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25 juillet 2013 4 25 /07 /juillet /2013 08:50

Bon anniversaire à Virginie Brac, née le 25 juillet 1955.

 

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Eve Lambert porte bien mal son prénom. Elle n'a rien d'une beauté, au contraire. La trentaine revêche, un mètre quatre-vingts pour soixante-dix-neuf kilos mal répartis, le nez cassé, le bas de la figure parsemé d'acné comme si on lui avait postillonné du yaourt, la poitrine aussi plate qu'un plateau sur lequel se seraient égarés deux boutons de culotte, elle ne symbolise pas vraiment la beauté fatale.

Un soir elle occis ses patrons, pille le coffre-fort, embarque tout ce qui peut représenter une certaine valeur négociable, et s'évanouit dans la nature. Elle prend pension chez un couple de châtelains - la mère et le fils -  dont le manoir vétuste s'érige près d'un petit village coincé à la limite de l'Alsace et de l'Allemagne.

Dans le village proche vit une communauté d'ectoplasmes qui voient en elle la résurgence de Cœur-caillou, leur égérie disparue. Eve se rend à Francfort et à raison de plusieurs séances de lifting, de chirurgie esthétique, prend une nouvelle apparence, approche de la beauté. Elle s'entiche de la jeune maquilleuse qui la soigne et la prend à son service au manoir. Seulement des événements étranges se passent dans le château et les environs et elle a du mal à gérer ceux qui la considère comme une divinité.

Dans cet anodin petit roman (petit par le format et le prix mais non par le contenu), derrière l'extrapolation de l'anticipation, du fantastique et du surnaturel, Virginie Brac pose au moins une question fondamentale qui ne devrait pas laisser indifférent toute une frange de lecteurs.

Que se passerait-il si une centrale nucléaire explosait ? Quelles en seraient les conséquences et qu'adviendraient les habitants de la région sinistrée. Evidemment un phénomène s'est déjà produit, loin de nos frontières, à Tchernobyl dans l'ex-Union Soviétique, mais les informations qui nous sont parvenues restent relativement vagues, même si l'on sait qu'il y a eu des morts et que les radiations ont agi profondément sur la nature, particulièrement sur la faune. Un livre qui, mine de rien, avec humour parfois, et des personnages complètement déjantés, tisse l'angoisse. Virginie Brac est happée, vampirisée par son travail de scénariste pour la télévision, ce qui ne lui laisse guère de temps pour écrire. Dommage.


Virginie BRAC : Cœur-caillou. Fleuve Noir, collection Les Noirs N°32. Septembre 1997. 256 pages.

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23 juillet 2013 2 23 /07 /juillet /2013 07:52

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Surtout ne vous méprenez pas. Du sexe il y en a, mais pour midinettes. Ou pour femmes en manque.

Car Alfred Brochel, alias Freddy le Galopin, le héros de ce roman, vend ses charmes et son savoir faire auprès de belles, et surtout moins belles, esseulées. Et pour avoir voulu narguer la directrice d’une agence un peu spéciale, le voilà aux abois.

C’est dans un camping qu’il trouve la délivrance sous la coupe d’une maîtresse femme, qui eut recours à ses services, devenue une sorte de camériste conseillère gouvernante de César Zarcé, le célèbre trafiquant d’armes retiré en Afrique pour raisons personnelles.

Zarcé se prend pour un descendant de Jules César, ressemble à Napoléon et désire que sa fille lui donne un rejeton de haute noblesse. Il l’a donc mariée à un vague héritier génétique de l’empereur François-Joseph, un berger tyrolien un peu simplet. Hélas les amours entre les deux tourtereaux forcés ne produisent pas de fruit. Zarcé les oblige à vivre leur lune de miel prolongée sur une gondole, au milieu d’un marigot putride. Freddy est désigné pour suppléer les défaillances de l’époux. Il y va de sa réputation et d’un héritage que les proches de Zarcé convoitent. Aubépine, sa fille, en premier.

Siniac est un auteur à part dans le giron de la littérature policière française. On pourrait parler de San-Antonio, de Jarry, de Westlake, de Hiassen, mais cela reste du Siniac pur jus, avec sa façon de décrire ses personnages atypiques et farfelus (à l’instar du graphisme débordant de Dubout), de les mettre en scène avec une faconde satirique, de construire une histoire plausible complètement loufoque dans un décor d’opérette, d’annoter ses propres délires, inventions, erreurs voulues ou non, de parsemer le tout d’un humour féroce et jovial, de mener le lecteur par le bout du nez sur les traces d’un safari exotique de pacotille et de le laisser subjugué par ce foisonnement imaginatif et caustique.


Pierre SINIAC : De l’horrifique chez les tarés. Rivages/Noir N°364. Juin 2000. 320 pages. 8,65€.

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18 juillet 2013 4 18 /07 /juillet /2013 07:57

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Quelques années après la fin de la guerre de Cent ans, les chevaliers n’ont pas grand chose à faire, alors ils se combattent dans des tournois qui en laissent plus d’un sur le carreau.

Gilles, le jeune écuyer, est habitué aux victoires de son maître, même si celui-ci ne paie pas de mine. C’est comme au catch, ça ne paie guère mais au moins on a la possibilité de se faire une renommée. Jusqu’au jour où y’a un chevalier qui arrive, comme ça, bêtement, alors qu’il n’était pas invité, et qui fout la baraque en l’air. Une sorte de Don Quichotte de pacotille avec son armure toute rouillée. Sauf que le poignet lui ne l’est pas rouillé, et boum, le chevalier se retrouve à terre, et il n’a pas le temps de s’en rendre compte que Dieu ou le Diable s’est déjà emparé de son âme. A la guerre comme à la guerre, il faut se plier aux principes.

Gilles devient le nouveau serviteur de cette casserole ambulante qui n’a pas de marque, je veux dire dont personne n’a vu le visage. Aurait-il quelque chose à cacher ? Cela se pourrait bien car alors qu’ils voyagent peinards, d’un seul coup le chevalier annonce à son écuyer que comme c’est la nouvelle lune, il doit être attaché sur le sol, fortement, par les poignets, sinon il risque de devenir méchant. Gilles se doit d’obéir alors il ligote les membres de son nouveau seigneur et maître à des piquets fichés en terre et il se dit maintenant je vais piquer un bon roupillon.

C’est sans compter sur la force de la nature et le chevalier dans une crise de démence se libère à la façon d’Houdini, dont il ne connaît pas l’existence et pour cause, et le voilà gambadant dans la forêt et qui se prend pour l’ogre. Coup dur pour Gilles qui ne s’attendait pas à ça. Mais bon, comme il doit respect et obéissance à son nouveau maître, faut bien se plier aux exigences de celui-ci. Seulement ce n’est pas pour batifoler au clair de lune qu’ils parcourent la sylve.

manoir-sortileges1.jpgUn prieur a confié une mission au chevalier et ce n’est qu’avec l’aide de Gilles qu’il peut la réaliser affirme-t-il. Il doit retrouver un grimoire contenant des formules magiques capables de le désenvoûter selon le religieux. Ce manuscrit est enfermé dans un manoir depuis longtemps assailli par les éléments et gardé par un troupeau de moutons qui n’ont de paisibles que la réputation de leur race. Avec une sauvageonne qui se prétend sorcière ils arrivent enfin sur place et commence alors le plus gros du travail.

La magie, l’angoisse, l’épouvante sont au rendez-vous de ce roman moyenâgeux dont l’action se déroule en la forêt de Brocéliande, de si sinistre réputation. Là encore la vedette est en partie tenue par une bâtisse recelant de profonds mystères, là encore à chaque fois que l’on pense être confronté à d’horrifiques sorcelleries, l’auteur prend le contre-pied de ce qu’il a écrit ou évoqué quelques lignes, quelques paragraphes auparavant.

Tout est expliqué de façon rationaliste et pourtant le lecteur ne peut s’empêcher de vibrer, de ressentir de l’effroi en lisant les chapitres goulûment. De la belle ouvrage monsieur Brussolo. On ne s’en lasse pas.


Serge BRUSSOLO : Le manoir des sortilèges. Le Masque Grand Format 1999. Réédition Le Livre de Poche. Novembre 2001. 318 pages.

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14 juillet 2013 7 14 /07 /juillet /2013 07:56

Bon anniversaire à Alain Bellet, né le 14 juillet 1949.

 

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Les deux SDF, Bonappe et Mohamed, qui ont assisté au meurtre d’une vieille libraire de la Butte aux Cailles ne sont pas d’accord : l’un refuse de témoigner, l’autre veut se rendre chez les flics.

Bonappe n’a pas envie de mettre le doigt dans l’engrenage car il a reconnu l’un des deux agresseurs. Pourtant madame de Vivanne était très appréciée, tant de ses clients que des SDF du quartier auxquels elle donnait toujours une pièce.

Puis c’est le cadavre d’un médecin qui est découvert sur les marches de la butte Montmartre. Quelque temps plus tard un élu écologiste.

Chloé Bourgeade qui doit écrire pour la revue Prométhée un papier sur Michel Ravelle, chantre désabusé de Paris, étudie parallèlement des archives pétainistes prêtées par son ami Antoine. Un document est glissé parmi les feuillets, qui a trait au camp de Satory où furent fusillés des chefs de la Commune en 1871. C’est ainsi que le présent et le passé vont se télescoper, le Paris d’aujourd’hui et la Commune d’hier.


alain-bellet.jpgCette fois le rôle dévolu à Chloé et Antoine est minimisé, et ils se partagent la vedette avec Bonappe, le SDF, et le policier Serge Duval. Jouant sur les coïncidences, Alain Bellet nous livre un bon roman qui démolit dans notre estime certains personnages de la Troisième République et nous inspire une forme de respect envers des chefs Communards trop souvent vilipendés.

L’intrigue se dilue dans le propos historique, mais nous ne nous en plaindrons, car il est juste parfois de remettre les pendules à l’heure. Et si vous êtes en manque de ballades parisiennes, pourquoi ne pas vous rendre au Père-Lachaise la nuit tombée ?

 

 

Alain BELLET : Fausse commune. Collection Polarchives, éditions Le Passage. Octobre 2003. 172 pages. 10,15€.

 

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9 juillet 2013 2 09 /07 /juillet /2013 08:16

Bon anniversaire à Richard Morgiève né le 9 juillet 1950.

 

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Morgiève œuvra sous le pseudo de Bauman à ses débuts dans la collection Sanguine chez Phot’œil puis Albin Michel ou encore Engrenage du Fleuve Noir. Depuis il a creusé son sillon, s’imposant avec un style, (des styles ?) particulier.

Notamment avec Fausto, chez Seghers en 1990 qui déjà décrivait le parcours d’un orphelin, ou encore avec Andrée ou Cueille le jour, en marge du fantastique, chez Robert Laffont, sans parler de ses dernières productions chez Pauvert. D’ailleurs il semble que le passage 2000/2001 fut bénéfique pour cet auteur en marge puisque pas moins de 6 titres ont été édités durant cette période, alors qu’il publiait bon an mal an un titre par an avec une interruption de 1997 à 1999. Mais les aléas de l’édition…

Donc Legarçon est l’histoire d’un enfant, battu, victime, abusé par la vie et les hommes (et les femmes) dont l’éducation laisse plus qu’à désirer, marginal en un mot, martyr à l’occasion.

Ecrit à la troisième personne, mais cela n’aurait pas dérouté le lecteur que l’emploi du Je fus systématique, ce roman est comme une incursion dans la pensée du narrateur par procuration. Avec une forme d’écriture parfois déroutante, la respiration du texte étant hachée, la ponctuation volontairement décalée, comme si l’auteur recueillait les pensées de son personnage, à chaud, sans remettre en forme ses déclarations, ses mémoires, son parcours d’enfant des rues.

Un livre émouvant, poignant, touchant, dérangeant, scatologique parfois mais comme pourrait s’exprimer un gamin qui survit, n’ayant pas de gants à prendre avec la société. Un beau livre, ardu de temps en temps à la lecture, mais qui a demandé de la part de l’auteur une rigueur à laquelle on n’est plus habitué.


Richard MORGIEVE : Legarçon. Collection Motifs N° 134, éditions du Serpent à plumes. (Réédition de Calmann-Lévy 1997). Juillet 2001. 232 pages. Existe également au format Kindle 9,99€.

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5 juillet 2013 5 05 /07 /juillet /2013 13:55

Au moins le cadavre n'a pas froid !

 

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Un certain Shaner Weier pénètre indigné dans le bureau de Mario Balzic, le chef de la police de Rocksburg : il se présente comme le responsable de l’église luthérienne locale depuis une semaine et demande la fermeture d’un sex-shop. Balzic tente de calmer l’olibrius offusqué, puis demande à son adjoint de se renseigner sur ce pasteur nouvellement arrivé. Peu après, il apprend qu’un homosexuel a été découvert assassiné dans la ruelle à l’arrière du sex-shop. Perturbé par l’état de santé de sa mère, hospitalisée à la suite d’un accident cardiaque, Balzic assume toutefois ses responsabilités de chef de la police. La victime a été frappée de vingt-neuf coups de couteau ; le meurtrier semble avoir été en proie à une folie colérique.

Le père Marrazo a eu une conversation téléphonique avec une femme qui lui a avoué avoir de graves problèmes. Balzic accepte de rencontrer l’inconnue ; mais, fortement troublée, elle ne se confie que peu à peu : son mari la bat et elle soupçonne son fils d’être le meurtrier.
Sa mère décède alors que Balzic s’était assoupi à son chevet. Son enquête et ses problèmes familiaux le perturbent fortement, mettant en péril son ménage. Tandis qu’il se recueille au funérarium, un homme demande à le voir. Il s’agit du mari de la femme qui lui a parlé. Il hurle, menace Balzic, le bouscule et repart énervé à bord de son véhicule.

Dans cette fausse enquête de Balzic, ou plutôt cette enquête tronquée, puisqu’il n’a pas à se déplacer, les éléments venant à lui, les sentiments, la douleur, les réflexions, la philosophie du policier priment. Mais surtout nous partageons l’émotion d’un homme qui vient de perdre sa mère et qui prend conscience des perturbations de la cellule familiale et du quotidien auquel il n’avait jusqu’alors pas prêté attention : l’une de ses filles se teint les cheveux ; l’autre profère des mots grossiers qu’il lui reproche alors qu’il en fait autant. Enfin, il se retrouve seul face à sa femme pour qui sa mère était une amie, un support, qui ne comprend pas que Balzic fasse passer avant tout le devoir de sa charge.

Balzic, comme dans Un homme exaspérant, se voit confronté à l’administration pénitentiaire en des démêlés à la limite du gag, mais révélateurs des bouleversements provoqués par de telles circonstances.

Un roman dans lequel les considérations extra-policières ne s’inscrivent pas en marge de l’enquête, mais font partie intégrante de l’histoire.


K.C. CONSTANTINE : Meurtre au soleil. (Unshine Enemy, 1990 - Traduction de Fabienne Poloni). Editions du Rocher. Novembre 1992. 230 pages.

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4 juillet 2013 4 04 /07 /juillet /2013 08:11

Hommage à Pascal Garnier, né le 4 juillet 1949.

 

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Au lendemain de la Libération, trois adolescentes de Saint-Martin sur Cher, Arlette la forte en chair, Gisèle la forte en gueule et Lucienne la forte en thème, sont tondues sur la place publique pour avoir couché avec l’envahisseur. Certains s’attèlent à la tâche par répression, d’autres pour prouver leur bonne foi après des moments d’égarement avec les Allemands. Gisèle et Lucienne n’ont pas supporté l’affront et sont parties vers d’autres cieux, Arlette elle est restée au pays.

Cinquante ans plus tard, venant d’Arras et désirant visiter les châteaux cathares, voyageant en compagnie d’une amie, Luce tombe en panne de voiture non loin de Saint-Martin. Le garagiste n’a pas la pièce adéquate afin de dépanner son véhicule et les deux femmes sont obligées de s’installer à l’hôtel. Gisèle revient au même moment sur les lieux de son enfance, afin d’assister à l’enterrement de sa mère. Arlette veuve d’un boulanger et menant à la baguette le commerce familial, est affligée d’un fils, Laurent, qui accumule les bêtises.

Les retrouvailles des trois anciennes amies organisées par le coup de pouce d’un destin farceur se font mi-figue mi-raisin. Le temps des réminiscences est sonné et quelques explications se doivent d’être approfondies. Pour Laurent, c’est peut-être aussi l’heure d’assumer enfin sa quarantaine atteinte à coups de larcins, de défis à la maréchaussée, de bouteilles éclusées en compagnie d’amis fauchés mais solidaires devant un verre, plein de préférence.

Une parenthèse dans une existence sabordée pour trois femmes, trois adolescentes à l’aube de leur destinée. Elles ont eu le courage de surmonter l’épreuve et ont connu des fortunes diverses. Pascal Garnier, dans ce roman, efficace dans la concision, narre ces retrouvailles inopinées simplement, avec humanisme, un peu comme le faisait Simenon, portant un regard attendri mais non moralisateur sur ses personnages et nous réservant un final qui pourrait être celui d’un conte de fée. Mais Pascal Garnier possède plus d’un tour dans son sac, et sous la candeur se cache la rouerie. Un excellent roman qui dépasse le cadre du roman noir mais y trouve pour autant une place privilégiée.


Pascal GARNIER : Parenthèse. Editions Plon. 19 aout 2004. 176 pages.

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3 juillet 2013 3 03 /07 /juillet /2013 09:44

Bon anniversaire à Viviane Moore, née le 3 juillet 1960.

 

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En cette année 1133, en pays d’Armor, la rivalité règne entre deux clans, les Lesneven et les Lochrist. Galeran de Lesneven parcourt les bois, chassant la sarcelle, ou, quand l’occasion se présente, le sanglier. Il attend de pouvoir être adoubé chevalier, contre l’avis de sa mère qui ne le sent pas mûr.

Le seigneur de Lochrist a ramené de sa croisade d’Orient une tribu qui sème la terreur dans la région. L’une des causes de discorde entre les deux familles est un cours d’eau qui partage leurs domaines. Dans ce ruisseau se reproduisent des mulettes, sortes de grandes moules d’eau douce qui renferment des pierres baroques de grandes valeur.

Lors d’une partie de chasse Galeran et ses compagnons tombent en embuscade et il parvient à s’ensauver avec un prisonnier, un jeune homme tremblant de peur. Poursuivi par les hommes de Lochrist, Galeran n’a d’autres ressources que de fuir espérant trouver refuge dans un tertre. La mort sera au rendez-vous et il n’aura la vie sauve que grâce à son prisonnier qui le tire d’un bien mauvais pas.

Ce sera pour lui le début de son apprentissage d’homme. En compagnie d’un valeureux chevalier qu’il rencontre inopinément il parcourt la côte et arrive au Mont Saint Michel. L’abbaye est déjà, pour de nombreux pèlerins qui font étape sur la route de Saint Jacques de Compostelle, un havre de paix, de repos et de ravitaillement. Seulement cette paix est factice et flotte sur l’île comme un mauvais présage, une légende qui comme toutes les légendes s’inspire de faits réels, d’atmosphère délétère de prévarication.


Nous retrouvons le jeune et futur chevalier de Galeran dans sa première aventure, celle qui lui fit quitter son pays natal et parcourir le pays de France en quête d’aventures. Quant au Mont Saint Michel, de tous temps il a exercé un attrait envers l’homme. Le croyant, le religieux, le pèlerin, étaient attirés par cette élévation vers le ciel, prometteur de rédemption et repos entre deux étapes. L’aspirant à l’isolement qui voyait en cette île le lieu idéal pour communier avec Dieu ou se rétablir d’une peine de cœur.

Les envahisseurs appâtés par la proximité et qui voyaient là le marche pied de la conquête. Le touriste aussi, charmé par le site exceptionnel sur lequel l’abbaye a été construite, par la majesté de l’édifice, par le mysticisme qui s’en dégage. Sans parler des marchands du temple qui toujours furent là pour attirer le chaland par des colifichets, parfois de mauvais goût, souvent d’inspiration religieuse, et toujours axés sur la Merveille.


Viviane MOORE : La couleur de l’Archange. Editions du Masque.

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29 juin 2013 6 29 /06 /juin /2013 07:47

Bon anniversaire à Marc Villard, né le 29 juin 1947

 

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Abandonnant l'habit de romancier noir, Marc Villard ôte en même temps un masque et se découvre en tant qu'homme. Celui qui comme tout un chacun se penche parfois sur son passé et épluche ses souvenirs.

En vingt cinq courtes nouvelles, il déshabille l'écrivain et c'est l'être humain qui surgit. Son enfance, ses errances d'adolescent, ses premiers pas dans l'édition à compte d'auteur, ses phobies et ses rendez-vous presque manqués avec Christine sont sujets à se moquer de soi-même et peut-être à régler ses comptes avec une enfance, si l'on en croit pas toujours heureuse.

Pas tant par manque d'argent que d'affection ou de compréhension. Il se retourne et regarde le gamin qu'il fut, celui qui ressentit ses premiers ‚mois en classe de CM1, celui qui joua les ouvreurs dans une salle de cinéma à seize ans, celui qui à vingt et un ans paie pour faire publier ses premiers poèmes. Vingt ans plus tard, il se trouve confronté‚ à d'autres situations qui cocasses pour le lecteur sont déprimantes ou émouvantes, consternantes ou attendrissantes pour l'auteur.

Ainsi sa rencontre en compagnie de Joseph Périgot d'élèves de CM1/CM2 dans une bibliothèque et de la séance de dédicaces pour le moins insolite qui s'ensuivit ou le voyage qu'il fit à Bordeaux à l'initiative d'un comité d'entreprise.

Pudique, Marc Villard ne dévoile pas tout à fait ses sentiments et tel l'acrobate il s'efface dans une pirouette humoristique. Il nous montre une autre facette de son talent, celle de se mettre en scène, de se moquer de soi-même, ce qui se révèle souvent plus difficile que de se gausser des autres. Plus périlleux aussi. Mais Marc Villard s'en sort par la justesse de son écriture, par son talent et par une certaine forme d'humilité.


Marc VILLARD : J'aurais voulu être un type bien. Recueil de nouvelles. L'Atalante. Juin 1995. 160 pages. 10,60€.

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28 juin 2013 5 28 /06 /juin /2013 12:43

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La canicule sévit à Good Hope, petite ville de la Virginie. Clara, la blanche et Elie le noir, s’aiment et attendent un enfant. Seulement, le bébé, nommé Nora Carol, décède peu après sa naissance d’une malformation. Nora Carol est inhumée en l’église baptiste Victory en présence du pasteur Derby nommé depuis quatre mois, et de la grand-mère de Clara, Rosy Epps, près des tombes de ses ancêtres.

Derby remet à Clara une chaînette avec un crucifix en sautoir. Snead, l’intendant de l’église, ne l’entend pas ainsi. Il convoque les diacres qui votent à l’unanimité l’exhumation du corps. Selon la tradition, un noir ne peut être enterré dans ce cimetière mais dans celui d’une église baptiste voisine. Le soir même Clara informe Monroe, adjoint du shérif Talley, que son époux n’a pas reparu de la journée.

Au même moment un incendie ravage l’église de Victory. Elie est sur place brandissant le poing, proférant des invectives à l’encontre de l’église. Monroe l’appréhende mais Elie nie avoir provoqué l’incendie. Nathan Deeds, ancien substitut du procureur à Good Hope, et qui s’est installé à Richmond après s’être séparé de sa femme huit mois auparavant, est commis d’office comme avocat. Deeds n’est pas convaincu de l’innocence de son client mais il accepte toutefois de prendre en charge la défense.

A Good Hope, Deeds retrouve Derby, un vieil ami d’enfance et se heurte à Talley qui fait la loi dans tous les sens du terme dans la ville et au procureur Fentress, son ancien patron. La découverte du corps calciné d’Amanda, la fille du shérif, dans les décombres de l’incendie n’arrange pas les affaires du prévenu. La condamnation à mort est requise mais Deeds est de plus en plus persuadé intimement que son client est innocent. Pourtant il encourage celui-ci à plaider coupable car il ne possède pas de preuves du contraire.

Selon le médecin légiste Amanda aurait bu, été violée et battue avant son décès. Deeds se demande pourquoi la jeune fille, âgée de dix-sept ans, se trouvait dans une église baptiste alors que son père est un fervent catholique, quoique séparé de sa femme depuis des années. Amanda était une fille secrète vivant la plupart du temps chez sa mère en dehors de Good Hope. Les conclusions du légiste ne conviennent pas à Deeds qui demande des compléments d’information.

Ce roman fort intéressant à plus d’un titre, est placé sous le signe de la dualité. Dualité Noir-Blanc, mais aussi dualité intérieure. Le personnage de Deeds, qui était substitut du procureur se retrouve placé de l’autre côté de la barre en devenant avocat. Il est persuadé de régir son couple comme il le devrait, mais tombe de haut lorsqu’il apprend par la bouche de sa femme qu’elle l’a trompé, une seule fois.

Dualité également entre le rôle du pasteur Derby et ses actes : il aime les femmes et la boisson. Dualité entre les églises : Amanda qui fréquentait l’église catholique - son père fervent pratiquant lui non plus ne suivait pas la conduite chrétienne - se tourne vers l’église baptiste par curiosité. Enfin on notera que Snead, le responsable des diacres qui exige l’exhumation et le déplacement du corps du bébé, réfute les termes de racisme et de ségrégationnisme, mais se retranche derrière la tradition. Les us et coutumes ont parfois bon dos.


Robbins DAVID : Terre brûlée (Scorched earth – 2002) trad. américain Nora Camelo. Editions de l’Archipel. Février 2004. 352 pages. 20,95€

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