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18 mai 2016 3 18 /05 /mai /2016 08:26

Du vent dans les pales...

Max OBIONE : Barouf.

Après avoir été localier pour un journal de Fécamp, avoir suivi des études de journalisme à Lille puis sévi dans des rédactions parisiennes et en avoir eu marre, Bob Mougin a créé au Havre son propre journal en ligne. Le EWE, Excelsoir Web Edition. Trois mille huit cent cinquante huit abonnés au compteur, à 2,50€ par mois, disséminés dans toute la France et même ailleurs, c'est un joli score qui permet à Bob de vivre presque raisonnablement et d'embaucher Fati, sa secrétaire stagiaire en CDD. C'est ce que l'on appelle un auto entrepreneur qui ne roule pas en voiture mais en Motocyclette bleue, 350cm3, ce qui est gonflé.

Bob s'est fait un copain de Gaston, un goéland rapide, et se nettoie les dents au troquet en bas de chez lui à base de café Robusta qui lui remette les neurones en place le lendemain de soirées un peu trop arrosées. Normal me direz-vous qu'au Havre les soirées et mêmes les journées soient arrosées. La pluie en Normandie, c'est la marque de fabrique. Mais ce n'est pas de l'ondée bienfaisante à laquelle je pensais, vous non plus d'ailleurs.

Il reçoit des lettre anonymes bien sûr, la plupart du temps injurieuses comme il se doit, des mails et autres bricoles susceptibles de lui fournir des indications précieuses pour des enquêtes de proximité de préférence. En lisant Le Libre, traduction Le Havre Libre, car il ne dédaigne pas pour autant s'informer quotidiennement sur support papier, Bob s'intéresse à un entrefilet.

En parlant de goéland, un plaisantin de mauvais goût a déposé un volatile la tête tranchée sur le parvis de la mairie. Une étiquette était attachée à l'une de ses pattes portant l'acronyme LPH. Une info à mettre au frais de même que ce laridé désargenté. Mais une autre mission attend Bob Mougin dans le pays de Caux, et plus exactement dans la vallée de l'Egoine.

Enfourchant hardiment sa fidèle Rosalinde, sa motocyclette reçue en héritage, Bob se rend donc à Drancourt où des mécontents ont bloqué la route en forme de protestation contre le projet d'implantation d'un parc d'éoliennes. Il se restaure et prend une chambre chez Arlette, tenancière d'un troquet épicerie, spécialiste des abats, puis rencontre le maire, et surtout un sculpteur-soudeur, Denglais, membre d'une association de défense contre l'invasion de ces structures enlaidissant le magnifique paysage normand. Le préfet a délivré un permis de construire, mais l'on sait tous que les préfets sont des valets de l'Etat.

Denglais en sculpteur émérite cisèle sa diatribe et ses propos de façon professorale, circonstanciée, claire, précise, passionnée, et Bob Mougin enregistre ces déclarations pour l'édification du petit peuple et surtout ceux qui une fois de plus vont se faire gruger par ricochets c'est à dire les contribuables. Et l'enquête conduite par Bob semble contrecarrer les plans d'individus mal intentionnés puisqu'il manque être écrasé par un tracteur urbain genre 4X4.

 

Avec un ton sérieusement humoristique ou humoristiquement sérieux, Max Obione nous place devant un cas de conscience : l'éolienne est-elle nécessaire pour l'avenir de l'homme ? Est-elle sans danger pour l'environnement, pour la santé, pour le confort et le bien-être de ceux qui vivent à proximité ? Est-elle rentable ? Autant de questions cruciales que devraient se poser les édiles avant de refuser ou d'accepter, souvent sous la contrainte ou par appât du gain, l'implantation de ces sculptures mobiles et modernes.

Un sujet plus grave qu'il y paraît, un fait de société narré avec une certaine malice et quelques clins d'œil envers des personnages de la mythologie blogueuse et des tenants de la chronique littéraire. Je ne m'étendrai pas plus sur ce sujet, je vous laisse apprécier, d'autres sujets et personnages étant nettement plus importants.

En effet, il me semble, et l'auteur me contredira si je me trompe, que le choix du nom de journaliste un peu Tintin dans ses démarches, Bob Mougin, n'a pas été choisi au hasard. De 1948 à 1962 un certain Robert Grandmougin plus connu sous le nom de Jean Grandmougin officiait comme journaliste, éditorialiste et rédacteur en chef à Radio Luxembourg devenue RTL. Ses propos en faveur de l'Algérie Française et ses relations n'ayant eu guère l'honneur de plaire au gouvernement de l'époque, il a été prié de démissionner. Moralité, quelque soit le gouvernement et son bord politique, gauche ou droite, si l'on ne plait pas on débarque et on dégage.

Quant à Bob Mougin, il a décidé de ne plus employer à tort et à travers son juron favori, qui se réfère à la prostitution, et de le remplacer par des noms de femmes historiques connues pour leur propension à coucher avec des personnages hauts placés et de préférence rois et nobles de cour en échange de faveurs. Ainsi profère-t-il à satiété Récamier, Pompadour et autres délicieuses personnes sans toutefois tomber dans la facilité d'user de patronymes actuels.

Max OBIONE : Barouf. Editions In8/Court Circuit. Parution le 2 mai 2016. 188 pages. 12,00€.

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17 mai 2016 2 17 /05 /mai /2016 13:22

Un Tracy à suivre à la trace...

Max Allan COLLINS : Dick Tracy. Cette année ils veulent sa peau.

Kid, un orphelin, véritable gavroche, est poursuivi par des flics pour avoir volé un portefeuille. Il se réfugie dans un garage et assiste, caché, à une partie de poker entre cinq truands. Soudain surgit une voiture. Bas-d’Plafond en descend arrosant à la mitraillette les cinq joueurs. Pendant que ses compagnons, le Marmonneux et le Gratteur, ramassent les portefeuilles, le Kid réussit à s’échapper.

Pendant ce temps, Dick Tracy et Tess, son éternelle fiancée, assistent à une représentation à l’Opéra. Tracy a juré de ne pas se marier avec Tess tant qu’il n’aura pas mis sous les verrous Alphonse Capricio alias Big Boy Caprice, le responsable de la mort du père de la jeune fille.

Grâce à sa montre gadget, Tracy est rapidement mis au courant de la tuerie. Malgré le vol des portefeuilles, il identifie sans problème les corps. L’un des malfrats abattus appartenait à l’équipe de Manlis le Lippu, propriétaire du Club Ritz et Tracy soupçonne Capricio d’être à l’origine de ce règlement de compte.

Frisson Mahoney, une très belle jeune femme, tient la vedette comme chanteuse au Ritz. Elle se fait embarquer, avec Manlis le Lippu, par trois policiers. Pat, un flic qui aide Tracy, en planque près du club, s’aperçoit du manège, subodore une combine vaseuse et suit les kidnappeurs. L’un des ravisseurs n’est autre que Bas-d’Plafond. Il emmène ses otages à Big Boy Caprice qui fait signer à Manlis un papier par lequel il lui cède son club. Puis Manlis finit sa triste vie dans une caisse remplie de ciment frais tandis que Pat est assommé par le Marmonneux, l’un des hommes de Big Boy.

Tracy le retrouve et abat les trois faux policiers. Il convoque dans son bureau Bas-d’Plafond, le Gratteur et le Marmonneux. A bout de force et la soif aidant, le Marmonneux fait une déposition que Tracy garde sous le coude.

Quelques jours plus tard, dans une salle du Club Ritz, Caprice réunit un congrès de truands de la ville et leur propose de s’associer, les invitant pour l’inauguration du club, prévue pour le lendemain. Mais cette conférence compte un spectateur clandestin, Tracy. Un second personnage a également tout observé, un personnage sans visage, tout de noir vêtu.

Repéré, Tracy est enlevé par Bas-d’Plafond et ses acolytes, enfermé dans la cave d’un immeuble dont la chaudière est prête à exploser suite à un sabotage. Mais le Kid parvient à sauver son protecteur in extremis. Peu après, Frisson propose à Tracy de l’aider à arrêter Caprice et l’embrasse « chastement » sur la joue. Hélas la marque de rouge à lèvre subsiste, ce qui attise la jalousie de Tess.

Touche-d’Ivoire, le pianiste, révèle à Caprice qu’un inconnu habillé de noir et sans visage lui a offert cinq mille dollars pour lui porter un message qui propose, outre de mettre Tracy sur la touche, de l’argent. Caprice fait savoir qu’il accepte la proposition de l’Effacé, surnom donné au mystérieux personnage. Ce dernier prend Tess en otage et se débarrasse de Tracy en le droguant.

 

Cette œuvre détonne dans la production de Max Allan Collins, habitué a écrire des romans plus sérieux, excepté peut-être les ouvrages mettant en scène Mallory.

Il nous donne ici un livre drôle, jubilatoire, incitant à la bonne humeur malgré quelques scènes tragiques, alerte, vivant et rondement mené. Même l’intrigue est solidement construite. Quant aux personnages, campés d’une manière forte et caricaturale, renforcée par leur patronyme, ils reflètent véritablement ceux croqués à l’origine dans les bandes dessinées de Chester Gould.

Jean-Louis Touchant a disséqué d’une façon magistrale et fort érudite la saga de Dick Tracy dans la revue 813 n°31, avril 1990.

Max Allan COLLINS : Dick Tracy. Cette année ils veulent sa peau. Traduction d'Oliver de Broca. D'après le scenario de Jim Cash, Jack Epps Jr, Bo Glodman & Warren Beatty.

Coédition Edition N°1 & Michel Lafon. Parution août 1990. 332 pages.

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16 mai 2016 1 16 /05 /mai /2016 13:01

Et des amputations mystérieuses...

Alexandre DUMAS : Le docteur mystérieux.

Des maisons d'éditions proposent depuis des années des rééditions de ce roman, soit en version numérique, soit en version papier, mais la plupart n'offrent que des versions abrégées ou largement amputées.

Ce qui fait que de nombreux lecteurs ne reconnaissent pas la patte de Dumas (et de ses collaborateurs) et trouvent l'histoire un peu légère, principalement son approche de la Révolution.

Aussi cette chronique est écrite d'après l'ouvrage paru en 1966 aux éditions Gérard dans la collection Marabout Géant N°256. 512 pages.

 

Médecin installé depuis trois années à Argenton, dans la Creuse, Jacques Merey préfère soigner les petites gens et refuse une patientèle riche et noble. Auparavant il habitait Paris et nul ne sait quelles furent les raisons qui l'ont amené dans cette petite ville de province.

S'il est apprécié des pauvres, il est aussi décrié, car ses méthodes ne sont pas en concordance avec celles de ses confrères, des rétrogrades issus des médicastres mis en scène par Molière. Ainsi il hypnotise des malades et surtout des blessés afin de prodiguer les premiers soins sans être importuné par les cris de douleur de ses patients, et pouvoir opérer en toute tranquillité d'esprit, aussi bien pour lui que pour celui qui les reçoit. Et bien entendu, certains n'hésitent pas à propager la rumeur d'une quelconque sorcellerie de sa part tandis que d'autres ne cessent de louer son humanisme.

En ce 17 juillet 1785, des gens du château de Chazelay sont dépêchés par le seigneur du lieu afin qu'il mette fin à la terreur qu'inflige un chien enragé dans la cour de la demeure. Il n'a pas l'intention de se déplacer mais Marthe, sa vieille servante, lui demande de rendre ce service, malgré son antipathie envers le marquis, car des valets et des paysans sont susceptibles d'être mordus par le canidé enragé.

Celui qui se définit comme le médecin des pauvres et des ignorants parvient à maîtriser le chien en le regardant fixement dans les yeux et afin de lui épargner la vie, le recueille. L'animal se montre affectueux envers ce nouveau maître et quinze jours plus tard, l'entraîne au cœur d'une forêt proche d'Argenton jusqu'à une cabane. Vivent là un bucheron, braconnier à ses heures, et sa mère. Scipion, puisqu'ainsi se nomme le chien, leur fait fête mais surtout Jacques Merey aperçoit acagnardée dans un coin, une enfant.

Il l'a ramène chez lui et en compagnie de Marthe la soigne, l'éduque, car Eva, ainsi décide-t-il de la prénommer, est une innocente, une idiote, qui ne parle pas et semble ne pas comprendre ce qu'on lui dit. Les seuls mouvements de sympathie, d'affection qu'elle montre, le seul sourire qui éclaire sa face, sont destinés à Scipion qui lui-même ne ménage ses démonstrations de joie à retrouver la gamine de sept ou huit ans.

Chez lui, avec l'aide de sa fidèle Marthe et de Scipion, Jacques Merey va apprivoiser l'innocente, lui délier la langue, lui apprendre ensuite à lire, à jouer du piano, bref à transformer la chrysalide en un magnifique papillon, en employant des procédés innovants pour l'époque, comme l'électrothérapie. Et l'affection ressentie par le médecin envers sa jeune protégée se transforme peu à peu en un doux sentiment amoureux qui est partagé.

 

Sept ans plus tard, le Marquis de Chazelay a appris qu'Eva, qui est sa fille et se prénomme Hélène, a été soignée par Jacques Merey et qu'elle est devenue une jeune fille fort avenante et instruite. Il décide de la récupérer, au grand dam des deux amants (dans l'acception du terme du XIXe siècle, c'est à dire les deux amoureux) et de la placer dans un couvent.

Jacques Merey remet Hélène solennellement au Marquis de Chazeley en lui formulant qu'elle est belle, chaste et pure digne d'être la femme d'un honnête homme. Une autre mission attend Merey, car il vient d'être nommé membre de la Convention et doit se rendre immédiatement à Paris, rejoindre ses amis Danton et Camille Desmoulins. Ceci se déroule en août 1792.

C'est avec regret qu'il quitte Argenton, déclarant qu'il est un philosophe et non un homme politique, médecin et non législateur. Acerbe il continue sa diatribe auprès du maire d'Argenton qui lui a obtenu ce poste auprès de la Convention et lui dit de prendre sa lancette, le bistouri et la scie car il y a de l'ouvrage à la cour pour les médecins et surtout les chirurgiens en prononçant ces paroles : Comme chirurgien, la place est prise, et vous avec là-bas un terrible tireur de sang qu'on appelle Marat.

Dans la capitale, Merey retrouve donc avec plaisir ses amis Danton et Desmoulins, et il participe comme émissaire aux batailles de Valmy puis de Jemmapes. Les heurts entre Danton, Robespierre, Marat et quelques autres ne font que s'amplifier et Danton est sur la sellette. Même si Merey ne partage pas tous les sentiments qui anime l'Aboyeur, le surnom du Georges Danton, il ne l'abandonne pas dans les moments critiques. Toutefois fidèle à son statut de médecin il vote la prison à perpétuité pour Louis XVI, refusant de se prononcer en faveur de la peine de mort. Un avis curieusement partagé par Monsieur de Paris, le bourreau Charles Sanson.

Ce sont des années de Terreur et Jacques Merey est invité à surveiller les agissements de Dumouriez, convaincu de trahison. Il se rend utile aux généraux Arthur Dillon et Miakinsky, sous les ordres de Dumouriez, lors de batailles dans la Meuse, grâce à ses connaissances du terrain, étant natif de la région. Il se rend à Valmy, à Jemmapes, dans le nord de la France et en Prusse, toujours pour le compte de la Révolution, sans oublier sa jeune protégée. Il essaie de savoir où elle réside mais les événements se précipitent, et il est soit constamment par monts et par vaux ou à Paris assistant au démêlés qui mettent aux prises les principaux ténors de la Convention.

 

Connu pour ses infidélités à l'histoire de France, Dumas se défend par ces phrases : les historiens et même les légendaires ont été rarement justes pour Louis XVI. Les légendaires étaient presque tous de la domesticité du roi. Les historiens sont presque tous du parti de la République. Soyons du parti de la postérité, c'est le droit du romancier.

S'il ne relate pas fidèlement les événements qui se sont déroulés entre 1792 et 1793, Dumas appose sa patte, et il est parfois virulent envers certaines personnalités de l'époque, et vitupère notamment contre le Pape Pie VI, le traitant de pontife bellâtre et l'accusant d'avoir ensanglanté la terre française, notamment par ses agissements et ses conseils dans la guerre de Vendée, des épisodes que ne connut pas le romancier mais sûrement informé par des écrits de son père, Thomas Alexandre Davy de La Pailleterie dit le général Dumas.

On retrouve la fougue qui a forgé le succès des Trois Mousquetaires et autres romans plus connus que ce méconnu Docteur mystérieux, mais également cette conviction révolutionnaire qui l'anime, tout en présentant certains des personnages historiques sous un jour complètement différent de celui qui nous est habituellement présenté. Danton, par exemple, dont il nous fait partager l'intimité et les convictions, se montre plus humain que le Danton des livres scolaires. Mais l'on sait que même les historiens, qui vivent bien longtemps après les événements décrits, se réfèrent à des textes souvent écrits soit par des laudateurs, soit par des partisans animés de mauvais esprit, et dont les textes reflètent souvent la partialité qui les anime.

Ce roman posthume d'Alexandre Dumas parut pour la première fois en 1872, Dumas décédant en 1870, mais fut écrit en 1868 et fait partie de Création et Rédemption, la seconde partie étant La fille du Marquis.

Ouvrage paru en 1966 aux éditions Gérard dans la collection Marabout Géant N°256. 512 pages

Ouvrage paru en 1966 aux éditions Gérard dans la collection Marabout Géant N°256. 512 pages

Editions Coda. Contient la suite : La fille du marquis. Parution décembre 2009. 650 pages.

Editions Coda. Contient la suite : La fille du marquis. Parution décembre 2009. 650 pages.

Alexandre DUMAS : Le docteur mystérieux. Editions Archipoche. Parution 1er octobre 2014. 7,65€. 240 pages

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15 mai 2016 7 15 /05 /mai /2016 14:15

Grand Prix de Littérature Policière 1993.

Paul COUTURIAU : Boulevard des ombres.

Alors qu’il avait absolument besoin de l’aide de son ami le journaliste Jeremy Lockwood, Harvey Billington, auteur d’un chantage qui devait lui apporter enfin la possibilité de refaire sa vie, Harvey le découvre mort, affalé dans un fauteuil.

Au début il pense que Jérémy a été assassiné par des tueurs lancés à sa poursuite. Même pas. Jérémy a tout simplement succombé à une crise cardiaque.

Une défection, un impondérable qui perturbe la ligne de conduite imaginée par Harvey. Alors, comme il en a marre de se terrer dans une minable chambre d’hôtel de New-York, il décide de transformer cette mort naturelle en mort violente, obligeant de fait la police à servir de tampon entre lui et ses poursuivants.

L’enquête est confiée au lieutenant Ring Lennox, qui depuis la mort de sa femme se morfond parmi les dossiers. Lennox ne se laisse pas abuser par cette mise en scène macabre. Les murs de la pièce dans laquelle est décédé Jérémy sont tapissés de photographies de Shirley Neuville, fille à papa et mannequin, morte dans des conditions tragiques quelques mois auparavant.

Immédiatement Lennox établit une corrélation entre ce fait-divers et l’affaire dont il est chargé. A lui de savoir tirer le bon fil de cet écheveau.

 

Dashiell Hammet préconisait quelques règles d’écriture, en particulier des phrases courtes et simple, et le non emploi de métaphores.

Un précepte que Paul Couturiau assimile, apportant sa touche personnelle, dérogeant toutefois à l’un des sacro-saints principes rappelés par André-Paul Duchâteau. Il ne suffit pas d’appliquer un conseil et de détourner une règle, il faut savoir construire une histoire, la mener jusqu’au bout et mettre en scène des personnages attachants.

Trois points que Paul Couturiau relie pratiquement à la perfection. Son roman démarre quasiment sur les chapeaux de roue. Souvent les débutants calent en cours de route, Couturiau avale les obstacles en vieux briscard.

Quant aux personnages, qu’il s’agisse de Harvey Billington, le monteur de cinéma par qui le chantage arrive, Ring Lennox, le flic perdu dans un ronron entretenu par le souvenir émotionnel de la disparition de sa femme, de Sue-Lynn, fille perdue écartelée entre son désir de liberté et un attachement inconscient envers son protecteur, plus quelques autres personnages secondaires, tous ces protagonistes semblent être montés en épingle et pourtant plus vrais que nature.

 

Réédition Editions du Rocher. Parution mai 1998. 216 pages.

Réédition Editions du Rocher. Parution mai 1998. 216 pages.

Paul COUTURIAU : Boulevard des ombres. Collection Attitudes. Claude Lefrancq Editeur. Parution janvier 1992. 224 pages.

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14 mai 2016 6 14 /05 /mai /2016 07:36

La starlette de Cannes a ri. Elle a une tête d'oiseau !

Alain BELLET : Aller simple pour Cannes.

Les petites salles de cinéma agonisent, seuls quelques intrépides ou nostalgiques continuent à programmer des rétrospectives des années cinquante, refusant de tomber dans la facilité du clinquant et de la pornographie.

Le Lumières, l'un des rares rescapés, niché aux confins du marché aux Puces et de la Porte de Saint-Ouen, va vivre sa dernière soirée dans l'apothéose et un embrasement que ne souhaitait certes pas son propriétaire. Des projets qui tombent à l'eau à cause du feu.

Pendant ce temps sur la Croisette, à Cannes, les premiers festivaliers envahissent pour une quinzaine la capitale du film.

Minettes aux cerveaux embrumés par des rêves de stars, pseudo-critiques aux propos snobinards, starlettes dévêtues en quête de publicité, comédiens confirmés venus affirmer par leur présence la qualité de leurs prestations cinématographiques, amoureux purs et durs des toiles indifférents aux nuits blanches, tout ce beau monde va se côtoyer pour fêter la dernière année du Palais Croisette, ce temple du 7e art qui ne va pas survivre à sa quarantaine vieillissante et pourtant encore alerte.

Mais un fou jette la perturbation au milieu de ce festival et ces morts qui parsèment la ville ne font pas du cinéma.

Pour Michel Ravel, critique et véritable passionné par le cinéma, il existe un lien entre ces décès et la destruction par le feu du Lumières à Paris. Un lien qui pourrait s'appeler Fossoyeur, film vestige des années cinquante et dont la carrière a tourné court à sa sortie.

 

Alain Bellet, lui-même critique de cinéma et fin connaisseur, a pris le prétexte policier pour nous présenter les quinze derniers jours du Palais Croisette, et toute cette faune qui pendant quinze jours investit Cannes, déambulant au gré des programmations et des rencontres supposées capitales pour gloires éphémères et starlettes en herbe.

Un bon premier roman, ambitieux, par un jeune auteur, plein de projets à l'époque et au demeurant fort sympathique, que j'avais eu le plaisir de rencontrer à Saint-Nazaire lors de la sortie de ce livre, et qui depuis trace son petit bonhomme de chemin.

 

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13 mai 2016 5 13 /05 /mai /2016 08:51

Une histoire qui ne manque pas de sel !

Jean-Luc BANNALEC : Les marais sanglants de Guérande

Ayant abandonné son fief concarnois, le commissaire Dupin se dirige grâce à un plan manuel dans les marais salants de Guérande à la recherche de barils bleus.

Il n'est pas en mission officielle mais s'est rendu sur le site à la demande d'une journaliste de Ouest-France, Lilou Bréval, qui traite plus les dossiers de fond que les affaires locales. Il a connu Lilou Bréval lors d'une précédente enquête, narrée dans Un été à Pont-Aven, et il sait que, si elle l'a contacté, ce n'est pas pour des broutilles.

Alors qu'il n'embêtait personne, on lui tire dessus. Une fusillade qui laisse présager qu'on en veut à sa vie, et que sa promenade parmi les étiers dérange quelqu'un. Donc l'information concernant les barils ne serait pas vaine, seulement il lui faut échapper à ce péril. Il se réfugie in-extremis dans une cabane. Et manque de pot (de sel) il ne capte aucun réseau avec son téléphone portable.

Au bout de quelques heures il est délivré par des policiers menés par la commissaire Rose, de Guérande, lesquels policiers ont été avertis de la fusillade. Penaud Dupin est obligé de confier que son enquête est en marge de la légalité puisqu'il n'est pas dans son domaine de juridiction. La commissaire Rose toutefois se montre bon enfant, la réputation de Dupin ayant franchi les frontières du Finistère. Mais elle n'apprécie guère cet empiétement sur son territoire.

Lilou Bréval ne répond pas aux nombreux messages qui lui sont adressés, et personne parmi ses connaissances ne peut les informer de sa présence en tel ou tel endroit.

Les fameux bidons bleus s'avèrent jouer à l'arlésienne jusqu'au moment où ils sont retrouvés dans un cristallisoir. La question primordiale réside alors à définir quel pouvait être leur contenu.

La commissaire Rose est officiellement désignée pour conduire cette enquête lorsque le cadavre de Lilou Bréval est découvert. Dupin étant accepté comme enquêteur complémentaire. Il en profite pour faire venir ses deux adjoints, qui ne seront pas de trop dans cette affaire car d'autres cadavres vont épicer l'enquête.

 

Dupin tient de plus en plus de Maigret, et malgré que cette affaire soit résolue en trois jours, il se montre aussi impatient parfois que son célèbre prédécesseur. L'enquête piétine, ne cesse-t-il de marmonner (le lecteur aussi, qui ne piétine pas mais aimerait que cela avance plus vite).

Car le côté documentaire, même s'il est précis, important pour la compréhension du décor, de la psychologie des personnages, ressemble parfois à un guide touristique qui s'étalerait de Guérande et engloberait le golfe du Morbihan avec ses nombreuses îles. Un guide touristique qui empiète largement sur l'histoire policière mettant aux prises différents protagonistes, paludiers indépendants, coopérative saline et grosse société méditerranéenne spécialisée dans le sel non marin.

 

Elle (Lilou Bréval) s'intéressait aux discussions et aux conflits autour du Pays blanc, son évolution. Les rivalités qui opposaient les indépendants, les coopératives et les grosses entreprises, mais aussi la commune et la Région. L'esprit de compétition qui dominait ce qu'on appelle le marché global du sel.

 

Le travail des paludiers, la cristallisation du sel, sa récolte, tout le travail qui tourne autour de ce pétrole blanc recueilli dans le Pays blanc, tout y est décrit minutieusement, et l'on pourrait presque sentir sur la langue ce goût particulier du sel de Guérande, le meilleur au monde selon les habitants de la presqu'île guérandaise, et je ne suis pas loin de penser comme eux.

Comment Dupin mènerait-il ses enquêtes sans la fidèle, précieuse et efficace Nolwenn, sa secrétaire qu'il peut joindre jour et nuit pour obtenir des renseignement indispensables dans ses différentes recherches ? Mais pas uniquement des renseignements, des retrouvailles également, et elle devient la complice et l'initiatrice d'un petit complot permettant Dupin de revoir sa Dulcinée alors que le moment est critique.

Dupin est quelque peu rétrograde, j'en connais d'autres, avec son téléphone portable qui refuse d'accéder au réseau alors qu'un appareil plus puissant lui serait utile dans ses déplacements. Or le téléphone se révèle un objet à l'importance primordiale et pas uniquement pour l'enquête.

Un roman paisible, idéal pour lire en vacances, surtout si vous pensez vous rendre en Bretagne, délassant et instructif, qui vous permettra d'allier en toute sérénité dégustation de produits locaux et voyages dans les marais salants et les balades sur les îles, et vibrer par procuration avec tous les dangers que cela comporte.

Ce roman s'il était adapté à la télévision, tiendrait plus de la série Inspecteur Derrick que d'Alerte Cobra.

 

Un autre avis ? Celui de YV sur son blog :

 

Mes précédentes chroniques sur les romans de Jean-Luc Bannalec :

 

Jean-Luc BANNALEC : Les marais sanglants de Guérande (Bretonisches Gold Kommissar Dupins Dritter Fall - 2014. Traduction d'Amélie de Maupeou). Collection Terres de France. Editions Presses de la Cité. Parution le 7 avril 2016. 400 pages. 21,00€.

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12 mai 2016 4 12 /05 /mai /2016 12:56

Hommage à Louis C. Thomas, décédé le 12 mai 2003.

Louis C. THOMAS : Des briques en vrac.

Entre Perrine, comédienne souvent à la recherche d'un cacheton, et Jo, boxeur sur la touche suite à un combat au cours duquel il a failli perdre la vue, c'est le grand amour.

Mais il faut bien faire bouillir la marmite, et il n'est pas dans la mentalité de Jo de vivre aux crochets de Perrine.

Aussi la proposition de Vezzano, ex-condisciple de Jo, qui traficote dans les milieux pugilistiques, cette proposition, pour douteuse qu'elle soit, arrange bien les affaires du boxeur au chômage et en panne de liquidités.

Mais Jo, un peu cupide et pas assez méfiant, va se mordre les doigts de cette association.

A la clé une mallette bourrée de billets de 500 francs tout neufs, une histoire de gnons, et un cadavre.

 

Une histoire typiquement américaine traitée par un grand monsieur Français de la littérature policière, et ce roman paru initialement en 1983 dans la collection Engrenage n'a pas perdu de son charme et de sa force, les années passant.

Bien des années après, Des briques en vrac est le genre de roman que l'on relit avec plaisir, tant Louis C. Thomas sait (savait) raconter des histoires avec maîtrise, d'une manière simple mais efficace.

De plus, le décor et l'endroit y sont pour quelque chose de particulier, ayant travaillé et habité moi-même non loin des lieux dans lesquels se déroulent l'action de ce roman, La Fourche et l'avenue de Clichy, quartier que Louis C. Thomas connaissait fort bien puisqu'il y habitait également.

A noter que dans ce roman un clin d'œil est adressé à Michel Lebrun, romancier et scénariste qui lui aussi résidait tout près.

Des briques en vrac, parmi toute la production de Louis C. Thomas, reste un grand souvenir de lecture avec Les Mauvaises fréquentations, Les écrits restent, Jour des morts et un certain nombre d'autre, car il n'y a pas de déchets dans la production de cet auteur atteint de cécité tout jeune, ce qui ne l'a pas empêché d'être un romancier prolifique et un scénariste pour des séries télévisées comme Les cinq dernières minutes et des films comme Voulez-vous danser avec moi ? de Michel Boisrond.

 

Première parution : Collection Engrenage N°57. Editions Fleuve Noir. Parution 1982. 222 pages.

Première parution : Collection Engrenage N°57. Editions Fleuve Noir. Parution 1982. 222 pages.

Louis C. THOMAS : Des briques en vrac. Collection Hermé Suspense. Editions Hermé. Parution août 1990. 226 pages.

Réédition format EPub parution 23 octobre 2015. 4,49€.

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11 mai 2016 3 11 /05 /mai /2016 08:04

Sur la plage abandonnée, coquillages et crustacés...

Olivia DUPUY : Sur parole. Sous titré : Fausses notes en Ré.

Et cadavre dénudé, étranglé, dont la poitrine est surmontée d'une petite pyramide de gros sel tassé et la lèvre supérieure agrémentée d'une ligne de farine, ou quelque chose d'approchant.

Pour le quinquagénaire commissaire Meyer, nouvellement muté à La Rochelle, la mise en scène de ce meurtre est particulièrement déroutante. Seule petite compensation, cela lui permet de découvrir l'île de Ré, qu'il ne connaissait que par la chanson de Charles Aznavour, Dans le petit bois de Trousse chemise.

En compagnie du lieutenant Privat, qui connait fort bien la région, Meyer entame son enquête en interrogeant les compagnons de la jolie rousse assassinée. Ce sont des étudiants toulousains venus passer quelques jours de détente, et rien dans leurs propos indique une quelconque faille dans leur emploi du temps. Laetitia, ainsi se prénomme la défunte, vingt-trois ans, seule au dernier recensement ayant plaqué son petit ami, ou le contraire, s'était éloignée du groupe de vacanciers afin de répondre au téléphone.

L'opérateur de son portable fournit une indication précieuse : le dernier appel qu'elle avait reçu provenait de La Rochelle, et plus particulièrement du commissariat. Probablement un coup d'épée dans l'eau. Bizarre quand même.

Une deuxième jeune fille est retrouvée morte, dans des conditions similaires. Le point commun principal entre ces deux mortes réside dans la couleur de leurs cheveux. Rousses toutes les deux. Un tueur en série roussophobe sévirait-il sur l'île de Ré ?

Afin de cerner le tueur, d'analyser son comportement, voire ses pulsion, il est fait appel au Département des sciences comportementales de la gendarmerie, c'est-à-dire à une profileuse, un gendarme cynophile et son animal, mais sont recensés également les individus ayant sur leur casier judiciaire des antécédents prohibés, viols notamment. Quatre personnes sont susceptibles d'avoir perpétré ces crimes, mais il ne faut pas s'arrêter sur quatre noms. Car la deuxième victime (il y en aura une autre !) avait également correspondu avec le commissariat de La Rochelle, du moins l'un de ses éléments.

Meyer s'empêtre dans les différentes démarches qu'il effectue, heureusement secondé par le lieutenant Privat. Veuf, il s'inquiète pour l'avenir de sa fille, d'autant qu'elle ne lui donne guère de nouvelles, et souvent oublie de lui téléphoner. Et puis une autre affaire requiert son attention. Des pommes de pin sont récoltées illégalement afin de récupérer les pignons destinés à des pays étrangers dont les habitants en font une consommation excessive.

 

Ce roman, de facture classique, possède un petit côté Agatha Christie avec les comptines qui permettaient la résolution des affaires. Bien construit, il offre au lecteur une énigme et un suspense habilement menés. Et les candidats-tueurs, s'ils sont en nombre réduits, cachent bien leur jeu. En incrustation, figure quelques pages d'un journal intime.

Le commissaire Meyer est attendrissant et possède ses secrets que l'on découvre peu à peu, mais pas tous. Quant à Privat, il cultive une particularité, qu'en général seuls les ensuqués utilisent afin de dissiper les brumes éthyliques et vidanger leur estomac : il jette des grains de sel, à la place de sucre, dans son café.

Toutefois, les nombreuses coquilles et approximations, surtout dans les premiers chapitres, perturbent la lecture, tout comme les comédons défigurent un angélique visage d'adolescent acnéique.

Par exemple, page 35, il est fait mention de 15 heures pour un appel téléphonique, et quelques lignes suivantes, on peut lire 11 heures, au lieu de 23 heures. Ceci n'est pas grave, mais choque mes yeux. De même page 21, On en sera plus dès qu'on connaîtra... au lieu de On en saura plus... Des bricoles, vous dis-je, mais qui empoisonnent la lecture.

Olivia DUPUY : Sur parole. Sous titré : Fausses notes en Ré. Collection Zones noires. Editions Wartberg. Parution 1er avril 2016. 204 pages. 12,90€.

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10 mai 2016 2 10 /05 /mai /2016 09:36

Bon anniversaire à Jacques-Olivier Bosco, dit Job, né le 10 mai 1967.

Jacques-Olivier BOSCO : Loupo.

Vous prenez un quart d'Auguste Le Breton, cuvée Les Hauts-murs, un quart de Léo Malet période La vie est dégueulasse, un quart d'André Héléna façon Les compagnons du destin, un dernier quart de José Giovani, vous ajoutez quelques pépites d'argot des cités, vous agitez, vous laissez reposer, vous saupoudrez d'une pointe de Bobby Lapointe, et vous pouvez déguster en égoïste le nouveau JOB, tranquillement installé dans votre fauteuil.

Il ne faut pas s'étonner si Loupo vit renfermé dans un studio au dernier étage d'un immeuble parisien près de la Nation. S'il entasse ses affaires, des armes, des sacs bourrés de billets qu'il a aménagé pour s'en faire un fauteuil, dans un placard dont les deux portes sont continuellement ouvertes. S'il dort toujours habillé, un flingue à portée de la main. S'il rêve, ou plutôt cauchemarde les nuits. Tout petit il avait pris l'habitude de rester des heures enfermé dans un cagibi tandis que son père, mais était-ce vraiment son géniteur, répandait violemment son fiel courroucé sur sa mère, en ne ménageant pas sa voix, ses cris, ses éructations. A quatre ans il s'est échappé et retrouvé dans un commissariat. Comprenant ses déboires, l'administration l'a placé dans un orphelinat puis dans un centre de détention. Il s'y est fait des amis, des potes qu'il voit toujours, Kangoo, Le Chat et deux autres qui lui rendent service de temps à autre.

Loupo est devenu un petit braqueur, aidé en cela par Kangoo qui l'emmène sur les lieux du hold-up en moto, et qui surveille la rue tandis que Loupo ramasse l'argent. Une banque, une poste, un cinéma, Loupo ne se pique pas d'ostracisme, tout lui convient. Il arrive toujours avec une arme à la main, tire un coup en l'air, peut-être pour conjurer le sort, car il se souvient toujours d'un braquage qui s'est mal terminé, à ses débuts.

Ce jour là il est réveillé en sursaut par Kangoo, car ils doivent peaufiner le prochain hold-up, toujours proposé par Le Chat qui travaille dans les assurances et leur fournit une liste des coups possibles. La dernière fois, c'était au Gaumont Italie, un cinéma. La guichetière, une jeune femme fort avenante, lui avait souri, et sous une impulsion qu'il n'a pu contrôler, il y est retourné, il a pris un ticket pour voir Mauvais sang, la rouquine derrière sa vitre l'a reconnu, pourtant il n'avait plus son casque de motard, et elle lui a donné rendez-vous à la fin de la projection. Elle est belle. Il est timide, alors il n'a pas osé la raccompagner jusqu'au bout.

Le lendemain comme prévu départ pour la banque où le hold-up doit avoir lieu. Bizarrement un vigile est à l'entrée, ce qui n'était pas prévu. Tant pis. Tandis que Kangoo attend dehors, la moto prête à démarrer - chapeau les roues ! - Loupo se dirige vers le guichet et comme à son habitude, afin de bien montrer sa détermination, il tire un coup de feu vers un panneau. Erreur, un gamin jouait derrière, sérieusement blessé, peut-être mortellement atteint. Tout en ordonnant d'appeler une ambulance, il veut quand même récupérer l'argent escompté, mais le directeur de l'agence lui signifie que les coffres ne contiennent rien, ou presque, ayant été averti du hold-up. Double coup sur la tête pour Loupo qui s'enfuit en compagnie de Kangoo.

Il rentre chez lui complètement démantibulé, effondré, ne sachant que faire. Sur son palier la gamine, pas bête, l'attend. Elle l'a suivi la veille et elle sait où il habite, alors ils entrent dans le studio, puis... Permettez-moi de ne pas vous déflorer tous les détails mais de revenir à nos moutons, le braquage loupé. J'allais oublier, elle s'appelle Nora.

Loupo est furieux. D'abord un gamin sur la conscience, ensuite il est persuadé qu'il a été dénoncé, mais par qui c'est ce qu'il doit découvrir. Et puis normalement Le coup, celui qui est prévu prochainement, le dernier, il lui faut le réaliser. Pour cela il a besoin d'un lance-roquette. Une bande des cités pourrait éventuellement le lui fournir, mais ils ne sont pas clairs. Loupo s'y rend, quand même, avec Kangoo, et des armes de poing efficaces. Tellement efficaces qu'elles vont cracher la mort. Il ne faut pas s'en prendre à ses amis, et le meneur de la cité a froissé Le Chat dans sa vie privée. Loupo sait aussi qui l'a trahit, comment et pourquoi, et le voilà lancé sur la piste d'un vieux à l'oreille déchiquetée qui n'est pas sorti d'un roman d'Edmond About. C'est plutôt lui qui le serait à bout...

 

Bien installé sur le siège arrière de la moto, avec Loupo aux commandes, ou JOB, je ne sais plus trop car tout c'est déroulé si vite, je me suis payé une virée qui restera marquée dans mes annales de lecteur. A fond la caisse, limitation de vitesse bafouée; nous avons franchi allègrement la ligne jaune de la légalité, roulant à contresens, défiant les voitures de flics lancées à nos trousses, empruntant des chemins de traverse, nous baladant même sur des toits parisiens glissants, mais pas avec la moto, à pied, je précise au cas où, attention à la chute, et lorsque le voyage s'est terminé, je me suis demandé si je ne venais pas de vivre un rêve et avais vécu toutes ces tribulations par procuration. A peine remis de ces aventures, encore tremblotant, je vous livre les sensations ressenties et vous invite à les partager. Et encore, je ne vous ai pas tout dévoilé !

Au fait j'ai évoqué plus haut Bobby Lapointe. Vous vous demandez peut-être pourquoi. Tout simplement à cause de ce genre de phrase :

Mon premier coup, frac pour le fric, fric-frac et braque la banque. Un branque, ouais, à l'époque....

Première parution Jigal Polar, éditions Jigal. Parution septembre 2013. 200pages. 16,80€.

Première parution Jigal Polar, éditions Jigal. Parution septembre 2013. 200pages. 16,80€.

Jacques-Olivier BOSCO : Loupo. Réédition Pocket Thriller. Parution 12 mai 2016. 192 pages. 5,95€.

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9 mai 2016 1 09 /05 /mai /2016 12:32

La dernière collaboration entre Pierre Boileau et Thomas Narcejac.

BOILEAU-NARCEJAC : J'ai été un fantôme.

Christine est une jeune fille réservée, timide et sentimentale.

Peut-être est-ce pour cela qu'elle se marie avec Bernard Vauchelle, philatéliste de son état et qui pourrait être plus que largement son père.

Un mariage blanc en quelque sorte puisque le mari s'avère impuissant à accomplir ce que l'on nomme pudiquement le devoir conjugal.

Personnellement, je puis vous assurer que si tous les devoirs à remplir étaient aussi agréables que celui-ci, je ne rechignerais pas devant l'ampleur de la tâche.

Pauvre Christine qui s'étiole et finirait bien par devenir timbrée à force de manipuler les figurines postales.

Dominique, un bellâtre, artiste peintre de profession, n'a guère de mal à chavirer le cœur et le corps de Christine qui connait enfin les joies de l'épanouissement féminin et les douceurs des liaisons extraconjugales.

Hélas Dominique n'y a vu là qu'une aimable passade tandis que Christine, enfin révélée en tant que femme, pensait pouvoir faire durer cette relation accompagnée de joutes amoureuses.

Son amant envolé vers d'autres cieux, elle tente de se suicider, mais alors que son âme allait frapper à l'antichambre du Paradis, le portier lui enjoint de retourner sur Terre, lui signifiant son refus par cette petite phrase :

Plus tard, quand tu seras libre.

Après avoir connu le grand frisson de l'amour puis celui de la mort, là voilà de nouveau vivante, mais sa conception de la vie n'est plus la même qu'auparavant.

Elle se détache progressivement de son mari et effectue un pèlerinage hebdomadaire à Roissy afin de supprimer de son cœur et de son esprit le surgeon Dominique.

De retour de l'un de ces pèlerinages expiatoires, elle découvre sa mère victime d'un assassinat. A nouveau sa vie bascule.

 

J'ai été un fantôme est le dernier roman écrit en collaboration par Pierre Boileau et Thomas Narcejac.

En effet Pierre Boileau est décédé le 16 janvier 1989. Mais il n'a pas effectué une fausse sortie comme l'héroïne de ce roman. Un homme barbu ne lui a pas dit : Plus tard, quand tu seras libre.

Lui était libre et a regagné directement le Paradis des mauvais garçons de la littérature policière.

Avait-il un pressentiment en collaborant à l'écriture de ce roman ? Que ce serait le dernier ? Est-ce un héritage en forme de clin d'œil ?

Non, Pierre Boileau n'est pas tout à fait mort. Dans nos cœurs et nos esprits il vivra toujours en compagnie de son compère Narcejac, qui lui est décédé le 7 juin 1998, et nous prenons toujours autant de plaisir à lire et à relire les œuvres de ce duo infernal.

Première édition collection Sueurs Froides. Editions Denoël. Parution mai 1989. 206 pages.

Première édition collection Sueurs Froides. Editions Denoël. Parution mai 1989. 206 pages.

BOILEAU-NARCEJAC : J'ai été un fantôme.

Réédition collection Folio Policier N°104. Parution le 19 octobre 1999. 192 pages. 6,50€.

Version EPub 6,49€. Disponible 1er mai 2016.

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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