après un épilogue flamboyant et frustrant, on s’aperçoit que Robert Pobi nous a entraînés dans une ronde infernale. Des images pixellisées qui se détachent, ne possèdent pas forcément de lien entre elles, des taches de couleur sombre qui oblitèrent d’autres points plus lumineux, puis tout à coup le flou se dissipe lorsque tout se met en place et offre un tableau en trompe l’œil, un peu à la manière de Raphaël, Michel-Ange, Botticelli ou Cornelis Norbertus Gysbrechts mais revisité par Jérôme Bosch. Tout était sous nos yeux, suffisait de réaliser l’assemblage, et en même temps on se dit que Robert Pobi nous a emmené en bateau.

Un bon premier roman, avec une intrigue maîtrisée, et de nombreuses références à l’art pictural, ce qui est normal puisque Pobi a longtemps travaillé dans la sphère des antiquaires. Maintenant il doit démontrer qu’il ne s’inscrira pas dans la liste des auteurs n’ayant qu’un seul roman à leur actif.

La citation :

-      Vous êtes un ancien alcoolique.

-      Juste un ivrogne entre deux cuites.

Robert POBI : L’invisible (Bloodman – 2011. Traduction de l’anglais/Canada par Fabrice

Pointeau). Editions Sonatine. 430 pages. 21,30€.

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9 juin 2012 6 09 /06 /juin /2012 07:56

cheminfer.jpg

Un p’tit train s’en va dans la campagne, un p’tit train s’en va de bon matin…

Cette célèbre chanson, interprétée notamment par André Claveau, reprise par les Rita Mitsouko avec de nouvelles paroles, aurait pu figurer en préface de cet ouvrage qui nous propose de voyager dans le temps et retrouver quelques personnages ou des événements qui ont défrayé la chronique judiciaire, policière et politique.

Aujourd’hui il n’est pas une semaine sans que des voyageurs se plaignent de la SNCF (sur neuf cinq fainéants d’après Coluche, mais je lui laisse la paternité et la véracité de cette affirmation !) et connaissent des désagréments. Des retards à répétition dus à des ruptures de caténaires, à un manque d’entretien, à des suicides, à des véhicules bloqués sur les voies pour diverses raisons, à des passages à niveaux dangereux, à un manque de personnel, à des grèves revendicatives ou en protestation d’agressions perpétrés envers les agents du réseau ferré, à la suppression de lignes, des gares fermées car non rentables. Liste non exhaustive bien évidemment.

Patrick Eris nous propose donc un voyage dans le temps à bord de tortillards, d’express ou de trains prestigieux, en restant toujours sur le rail de la narration avec une gare de départ, une d’arrivée et dix-huit stations. Mais je ne vous imposerai pas tous les arrêts et vais brûler quelques gares sans vergogne.

Le protocole élyséen s’inquiète, observe avec circonspection ces attitudes déplacées d’un président qui semble excité dans ses propos et démesuré dans ses gestes. Il ne s’agit pas de qui vous pensez mais d’un président de la troisième république, qui ne le fut que sept mois, devenu célèbre non pas pour des décisions, bonnes au mauvaises, au cours du laps de temps où il aura été à la tête de l’état, mais pour avoir été retrouvé en pleine nuit cheminant en pyjama sur les rails non loin de Montargis. Paul Deschanel, puisque c’est de lui dont il s’agit, est tombé par inadvertance sur la voie. C’était un homme fantasque à la jeunesse difficile et qui se conduisit en personnage farfelu. S’il s’agit ici d’un accident, d’une étourderie, qui pourrait prêter à sourire, d’autres hommes politiques ou proches du pouvoir ont connu un sort funeste dans les trains ou sur le ballast. Ainsi Marc-Antoine Barrême, préfet de l’Eure, retrouvé sur les voies le 13 janvier 1886, près de Maisons-Laffitte. La thèse de l’accident est rapidement écartée car le haut fonctionnaire a reçu une balle dans la tête. Le vol semble exclu à première vue puisque le cadavre possède encore son porte-monnaie, sa montre et divers objets précieux. Mais il apparaît bien vite qu’il aurait dû être en possession d’une sacoche contenant une forte somme d’argent destinée à régler des factures départementales. Aucune frasque ne peut lui être reprochée, sa femme n’entretient pas de liaisons, donc il faut se résoudre à porter les soupçons ailleurs. Peut-être sur d’autres personnages de l’état, un sous-préfet jaloux, le gendre de Jules Grévy, alors président de la République, ou tout simplement un individu malhonnête ayant appris par hasard l’existence de la sacoche.

Alors qu’il n’est encore que Maire de Paris et président du RPR, Jaques Chirac voyage à bord du Capitole, l’un des fleurons du rail, afin de regagner sa chère Corrèze. Le 29 mars 1982, à une vingtaine de kilomètres au nord de Limoges, une violente explosion secoue les rails. Un acte revendiqué trois heures après au nom des amis de Carlos.

Autre histoire qui défraya la chronique, celle du Bordeaux-Vintimille, de triste mémoire et qui fut produite et interprétée au cinéma par Roger Hanin sous le titre de Train d’enfer. De futurs légionnaires qui perpétrèrent un meurtre sous l’influence de l’alcool et du racisme.

Avec les guerres, la SNCF connaîtra bien des avatars et des heures sombres. Ainsi le 1er septembre 1944, alors que les Américains ont débarqué depuis près de trois mois sur les plages de la Normandie, que Paris a été libéré, un train « accueille » les prisonniers de la maison centrale de Loos, qui est surchargée de prisonniers, principalement des résistants. Ce sera le dernier convoi quittant la France avec à bord, des voyageurs malgré eux, entassés dans des wagons ayant servis à des transports de marchandises, charbon ou chaux, direction la Belgique puis l’Allemagne. Il sera surnommé le train de la Malchance.

Autre convoi qui subira un sort funeste, le train 612 qui doit relier la gare de Bassano en Vénétie italienne et la France. Le 12 décembre 1917, le train transportant des permissionnaires passe sous le tunnel du Mont Cenis et s’arrête à Modane. Les pioupious s’égaient dans les cafés environnant la gare et après force libations s’apprêtent à remonter dans les voitures. Seulement le mécanicien du train, un militaire, refuse de repartir. Les freins sont défectueux et risquent de lâcher à tout moment lors de la longue et périlleuse descente qui se profile. Mais un soldat, c’est avant tout un soldat, et il doit obéir aux ordres provenant de ses supérieurs, même si cela va à l’encontre du bon sens. Heureusement l’histoire retiendra aussi les bons souvenirs, ainsi le fameux wagon dans lequel fut signé l’armistice le 11 novembre 1918.

Le 8 mai 1842, la compagnie ferroviaire enregistrera sa première catastrophe sur la ligne Paris Saint-Germain-en-Laye. Parmi les victimes, Dumont d’Urville, le célèbre navigateur ! Ce train n’arrivera jamais à destination à cause d’un enchainement de circonstances malheureuse. La locomotive affectée pour le voyage tombe en panne dès sa sortie de l’atelier. Aussitôt une loco de rechange est prévue, mais elle a déjà effectuée un grand nombre de rotations, et les cheminots n’ont guère confiance en elle. De plus des pièces devaient être changées mais elles sont retenues en douane, la compagnie étant dans l’impossibilité de payer les frais, et pire, suite à une injonction du préfet de police qui voulait empêcher les voyageurs de descendre des wagons et se balader sur les voies, la solution trouvée fut de boucler de l’extérieur les portières !

Bien d’autres incidents sont narrés, et les attaques de la diligence, pardon, du cheval de fer à vapeur, ne manquèrent pas. Les bandits du rail furent légion, les hold-up aussi, mais je vous laisse les découvrir dans cet excellent ouvrage qui devrait vous faire passer le temps, si vous prenez le train pour rejoindre votre villégiature estivale ou tout simplement votre demeure familiale le soir après une longue et harassante journée de labeur.

On déplorera tout juste quelques coquilles dans des datations. Par exemple L’énigme de la Porte de Charenton, une affaire qui s’apparente à un meurtre en chambre close, se déroule en 1937. Un homme revendique l’assassinat d’une jeune femme mais il est signalé qu’il est né en 1925. Un peu jeune non ? Dans Le 612 ne répond plus, une stèle dédiée aux victimes est érigée en décembre 1996, soit près de quatre-vingts ans après le drame qui eut lieu en 1917. Quatre-vingts et non cinquante comme il est écrit, en chiffres je le précise, d’où peut-être la confusion lors de l’impression.

A noter que chaque histoire est précédée d’une illustration, extraite de sources diverses et notamment Le Petit Journal Illustré.

Vous pouvez retrouver mon entretien avec Patrick Eris ici

Patrick ERIS : Histoires vraies sur les rails. Collection Et soudain… Le Papillon Rouge éditeur. 288 pages. 20,50€.

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8 juin 2012 5 08 /06 /juin /2012 07:21

flora.JPG

Dans ce petit port tranquille de Bretagne, le café des Embruns vit au rythme des marées, du départ et du retour des pêcheurs, de la rotation du phare. Le café des Embrubs, c’est le refuge des marins. A sa barre, Flora, veuve de pêcheur et mère de Viviane, une jeunette de dix-huit ans, délurée, à la langue agile, lycéenne à l’étroit dans ce petit village.

Tous les jours Flora effectue son pèlerinage, dire une prière à la chapelle Notre-Dame des Péris-en-mer, à la mémoire de Vinoc son mari, disparu en mer dix-sept dix-huit ans auparavant. Un mariage qui aura duré une semaine.

Flora vit, survit, ressassant ses souvenirs. Des souvenirs en forme de honte qui lui laissent dans la bouche un goût amer, dans la tête des images d’humiliation, de duperie, de trahison. L’ambition qu’elle nourrissait et dont elle voulait faire profiter son fiancé s’est retournée contre elle.

Nonna, l’armateur, le mareyeur, l’homme riche du canton, avait promis le commandement d’un bateau pour Vinoc si Flora couchait avec lui. Un calcul éhonté de la part de Flora qui, pensait-elle ne prêterait pas à conséquence. C’était sans compter sur le destin, représenté sous la forme d’un bossu, ivrogne, jaloux, malfaisant, pervers et cancanier. Le rêve a éclaté comme une bulle de savon, fragile et irisée dans le soleil, ballotée au gré du vent.

flora2.jpgDans le village un étranger arrive. Il dit être de nationalité danoise, s’exprime avec difficulté, animé de mauvaises intentions, et dont l’idée fixe s’exprime en un seul mot : vengeance.

Insidieusement, Hervé Jaouen nous entraîne sur la piste de cet homme et de son obsession, dans les souvenirs de Flora et de sa hantise, dans le dévergondage de Viviane et de son appétence de liberté et de distractions, dans les regrets et les désirs de Nonna, le vieux beau à l’origine de ce drame. Hervé Jaouen pose ses repères, ses jalons comme la mer abandonne sur la plage les algues et les détritus. L’on se dit que la vague va tout nettoyer, qu’avec le ressac le sable sera propre, débarrassé des impuretés. Mais comme la mer qui inexorablement rejette ses cadavres, Hervé Jaouen ne peut épiloguer sur une note optimiste. Il faut que la punition s’accomplisse, non pas en tant qu’exemple, mais sous l’aspect de mortification.

 

Vous pouvez retrouver un entretien avec Hervé Jaouen. 


Hervé JAOUEN : Flora des Embruns. Collection Les Petits Romans Noirs. Presses de la Cité. (Réédition des éditions Denoël – 1991). 162 Pages. Prix découverte : 9€.

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6 juin 2012 3 06 /06 /juin /2012 12:41

piste-tigre.jpg

Les scènes de meurtres perpétrées avec violence, Alex Cross, l’inspecteur et psychologue du FBI y est habitué. Pourtant lorsqu’il découvre l’horreur dans une maison de Georgetown près de Washington, il ne peut refréner ses sentiments. Une famille a été décimée, le père, la mère, les enfants, mais ce qui bouleverse le plus Alex Cross, c’est qu’il reconnait en l’une des victimes une ancienne petite amie, lorsqu’ils fréquentaient ensemble les bancs de l’Université de Georgetown. Son premier amour. Les premières constatations sur les lieux du drame démontrent que plusieurs personnes ont participé au massacre, principalement des enfants.

D’autres meurtres similaires se produisent peu après et Cross décide de s’investir personnellement dans cette affaire. Bree, sa compagne, inspectrice elle aussi, participe aux enquêtes et aux premières constatations sur le terrain. Grâce à un ami, il apprend que le responsable de ces tueries serait un personnage surnommé le Tigre. Mais Eric Dana, l’un des patrons de la CIA lui interdit de participer à l’enquête qui est du ressort de la célèbre agence.

Le fils d’un ambassadeur nigérian est abattu dans une discothèque. Il recueille quelques renseignements primordiaux auprès des témoins qui ont assistés au meurtre. Malgré les instructions aussitôt transmises afin de les avertir, ses parents qui assistent à une réunion à Abuja, la capitale fédérale du Nigéria, sont eux aussi tués. Cross participe à une opération montée par le FBI dans l’état de Virginie, près d’une station service. Malgré la souricière, les tueurs repérés parviennent à s’enfuir. Laissant sur le carreau quelques policiers. Cross a le temps d’apercevoir le meneur, un homme imposant commandant à des gamins.

Bravant les interdits émanant de Bree et de sa grand-mère Mama Nana qui élève chez lui les trois enfants d’Alex nés d’un précédent mariage, malgré les représentants de la CIA, Alex Cross décide de s’impliquer davantage. Selon certaines sources, le Tigre serait reparti au Nigeria et Cross, sur ces deniers personnels, prend un avion pour Lagos.

Dans l’avion qui le mène à Lagos, il est contacté par un prêtre, le père Bombata, qui lui signifie que parvenu sur place il risque d’avoir besoin de son aide. Mais tout d’abord Cross doit contacter Flaherty, le représentant local de la CIA. Dès son arrivée à l’aéroport il est en butte aux tracasseries douanières et policières. Les pots-de-vin et le graissage de pattes est monnaie courante. Cela ne suffit pas. Il est arrêté et conduit dans une prison où il végète près de trois jours. Il est molesté, a le nez cassé, recueille auprès d’autres prisonniers quelques informations puis il est libéré en piteux état.

Ses démarches, d’abord en compagnie d’un homme amputé d’un bras et dont il fait la connaissance dans une mine de diamants, puis d’Adanne, une journaliste qui traque elle aussi le Tigre, le conduisent en différents points du Nigéria, de la Sierra Leone, du Libéria et jusqu’au Darfour, dans un camp de réfugiés. Il risque sa vie à plusieurs reprises, assiste impuissant à de nombreuses exactions, à des massacres, et se voit investi d’une mission : en tant qu’Américain, il doit raconter ce qu’il a vu afin d’en informer le monde entier. Avec l’espoir que les meurtres, les massacres, les génocides ethniques soient connus de tous afin qu’une éventuelle prise de conscience puisse remédier à tous ces homicides.

Si certains des romans de James Patterson sont faciles à lire, simples dans les intrigues parfois convenues mais toujours distillées avec un métier certain, ici l’auteur nous entraîne dans une suite d’aventures poignantes, terribles, difficiles à supporter tant l’horreur décrite est prégnante, et il démontre un esprit humaniste. Il dénonce les horreurs qui se perpétuent dans cette partie du continent africain, où les membres des ONG, les soldats de l’ONU et autres pacificateurs ont du mal à assumer leurs missions. La prévarication balaie les bons sentiments, quant ils existent, les brutalités commises tout autant par des bandes organisées que par les policiers font froid dans le dos, et le lecteur ressort meurtri, affligé, ému, indigné, révolté devant l’étalage des sauvageries, des atrocités, du barbarisme qui suintent de ces pages. Sont également dénoncés la corruption, les trafics en tous genres, diamants et pétrole, les magouilles financières internationales et le double jeu de la CIA.

Un roman noir dans lequel l’auteur est tout autant impliqué que son héros, et si cela pouvait avoir un minimum d’impact dans les consciences, on pourra se dire que James Patterson a réussi dans son entreprise. Mais combien n’y verront là qu’un roman de fiction, d’aventures, dans un contexte où personne ou presque se sent concerné, puisque tout dépend du ressort des états et de leur implication, de leur bon vouloir à régler les problèmes en faisant abstraction des enjeux financiers ?

James PATTERSON : La piste du Tigre (Crosscountry – 2011. Traduction de l’anglais/Etats-Unis par Philippe Hupp). Editions Jean-Claude Lattès. 350 pages. 20€.

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4 juin 2012 1 04 /06 /juin /2012 13:56

reseau-d-etat.jpg

… Les fuites existent avant toutes les élections ; c’est même le meilleur moment pour abattre les candidats en montrant les cartes qu’on a contre eux.

Alors que la France vit à l’heure des élections présidentielles, des événements qui passent d’abord inaperçus du grand public mais seront diffusés par la suite, se déroulent dans l’ombre. Un homme est désigné comme la cible du pouvoir et toutes les polices françaises le traquent. Il parvient à s’échapper de la souricière dans laquelle les forces de l’ordre voulaient l’enfermer et quitte la région du Doubs où il se cachait, et se rend à Paris. Il renoue avec l’un des ses anciens comparses, Auguste, devenu le patron d’un journal dit de gauche, La Liberté.

Pendant ce temps, dans un restaurant huppé, Mariono, qui est au parfum, doit déjeuner en compagnie de Lou, une journaliste, afin de lui communiquer de soi-disant informations sur une opération en cours. Mais il est interrompu dans son approche par un appel téléphonique de l’Elysée. Mariono est un conseiller spécial du président Marcoussy.

La cible, plus connu sous le sobriquet de Martin Martin, a fréquenté dans les années soixante-dix un groupe de trotskystes, dont Auguste mais également l’ancien Premier Ministre Jansen. Pourchassé, Martin Martin est considéré comme l’homme à abattre car possédant selon toutes vraisemblance un dossier brûlant, mais les tensions entre Mariono et Bauman, responsable de la sécurité, sont vives. Chacun désirant s’approprier les bonnes grâces de Marcoussy. Arrivé à Roissy, Martin Martin parvient une fois de plus à filer à l’anglaise au nez et à la barbe des policiers chargés de l’appréhender.

Penser à mai 68 ainsi qu’aux débuts de son journal La Liberté, offrent une seconde jeunesse à Auguste qui fait appel à ses anciens compagnons de combats. Ces anciens gauchistes, des trotskistes mais également des maoïstes, sont devenus banquiers, producteurs et autres personnages influents de la vie économique et culturelle française. Bien installés dans un statut de parvenus, ils ne peuvent résister aux sirènes du passé.

Les petits coups tordus entre Mariano et Bauman, afin de démontrer au président qu’ils sont à ses bottes, qu’ils ont bien compris ses directives, engendrent erreurs, loupés et bavures. Avec pour résultat quelques uniformes sur le carreau. Et comme il faut une belle femme dans le récit, une journaliste pour changer des espionnes, la très belle Lou de Fontaines apporte sa pierre pour consolider l’édifice.

Comme si cela ne suffisait pas, de nombreuses références à la Centrafrique et à Foccart, le Monsieur Afrique de gouvernements précédents, sont disséminées, et l’on ne s’étonnera pas que la CIA et le MI6 soient évoqués.

Ce roman de politique-fiction, à l’intrigue tortueuse comme les arcanes de la politique, vaut tout autant par les nombreuses péripéties et l’histoire en elle-même, que par les personnages qui en constituent le socle. Malgré l’avertissement au lecteur : Toute ressemblance, bla, bla, bla…, aussitôt corrigée par celui-ci : Ce roman est une fiction, inspirée par des faits et des personnages bien réels, les lecteurs reconnaitront sous les patronymes d’emprunt quelques personnages qui gravitent dans la sphère nébuleuse du pouvoir.

Bauman est ainsi décrit : Saluant les uns et les autres d’un hochement de tête ou d’un sourire évasif, il se satisfaisait de m’être aimé de personne mais connu de tous. Quant à Marcoussy c’est de cette façon que l’auteur le présente : Marcoussy fit son entrée, séparant d’un coup la soirée comme les flots du Jourdain en deux groupes inégaux : ceux qui croyaient en sa réélection et les autres. Des applaudissements s’élevèrent. Marcoussy, rompu à l’exercice, savait que les plus enthousiastes étaient ceux qui l’aimaient le moins : il l’avait fait avant eux, encensant tous les gens de pouvoir et les méprisant d’autant plus qu’il louait leurs qualités. Plus loin, dans une conversation, le lecteur apprend, s’il ne le savait pas déjà : Marcoussy, il était dans le bouillon en 95 après s’être trompé de candidat aux présidentielles. C’était un paria, personne n’en voulait dans son parti. Jansen, qui a lamentablement échoué lors d’une élection présidentielle précédente, est issu des milieux trotskystes. Aussi, lorsqu’un journaliste, ami de Lou lui déclare : Je n’ai pas voté pour vous, vu que je suis de gauche, mais j’ai été ravi de vous rencontrer. A quoi Jansen rétorque, peu amène : Mais je suis socialiste ! Et le journaliste d’enfoncer le clou : C’est bien ce que je dis. Seulement l’auteur, parfois mélange les pièces du puzzle, fusionnant à ses personnages dont on est sûr d’avoir reconnu les portraits, les traits d’autres politiciens, ou amalgamant sciemment les dates sans les dévoiler.

leforestier.jpgLe Caveau de la Républiquedont Hugues Leforestier est l’actuel directeur, est un cabaret parisien renommé pour l’esprit frondeur qu’il professe à l’égard des personnalités politiques de la scène française. Des humoristes, des satiristes, des chansonniers, qui ne mâchaient pas leurs mots mais sans user pour autant de vulgarité mais avec férocité, s’y sont produits : Edmond Meunier, Robert Rocca, Jean Valton, Maurice Horgues, Anne-Marie Carrière mais aussi Pierre Dac, puis Patrick Sébastien, Jean Roucas, et quelques autres qui y firent leurs débuts. Et dans son roman Hugues Leforestier prolonge cet humour corrosif, et parfois on croit lire un feuilleton que l’on pouvait lire dans le Canard Enchaîné du temps de Gaulle: La Cour, puis après le départ du général, La Régence. Hugues Leforestier perpétue cet esprit frondeur dont on a bien besoin de temps en temps pour se rendre compte qu’on existe toujours en tant qu’êtres humains et non pas comme des pions que l’on peut manipuler sans vergogne.

Hugues LEFORESTIER : Réseau d’état. Collection Jigal Polar. Editions Jigal. 184 pages. 16€

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2 juin 2012 6 02 /06 /juin /2012 07:49

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Le titre du roman, le lieu où l’action se déroule, deux ingrédients qui m’ont mis l’eau à la bouche, et attisé ma curiosité. Toutefois, malgré un thème intéressant, ce livre m’a quelque peu déçu, pour plusieurs raisons que je détaillerai après en avoir détaillé, point trop quand même, l’intrigue.

Editeur renommé à Edimbourg, Lloyd Mackgover arpente nerveusement son bureau. Il attend Robert Barney, son ami et bras droit lequel revient d’une île des Orcades où il a passé quelques jours de vacances à taquiner le saumon. Lloyd est embêté. Dans quatre mois va paraître le second roman de Claudia Heiss et selon la tradition elle doit participer à une séance de dédicaces dans une librairie au début des festivités de l’Edimbourg Tattoo. Seulement Claudia Heiss est un pseudonyme et ils ne connaissent ni son nom ni son adresse. Leur correspondance est adressée par le truchement d’une boite postale. Comment la contacter et l’obliger à respecter cette coutume ? Robert, pragmatique, propose à Lloyd de prendre quelques jours de repos dans son cottage de Sanday, l’une des soixante-dix îles répertoriées des Orcades.

Lloyd est un acharné de travail, surtout depuis la mort accidentelle de sa femme Clara deux ans auparavant, et la perte du bébé qu’elle attendait. Il accepte donc la suggestion de son ami, ce qui devrait lui permettre de décompresser et se refaire une santé morale. Son arrivée sur l’île est perturbée par les éléments déchainés. Trempé, il frappe à la porte du cottage d’une jeune femme afin de se protéger de la pluie battante. Il a installé ses affaires dans l’habitation de son ami mais lorsqu’il montre sur le plan confié par Robert l’endroit où il est sensé demeurer, la jeune femme lui apprend qu’il s’est trompé de demeure. Elle lui apprend que le cottage de son ami n’a plus de toit depuis deux ans et elle accepte alors de l’héberger, avec réticence, pour la nuit. Elle se nomme Laura Mills mais Lloyd la déconcerte lorsqu’il ui dit qu’il sait qu’elle est Claudia Heiss.

Laura Mills est affublée d’une cicatrice sur le visage, et sur tout le corps. Elle a été victime d’un accident plus de deux ans auparavant, depuis elle est amnésique. Son passé est complètement effacé. Tout ce dont elle se souvient, c’est qu’un camion a percuté la vitrine du magasin londonien devant laquelle elle se tenait. Depuis elle vit en recluse sur l’île de Sanday, grâce à l’argent de l’assurance, et s’est fait quelques amis dont Chris et sa petite famille. Mais elle est inquiète, angoissée, apeurée, et un rien la met hors de ses gonds ou la fait pleurer. Lloyd a discuté avec une vieille femme qui réside sur l’îlot depuis peu, mais Laura le prévient. Elle est renommée pour être la Radio-Pipelette de l’endroit.

Des événements étranges se produisent. Alors qu’ils sont chez Chris, la maison de Laura est dévastée, puis un peu plus tard, elle est incendiée. Heureusement les nombreuses pellicules photos qu’elle possède, l’une de ses passions est prendre des clichés de l’île, ne lui ont pas été dérobées. Alors Lloyd lui propose de rentrer ensemble à Edimbourg, de rencontrer un de ses amis, Donald Swaney de Scotland Yard, ainsi qu’un spécialiste londonien en hypnose, susceptible de pouvoir lui faire recouvrer la mémoire. Les résultats ne se font pas attendre, les mauvaises surprises la concernant aussi. Les souvenirs se bousculent au portillon de son cerveau et ils sont loin d’être roses. Et entre Lloyd et Laura, le coup de foudre, qui n’est pas dû à l’ouragan qui a traversé l’île de Sanday, a été quasi instantané. Et peu à peu la jeune femme retrouve le sourire en compagnie de Lloyd mais la résurgence de sa période post-accidentelle la trouble et lui occasionne de nombreuses frayeurs. D’autant qu’elle s’aperçoit qu’elle est suivie. Pendant ce temps, les journaux ont de quoi se mettre sous les rotatives : une sombre affaire de décès de nouveau-nés intéresse sérieusement la justice.

Il est dommage qu’à la relecture et à la correction, de trop nombreuses incohérences dans le récit n’aient pas été relevées. Si je ne suis pas parfois contre un manque de crédibilité, il faut que cela ne soit pas trop flagrant quand même. Ici, dès les premières pages, le lecteur peut se poser des questions. Et je ne vais me contenter de vous en recenser que les premières incohérences, d’autres pouvant déflorer l’intrigue. Page 12, on peut lire : Robert Barney, en vacances depuis quinze jours sur l’uns des îles des Orcades pour pratiquer son sport préféré. Page 19, le lieu de pêche s’est déplacé à Aberdeen. Si Robert était véritablement à Sanday comme il le prétend au départ, la toiture de sa maison aurait dû être en bon état. Sinon, il n’aurait pas proposé cet hébergement à son ami. Du moins, c’est ce que je pense. La correspondance est adressée sous le nom d’emprunt de Laura Mills. A quel endroit ? Cette femme possède-t-elle deux jeux de papiers d’identité ? Ensuite, par un coup de baguette magique Lloyd se retrouve en face de la romancière, découvre sous qu’elle identité elle se cache. Egalement le rôle joué par Miss Radio-Pipelette, personnage que l’on retrouvera plus tard. Je ne vais pas plus loin, car nous entrerions par trop dans l’intrigue et je risquerais de trop en dévoiler. Autre chose qui m’a interloqué, ce n’est pas le coup de foudre entre l’éditeur et la romancière, mais leurs dialogues qui empruntent aux romans à l’eau de rose qui étaient écrits durant l’entre-deux guerres et étaient destinés aux midinettes qui rêvaient du Prince Charmant. Un manque de rigueur, une certaine complaisance dans l’écriture, des dialogues parfois simplets même si les amoureux peuvent bêtifier, qui méritaient d’être signalés, non pas pour dénigrer l’auteure mais afin de l’inciter à mieux gérer son manuscrit, à progresser. Car en lui-même le thème était intéressant et aurait mérité un meilleur développement. Comme si Chantal Jagu, qui a placé deux histoires en une afin de compliquer l’intrigue n’avait pas réussi à maîtriser son sujet, et pour une fois, je regrette que ce roman ne soit pas plus épais afin de dissiper toutes les zones d’ombre qui englobent l’intrigue.

Chantal JAGU : L’empreinte des ténèbres. Editions Pascal Galodé. 208 pages. 20€.

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31 mai 2012 4 31 /05 /mai /2012 13:13

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Tous les psychologues sont d’accord. Trop de violence pour les jeunes et les adolescents, à la télévision, dans les jeux vidéo, dans les romans parfois. Aussi aborder des romans empreints de mystères, de frissons, d’énigmes sans pour autant sacrifier à une mode peut aider à vivifier l’imaginaire, en reprenant l’esprit des bons vieux récits qui ont enchanté notre enfance. Il suffit d’une intrigue prenante, foisonnante, avec des personnages auxquels le lecteur peut ou souhaite s’identifier, pour offrir quelques heures de détente.

Paul Halter a non seulement gardé son âme d’enfant, mais incite à partager avec lui quelques recettes propices à l’évasion.

Entre Quentin et Mélanie, c’est le stade des amours juvéniles, et à seize ans, ceci n’est pas répréhensible. Mais comme pour les adultes, la vie est parfois difficile. Le programme estival de Mélanie est chamboulé au dernier moment. Elle devait participer à un stage de voile en Bretagne début juillet, mais il a été annulé. Et comme ses parents partent faire du trekking au Maroc et qu’ils ne veulent pas la laisser seule en banlieue parisienne, elle doit se rendre chez un oncle près de Dinard. Et cela ne l’enchante guère car elle garde un mauvais souvenir de son précédent séjour chez l’oncle Jerry huit ans auparavant.

Jerry, le frère de la mère de Mélanie, vit dans un vieil hôtel accroché à la falaise près du bord de mer, une bâtisse qui date des années 1930 et qu’il a rachetée. L’endroit est sinistre, isolé, battu par les vents. La demeure est flanquée d’une tour en haut de laquelle on peut accéder par un escalier en spirale. Une image qui procure rétrospectivement des frissons à la jeune Mélanie.

Concomitamment, dans la région de Dinard, les gendarmes sont sur les dents. Des jeunes femmes ont été retrouvées étranglées dans les environs. Ce n’est guère rassurant, mais Mélanie part laissant Quentin seul. De toute façon, ils pourront communiquer grâce à leurs portables. C’est le modernisme, mais pour que cela soit efficace, il faudrait qu’il y ait du réseau. Alors Quentin se morfond jusqu’au jour où il reçoit, enfin, une lettre de Mélanie, puis une autre. Quatre en tout.

Mélanie narre son arrivée chez cet oncle Jerry dont elle a à moitié peur. Pourtant au début tout se passe bien. Sauf un soir où elle aperçoit une silhouette qui emprunte l’escalier en spirale. Elle prévient Jerry et celui-ci lui propose d’inspecter la pièce. Rien, il n’y a personne. Peut-être a-t-elle eu une vision ! Des invités, amateurs d’insolite et de mystère, doivent être hébergés dans cet ancien hôtel, et malheureusement Jeanne, la gouvernante tombe malade. Alors Jerry demande à Mélanie de la remplacer sans avouer qu’elle est la nièce de l’hôte. Il compte sur la présence de Rose Lestrange, médium, pour résoudre les affaires des jeunes femmes étranglées. Arrivent successivement le professeur Bourgeois, puis un bel homme répondant au nom de Bill Morane, ensuite mademoiselle Harper, professeur de piano, et enfin le colonel Leroc. Mademoiselle Rose doit être, afin de consulter les esprits en toute tranquillité, enfermée dans la pièce en haut de la tour. Une pièce fermée à clé de l’intérieur, puis sont placés des scellés de cire sur lesquels chacune des personnes présentes, sauf mademoiselle Rose évidemment, appose une empreinte à l’aide d’un objet qui lui est personnel. Et c’est là que l’impensable se produit…

Ce roman possède comme un petit air du Club des cinq d’Enid Blyton (même si les jeunes protagonistes ne sont qu’au nombre de deux, quatre en comptant les remplaçants que vous découvrirez au cours de la lecture), mais les références aux romans d’énigmes sont légions. Agatha Christie, bien évidemment, avec cette image de la plage de Dinard dédiée à la Reine du Crime qui aimait se rendre dans cette station balnéaire et que la ville honore tous les ans, mais aussi à Gaston Leroux et quelques autres sans qui la littérature policière n’aurait pas obtenu ses lettres de noblesse. Paul Halter emprunte également au fameux jeu de Cluedo qui fit fureur durant quelques décennies avant l’apparition des jeux vidéo en ligne. Et bien entendu il propose à la sagacité du lecteur de résoudre le mystère d’un meurtre en chambre close.

Frisson, angoisse, énigme, jalousie aussi, mensonges, déjà, de la part d’adolescents, des ingrédients savamment utilisés pour une histoire dont le décor n’est pas là justement utilisé d’une façon banale, mais pour entretenir le suspense.

A lire également Le Voyageur du Passé publié au Masque Jaune, éditions du Masque.

Paul HALTER : Spiral. Collection Thriller. Editions Rageot. 240 pages. 9,90 €.

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30 mai 2012 3 30 /05 /mai /2012 13:00

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Dans la grosse bourgade de Saint-Denis, en Dordogne, où vivent environ 3000 âmes, règne, outre le maire Mangin, Bruno Courrèges, le chef de la police municipale. Il connait tout le monde et lorsqu’il déambule sur le marché, il ne compte plus les bises aux femmes et les poignées de main aux hommes. Ce jour là, c’est l’effervescence, car les inspecteurs de l’hygiène délégués par Bruxelles sillonnent la région. De plus c’est la commémoration du 8 mai et les porte-drapeaux défilent comme tous les ans, sans se parler, sans se regarder, jaloux et suspicieux. Ils pensent être mutuellement cocus et cela date de la dernière guerre et après.

Quoiqu’il soit le responsable de la police municipale, Bruno tient à entretenir de bonnes relations avec les gendarmes du village. Toutefois le capitaine Duroc n’est guère satisfait du comportement de quelques villageois, principalement des garnements, qui auraient fait actes de vandalisme auprès des représentants de Bruxelles. Et tandis qu’il adresse ses remontrances, il est informé qu’un meurtre vient d’avoir lieu. Le corps d’Hamid a été découvert par son petit-fils Karim. Bruno et Duroc se rendent aussitôt sur place, accompagnés de gendarmes, premiers secours et autres afin d’effectuer les premières constatations. Hamid vivait dans une vieille maison isolée sur les hauteurs du village depuis deux ans environ. Mais son fils Momo et son petit-fils sont installés depuis longtemps, et appréciés des villageois. Karim tient un bar avec sa femme, tandis que Momo, pour Mohamed, est professeur de math au collège.

Pourtant ce meurtre n’est pas banal. Hamid a été tué à l’arme blanche, éventré, et une croix gammée a été sculptée sur son torse. Rien n’a été chamboulé dans la maisonnette donc il ne peut s’agir d’un vol qui aurait mal tourné. Pourtant deux objets ont disparu : la Croix de guerre qu’Hamid avait obtenue et une photo le représentant en compagnie d’autres footballeurs. Hamid était un ancien militaire qui avait participé à la fin de la guerre dans différentes opérations puis à celles d’Indochine et d’Algérie parmi les troupes françaises. Tout de suite Duroc pense à une expédition punitive de membres de l’A.N., l’Alliance Nationale. Pourtant si une communauté maghrébine vit dans le village, jamais aucun trouble n’a été signalé. D’autant qu’Hamid et ses descendants ne professaient pas des idées islamistes, au contraire. Une intégration réussie qui risque de dégénérer.

Des policiers de Périgueux sont en charge de l’affaire, ainsi que les gendarmes, mais Mangin le maire du bourg souhaite que Bruno participe à l’enquête. La piste d’extrémistes est envisagée et va déboucher sur une affaire de drogue.

Bruno qui connait tout le monde, parle aux uns et autres, rend visite par exemple à un Anglaise qui vit non loin du domicile d’Hamid et qui loue des chambres de gite aux estivants, et seconde Isabelle, la belle, jeune et ambitieuse policière. Il est attiré par Isabelle, ainsi que par Pamela, l’Anglaise et par Christine son amie qui est là pour quelques semaines.

Outre l’enquête, qui nous entraîne bien loin de ce que l’on pouvait penser au départ, ce sont les digressions intéressantes placées ici et là, sans nuire en rien au récit qui lui apportent une saveur particulière. Ainsi les affrontements avec les hommes chargés par Bruxelles pour contrôler l’hygiène des produits frais sur le marché. La façon dont ils sont accueillis mais surtout la rhétorique employée par Bruno Courrèges, pour leur démontrer qu’ils agissent soit en dehors de leur champ d’action, soit pour signifier que les produits ne peuvent en rien être considérés comme des atteintes aux décisions européennes, est traitée avec humour.

Dans un registre plus grave, la manifestation en hommage à Hamid qui dégénère en affrontements entre les antiracistes et les membres de l’Alliance Nationale, offre des sujets de réflexion, puisque nous sommes toujours en période électorale. Cette montée de haine qui s’enflamme à la moindre étincelle et qui s’étend comme un feu de broussailles. Martin Walker remonte le temps, s’intéresse à l’histoire des Harkis, et place le départ de son intrigue dans un épisode méconnu de la Seconde Guerre Mondiale.

Mais d’autres sujets plus terre à terre méritent le détour. Pourquoi la cuisine anglaise est-elle si décriée ? Pourquoi la date du 18 juin en France est citée uniquement en référence à l’appel londonien du Général De Gaulle mais que jamais il n’est fait mention que c’est également la date anniversaire de la défaite de Napoléon à Waterloo ?

Bruno est un fin gourmet, et lorsque Pamela lui propose de dîner ensemble, il se pose des questions : Il avait beaucoup entendu parler de la cuisine anglaise et ce n’était pas rassurant. Ce qui démontre de la part de l’auteur, un Anglais, une bonne dose d’humour. Il porte sur la France un regard amusé et critique, mais en connaissance de cause car il possède dans le Périgord une maison où il se rend en été. Donc s’il se moque, tout autant de ses compatriotes que des Français, c’est sans méchanceté, avec tendresse même parfois. Et il me tarde de retrouver Bruno Courrèges, super garde-champêtre qui aime tant sa région, et sait si bien en parler via le truchement de Martin Walker.

Martin WALKER : Meurtre en Périgord (Bruno, chief of police – 2008. Traduit de l’anglais par Serge Cuilleron). Editions du Masque, moyen format. 374 pages. 15€.

challenge régions

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29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 13:22

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Vous connaissez tous la chanson d’Alain Souchon, J’ai dix ans ? Le narrateur lui aussi a dix ans, mais il ne se contente pas de casser la gueule à la récré. Il tue. D’abord, sa mère, à sa naissance, mais ça ne compte pas. Puis son demi-frère, laissant croire à son père et à sa nouvelle mère que c’est un accident de balançoire. Puis c’est la maîtresse d’école qui subit sa vindicte. Officiellement elle est tombée sur un coin de son bureau. En réalité, il s’est aidé d’une pierre. De toute façon il a agit en toute impunité, car il sait que ses copains ne diront rien. De toute façon, c’était pas une vraie maîtresse d’école, pas une vrai école non plus et ils n’étaient que quatre élèves. Lui, Laurie, Adrien et Marcus. Mais Marcus ne compte pas car il est noir. Donc la maîtresse d’école est enterrée dans la maison de bois avec la croix, et fait exceptionnel, le curé, qui est vieux, ne passe pas une cassette, mais lit un texte. Faut dire que dans le village à eux, ils ne sont pas nombreux. Faut presque compter sur les doigts des mains. Il y a le narrateur, son père et sa nouvelle mère. Y a Laurie et ses parents, dont la mère ne fait rien de la journée sauf qu’à crier comme les loups. Et le père qui halète le soir dans la chambre de Laurie. Y a aussi la catin que le père d’Adrien va voir, un soir sur deux, tandis que c’est le père du narrateur qui lui rend visite les autres soirs. Y’a aussi les parents de Marcus, mais eux ils ne comptent pas, puis l’épicière qui a un chat. Toutes les semaines le facteur passe, apportant les cassettes et les pensions des trois couples blancs. Les parents de Marcus eux ne touchent rien. Une vie tranquille, en autarcie, et au-delà des collines, le monde. Un monde que le narrateur découvre le soir avec son livre qu’il planque sous son lit.

Un roman dur, poignant, qui révèle toute la détresse d’une certaine frange de gamins, d’hier ou d’aujourd’hui. Le narrateur vit dans un village peuplé d’une quinzaine de personnes, mais il serait dans une HLM, ce serait pareil. Ses pensées sont la destruction des autres, pourquoi, il ne le dit pas mais c’est devenu une obsession. Une forme de liberté guère rassurante pour les adultes qui ne comprennent pas les attentes et les obsessions des gamins. Peut-être un peu d’amour, de présence. C’est un bouquin qui ne doit pas être lu par des gosses, même s’il dépeint leur mode de pensée. Les temps ont bien changé, ou bien on ne se rappelle plus de quoi étaient faits nos aspirations, nos souhaits, nos colères, nos rancœurs lorsque nous avions l’âge du narrateur. Un livre court, ramassé, dur, qu’on aimerait lire comme un conte, mais qui n’est peut-être qu’un reflet de la vie.

Jean-Luc LUCIANI : Un léger bruit dans le moteur. Collection Le Petit Ecailler. Editions de l’Ecailler. 112 pages. 7€.

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