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24 décembre 2018 1 24 /12 /décembre /2018 05:42

Méfiez-vous des repas de Noël !

Il se pourrait que ce soit de l'art scénique !

Deryn LAKE : L’apothicaire et le banquet empoisonné.

Transportons-nous au XVIIIème siècle, précisément en l’an de grâce 1758. A Londres, en ce mois de novembre plutôt frisquet, la confrérie des maîtres apothicaires s’est offert un banquet.

Rawlings, apothicaire débutant, alors qu’il venait d’effectuer ses emplettes chez un herboriste proche du lieu des agapes, sauve de l’empoisonnement un des convives, Maître Alleyn. Il le transporte jusqu’au domicile du malade et le confie à sa famille. Le lendemain il apprend que son patient n’a pas survécu, décédé d’une forte dose d’arsenic. Le poison aurait été dissimulé dans un pot de farine ayant servie à la préparation d’une sauce. Si les autres convives ont été intoxiqués, seul Alleyn n’a pas survécu. Les apothicaires étaient-ils tous visés ou seul Alleyn était-il en point de mire du meurtrier ?

Rawlings, enquêteur à ses heures, est convié par John Fielding, magistrat de la cité, de débrouiller l’affaire et ses soupçons se portent sur trois personnages. Un apothicaire mis à l’écart de la confrérie, un père de famille ayant perdu son fils à cause d’un mauvais diagnostic et le majordome qui s’était, la veille, entretenu vertement avec le responsable de la confrérie pour une misérable affaire d’argent.

Rawlings est intrigué par le comportement de l’influent et riche apothicaire Francis Cruttenden, qui entretient de troubles relations avec la famille du défunt.

 

Rawlings, dans ce nouvel opus, tombe amoureux de la fille de maître Alleyn, ce qui perturbe ses amours avec la belle Coralie Clive, actrice de son état, qui fait passer son métier avant le mariage.

Un roman plein de rebondissements, et même si l‘identité du coupable ne fait aucun doute au lecteur, les dernières pages sont pour le moins intéressantes par un épilogue qui met en lumière les rapports tendus entre la France et l’Angleterre.

Ce qui n’empêche pas les notables et les nobles de s’adonner à une consommation non négligeable de champagne.

 

Deryn LAKE : L’apothicaire et le banquet empoisonné. Collection Moyen format aux éditions du Masque. Parution 10 avril 2002. 310 pages. 14,70€.

ISBN : 978-2702497258

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18 décembre 2018 2 18 /12 /décembre /2018 05:39

Une ligne à ne pas franchir !

Laurence GOUGH: Ligne dure

Oscar Peel et Pat Nash, pris de panique à la vue d'une vedette de police, ont jeté par-dessus bord leur cargaison, soit environ vingt kilos d'héroïne représentant la modique somme de 80 millions de dollars.

Le roi de la drogue à Vancouver, Gary Silk charge Franck, son garde du corps, et Nash d'abattre le fautif. L'exécution a lieu près d'un appontement et le corps balancé à l'eau. La voiture, accidentée, est laissée sur place. Les officiers de police Jack Willows et Claire Parker découvrent des impacts de balles, des traces de sang et une douille dans le véhicule abandonné. Un cadavre est retrouvé accroché à une pile de pont. L'autopsie et les relevés d'empreintes digitales permettent d'identifier le noyé. Il s'agit d'Oscar Peel. Willows et Parker se rendent chez la jeune veuve, une gamine de vingt ans qui allaite son enfant. Elle donne tous les signes d'une droguée.

Pendant ce temps, Paterson, le patron d'une entreprise de logiciels, est au bord de la faillite. Il entrevoit une solution à ses déboires lorsqu'il aperçoit deux gamins jouant avec un sachet de poudre. Se faisant passer pour un flic, il confisque le sac récupéré sur la plage. Il prend une chambre dans un hôtel minable et demande trois prostituées, partant du principe que sur les trois une au moins est droguée. Randall, le protecteur des filles, est intrigué et lui tire les vers du nez. Paterson propose la marchandise puis se rend compte qu'il est dans une nasse. Il tire sur Randall, le blesse et s'enfuit. Il épluche des coupures de journaux afin de connaître le nom d'un dealer notoire et relève le nom de Gary Silk. Franck et Nash font alliance. Franck déteste de plus en plus les manières odieuses de son patron. Il décide de l'éliminer et Nash par la même occasion. Nash de son côté est dans le même état d'esprit.

Une plaque de métal est retrouvée dans le sac ayant enveloppé le cadavre de Peel. Il s'agit de la base d'un trophée décerné lors d'un concours de squash. Renseignements pris auprès d'un professionnel, le trophée a été remis à Silk. Willows et Parker, débarquent accompagnés d'une quinzaine de policiers chez Silk, lequel est en compagnie de Franck et consorts. La fouille des hommes permet de trouver des armes dont celle qui a servi à tuer Peel.

 

Entre les démêlés d'un PDG en proie à des problèmes financiers, un roi de la drogue imbu de lui-même et méprisant les autres, un couple de policiers qui pratiquent esprit d'équipe et amitié complice pour ne pas dire amoureuse, et autres protagonistes, Laurence Gough propose des personnages à la limite de la caricature ou du pastiche.

Pourtant ils sont crédibles, tout comme l'est l'intrigue, qui maniée avec précision n'en possède pas moins un humour sous-jacent. Un roman qui se lit avec d'autant plus de plaisir qu'il ne convoie pas de message et les temps morts sont inexistants. Les personnages sont décrits en quelques lignes.

Un petit coup de griffe est destiné au passage envers les sportifs et leurs facultés intellectuelles, et le mauvais caractère de McEnroe qui semble la bête noire de Laurence Gough.

 

Laurence GOUGH: Ligne dure (Hot shot - 1989. Traduction de Laetitia Devaux). Collection Les Noirs N°26. Editions Fleuve Noir. Parution le 1er septembre 1997. 318 pages.

ISBN : 978-2265061781

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15 décembre 2018 6 15 /12 /décembre /2018 05:19

Mais ce ne sera pas pire que si c’était moins bien !

Williams EXBRAYAT : Ma vie sera pire que la tienne.

Dans la lignée de son célèbre homonyme, le grand Charles, Williams Exbrayat creuse son propre sillon, en marge des sentiers battus de la littérature policière, noire, populaire.

Mais cette homonymie n’est que patronymique, car l’univers littéraire qui les rassemble se décline différemment, tous deux étant de fort bon aloi. D’autant que Williams Exbrayat s’autoédite et donc ne bénéficie d’aucun support éditorial.

Construit comme un triptyque, chaque panneau narrant une histoire et l’ensemble s’intégrant dans une suite logique, ce roman pourrait être lu comme un recueil de nouvelles - d’ailleurs chaque partie possède son propre épilogue - indépendantes mais complémentaires. Ce qui confère un charme indéfinissable au récit qui oscille entre humour noir, dérision et une forme de désespoir liée à des événements qui n’entrent pas dans le cadre du récit mais l’engendre.

 

Première partie : Cloches célestes.

Le narrateur, dont on saura le nom par la suite, un prénom qui par ailleurs ne lui convient guère mais chut…, donc le narrateur a entrepris avec deux copains, des bras cassés comme lui, de dévaliser une villa de rupins semblant abandonnée, du moins vide de tout occupant. C’est en pleine campagne, alors pas de raison de se gêner pour s’approprier l’argenterie. Seulement, lorsque l’argent te rit au nez, tu risques de tomber sur un os. Et l’os se précise sous la forme de trois individus en blouse blanche avec masques chirurgicaux sur le nez et lunettes de protection.

Les trois hommes sont tombés dans un repaire de petits chimistes en herbe et en gélules de captagon, une drogue qui comme le tabac peut nuire à la santé. Terminé le chapardage, il n’y a plus qu’à prendre ses cliques et ses claques, aïe ça fait mal, et tenter de se sauver. Mais ce n’est pas du cinéma, et le narrateur et ses copains, Mycose et Paulo, sont embarqués dans une histoire dont ils n’avaient pas imaginé la fin. Surtout Paulo et Mycose. Car si le narrateur s’en sort, c’est parce qu’il possède du répondant, qu’il se réfugie dans la campagne profonde et la maison d’un oncle décédé, qu’il aime Leïla, sa copine dont il n’a plus de nouvelles, et qu’il doit s’occuper de Disco Boy, le bouledogue bringé de feu son oncle qui se délecte de grandes lampées de bière tout comme son nouveau maître.

 

Deuxième partie : Braquage(s).

Trois anciens présidents de la république ont décidé de braquer un casino. Ce qui étonnera le lecteur qui sera mis en présence de Chirac, Hollande et Sarkosy, car comment imaginer que ces trois hommes puissent s’attaquer à un établissement de jeux. Ne vous leurrez pas, ces trois hommes portent des masque mais leur intention est bien de s’emparer de l’argent, ce qu’ils réussissent à faire tout en emmenant en otage une hôtesse, ce que les romanciers machistes appelleraient une belle plante mais restons courtois et digne. Donc ils prennent en otage Sahora, une ancienne athlète qui a dû abandonner la course à pied à cause d’une cheville défaillante. Chirac pète les plombs en arrosant un couple de flics, deux copains qui ne demandaient rien à personne, et Hollande est blessé par une balle perdue. C’est ce qu’on écrit en général car le projectile n’est pas perdu puisqu’il a atteint la jambe du niais. Je parle du braqueur bien entendu. Et ils s’enfuient jusqu’à un endroit situé non loin où s’est installé le narrateur de la première partie. Le Patron des trois chimistes n’est pas satisfait de la spoliation dont il est la victime et il se lance en compagnie de ses sbires sur la trace des présidents.

Bien entendu la rencontre est inévitable, des morts sont dispersés dans les bois et les fourrés, tandis que le policier rescapé se met activement à leur recherche.

 

La troisième partie, Malbête, est un peu la synthèse des deux premières, Une suite dont on a perdu en cours de route quelques protagonistes et qui nous en fera découvrir d’autres, toujours dans une histoire qui relève de la pérégrination débridée, d’autres événements se greffant sur les deux précédents récits.

 

Dans un style particulier, narration à la première personne d’abord, puis narration normale à la troisième personne, et enfin parole est donnée à quelques uns des personnages qui s’investissent, volontairement ou non, dans cette intrigue débridée, décalée, étonnante et détonante, diabolique presque. Un roman déstructuré et pourtant à la structure, la construction précise, implacable, laissant toutefois au lecteur la possibilité de combler quelques manques.

Tout au long du récit, un personnage apparait en compagnie de ses deux chiens et une bête rousse nargue animaux et humains. Sont-ils là pour le décor ou jouent-ils leur partition comme ces rôles très secondaires, au théâtre et au cinéma, qui paraissent insignifiants mais marquent profondément de leur empreinte la pièce dans laquelle ils évoluent comme figurants ?

Penchés sur les épaules de Williams Exbrayat, tapis dans l’ombre, j’ai cru reconnaître ces auteurs américains de premier plan, pour la plupart injustement oubliés de nos jours, dont Jim Thompson, Charles Williams, Day Keene ou encore Brett Halliday. Seulement, ceci ne se passe pas aux Etats-Unis, mais pour la plus grande partie en Ardèche.

Un autre avis sur ce roman ? N’hésitez pas à vous rendre sur le site ci-dessous :

Williams EXBRAYAT : Ma vie sera pire que la tienne. Independently published chez Amazon. Parution 29 août 2018. 232 pages. 12,99€. Version Kindle : 3,99€.

ISBN : 978-1719901536

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14 décembre 2018 5 14 /12 /décembre /2018 06:31

Quand on vous dit qu’il est préférable d’aller chez son libraire !

Maurice LIMAT : Amazone de la mort.

Depuis que sa fiancée Christiane est décédée d'un arrêt cardiaque quelques semaines auparavant, Cyrille, toutes les nuits, est en proie à un horrible cauchemar.

Ce cauchemar récurrent est devenu comme une idée fixe. Christiane l'appelle à l'aide, elle veut qu'il vienne la chercher, il aperçoit une sorte de machine, un laboratoire, mais il ne peut rien faire pour la sortir de ces limbes dans lesquels elle est engluée.

Il consulte un toubib qui, après examens, ne lui trouve aucun symptôme psychique. Cyrille, vingt-neuf ans, est un homme dans la force de l'âge, bâti en athlète, en pleine possession de ses moyens physiques ou mentaux. Le docteur Sorbier, le praticien auquel a eu recours Cyrille, qu'il connait bien puisque c'était le médecin de famille, préfère demander à son ami Teddy Verano, le détective de l’étrange et du surnaturel, de rencontrer le jeune homme et d'établir son diagnostic.

Teddy Verano est persuadé de la véracité du récit de Cyrille et pour s'en convaincre, il se rend en compagnie de celui-ci près de Pacy-sur-Eure, dans le petit cimetière où est inhumée Christiane. De nuit, munis de pelles, les deux hommes mettent au jour le cercueil simplement enfoui sous un tumulus en attendant la dalle définitive. Cyrille ne ressent pas la présence de Christiane. Pour cause, et leur surprise est énorme lorsqu'ils s'aperçoivent que le cercueil est vide !

Teddy décide alors de poser quelques questions au fossoyeur qui a procédé à l'inhumation. Pour cela il se rend au village, affublé de l'alias de Théodore Verdier, représentant, afin de récolter des renseignements sur Paul Halbin, le croquemort. C'est un ivrogne qui n'a pas bonne presse dans le bourg. Deux jours plus tard, Teddy et Cyrille se présentent de nuit à la cahute d'Halbin. Ils repèrent les lieux et c'est ainsi qu'ils distinguent l'arrivée d'une jeune femme habillée de noir. Une fenêtre leur permet d'assister au spectacle, malheureusement ils n'entendent rien. La femme parle et à un certain moment elle ôte son manteau noir et apparaît nue. Halbin veut la toucher mais dès qu'il a frôlé l'épiderme de sa visiteuse, il retire sa main comme s'il s'était brûlé.

Puis elle sort. Teddy décide de la suivre. Elle passe près d'eux, marche d'un pas mécanique, dégageant un froid glacial, puis s'évanouit dans la nature. Le détective et son compagnon retournent à la cabane. L'ivrogne délire puis s'emparant d'une pelle en frappe Cyrille, le blessant. Teddy l'assomme à moitié. Toutefois il parvient à le faire parler mais l'homme ne peut que bredouiller quelques mots. La femme, qu'il ne connaît pas, ayant la peau glacée et pourtant brûlante, et les tombes, qu'il a violées, toutes recelant des jeunes femmes. Il est trop saoul pour continuer et s'effondre. Teddy remet à plus tard leur entretien et c'est le retour sur Paris. Mais ils n'ont roulé que quelques kilomètres lorsqu'ils distinguent une lueur rouge. Un incendie. Celui de la cabane. Incendie provoqué accidentellement par Halbin qui s'éclaire à l'aide d'une lampe à pétrole ou incendie criminel ?

Teddy décide alors de consulter une de ses amis, la voyante Anita, afin qu'elle détermine si Cyrille est perturbé psychologiquement. En réalité elle décèle qu'il est médium mais elle apporte quelques révélations qui conforte Teddy de continuer son enquête.

Cyrille est mis provisoirement sur la touche et Gérard, le fils d'Yvonne et donc le beau-fils de Teddy Verano, va participer activement à l'enquête qui ne manque pas de les surprendre.

 

Maurice Limat reprend et développe le thème du mort-vivant, avec naturellement à l'origine de ces résurrections, un savant fou qui a mis au point une drôle de machine pour réaliser ses expériences.

Ce sont cinq femmes qu'il a ainsi réveillées, les Amazones de la mort comme il les appelle. Teddy et Gérard vont se trouver confrontés à ces cinq zombies et ne devoir la vie sauve que grâce à leur expérience, pour l'un, et la fougue de la jeunesse pour l'autre.

Comme toujours, une histoire simple que Maurice Limat déroule avec maîtrise, enchainant les actions en une véritable cascade d'épisodes tous plus dangereux et angoissants les uns que les autres. Le côté psychologique n'est pas appuyé, les agissements des personnages étant primordiaux.

Un bon roman d'angoisse et de suspense dans lequel le fantastique n'est pas une émanation spirituelle mais élaboré par un scientifique qui a mis au point une machine infernale. Et entre le cartésien et l'irrationnel la frontière est mince. Teddy Verano, tout en étant le détective des fantômes recherche la cohérence dans les événements.

Voyez-vous, monsieur Arcal, je n'aime pas trop le théâtre de Pirandello, et les jeux de logogriphes.

Et Maurice Limat renvoie son lecteur à deux aventures précédentes de Verano pour expliquer rapidement ses relations avec sa femme Yvonne, comment il l'a connue, ainsi qu'avec Gérard, son beau-fils qui l'admire sans réserve. Il ne s'appesantit donc pas sur la description de ces deux événements, les évoquant simplement en quelques lignes. Il s'agit de Les jardins de la nuit (Angoisse N°129) et de Mandragore (Angoisse N°101).

Maurice LIMAT : Amazone de la mort. Collection Angoisse N°154. Editions Fleuve Noir. Parution 3e trimestre 1968. 256 pages.

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13 décembre 2018 4 13 /12 /décembre /2018 06:07

Et sans carburant ? Une économie des sens !

David AGRECH : Deux mille kilomètres avec une balle dans le cœur.

Décerné pour la première fois en 1930 pour le roman de Pierre Véry Le Testament de Basil Crookes, le Prix du Roman d’Aventures est spécifique aux Editions du Masque, nouvelle appellation de La Librairie des Champs Elysées créée par Albert Pigasse. A l’origine ce prix était remis sur manuscrit, mais à la fin des années 60, il est devenu un prix d’éditeur. Certains des récipiendaires ont connu une carrière remarquable au sein même du Masque, ou chez d’autres éditeurs.

Ainsi Charles Exbrayat, Alexis Lecaye, Jacques Chabannes, Yves Dermèze, Michel Grisolia, Paul Halter, Jean Bommart, pour n’en citer que quelques uns dans le désordre. Certains se sont comportés honorablement, d’autres n’ont effectué qu’un petit tour et puis s’en va, liste que je me garderai bien d’établir par correction envers ces auteurs disparus de la scène littéraire prématurément. Souhaitons à David Agrech qui vient d’obtenir ce prix de pouvoir emprunter la voie de ses glorieux aînés.

 

Daniel Ferrey, qui a tenté de devenir traducteur d’anglais et effectué de petits boulots pour payer ses études, végète dans un quotidien sans relief. Son beau-frère Victor, investisseur immobilier, et sa sœur Sandrine l’hébergent de temps à autre, mais surtout grâce à Victor il peut gagner quelque argent en pariant sur les champs de course. Pas de grosses sommes, mais de quoi rembourser la mise que Victor lui a obligeamment prêtée au départ et en engrangeant de petits bénéfices.

Il ne joue pas à l’aveuglette, mais scientifiquement, étudiant les chances des chevaux participants aux courses, jouant ses favoris placés, ce qui lui rapporte grosso modo du dix pour cent. Mais alors qu’il attend sagement son bus, près d’un abribus où la photo d’un mannequin attire son œil et même les deux, une voiture arrive, et un individu lui tire quelques balles dont une dans le ventre.

Alors qu’il gît sur le bitume, son inconscient lui ordonne de ne pas tomber dans les pommes et il croit que la belle de papier est descendue de son support, lui prodiguant des encouragements à survivre jusqu’à l’arrivée des secours.

Il se remet tout doucement de ses blessures et lorsqu’il sort de l’hôpital, Victor lui offre un séjour au Maroc dans un hôtel de luxe afin qu’il se rétablisse dans le calme et la sérénité. C’est vraiment sympa de la part de son beau-frère, et Daniel ne peut que le remercier même s’il se demande s’il n’y a pas un coup fourré quelque part. Ce qui lui importe surtout c’est de retrouver son ange gardien et il parvient à obtenir son adresse. C’est ainsi qu’il fait la connaissance d’Anja, Norvégienne, et qu’ils sympathisent. Toutefois elle n’est pas la bonne fée désirée et il continue ses recherches pour enfin tomber sur Clara, une péripatéticienne.

 

Ceux qui souhaitent lire un roman d’action vont être frustrés, mais ceux qui privilégient les histoires de suspense psychologique vont être comblés.

Narré à la première personne ce roman est comme un sandwich, deux tranches d’action enveloppant deux histoires d’amour plus ou moins épaisses, pimentées de réflexions sur le système financier des paris hippiques et surtout comment ne pas perdre trop d’argent, la préférence allant aux petits gains assurés, le tout agrémenté des salades de Victor.

Parfois on pourrait penser lire une Harlequinade notamment lorsque les jeunes femmes relatent leur parcours, pourtant je n’ai pu m’en détacher lisant quasiment tout d’une traite.

Comme quoi, il suffit parfois de peu de choses pour installer une relation de confiance entre l’auteur et le lecteur et se trouver accroché. Mais j’attends du prochain roman de David Agrech une autre approche du roman policier afin qu’il nous démontre sa capacité à se renouveler. S’il y en a un autre…

David AGRECH : Deux mille kilomètres avec une balle dans le cœur. Le Masque Jaune N°2530. Editions Du Masque. Prix du roman d’aventures. Parution 13 octobre 2010. 384 pages. 8,00€.

ISBN : 978-2702435120

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12 décembre 2018 3 12 /12 /décembre /2018 05:18

Quand Paul Gerrard, talentueux auteur de romans noirs, écrivait pour les enfants…

Paul BERNA : Le carrefour de la pie.

Depuis l’aménagement de la déviation de la Rua, entre Tournus et Mâcon, au lieu-dit le Carrefour de la Pie, madame Paulin, outre élever ses deux filles et ses cinq vaches, s’est trouvé une autre occupation rémunératrice : elle a transformé sa ferme et les dépendances en restaurant-buvette et proposant huit chambres aux touristes désirant se reposer ou baguenauder dans la région.

Une occasion rêvée pour la SICA qui fait construire une station-service avec deux pistes d’accès, cinq pompes électriques, un stand et un bungalow pour la famille qui tient le relais. Et tout naturellement Frédéric, le garçon de quinze ans, fils du pompiste, va se lier d’amitié avec les deux fillettes, Colette et Fanny, de la petite auberge paysanne sise de l’autre côté de la route.

Seulement, Langlais, le père de Frédéric, a subi un accident quelques mois auparavant, et depuis il ne peut plus conduire de camions. Un avantage qui aurait dû profiter à Frédéric qui ne voyait son père qu’épisodiquement. Mais Langlais reste renfermé et ne sourit presque jamais, se montrant froid et réservé à l’encontre de son adolescent.

Deux événements lui révéleront en partie ce passé paternel qui lui empoisonne l’existence. D’abord, la rencontre avec deux motards de la gendarmerie, des centurions comme il les surnomme, qui lui indiqueront que quelques mois auparavant, ils étaient affectés dans la Somme et qu’un homme conduisant un camion avait percuté un cycliste. L’homme se serait rendu immédiatement aux forces de l’ordre, s’accusant d’avoir taquiné la chopine et de rouler trop vite. Ensuite, un individu, bossu, nommé Jérémie, arrive dans une camionnette brinquebalante, demandant si par hasard il n’y aurait pas de travail pour lui. Il peut transformer son véhicule délabré en dépanneuse et il affirme que la mécanique et lui ne font qu’un. Langlais se laisse influencer et Jérémie couchera dans une petite dépendance.

Frédéric sent que son père lui cache quelque chose et il se méfie de Jérémie qui prend de l’ascendant sur son père. Toutefois le gamin accepte de l’aider dans les réparations que le bossu pratique sur des véhicules en panne, principalement des conducteurs de passage. Alors il commence à épier le soir, de sa chambre, le mécanicien qui semble s’entretenir avec un individu louche, tandis que deux autres bras cassés prennent pension au Relais de la Pie, du nom du carrefour où sont installées la station-service et l’auberge.

 

Et Frédéric se trouve au cœur d’un étrange trafic de cigarettes de contrebande, que son père aurait pu convoyer.

Alors évidemment, Frédéric va mener son enquête, avec l’aide de ses deux jeunes amies, trouvant également des appuis auprès des deux centurions et du facteur local, se rendant dans un cimetière de voitures installé dans une ancienne carrière de pierre de meulière.

Avec un peu plus de virilité dans les dialogues et dans les actions, ce roman aurait pu convenir agréablement à des adultes, mais il ne faut pas oublier qu’il était destiné à un lectorat de garçons à partir de dix ans.

Si l’épilogue réserve quelques surprises, si la fin paraît être une farce, l’intrigue du roman tourne autour de Frédéric et de son besoin de se voir reconnu, affectionné par son père. Le détachement que celui-ci professe à l’encontre de son fils réside dans ses problèmes antérieurs et il ne veut pas que Frédéric en subisse les conséquences, cachant son secret par honte.

Le lecteur déjà âgé et qui comme moi lit sans vergogne ces romans pour adolescents, retrouvera une partie de son enfance, le milieu des années 1950, avec toutes ces voitures qui ont fait rêver, de la 4Cv à la Simca Aronde, dont la Châtelaine de la famille Langlais, et quelques autres que l’on peu découvrir lors de réunions des vieilles gloires automobiles. Ainsi que les pompistes qui obligeamment donnaient à boire aux véhicules déshydratés.

 

Paul BERNA : Le carrefour de la pie. Bibliothèque Rouge et Or N°115. Editions G.P. Parution mai 1957. 192 pages.

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11 décembre 2018 2 11 /12 /décembre /2018 06:38

Le vol d’e.car ? On n’arrête pas le progrès !

Olivier ONDET : Le vol du siècle.

Arrivée depuis une semaine à Narbonne, comme avocate chez Maître Ovalie, Mandoline accepte de bon cœur la proposition de son amie Florence de se rendre à Narbonne-plage afin de passer une soirée agréable.

Et effectivement la soirée fut une réussite. Ce qui l’est moins, c’est le retour. A trois heures du matin, alors qu’elles roulent peinardement en écoutant de la musique, devant leur véhicule se dresse une voiture qui leur barre la route. Un accident provoqué par un sanglier qui n’avait pas traversé dans les clous. Tant pis pour lui, l’animal se retrouve dans le fossé. Quant au conducteur il est quasiment mort. Et lorsque Mandoline se penche au dessus du corps inconscient, une voix sort d’un haut-parleur.

Les deux jeunes femmes sont intriguées, mais il s’agit juste du loueur du véhicule accidenté qui s’inquiète, désirant avoir des précisions. La voix appartient à Esko, un informaticien qui en compagnie d’une petite équipe vient de mettre au point une voiture tout électrique capable de se conduire toute seule, sans la présence d’un chauffeur, ou presque.

Le théâtre du drame rappelle au major Bonflair, arrivé rapidement sur les lieux, que douze ans auparavant un même accident s’était produit, avec quatre morts à la clé dont un jeune champion de kitesurf prometteur au volant d’une voiture de sport et sa copine. Un endroit accidentogène, perdu en pleins vignobles languedociens du massif montagneux de la Clape. Et l’homme serait-il victime du mât de son char à voile entreposé à l’arrière du véhicule.

Esko, avec l’aval de sa directrice qui plaide à New-York leur invention auprès de banquiers, se rend immédiatement sur place afin de comprendre pourquoi et comment l’accident s’est produit, en interrogeant l’ordinateur de bord sur place et à distance. Ses premières constatations sont assez défavorables au conducteur qui ne devait pas dépasser une certaine vitesse. Quelque chose cloche quelque part, et il lui faut trouver ce qui ne va pas, l’avenir de « sa » voiture sans conducteur étant en jeu. Il va enquêter sur le système d’exploitation et les probables défaillances en compagnie d’Alex, le chef des programmeurs resté à Paris, et la jolie Mandoline qui la première était sur place.

Car ce cabriolet est un prototype et le conducteur un testeur qui devait respecter une feuille de route. Esko en vient à se demander si un de leur concurrent n’aurait pas bidouillé à distance le système informatique, provoquant un bug mortifère.

Mais le major Bonflair de son côté ne reste pas inactif, se renseignant auprès de l’un de ses anciens collègues, actuellement en retraite et qui avait couvert le premier accident. Un accident dû à une vitesse excessive, certes, mais le conducteur n’aurait peut-être pas pu éviter la camionnette venant en face. Or le conducteur était le fils de Maître Ovalie, l’actuel adjoint-au maire.

L’accidenté dans le cabriolet prototype était un employé d’un important vigneron de la région, ce que découvre avec stupéfaction Florence, l’amie de Mandoline qui elle aussi émarge sur la feuille de paie de ce viticulteur, mais dans un autre service. Un jeune homme qui transportait dans son véhicule les pièces d’un char à voile, adepte également du kitesurf, et de sports nautiques.

Esko, Mandoline, Florence, Bonflair vont être amenés à enquêter, chacun recherchant des indices dans le domaine qui leur est propre. Le hasard remonte à la surface un cadavre, le corps d’un jeune homme qui faisait partie de la bande de kitesurfeurs évoluant sur l’étang de Sigean.

 

Entre hier, les fouilles archéologiques effectuées sur l’emplacement d’un antique port romain, et demain, avec les progrès technologiques d’une voiture électrique sans conducteur, en passant par aujourd’hui avec les problèmes liés à l’implantation d’une centaine, voire plus, d’éoliennes géantes, avec inévitablement les affrontements entre les pour et les contre, Olivier Ondet déroule gentiment son intrigue qui joue quand même un peu sur les coïncidences pas forcément fortuites.

Etant de la génération des vétérans de la vie (à mon âge, on ne parle plus de seniors !) je suis un peu inquiet de la prolifération des nouvelles technologies, du tout numérique, de ce que le commun des mortels ne peut pas maîtriser. Et le moindre pépin peut entraîner des déboires, voire des catastrophes dont les conséquences sont difficilement maîtrissables.

La partie historique est aussi intéressante, sinon plus que la partie réservée aux nouvelles technologies, une anticipation ou une réalité, je ne sais pas n’étant pas assez pointu sur ce que l’auteur décrit. Mais cela présage un avenir pas forcément glorieux, et lorsque l’on stigmatise tous ceux qui sont considérés comme des assistés, l’on se rend compte que tous nous devenons des assistés de l’informatique qui nous bouffe nos idées de liberté d’entreprendre, de se gérer soi-même. Seul l’avenir sera réservé à une élite d’informaticiens et les autres devront subir.

L’auteur d’ailleurs répond en partie aux questions que l’on peut se poser :

L’article faisait également état d’une polémique sur la sécurité de ce genre de voiture : serait-il possible d’en prendre le contrôle à distance ? De sauver des vies si un conducteur perdait connaissance ? Ou au contraire de déclencher massivement des accidents si un terroriste prenait le contrôle de plusieurs voitures ?

 

Depuis quelques temps, je me rends compte également que la langue française régresse et que certains mots sont devenus obsolètes. Olivier Ondet n’est pas seul en cause, ayant relevé chez bien de ses confrères de telles aberrations (pour moi !) dont celles qui suivent :

…Le jeune homme qui s’était tué il a y douze ans…

Je préférerais lire :

… Le jeune homme qui s’était tué douze ans auparavant…

Ou encore : Il était rentré très tard hier soir… Il était rentré très tard la veille au soir, ne serait pas mieux ?

Mais Olivier Ondet n’est pas le seul, et de loin, à pratiquer ce petit cafouillage entre narration et dialogue.

Esko, Finlandais d’origine, est quelqu’un qui n’est vraiment pas pressé comme le démontre la phrase suivante :

Le serveur apporta le dessert – une île flottante – qu’il engloutit en quelques minutes.

Quelle voracité !

 

Un roman agréable qui entraîne le lecteur plus loin qu’il aurait pu penser au début, avec des problèmes ethniques qui ont défrayé la chronique à la fin du siècle dernier, ou sociologiques qui relèvent tout simplement de la tolérance, un sentiment négligé de nos jours.

Olivier ONDET : Le vol du siècle. Thriller. Le Papillon Rouge éditeur. Parution le 19 octobre 2018. 316 pages. 17,90€.

ISBN : 978-2490379026

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9 décembre 2018 7 09 /12 /décembre /2018 05:34

Où l’on apprend que Nestor Burma aimait Brigitte M.

Michel QUINT : Les belles de Grenelle.

N’allez surtout pas fantasmer, cette Brigitte M. qui vient d’être égorgée dans le parc Georges Brassens à Paris, s’appelait Brigitte Merlier.

Ayant découvert une photo représentant Burma jeune dans les affaires de la jeune femme, la commissaire divisionnaire Stéphanie Faroux mande à Burma de venir immédiatement afin de comprendre pourquoi il est impliqué, tout au moins photographiquement, dans ce meurtre. Nestor est désarçonné par cette découverte qui le projette quelques décennies en arrière. Et il n’a aucun mal à indiquer où demeurait Brigitte puisque les fenêtres de son appartement donnent sur le parc.

Cet appartement il le connait bien, car alors qu’il était adolescent, jeune libertaire ne sachant ce que serait son avenir mais déjà bourru et solitaire, il était souvent invité chez les parents de Brigitte. Les deux jeunes gens s’aimaient, surtout Brigitte car lui désirait garder ses distances question de principes, mais inconstant et bête comme un garçon peut l’être à cet âge là, et même après, ils avaient rompu, navigant chacun de leurs bords. Brigitte était devenue documentariste et avait signé plusieurs ouvrages et documentaires sur des personnalités du spectacle et autres, toujours avec rigueur et conscience professionnelle.

Retrouver le meurtrier de Brigitte devient une obligation morale pour Nestor Burma qui évolue en marge des investigations de Stéphanie Faroux, pour laquelle il ressent un sentiment mitigé. La commissaire divisionnaire a trouvé un pendant d’oreille près du corps, et lorsque Burma découvre le bijou jumeau alors qu’il investigue en compagnie de Stéphanie et de la Scientifique, il se garde bien de le dire. Au contraire, il cache cet objet se promettant de le faire parler et en connaître l’origine. Un bijou apparemment unique réalisé par un artisan, peut-être receleur d’or.

Il fouille dans l’appartement qui a été dévasté et trouve le carnet d’adresses de Brigitte. Et dans la boîte aux lettres, il récupère une bafouille émanant d’une petite maison d’éditions, proposant un contrat à six chiffres, sans virgule. Brigitte venait d’écrire un manuscrit mais impossible d’en trouver trace. Auprès de la maison d’éditions dirigée par une femme effondrée par la nouvelle du décès de Brigitte il n’en apprend guère plus. Sauf que ce livre devait être un brûlot et dérangerait peut-être jusque dans les arcanes du pouvoir. C’est ainsi que Nestor Burma remonte une filière sur laquelle plane l’ombre de quelques vedettes féminines du cinéma, dont Arletty, et de seconds rôles indispensables pour qu’un film soit réussi tels que Carette, Pierre Larquey, et quelques autres, aujourd’hui oubliés mais qui connurent leur petite heure de gloire.  Ainsi que la présence prégnante de Romy Schneider.

Les oubliés du cinéma, c’est le titre, approximatif, d’un festival qui doit être projeté dans un vieux cinéma de quartier, rendant hommage à tous ceux qui en furent les figures populaires, dont Viviane Romance, Arletty et je ne vais pas les citer toutes et tous. Et Nestor se verra convié aussi au Salon du Livre de Paris, salon auquel devait participer Brigitte et où il sera à même de s’imprégner de sa présence par procuration.

Quant à ses adjoints, la belle et délurée Kardiatou et le musclé Mansour, ils n’ont pas le temps de chômer, remontant entre autre à l’origine de la boucle d’oreille. Et son pote Jamie Wilcox est invité à se pencher sur quelques traces ADN sans oublier les analyses laboratoire de Nestor, analyses sanguines qui pourraient contenir, outre les Gamma GT (qui ne veut pas dire Grand Tourisme) des bricoles susceptibles de nuire à sa santé.

Si ce roman est émaillé de nombreuses références cinématographiques il nous envoie également quelques morceaux musicaux jazzy, avec la réminiscence d’un cornettiste oublié de nos jours, Bix Beiderbecke.

On retrouve un Burma parfois désabusé, nostalgique, bien dans l’esprit de Léo Malet mais avec la touche stylistique incomparable de Michel Quint. Car reprendre un personnage qui a marqué son époque tel que Nestor Burma n’est guère chose aisée. Et Michel Quint endosse avec sa personnalité l’imper de Léo Malet sans pour autant dénaturer ce héros mythique.

 

Dans la même collection :

Michel QUINT : Les belles de Grenelle. Série Les nouvelles enquêtes de Nestor Burma N°3. Collection Polar. Editions French Pulp. Parution le 15 novembre 2018. 208 pages. 1500€.

ISBN : 979-1025103661

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8 décembre 2018 6 08 /12 /décembre /2018 05:20

Quand les céréaliers se font du blé !

Max OBIONE : Les vieilles décences.

Le Mat, inspecteur de police en retraite, et Raja, ex substitut du procureur, se promettaient d’attraper “ le Monstre ”, un énorme brochet, dans un étang de Mornelande à Villecourt, non loin de Chartres.

C’est le cadavre d’un homme égorgé qu’ils remontent accroché à leurs hameçons. Dans les poches de ses vêtements ils trouvent un épi et des grains de blé. L’annonce dans un journal local que l’homicide serait en réalité un suicide attise leur colère. S’informant auprès du localier, Gaspard Métanier, Le Mat apprend que son article a été réécrit par le rédacteur en chef. Toutefois le pigiste promet de fournir une disquette qu’il placera sous la statue de Saint Antoine de Padoue, dans l’église du village.

Sur les conseils avisés d’un bistrotier, Baduc, Le Mat loue une chambre chez l’habitant. Puis il se rend au lieu dit. En cours de route il tombe sur un attroupement. Un camion de pompier vient de blessé mortellement Métanier. Selon le brigadier Bléchard, qui avait procédé à l’enlèvement du corps du noyé, il s’agit d’un banal suicide. Bizarrement le conducteur s’est enfui. Raja le rejoint le lendemain. Dans le train il retrouve par hasard Spiegelman, un journaliste parisien qui doit enquêter sur les céréaliers et plus particulièrement sur une association dite la confrérie de Saint-Luperce. Il passe à la morgue de Chartres afin de vérifier l’identité du poisson humain. Mais le cadavre présenté ne correspond pas au leur.

La disquette leur fournit le nom du faux suicidé : Mornand, un cultivateur qui se serait converti au bio. Après une soirée bien arrosée chez Baduc, lequel leur remet deux jetons permettant semble-t-il de s’introduire dans une officine de jeux clandestins, les deux compères prennent la route de la ferme de Mornand. Ils surprennent une troupe d’une douzaine d’individus habillés en para militaires se rendant vraisemblablement à un rendez-vous en pleine campagne tandis qu’un DC3 survole la région.

Après une nuit réparatrice, ils se présentent à la ferme de Mornand qui semble abandonnée. Des oiseaux morts gisent ça et là. Ils se font passer pour des journalistes auprès d’un jeune écolo, instituteur de son état qui rend visite à Mme Mornand. Celle-ci est inquiète n’ayant pas de nouvelles de son mari depuis plusieurs jours. Selon l’instit, le principal adversaire de Mornand serait le vicomte Hubert Couillard de Hautemanière qui règne sur les céréaliers.

 

Sous un aspect futile et léger, dû principalement à l’humour dégagé par les deux compères, ce roman de Max Obione traite d’un sujet brûlant, celui des dérives agricoles, d’une façon lucide.

Les méfaits des manipulations transgéniques, niées et cachées par les grands groupes chimiques et ceux qui préfèrent la rentabilité au principe de précaution, bafouant la santé de leurs concitoyens, ne sont pas toujours dénoncés avec la virulence qu’il faudrait.

Max Obione ne délivre pas un message mais il met en avant certaines pratiques honteuses, même si cela ne conduit pas forcément jusqu’au meurtre. Quoique. Les exemples de fermes incendiées “ spontanément ” ; de troupeaux d’ovins décimés, appartenant à de jeunes éleveurs bio, deviennent par trop fréquents dans la vie courante, pour que ces événements soient naturels.

Max Obione gratte où ça démange, et il serait souhaitable que d’autres personnes en prennent conscience, et pas uniquement des auteurs de romans noirs. Les personnages de Raja et Le Mat sont réjouissants, et méritent d’entrer dans la galerie des protagonistes atypiques. Quant aux autres figurants de cette histoire, bons ou méchants, ils méritent eux aussi des mentions très bien, quel que soit leur rôle, comme les acteurs à qui seraient décernés le César du meilleur second rôle.

Première édition : Editions Krakoen. Parution 1er mars 2005. 232 pages.

Première édition : Editions Krakoen. Parution 1er mars 2005. 232 pages.

Max OBIONE : Les vieilles décences. Collection Noire Sœur. Editions SKA. Parution le 20 novembre 2018. 2 ,99€.

ISBN : 9791023407457

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4 décembre 2018 2 04 /12 /décembre /2018 05:06

Il pourrait blesser quelqu’un !

René REOUVEN : L’assassin maladroit.

Maître Octave Manigou, avocat au barreau de Paris, reçoit une missive sibylline d’un expéditeur anonyme, lequel le prévient qu’il va le tuer pour un motif inconnu.

Ce pourrait être une farce, pourtant la balle qui le frôle, le manquant de peu et va se ficher dans une armoire de son bureau, prouve qu’il ne faut pas prendre à la légère cet avertissement. Un assassin maladroit, certes, mais entêté.

Maître Manigou fait appel au ban et à l’arrière-ban de ses troupes, c’est-à-dire ses deux avocats stagiaires et sa secrétaire, pour mener une enquête à Nice, point de départ de toute l’affaire.

Tandis que le futur assassin multiplie ses maladresses, maître Octave Manigou s’échine à trouver le mobile d’une vengeance problématique. Un assassin en devenir qui, cyniquement, écrivant à maître Manigou termine sa lettre par : Ne vous laissez pas abattre.

 

René Reouven use tout à la fois d’un style précis, humoristique et travaillé. Ce qui valut à ce roman, lors de sa parution en 1970 dans la collection Crime-club chez Denoël, le Grand Prix de Littérature Policière 1971.

D’ailleurs Reouven collectionne les prix : Prix Mystère de la Critique en 1982 pour son roman Elémentaire, mon cher Watson, paru sous le pseudonyme d’Albert Davidson, et Grand Prix de la Science-fiction française pour sa nouvelle Un fils de Prométhée parue dans le recueil Les Insolites sous son nom de René Sussan, sans oublier le Prix Cazes en 1965 pour un roman non policier, Histoire de Farczi.

René Reouven, un romancier discret, érudit, qui ne possède peut-être pas une bibliographie imposante, impressionnante, contrairement à certains auteurs écrivant à la chaîne, mais ses romans sont de qualité, ce qui justement en est une !

Première édition Collection Crime-club. Editions Denoël. Parution 1970.

Première édition Collection Crime-club. Editions Denoël. Parution 1970.

René REOUVEN : L’assassin maladroit. Collection Sueurs Froides. Editions Denoël. Parution 2 février 1990. 168 pages.

ISBN : 978-2207236659

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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