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2 janvier 2013 3 02 /01 /janvier /2013 14:05

Pas de Lupin mais un roman coquin !

 

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Les deux jeunes femmes nues dansaient toujours, harmonieuses, gracieuses, impudiques. Les pointes de leurs gorges se frôlaient. Souples, elles se renversaient en arrière ; les bras à la taille, unissant leurs ventres, et sur leurs visages, il y avait le même sourire de volupté vague qui, entre les paupières à demi closes, laissaient à peine voir les prunelles noyées, entre les lèvres entr’ouvertes laissait à peine luire l’éclat blanc des dents…

Qui eut pu imaginer que celui qui a écrit ce paragraphe gentiment sensuel et vaguement érotique se nomme Maurice Leblanc, le créateur d’Arsène Lupin ? Et ce n’est pas son seul ouvrage où il aborde l’amour d’une façon concrète. Mais ces romans sont tombés dans l’oubli, ce qui est quelque peu dommage car c’est tout un pan de l’œuvre de Maurice Leblanc qui passe à la trappe. Mais espérons qu’en 2013 quelques éditeurs combleront cette lacune.

 

A trente-quatre ans, Patrice Martyl est le plus célèbre des jeunes avocats d’assisses de Paris. Il est marié depuis quatre ans avec Dominique qui appartient à une vieille famille de la noblesse bretonne. Elle n’avait que vingt ans lorsqu’ils se sont vus pour la première, et tout de suite ce fut le coup de foudre. Cette vierge de corps et d’âme est pieuse, se conforme à des princes sévères par goûts et par éducation. Afin de fêter leur quatrième anniversaire de mariage, Patrice et Dominique dinent au restaurant du Bois, en proche région parisienne. Patrice incite Dominique à boire un verre de Kummel, malgré les réticences de la jeune femme qui sait qu’elle ne supporte pas l’alcool. Le patron du restaurant leur offre, en tant que bons clients, une caisse d’un champagne prestigieux qui doit être mis peu après sur le marché. Ensuite ils retrouvent leurs amis Antoine et Richard, lequel est secrètement amoureux de Dominique, et se promènent en voiture dans la forêt de Saint-Germain en Laye. Ils s’enfoncent dans un petit chemin qui les conduit jusqu’à une clairière. Ils rencontrent un automobiliste en panne, puis dans la clairière illuminée de lumières bleues, assistent à un étrange spectacle. Deux jeunes femmes nues dansent entre elles bientôt rejointes par une troisième. Patrice sort quelques bouteilles de champagne et tout le monde déguste le breuvage. Bientôt tous sont plus ou moins pompettes cela se termine en caresses, baisers gloutons et plus. Les corps s’enchevêtrent. Dominique est caressée puis subit les assauts d’un homme, avec un plaisir certain aiguisé par l’alcool. Elle est persuadé qu’il s’agit de Patrice. Soudain un cri s’élève. Tout ce petit monde est rapidement dégrisé. La Pierreuse, la troisième femme qui avait rejoint les danseuses, gît étranglée.

Vite branle-bas de combat. Tout le monde récupère ses affaires dans le noir et Patrice accompagné de sa femme et ses deux amis s’enfuient sans demander leur reste. Direction Paris où Patrice dépose les deux amis qui prennent un taxi afin de rentrer chez eux. Seulement l’un d’entre eux a récupéré une bouteille de champagne qu’il laisse après dans le véhicule.

Rentrés dans leur luxueux appartement, Patrice se rend compte qu’il possède une écharpe jaune qui appartenait à la Pierreuse tandis que Dominique déplore la perte de son collier de perles. Patrice est en colère, accusant sa femme de l’avoir trompé, alors qu’elle se défend comme elle peut, assurant avoir copulé avec lui. Les doutes la rongent, mais il faut faire bonne figure vis-à-vis de leurs relations. A-t-elle réellement couché avec Patrice ou a-t-elle succombé aux assauts de Richard, d’Antoine ou encore de Julot, l’automobiliste qu’ils ont dépanné ? Le corps de la Pierreuse est retrouvé et le brigadier Delbot, un policier accrocheur, tenace, est chargé de l’enquête. Les indices relevés le conduisent rapidement chez l’avocat mais il manque de preuves et Patrice est trop habitué à défendre des clients ayant enfreint la loi pour se laisser démonter.

Entre Patrice et Dominique les relations sont tendues. Les soupçons tenaillent Patrice tandis que Dominique se persuade de n’avoir cédé qu’aux avances de son mari.

Ce roman s’apparente au genre policier puisqu’il y a meurtre, puis enquête. Mais c’est également une étude de mœurs, d’abord au sein d’un couple déchiré, en proie au doute, mais aussi sur les actes de l’amour au féminin. Maurice Leblanc magnifie les évolutions, les rapprochements, les embrassades des danseuses qui se produisent sur une autre scène fort prisée et en plein air. Les spectateurs, sur leurs sièges, suivaient avec une attention frémissante le spectacle gracieux d’un érotisme léger où ils puisaient une exaltation sensuelle, trouble et pourtant esthétique à cause de la beauté et du tact des danseuses.

Patrice jette l’opprobre sur Dominique, ne se posant pas de questions, ne se rendant pas compte que c’est lui qui a obligé sa femme à boire, celle-ci obéissant à son mari par amour. Il pratique une totale mauvaise foi, ne se demandant pas, si Dominique a couché avec l’un des participants males lors de cette concupiscente réunion des corps, avec qui lui-même forniquait. La jalousie, la colère, le dégoût revenaient, le torturaient, le poussaient à la méchanceté, à l’injustice, à l’insulte. Dominique, la plus sage des deux, qui femme amoureuse même si ses sens exacerbés lui ont joué un mauvais tour, reste plus calme, plus réfléchie que Patrice : L’évidence n’est pas toujours la vérité. Et puis, rien, quand même, ne te donne le droit de me faire souffrir ainsi.

Si les jours passent, si l’orage qui stagnait sur leurs têtes semble s’éloigner, la maladie du doute est au fond de nous, sournoise, épuisante, et ne peut pas guérir.

Le scandale du Gazon bleu est donc un roman à découvrir pour son charme rétro et qui s’inscrit dans la lignée de quelques auteurs qui publièrent dans la même collection ou non, à commencer par Pierre Louÿs, mais aussi de Henri de Régnier, d’Octave Mirbeau ou encore de Marcel Prévost. Un roman qui met en situation des scènes qui pour l’époque pouvaient être considérées comme scabreuses avec les ingrédients qui ont pour nom : échangisme, partouse, voyeurisme et lesbianisme.


A lire égalment mon article sur la revue Rocambole N° 61 consacrée à

Maurice Leblanc sans Lupin.

 


Maurice LEBLANC : Le scandale du Gazon bleu. Collection L’Amour. Editions Flammarion. Octobre 1936. 144 pages.

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16 décembre 2012 7 16 /12 /décembre /2012 07:29

Odieux Noël !

 

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Noël, c'est pas son truc à Corinne. La grande bouffe, le sapin, les cadeaux, elle n'en a rien à faire. Ce qu'elle veut, s'est s'éclater, aller voir ailleurs si c'est mieux que chez ses parents, dans sa petite vie étriquée.

La veille de Noël, elle décide de se faire elle même son petit cadeau en volant une montre de prix dans un grand magasin. Après, il ne lui reste plus qu'à fuir, prendre le bus pour une destination inconnue, se perdre en pleine campagne, être hébergée par un couple de vieux, accepter la proposition de se faire raccompagner chez elle par un bonhomme dont la libido se réveille à la proximité de cette jeunette de quinze ans, se retrouver seule sur un parking d'autoroute, se faire aborder par un camionneur et fuir à nouveau parce que le routier possède des revues pornos et qu'elle ne tient pas à laisser sa vertu entre des mains qu'elle ne connaît pas.

Jean Noël, c'est un imaginatif, obligé de suivre ses parents à la messe de Noël, de subir les sarcasmes d'un de ses condisciples lycéens. Il se crée son petit monde à lui, peuplé d'une certaine Corinne, une jeune fille rousse. De quoi en rester sur le cul lorsqu'il rencontre celle qui alimente son imaginaire. Le contact charnel entre ces deux adolescents ne leur suffisant pas, ils décident de partir, à Paris, de se payer du bon temps.

Jérôme, jeune flic qui passe seul son réveillon au commissariat, est persuadé de ses compétences et lorsque les parents de Corinne signalent sa disparition, il se voit déjà tout auréolé de gloire dans l'accomplissement d'une enquête rondement menée. Mais entre les désirs et la réalité il existe une marge, un fossé, un canyon même.

Cette road-story moderne allie humour et noirceur, campant des personnages caricaturés avec férocité. Le côté désabusé, blasé de Corinne, la mythomanie de Jean Noël, la mégalomanie du flic, en font des êtres déphasés avec le quotidien, en décalage constant avec la réalité, gravitant dans un univers parallèle. Constat et satire du monde moderne, le roman noir constitue la relève du drame et mélodrame qui servaient de support descriptif d'un monde décadent, de l'antiquité jusqu'à nos jours.


Jean-Luc TAFFOREAU : Corinne n'aimait pas Noël. Collection Fleuve Noir Crime. Editions Fleuve Noir. (Novembre 1996). 190 pages. 6,40€.

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30 novembre 2012 5 30 /11 /novembre /2012 13:41

Ce manuscrit a connu un parcours étonnant que Joseph Bialot m’a dévoilé au Mans en novembre 1994, lors des 24 heures du Livre.

 

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Voici donc l’anecdote. Alors qu’il était régulièrement publié à la Série Noire, je lui avais demandé comment il se faisait que ce livre soit publié au Fleuve Noir. Il m’a répondu : J’avais envoyé mon manuscrit au Fleuve Noir et chez Rivages. Le Fleuve Noir m’a répondu le premier et j’ai signé aussitôt le contrat. Le lendemain, j’ai reçu une réponse positive de Rivages, mais c’était trop pour revenir en arrière. Pas courant, non ?

 

Balade dans un Paris promis à la démolition, aux promoteurs, et qui ne livre ses secrets qu'à ceux qui savent apprécier ses charmes séculaires, cet unique roman de Joseph Bialot, La main courante a donc été édité aux éditions Fleuve Noir en mars 1994.

Un incendie qui ravage un hôtel dans le faubourg Saint Antoine, ce ne pourrait être qu'un banal fait divers. Seulement la présence d'un truand égorgé retrouvé parmi les victimes fait tiquer le responsable des îlotiers du quartier. D'autant que le propriétaire de cet immeuble dortoir pour immigrés, décédé lui aussi tel une Jeanne d'Arc auvergnate, aurait revendu le bien à un promoteur.

Mais les deux îlotiers, compléments indispensables du commissariat et de la Crim, les Starsky et Hutch de Reuilly, un néo Français issu de Portugais et un Martiniquais fils de sorcier manipulateur de fonds et de paysanne beauceronne, sont aux premières loges de cette enquête et ne pensent qu'à alpaguer le coupable pour l'embastiller.

Les cadavres se reproduisent incongrument, les faux billets de cinq cents francs fleurissent sur le bitume, la petite amie de l'îlotier franco-portugais est retrouvée dans le coma et une petite vieille, tout en déplorant le manque d'ardeur de son défunt mari, vitupère contre un fantôme bruyant squattant son pavillon. Les tours de passe-passe entre immeubles mènent nos enquêteurs dans des impasses tandis qu'un loufiat jongle avec les faux papiers et un vrai bulletin de décès: le sien. Un ébéniste historien se contente d'étaler sa culture et l'on se demande lequel de ces personnages est le plus vernis.

Joseph Bialot raconte une de ces histoires dont il a le secret, puisant dans la nostalgie des vieux quartiers parisiens, imprégnant son récit d'une forte dose d'humour. Un livre à trois voix, les deux îlotiers prenant tour à tour la parole et s'immisçant dans ce duo, Diogène, un septuagénaire qui vit dans des containers à ordures, non par nécessité mais parce qu'il y retrouve la liberté et la solitude dont il est privé chez lui, et qui recherche désespérément Rommel, son chien mystérieusement disparu.

Cet ouvrage est une ode à la capitale, mais surtout à ces quartiers, petits villages dans la mégapole, dont les habitants se trouvent déboussolés lorsqu'ils en franchissent les frontières définies par des arrondissements arbitraires. On ne peut s'empêcher de penser à Léo Malet, chantre de ce Paris méconnu et qui désabusé ne mena pas jusqu'au bout son incursion parmi les mystères de Lutèce.

Joseph Bialot est décédé le 25 novembre dernier, et les éditions Rivages peuvent-elles rééditer ce roman qui le mérite ? La question est posée.

 

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De gauche à droite : Joseph Bialot, Jacques Mondoloni, Alain Demouzon et Emmanuel Errer/Jean Mazarin.


Joseph BIALOT : La main courante. Collection Crime Fleuve Noir N°47. Editions Fleuve Noir. 1994. 192 pages.

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26 novembre 2012 1 26 /11 /novembre /2012 14:56

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Les blondes, quelles blondes ? Les femmes, les cigarettes, les bières ?

 

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Michel Audiard, plus connu comme scénariste, dialoguiste et réalisateur de films, a écrit au début des années 1950 trois romans parus dans la collection Spécial Police du Fleuve Noir : Priez pour elles (N°5), Méfiez-vous des blondes (N° 7) et Massacre en dentelle (N° 26). Puis le cinéma l’a accaparé et peut-être que l’écriture de romans ne l’intéressait plus guère. Il récidivera près de quinze ans plus tard avec Ne nous fâchons pas puis Le Terminus des prétentieux chez Plon. Serait-il souhaitable que ces romans soient réédités, comme le souhaitent certains nostalgiques ? Pourquoi pas, dans un volume Omnibus par exemple !

 

Journaliste dans un quotidien marseillais, Georges Masse l’est parfois, à la masse. Il fait honneur à tout liquide qui racle la gorge et décape les papilles. Ce qui l’amène à bousculer ses collègues dont Donald (un surnom) qui a tendance à le mettre de mauvaise humeur. Mais l’important n’est pas là car Georges Masse, s’il utilise volontiers sa langue pour lancer des piques, sait se servir de ses mains pour flatter les sténos callipyges qui prennent en note ses articles.

Ce jour là, alors que la canicule assèche encore plus son gosier, il attend avec impatience la belle Jeanine Lambert. Celle-ci doit revenir d’un reportage à Saïgon, une enquête sur le trafic de drogue. Un homme se présente au journal et remet une serviette à Masse de la part de Jeanine. Mais celle-ci a disparu à son arrivée à l’aéroport.

Sans perdre de temps Masse et son fidèle photographe P’tit Louis se rendent chez Jeanine. Elle est chez elle mais dans un piteux état. Elle a été tabassée, ce qui est une injure à son joli petit corps. Toutefois, plongée dans une semi-inconscience elle parvient à susurrer ce qui lui est arrivé.

Elle a été abordée par deux hommes dans le hall de l’aéroport, portant en bandoulière des appareils photos, comme s’ils étaient de nouveaux employés au journal. Une fois assise dans le véhicule qui devait la conduire vers Georges, elle reçoit en guise d’apéritif un coup de poing dans l’estomac et tombe dans les pommes. Elle se réveille face à Costelli qui lui réclame un document important, une pièce d’état-civil, mais elle a eu la prescience de ce qui devait lui arriver puisqu’elle a pris la précaution de remettre son bagage à un inconnu, lequel a tenu sa promesse en remettant la serviette à Georges. Durant un long moment Costelli lui en a fait voir de toutes les couleurs à l’aide de sa ceinture. Elle se souvient seulement qu’il a évoqué un Chinois qu’il a appelé le Barman.

La seule solution pour Georges, accompagné de P’tit Louis, est de rechercher des Chinois dans Marseille, de les photographier et de soumettre les clichés à Jeanine. Soudain, Georges pense au Fleuve Bleu (tiens, tiens, clin d’œil ?), une boîte de style extrême oriental qui propose jazz, jeunes femmes esseulées ou tarifées. Le début des ennuis pour Georges qui est approché par une belle blonde, Olga Schneider, qui se dit proche de Lady Wilson, une richissime inconnue, mais il est repéré également par le barman chinois, quelques gros bras à la solde de Costelli, grossiste en produits illicites. Puis le commissaire Besnard qui va se mettre en travers de sa route pour une histoire de meurtre, car Jeanine est retrouvée défunte peu après. Alors que Masse veut prévenir la police celle-ci débarque, le commissaire Besnanrd en tête, avertie par un appel téléphonique.

blondes.jpgReprésentatif des romans à l’américaine des années cinquante, quoique l’action se déroule à Marseille, Méfiez-vous des blondes lorgne du côté de Peter Cheney auquel ce livre est dédié. Mais ce roman est également dédié à André Hunebelle, le réalisateur en 1950 du film éponyme interprété par Martine Carol, Raymond Rouleau, Bernard Lajarrige, Noël Roquevert et Yves Vincent dans les rôles principaux, scénario, dialogues et adaptation de Michel Audiard.

Dans son avertissement, Michel Audiard établit les différences existant entre le film et le roman et se réfère à Hemingway en énonçant une déclaration du romancier américain : J’écris une nouvelle d’après un film tiré d’un de mes romans. Une spirale sans fin.

Quant à cette réflexion de Georges Masse, elle s’avère dans ce contexte pour le moins étonnante : Moi j’ai le cinéma en abomination, ça me fait danser le cassis et j’en sors avec la migraine. Lorsqu’il décrit le personnage d’Olga Schneider, Michel Audiard est très explicite : Une vrai Vision d’Art. Un conte de fée, blonde comme les blés, balancée comme Martine Carol, claire comme le jour, avec des yeux de myosotis, et un teint… et une bouche… Non, mais alors une bouche ! C’est en trop pour un seul homme. Georges Masse ne dédaigne pas les alcools forts, au contraire, et s’enfile armagnac, whiskies, et pastis, pur apparemment, puisqu’il lui arrive de boire directement à la bouteille le breuvage qui a fait la réputation de la cité phocéenne.

Ce roman est un peu daté, certes, à cause par exemple de l’argot employé, mais pas trop, et il est encore lisible et nous plonge dans une époque qui ne diffère pas vraiment de la notre. S’il s’agissait d’un roman traduit de l’américain, nul doute qu’un éditeur le ferait retraduire, ce qui serait dommage car il en perdrait le charme de la spontanéité.


Michel AUDIARD : Méfiez-vous des blondes. Collection Spécial Police N°7. Editions Fleuve Noir. 1950. 220 pages.

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26 novembre 2012 1 26 /11 /novembre /2012 07:12

Du Quai de la gare au Quai des Orfèvres...

 

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Le Prix du Quai des Orfèvres 2013 a été décerné à Des clous dans le cœur de Danielle THIERY, publié chez Fayard. L’occasion de revenir sur un de ses romans publié en 1998.

Pour ceux qui ne la connaîtraient pas, Danielle THIERY fut l'une des premières femmes reçues au concours d'inspecteur de police en 1969, puis commissaire en 1976. Mais elle est surtout connue pour son personnage de Marie-Gare qui a donné lieu à une série télévisée titrée Quai n° 1 avec Sophie Duez.

 

Alors qu'elle pratique son sport favori, le jogging, le commissaire Edwige Marion aperçoit un attroupement sur les berges du Rhône. Le cadavre d'une jeune femme vient d'être repêché. Il s'agit de Marie Sola Lorca, une avocate qui devait défendre Manuel Bianco, une ancienne gloire de la tauromachie confondu dans une affaire d'escroquerie et d'association de malfaiteurs.

L'avocate et son client ne s'étaient pas présentés le jour du procès. Une clocharde avait affirmé avoir vu la jeune femme danser sur la rambarde d'un balcon et être tombée. Quant à l'ex toréador, il a été retrouvé dans une chambre d'hôtel, mort, nu et torturé. Seuls indices retrouvés sur les lieux, des graines de pollen de pins des Landes, des cheveux blonds.

THIERY.jpgLe commissaire Marion va remonter à la source en enquêtant dans la forêt landaise, malgré l'hostilité des gendarmes, la cour pressante d'un commissaire trop beau gosse et l'accumulation de cadavres.

Dès le départ le lecteur connaît le nom du coupable, mais l'intérêt de ce roman réside dans les motivations ayant poussé le meurtrier à accomplir sa vengeance afin d'exorciser un traumatisme d'adolescent. Le croisement des chemins entre l'enquêtrice et le coupable ne se feront pas sans heurts et sans dégâts.

Un roman noir sur lequel plane parfois l'ombre de Robin Cook, l'auteur de "J'étais Dora Suarez", avec sang, sexe et obsession, le tout saupoudré de l'ambiance tauromachique.


Danielle THIERY : Mises à mort. Editions Robert Laffont. Réédition Editions Pocket. Collection Pocket Noir 10882.

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25 novembre 2012 7 25 /11 /novembre /2012 07:52

C’est Maintenon ou jamais !

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Conclure une conversation téléphonique par un Aaargh du plus bel effet bédéphile, pour Patrice Bergof, enseignant en communication à Paris VIII ex Vincennes, ce ne peut être qu’une farce. Qu’à la rigueur il qualifierait de mauvais goût s’il ne se sentait pas attiré par l’aura de mystère qui plane sur le contenu de cette conversation. Ce Aaargh est à n’en point douter le cri d’un agonisant, d’un suicidé, d’un assassiné qui sait.

Mais l’ire du meurtrier présumé serait-elle due à la teneur même du dialogue téléphonique ? Un crime hypothétique qu’aucune thèse vient étayer. Pourtant l’intérêt de Patrice Bergof est éveillé, peut-être parce que le sujet de cet appel était Paul Scarron, l’auteur du Roman Comique, mari de la belle Françoise d’Aubigné, petite-fille du poète Agrippa d’Aubigné et future maîtresse du roi Louis XIV sous le nom de Madame de Maintenon.

Un mystère qui s’épaissit lorsque Patrice Bergof lors d’une enquête en dilettante et sur trame historique apprend le décès subit de spécialistes de Scarron, d’amateurs éclairés et de membres de la Société des Amis de Scarron.

Humour, histoire, enquête, tendresse, sont au programme de ce roman de Christian Poslaniec, auteur de Punch au sang paru à la Série Noire et dont Patrice Bergof était déjà le héros.

Christian Poslaniec, professeur de lettres, mais également directeur de collection pour la jeunesse, auteurs de nombreux romans pour la jeunesse et d’essais sur la littérature pour les jeunes, s’amuse et divertit le lecteur dans ce roman un peu loufoque, qui oscille entre la farce et l’énigme historique.

Un livre extrêmement plaisant qui rompt avec la monotonie qui guette la littérature noire dont la production actuelle s’oriente autour des faits et méfaits de la société moderne et tristounette.

Il ne faut pas oublier que la littérature est aussi et surtout un moyen d’évasion même si elle explore le temps d’une façon détournée. Enfin, à noter une définition du Sida qui vous laisserai pantois mais ne comptez pas sur moi pour vous la révéler.

 

Vous pouvez retrouver un entretien croisé avec Christian Poslaniec sur le site Rick Bass et les nature writers ici :

http://naturewriting.wordpress.com/

site qui vous proposera de découvrir à partir du 5 décembre les premiers chapitres en numérique des Fous de Scarron.

 

Message de Réjane Niogret qui a eu cette heureuse initiative :

J'ai le plaisir de vous adresser les sésames vous permettant d'accéder dès aujourd'hui aux trois premiers épisodes des Fous de Scarron une innovation numérique que les lecteurs pourront apprécier sur le net à partir du mercredi 5 décembre 2012 (accès gratuit).

Pour la découvrir en avant-première, la marche à suivre est la suivante : Cliquer sur l'adresse : http://lesfousdescarronap.wordpress.com/
Saisir l'identifiant : lesfousdescarronap@gmail.com

Saisir le code : entrezchezlesfous

 

Je vous souhaite une belle exploration de cette publication que j'ai eu plaisir, en tant que co-auteure créatrice des "surprises", à réaliser. Pour en savoir plus : Interview croisée, Les dessous des fous : http://naturewriting.wordpress.com/

 


Christian POSLANIEC : Les fous de Scarron. Collection Le Masque N° 1998. Prix du roman policier au festival de Cognac 1990.

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24 novembre 2012 6 24 /11 /novembre /2012 13:53

 

Hommage à Jean Amila né le 24 novembre 1910.

 

 

Il ne faut pas prendre les enfants du Bon Dieu pour des boeufs !


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Colleville sur mer, Saint Laurent sur mer, Vierville sur mer. Cinq kilomètres de plages. Le 18 juillet 1956 eut lieu la cérémonie d'inauguration du cimetière et du mémorial d'Omaha Beach. Février, Mars 1964, les journaux régionaux ne parlaient pas encore du 20ème anniversaire du débarquement et des réceptions prévues. Février 1964. Parution du roman de Jean Amila, "La Lune d'Omaha" et pour l'auteur une nouvelle occasion de brocarder la guerre et ses cortèges d'horreur.

Il prend pour théâtre ce petit bout de terre (70 hectares) concédé à perpétuité par le gouvernement français au gouvernement américain. Et d'imaginer une histoire de déserteur qui au lendemain de la guerre se serait fait passer pour mort avec la complicité d'un paysan normand, le père Delouis. George Hutchins devient George Delouis, livret de mariage falsifié d'Amédée Delouis à l'appui. A la mort du père Delouis en 1963, lequel était employé à l'entretien des parterres, des plantes, de la tonte du gazon, des jardins du cimetière américain d'Omaha, ce secret est enfoui dans la tombe avec le corps du jardinier.

omaha2C'est sans compter avec l'avidité du fils légitime du père Delouis. S'ensuivent tractations, marchandages guidés par la haine, l'hypocrisie et la roublardise. Hutchins le déserteur qui éprouve le désir de réendosser, non pas son uniforme mais son identité devant la bassesse d'une famille attirée par l'héritage, quitte le village de Seine et Marne où il est installé avec Jeanine sa femme, institutrice, et ses trois enfants, et révèle son origine et la supercherie lors d'une confrontation appelée par euphémisme, familiale.

Seulement il menace de se dénoncer auprès des gendarmes, mettant ainsi fin au versement d'une rente mensuelle qu'appréciait son frère d'adoption. Il est reconnu par le sergent Reilly, le responsable de l'entretien du Mémorial, lequel se propose de l'aider ainsi que le capitaine Mason, à lui trouver des excuses dans son comportement lors du Débarquement. Hutchins ne serait que déserteur par négligence, après avoir été prisonnier et s'être évadé. Retentirait la douce mélodie du bonheur et de la tranquillité si la femme de Hutchins ne s'était pas si impliquée dans la fabrication de l'identité de son époux et si celle de Reilly, une petite paysanne avide de plaisir, un peu pute sur les bords (lesquels ?), d'une vingtaine d'année sa cadette, ne venaient perturber cet agencement viril dans lequel on reconnaît la mansuétude du héros américain.

Guy de Maupassant, dans ses contes normands, ne s'était pas privé de dévoiler les travers d'une certaine paysannerie rapace, retorse, madrée, donc jusque là rien de réellement provocateur de la part d'Amila. A priori cette histoire de déserteur aurait pu susciter une certaine indignation de la part de ceux qui prônent les vertus rassurantes de mots tels que Patrie, Noble Cause, Valeur, Idéal, Honneur. Mais Jean Amila va plus loin dans la bravade et l'audace de ses dénonciations romancées.

Il ose insinuer que certaines magouilles auraient eu lieu lors de l'aménagement du cimetière. Par exemple un trafic de fumier dont le père Delouis serait à la tête, ce qui contrarie le sergent Reilly. “ Car hélas! tous les arbrisseaux, les parterres, les buissons de roses galliques et les pépinières ne se contentaient plus de l'humus symbolique américain, il fallait du fumier français! ”

Une fois par semaine environ le sergent Reilly rend un hommage à ses camarades de combat. “ Il faisait en zigzag ce qu'il appelait l'appel de l'escouade. D'un bout à l'autre du grand cimetière, il se promenait selon une ligne brisée, mais invariable. ” “ Il remontait vers le centre, autour de la chapelle ronde. Et presque avec tendresse, il touchait en passant les croix de Harry, de Gordon, de Hann... Il s'arrêtait plus longuement devant la croix de James R. Bancroft, le râleur... Au delà du grand Agénor de bronze du Mémorial, il rendait visite au mur des disparus où le dernier homme de l'escouade, Cornell, avait son nom au milieu d'autres, pulvérisés, jamais retrouvés ”.

Il traque comme le font encore aujourd'hui les jardiniers Amila2français employés à l'entretien, le moindre brin d'herbe risquant de jeter une note discordante de laisser aller incongru. “ Il avait eu l'honneur de faire un stage à Arlington avant de venir au cimetière d'Omaha Beach. Il lui en était resté la haute conscience du gazon absolument irréprochable. Chasse féroce à l'ignoble pissenlit, au sournois laiteron, au vulgaire pâturin! Mètre par mètre, d'un bout de l'année à l'autre, le gazon était ausculté, tondu, noyé, roulé, piqué... Pas une trace de mousse aux endroits d'ombres. Pas la moindre éclaircie aux surfaces brûlées par le soleil de juillet et d'août! Les bords nets! La tonte au ras des croix! 

Une profession de foi que l'on retrouve en bonne place dans le dépliant fourni à l'entrée du Mémorial: “ L'alignement parfait des tombes sur la pelouse vert émeraude merveilleusement entretenue inspire un sentiment inoubliable de paix et de sérénité ”. Et il valait encore mieux passer par le père Delouis, officieux adjudicataire des fumiers et composts, que de se voir livrer un “ fumier farci de pourridié malade, ou truffé de tonnes de vers blancs qui compromettaient tout la végétation ”.

Il y avait toujours la solution de porter plainte. Seulement “ Ça menait loin et ça prêtait le flanc à la rigolade de la sympathique population ”. Et puis entre nous, cette façon de faire son beurre et d'écouler sa production, cela a toujours existé et existera toujours, quoique l'on dise ou fasse. Pas de quoi fouetter un bœuf, ou un chat, et encore moins matière à un article. Allons plus loin dans l'horreur et l'absurdité dénoncées avec une force tranquille, goguenarde et irrespectueuse de la part de Jean Amila qui va bientôt nous camper quelques scènes et dessiner des portraits caricaturaux propres à soulever la réprobation générale, l'indignation dans la presse locale, l'irritation des édiles, le mécontentement onctueux du clergé assorti d'une menace d'excommunication, la colère des autochtones.

Amila.jpgEnvisager une telle pratique blasphématoire et irrévérencieuse envers la mémoire de héros qui le 6 juin 1944 avaient mouillé leurs pantalons aussi bien au propre qu'au figuré ne pouvait que soulever une poignée de hallebardes prêtes à fondre sur l'iconoclaste anarchiste. Plus que le courage, la témérité et le plaisir de combattre, (Lafayette, nous voici !) c'était la peur de mourir qui obligeait nos libérateurs à mettre un pied devant l'autre et de grimper les falaises. L'apaisement et la communion que ressent le sergent Reilly vont en prendre un sacré coup lorsqu'il apprend par le curé de Saint Laurent sur mer que les vaches du père Delouis auraient été enterrées dans l'immense charnier en compagnie des cadavres des soldats américains. Bien sûr “ Reilly n'avait guère d'illusions sur la façon dont l'Armée avait pu traiter les cadavres. Et il était bien placé pour savoir que les croix alignées, le gazon impeccable, la bannière étoilée, les mots IDEAL, VALEUR et PATRIE gravés sur le Mémorial et le grand Agénor au coup de pied à la lune, ne recouvraient qu'une immense fosse commune ... Mais le coup des vaches, il ne l'avait jamais soupçonné. Et parce qu'il éprouvait du ressentiment pour Claudine, ce matin-là, il trouva cela aussi normand, aussi français, aussi dégoûtant que le croissant trempé dans du café au lait ”.

Devant cette marque flagrante d'irrespect Reilly ne peut qu'exprimer sa fureur à son supérieur qui se montre pour le moins philosophe et balaie par une citation empruntée à Alexandre Dumas (on peut pisser dans un fleuve, aucune importance!) ce qu'il considère comme une blague, traitant le curé de farceur ou le père Delouis d'avoir voulu se rendre intéressant... L'attitude des paysans à son égard, la subordination de ses jardiniers teintée d'ironie, trouvent explication à ses yeux. “ Brusquement il se souvint de la curieuse manière qu'avaient les gens de par ici de prononcer Omaha, en le traînant, en le veulant jusqu'à en faire un meuglement : Omeuheuuu!... ”

Amila3


Ceci est un extrait d'un article paru dans la revue Polar N°16.

 

Jean AMILA : La Lune d’Omaha. Série Noire N° 839 (1964) réédition Folio policier 309, éditions Gallimard. 5,30€.

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23 novembre 2012 5 23 /11 /novembre /2012 09:16

Nice n’est pas nice !

 

  Nice est


Nice-est, c’est comme un nævus verruqueux qui dépare un joli visage, comme la tache sur le pétale d’une rose, comme l’étron dans une assiette en porcelaine de Limoges, comme… C’est l’envers, ou l’enfer du décor.

Les Vignasses, une HLM perdue parmi d’autres, une HLM dont les occupants, principalement des ressortissants de pays qui se trouvent de l’autre côté de la Méditerranée, oublient de payer le loyer. Spinelli, un encaisseur désabusé, est chargé par son patron de signifier aux locataires récalcitrants qu’à défaut de bon argent sonnant et trébuchant, c’est l’expulsion qui les attend. Un boulot qui n’enchante guère notre encaisseur de service, surtout lorsqu’il apprend que derrière tout ça se cache une vilaine histoire de gros sous et de terrain. Je t’achète, je te vends, tant pis pour les locataires démunis qui se retrouveront vite fait à la belle étoile.

Seuls quelques-uns auront le privilège d’être relogés.

Patrick Raynal trimbale son héros et son blues dans une ville qu’il connait bien. Patrick Raynal aime sa ville, mais ce n’est pour autant qu’il pardonne tout. Encenser le beau, c’est bien joli, mais ce n’est guère courageux. Dénoncer les imperfections, pour ne pas dire les magouilles, cela réconforte avec soi-même. Il faut savoir s’assumer et ce n’est pas en recouvrant de fleurs un tas de fumier que la pourriture disparaitra. Patrick Raynal le sait et ce n’est pas à sa ville qu’il en veut mais à ceux qui sont aux commandes.

 

Quant on vous dit que le roman policier, le roman noir est un reflet de la société ! Beaucoup trouvent futile ce genre de littérature, pourtant que de constats, de réflexions amères, de leçons devraient en être tirés. Patrick Raynal possède une façon bien particulière d’écrire, avec de nombreuses petites phrases, des métaphores, des formules percutantes.

 

Ce roman avait paru initialement en 1988 dans l’éphémère collection SOS Racisme chez Calmann-Lévy. Cette collection aurait mérité un plus grand retentissement, mais soit elle fut boudée par les lecteurs, soit le principe même ne fut pas concluant aux yeux de la maison d’éditions. Pourtant les titres qui ont été proposés valaient largement le détour. Cette collection SOS Racisme était-elle une bonne idée ? Ne prêtait-elle pas à confusion ? Certains auteurs, dont Patrick Raynal, sont tentés de le croire (voir Anthologie du Mystère 1989, entretien avec Jacques Baudou, Le Livre de Poche) mais il fallait avoir le courage de tenter cette expérience. Les thèmes abordés étaient le racisme, la ségrégation, la haine ou la peur de l’étranger. Etranger ne signifiant pas seulement celui qui est né au-delà des frontières, mais aussi de l’inconnu, celui qui traverse le village avec une horde de chiens hargneux à ses trousses, les gens du voyage, les handicapés, les marginaux… Et le titre même de la collection SOS Racisme, avait disparu de la couverture dès le cinquième titre, peut-être pour éviter de choquer certaines susceptibilités.


Les titres édités furent : Djemila de Jean-François Vilar (Mars 1988), Nice-est de Patrick Raynal (Mai 1988), Mississipi Delta Blues de Marie et Joseph (Aout 1988), Skinheads de Roger Martin (Octobre 1988), Billard à l’étage de Michel Quint (Mai 1989) Grand Prix de Littérature policière 1989 et L’encre de Chine de Frédéric Larsen (Mai 1989).

 

 

Patrick RAYNAL : Nice-est. (Réédition de Calmann-Lévy, collection SOS Racisme – 1988) Collection Instantanés de Polar. Editions Baleine. 142 pages. 5,95€.

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18 novembre 2012 7 18 /11 /novembre /2012 10:45

Mignonne, allons voir si la ronce...

ronce


La vie, c’est comme les roses, c’est beau mais il ne faut pas oublier les épines qui sont le complément indispensable. Comme le mal qui s’accroche au bien, afin de relativiser notre existence.

Et dans les nouvelles signées par Roland Sadaune, la vie en contient pas mal de ces dards qui égratignent les petits moments de bonheur éphémères. Treize exactement, comme dans la cène, douze apôtres autour de celui qui deviendra le Christ dont le front sera ceint de ronces.

Mais n’allez pas croire que Roland Sadaune puise son inspiration dans le domaine biblique. Non, c’est plus prosaïquement à partir de la vie quotidienne qu’il construit ses historiettes, avec parfois un trait de plume trempé dans la dérision, le caustique, l’humour grinçant, l’ironie, le rêve aussi.

Comme Roland Sadaune est également, et avant tout allais-je écrire, artiste peintre, il s’inspire de son savoir-faire et de son expérience pour nous planter le décor en deux coups de pinceaux plongés dans le noir, amélioré de gris, pour nous camper quelques personnages issus de son milieu ou non, pour brosser des situations dramatiques tout en étant cocasses. Et au fil de ses nouvelles et de ses romans, il s’affine, le trait de vient plus incisif, plus corrosif, plus obsédant aussi. Un auteur à découvrir.

 

A lire également de Roland Sadaune : Le loup d'Abbeville, Deauville entre les planches, Game Auvers.

 

Roland Sadaune : La vie en ronces. Editoo.com. Avril 2004. 13€.

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10 novembre 2012 6 10 /11 /novembre /2012 11:17

Ou passion délirante ?

 

délirepassionné


Antoine est étonné de se réveiller avec dans son lit une inconnue, nue comme lui. Lucienne, dite Lulu, est moins déconcertée et impute cette situation scabreuse à l’absorption d’un verre de trop. Un coup de téléphone de son ami Théo dissipe rapidement le malentendu. La veille, Tony et ses copains ont fait la tournée des grands ducs et flirté avec quelques filles dont Lulu qui tenait le vestiaire d’une boîte de nuit.

Robert et Théo ont raccompagné, déshabillé et couché Lulu et Tony bien éméchés dans le lit du jeune homme pensant leur faire une bonne blague. Comme Lulu est consentante, ils sacrifient au réveil au démon de la chair. Tony est stupéfait de démontrer à la jeune fille sa virilité à plusieurs reprises. Ce qui le surprend, pensant être devenu plus ou moins détaché des plaisirs charnels depuis le départ de sa femme avec un homme plus fortuné que lui.

Lulu lui avoue avec candeur avoir connu plusieurs hommes et se faire entretenir. Sa situation de courtisane ne la gêne pas et ils adoptent vite un compromis. Elle s’installe chez Tony. Une sorte de contrat moral qui les satisfait, surtout au lit. Cependant Tony est un peu agacé par la propension de Lulu à mettre en parallèle ses précédentes aventures.

Chacun de leur côté, ils connaîtront d’autres aventures, sans lendemain. Le cœur n’y est pas. Ils se retrouvent avec plaisir et le mariage se profile à l’horizon.

 

Portrait d’une femme libérée avant la fameuse révolution sexuelle, Délire passionné joue beaucoup sur la métaphore et le subjectif pour décrire les scènes d’amour. Un roman à l’écriture ampoulée, vieillotte, mais sauvé par les situations modernes subies par les personnages.

 

Citation : Une femme sans homme c'est comme un petit chien sans maître. (Page 129).

 


DOLNEY Robert J. : Délire passionné. Collection Noire et rouge du Fleuve Noir (1953).

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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