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24 juin 2016 5 24 /06 /juin /2016 12:27

Du grisbi à Neuilly...

Auguste Le BRETON : Du Rebecca chez les Aristos.

Délaissant le mot Rififi, qu'il avait créé en 1942 à Nantes avec son pote Gégène de Montparnasse et devenu quelque peu galvaudé, Auguste Le Breton a préféré utiliser un vieux substantif argotique tombé en désuétude pour titrer son nouveau roman.

Une incursion joyeuse à prétexte policier chez les représentants de la Haute qui vont démontrer que l'aristocratie n'est pas uniquement constituée de snobinards, fils à papa, comme certains aimeraient à le faire croire. Que nenni !

Mais avant de continuer, peut vaut-il mieux vous présenter quelques-uns des personnages qui gravitent dans cet opus. Ils ont pour patronyme le comte de Mesroustons, le duc et la duchesse de Sifilo, le marquis et la marquise de Couillemol, le baron et la baronne de Chéquenbois, le vicomte et la vicomtesse de La Pinepercée, Mr Braquemard et le sire de Moudevot. Dernière petite précision : Roseline de Chéquenbois est à la tête d'une maison particulière dite close ouverte aux portefeuilles garnis et soumet une partie de son cheptel à se faire tondre les poils du Mont de Vénus afin d'accéder au désir de certains clients étrangers.

Touchez à un cheveu d'un des leurs et vous sentirez le vent de leurs soufflets. Car ce ne sont pas des ramollis du bulbe, des atrophiés du muscle. Ils savent se lancer sur le pied de guerre lorsque le besoin s'en fait sentir. Bon chic bon genre au dehors, les Aristos de Le Breton recèlent en eux des chromosomes actifs de leurs pères, de leurs ancêtres, de ceux qui se défendaient avant qu'on les attaque, de ceux qui ont participé aux diverses croisades, de ceux qui jouaient innocemment avec de l'huile bouillante, de ceux qui troussaient hardiment les servantes et les femmes de leurs copains et qui ripaillaient à pleines bouches sans penser à leur taux de cholestérol. Après eux le déluge.

Bien entendu, comme dans toutes les couches de la société, la jalousie, la perfidie, les entrainent à se rencontrer en duel, mais que l'une de leur descendante soit prise en otage par de vulgaires bourgeois issus de la grande bourgeoisie dégénérée, et le ban et l'arrière-ban rappliquent en quatrième vitesse.

Qui s'y frotte s'y pique et tant pis pour les négociants du cartel de Medellin, ils n'avaient pas à vouloir jouer à l'héroïne. Les Aristos se shootent au Dom Pérignon, pas à la poudre de Perlimpinpin.

Dans un style rabelaisien et san-antonionesque, Auguste Le Breton en mettant en scène des personnages à la Dubout, nous offre un roman drôle, paillard, humoristique, égrillard, font la trame pseudo policière fait place parfois à des digressions pseudo-psychologiques non exemptes de bon sens.

Par exemple ces quelques pages dans lesquelles Dieu se doit de résoudre un problème kafkaïen. Après la tornade blanche et nucléaire qui a détruit toute vie sur Terre, Dieu doit-il laisser la vie sauve au misérable poisson, seul et unique survivant, afin qu'il redémarre la longue lignée des bêtises humaines, ou doit-il le noyer et continuer à jouer à la pétanque avec Saint-Pierre en toute tranquillité ?

Les amoureux de l'argot vont se régaler à la lecture de cette histoire empruntant bon nombre de mots à la langue verte, une langue imagée, savoureuse et truculente. Les autres n'auront aucun mal à décrypter, le contexte se suffisant à lui-même pour traduire les mots qu'ils ne connaissent pas encore, les quelques noms et verbes pas encore popularisés ou entrés dans le langage familier.

 

Auguste Le BRETON : Du Rebecca chez les Aristos. Editions du Rocher. Parution avril 1991. 298 pages.

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23 juin 2016 4 23 /06 /juin /2016 15:16

Pas si sûr !

Alexis AUBENQUE : Tu ne manqueras à personne.

C'est le jour de la rentrée et Raphaël est quelque peu angoissé. Il ne connait personne au collège Bellamy de Pacific View et il se demande comment il va pouvoir s'intégrer.

Or la première personne qu'il aperçoit engluée dans la foule des étudiants, c'est Kelly, son amie Kelly, enfin son ancienne amie car depuis que sa sœur est décédée, elle le fuit.

Mais cette rentrée n'est pas placée sous le signe de la bonne humeur, au contraire. Une étudiante est retrouvée dans les toilettes, morte. Aussitôt le lieutenant Gregory Davis, le père de Raphaël, est dépêché sur place en compagnie du sergent Veronica Boom. Lorsqu'ils arrivent sur place, c'est pour constater que la jeune Lucy Torper est sur les toilettes, totalement nue, décapitée, la tête sur les genoux, les cheveux teints en vert. Un simulacre macabre du Joker de Batman.

Faye Sheridan, journaliste au San Francisco Chronicle, apprenant cette découverte veut immédiatement couvrir l'événement. Normalement elle est spécialiste des chroniques de l'Art de vivre, mais l'art de mourir ne la répugne pas. Seulement elle va devoir collaborer avec un envoyé de la maison-mère, Angelo Guadardo, qui souvent la prend de haut, du moins c'est ce qu'elle imagine. Elle possède sa fierté.

Les premiers interrogatoires des étudiants révèlent que Lucy n'était guère appréciée par ses condisciples. Une question de physique car elle détonait parmi les jeunes filles sosies de mannequins délurées. Mégan, sa seule copine en apparence, dévoile toutefois qu'il y a une rumeur de vidéo cochonne qui traînerait et dont Lucy aurait fait les frais. Mégan aussi désavantagée que Lucy accuse Heather d'avoir incité Conrad, un petit connard qu'elle déteste, ce sont ses propres mots, à coucher avec Lucy et de les avoir filmés.

Pour Gregory Davis et Veronica Bloom commence la longue tournée des parents à prévenir ou à interroger. Faye elle aussi, en compagnie de son ange gardien Angelo, s'attelle à la même tâche. Et bien entendu ils sont, aussi bien Davis que Faye, reçus comme des chiens dans des jeux de quilles. D'un côté ceux qui ont perdu leur fille, de l'autre ceux qui n'acceptent pas que leur progéniture, bien sous tous rapports, soit soupçonnée. On fait partie de la bonne société ou pas. Cette histoire de vidéo est toutefois contrebalancée lorsqu'un nom est avancé, celui d'un professeur.

Ryan, un motard en rupture de ban de la société, travaillant pour une mystérieuse organisation dont le but est de suppléer les policiers lorsque ceux-ci ont failli dans leurs enquêtes, revient se cacher dans la caravane de Faye. Les deux amants se retrouvent avec plaisir, tout en sachant que l'épée de Damoclès plane sur la tête de Ryan. Il veut savoir ce qu'est devenue Rosie, une collègue de Faye, disparue depuis des semaines et qui du jour au lendemain alors qu'elle effectuait des recherches, a disparu de la circulation.

Bien entendu ce meurtre à la mise en scène peu ordinaire met en transe la petite ville. Et dans ce microcosme, se trame une intrigue à plusieurs entrées, dont l'épilogue laisse entrevoir une suite.

 

En effet, nous retrouvons les principaux personnages qui ont été présentés dans Ne crains pas la Faucheuse, avec en suspens des interrogations qui se prolongent.

Ainsi Ryan qui cherche après Rosy, est toujours persuadé que Gregory Davis a tué sa femme Charleen pour capter son héritage. D'ailleurs Davis a effectivement hérité de la magnifique villa de Pacific View dont l'oncle de Charleen était propriétaire. Davis fait des cauchemars récurrents concernant Charleen, et il va découvrir une pièce secrète dans le grenier, pièce dans laquelle son entreposés des tableaux peints par Charleen.

Faye et Veronica qui étaient fâchées depuis des années ont renoué suite à l'épisode précédent. Quant aux amours de Kelly et de Raphaël, ils semblent au point mort depuis le décès de la sœur de la jeune fille, décès relaté dans des circonstances décrites elles aussi dans Ne crains pas la Faucheuse.

Mais ce ne sont pas les seuls points noirs, ou roses, qui parsèment ce roman, car l'attitude de Ryan est peu à peu développée, surtout ses relations avec l'association secrète, mais des brumes subsistent, de même que les prises de position du shérif Crawford. Le plat de résistance, le meurtre de Lucy et ses conséquences, reste le cœur de l'intrigue et lui ne souffre d'aucune échappatoire, tout étant résolu à la fin, mais dans des conditions qui ne sont pas évidentes au départ.

Encore une intrigue à double facette maîtrisée de bout en bout et qui nous annonce un troisième épisode particulièrement palpitant. Un troisième épisode qui pourrait s'intituler : Le principal est que je sois en vie.

 

Petite précision : Je ne comprends pas trop la mention en quatrième de couverture : Texte intégral, sachant que ce roman est inédit !

 

Je suis moi aussi une farouche adepte du respect du droit des femmes et dans tous les domaines. Mais je vais dire une évidence, l'homme et la femme sont différents, même s'ils sont égaux. Les instincts existent. Qu'on le veuille ou non, chaque sexe a le sien propre.

Alexis AUBENQUE : Tu ne manqueras à personne. Editions J'ai Lu. N°11251. Inédit. Parution le 2 juin 2016. 380 pages. 8,00€.

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23 juin 2016 4 23 /06 /juin /2016 10:40

L’Académie du Bassin d’Arcachon délivrera

son huitième prix à
François DARNAUDET
pour son ouvrage

« L’homme qui valait des milliards »,
publié par les éditions Wartberg.
Cérémonie de remise du Prix : Mercredi 29 juin à 15h
au siège de l'Académie : 20 avenue Sainte Marie,

Arcachon

 

François DARNAUDET : L'homme qui valait des milliards.

Les élèves du collège Bastiani ne sont pas des anges, mais pour Jean-Claude Bauduer, professeur de mathématiques, ils ne sont pas pire que d'autres.

Divorcé, trois enfants qui ont pris leur envol, la cinquantaine déprimante arrosée avec une bouteille de Cragganmore, pour son anniversaire il pouvait bien s'offrir ce luxe, Jean-Claude se réveille pâteux, nonchalamment vautré dans son canapé, n'ayant pas entendu le réveil le rappeler à l'ordre.

Il fait acte de présence toutefois l'après-midi au collège en salle d'informatique et répond obligeamment aux questions posées par sa petite troupe d'élèves avides de savoir, surtout sur sa personne. C'est ainsi qu'ils apprennent avec surprise qu'il a suivi une école d'ingénieur en Travaux Publics, mais pour des raisons indépendantes de sa volonté n'a jamais exercé et qu'il est docteur en mécanique. Si cette dernière qualité ne disent rien aux loupiots éberlués, l'un d'entre eux en farfouillant dans son ordinateur découvre qu'un milliardaire féru de sciences offre un million de dollars à la personne qui résoudra l'un des sept problèmes de mathématique du siècle.

En parcourant les textes des énoncés proposés, Jean-Claude est tout étonné que l'un d'eux corresponde à son vieux sujet de thèse de mécanique. Mais un autre problème l'intéresse plus particulièrement, la structure des nombres premiers. Et c'est le genre de problème qui le branche.

Mais il n'y a pas que les maths dans la vie, il y a aussi les collègues. Et justement l'arrivée d'une nouvelle collègue, Anne-Dominique, qui vient d'obtenir son agrégation externe de mathématiques, va bousculer son existence.

Au départ, en vieux grognon pas envieux, Jean-Claude professe une certaine retenue envers la jeune et belle Anne-Dominique mais bientôt leurs relations premières vont se tourner vers les nombres premiers, version Euclide, la case Eros n'étant pas programmée pour tout de suite. Et ce problème à résoudre, c'est son copain Eric qui souffle, non pas la solution, mais une invitation à rapprochement. Et ce rapprochement s'effectue au départ par un échange de mails, au cours desquels Anne-Dominique l'informe qu'elle vient de rompre avec son ami du moment, pour la petite histoire cadre sup chez Coca donc décapant mais pas forcément attirant, et qu'elle s'intéresse elle aussi à ce problème, et qu'éventuellement... S'ensuivent des échangent dans lesquels Riemann, la conjoncture Goldbach et autres chinoiseries sont évoquées.

Ce sont les vacances et Jean-Claude est à Biscarosse, planchant sur ces nombres premiers tandis Anne-Dominique déménage d'Angoulême où elle habitait à Saint-Jean d'Illach afin de se rapprocher de Bordeaux et de son lieu de travail. Apparemment, cela n'a rien à voir avec l'histoire et pourtant, cette séparation momentanée possède son importance vitale.

Car ils sont surveillés, comme bien d'autres internautes s'intéressant aux problèmes posés par le Clay Institute, et leurs échanges de courriers électroniques ne passent pas inaperçus. Ce qui semblait anodin pour J.C. et A.D. ne l'est point pour le hacker qui déchiffre leurs messages et transmet aussitôt à une entité spécialisée dans la protection, bancaire entre autres. En effet si ces deux chercheurs trouvaient la solution, on peut rêver, ils seraient capables de casser le secret des codes bancaires, et gagner non pas un million comme prévu mais des milliards.

A Paris, un journaliste pigiste qui aimerait bien obtenir une place stable, travaillant pour des magazines scientifiques, découvre justement la dépêche concernant le suicide à Bordeaux d'un homme de l'Est, un matheux. Or, depuis quelques mois, des mathématiciens ayant mis leurs neurones au service de la résolution de problèmes du siècle sont décédés dans des conditions troubles.

Aussitôt des tueurs, nommés Smith 1 et Smith 2 sont lancés sur la trace de ce journaliste fouineur ce qui ne pose aucun problème de logistique puisqu'ils sont basés à Bordeaux, venant de réussir une mission plutôt délicate.

Commence une chasse à l'homme, et à la femme, lesquels s'apercevront vite qu'ils ne sont pas les premiers à être poursuivis et que leurs pourchassants sont en nombre. De Taussac à Pauillac, d'Auch au col de Bayuls, en passant par quelques petites villes et Bordeaux naturellement, c'est le véritable parcours d'un combattant pas con et pas battu qui ne doit compter que sur lui-même, voire sur un ami puisque deux est un nombre premier, oubliant qu'on peut le retrouver à la trace à cause de ses retraits d'argents avec sa carte bancaire.

 

Alliant avec brio le principe des chiffres et des lettres, François Darnaudet nous propose une histoire habilement construite dans laquelle la partie pédagogique mathématique, ou arithmétique, n'occupe que quelques lignes, voire pages afin de ne pas décevoir les lecteurs scientifiques, mais qui ne perturberont pas le lecteur moyen âgé d'une soixantaine d'années, sachant que cette matière était enseignée au collège dans les années soixante et qu'aujourd'hui elle est réservée à une élite. Comme bien d'autres domaines lâchement abandonnés par des ministres de l'Inéducation Nationale (comme aime le préciser François Darnaudet) lesquels pour la plupart n'ont jamais enseigné et ne savent pas ce qu'est un élève, sinon grâce à des tableaux statistiques.

Ce roman possède des résonnances qui ne manqueront pas d'échapper aux lecteurs qui suivent le parcours de François Darnaudet depuis des années puisqu'il emprunte pour beaucoup dans la biographie de l'auteur. Et pour ceux qui ne le connaissent pas encore, je leur conseille de lire le portrait que j'ai réalisé il y a quelques années déjà, portrait qui depuis a subi de nombreuses fractures.

Le parcours professionnel de Jean-Claude permet à l'auteur de montrer son côté anar grognon, révolté lucide, et de placer quelques vérités premières concernant les administratifs :

Finalement, la dernière petite nana ministre de l'Inéducation Nationale, avec son joli minois à sucer du bout des lèvres peinturlurées au rose chanel, elle a fait autant de mal avec sa réforme du collège que le gros Allègre ou l'immarcescible Haby.

Mais il démontre également son côté humaniste, un peu aigri, conscient que tout ne se résoudra pas du jour au lendemain, et que tenir à jour un petit carnet, nommer le Foaitrekhon, peut éventuellement évacuer sa bile. Toutefois, il faut savoir tourner la page :

Tu cultives ton aigreur en écrivant ce journal. Jette-le ! Le monde est truffé de cons, mais ça ne sert à rien de les recenser.

Il y en aurait probablement plus que des nombres premiers.

Et l'amour là-dedans, me demanderez-vous. Je me contenterai d'une dernière citation :

Nous nous aimions comme des gourmets qui dégustent une bouteille de bordeaux, sachant qu'elle finirait par être vide...

François DARNAUDET : L'homme qui valait des milliards. Sous-titré : Le hacker de Bordeaux. Collection Zones Noires. Editions Wartberg. Parution le 1er avril2016. 180 pages. 11,90€.

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22 juin 2016 3 22 /06 /juin /2016 11:27

Bon anniversaire à Catherine Fradier, née le 22 juin 1958.

Catherine FRADIER : Ballon.

Tandis que des centaines de milliers de supporters, à un ou deux près, envahissent la France, désirant encourager leurs équipes respectives, dépensant sans compter leurs euros, faisant le bonheur des débits de boissons et fournissant allègrement du travail à ceux qui sont au chômage ou non lors des dégâts occasionnés par leurs débordements joyeux, là-bas, en Orient, un gamin pigne auprès de sa mère son ballon.

Il a oublié son ballon sur la plage, à cause des bombardements. Alors sa mère, Razan, sachant que le père lui offrira gentiment quelques torgnoles en rentrant, Qusaï effectuant six tours dans ses baskets délabrées sans toucher les bords, Razan décide d'aller récupérer le jouet de son fils malgré son ventre en capilotade.

 

En quatre pages, Catherine Fradier aborde un sujet grave. Elle nous montre les horreurs de la guerre à travers un événement parmi tant d'autres, un court épisode de la vie quotidienne, alors que tout devrait être joie pour des gamins qui n'ont rien demandé sauf une parcelle de bonheur, toucher la lune par exemple.

Une page d'histoire écrite tout en finesse, en toucher de plume, et le lecteur assiste, comme au cinéma, à ce qui pourrait être un moment de détente au milieu de la guerre. Mais la détente n'est pas celle à laquelle Qusaï pourrait, devrait, avoir droit, car les doigts des hommes sont dessus.

Catherine FRADIER : Ballon. Nouvelle numérique. Collection Noire Sœur. Editions Ska. Parution juin 2016. 1,49€.

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22 juin 2016 3 22 /06 /juin /2016 08:07

Quand il était enfant, sa mère lui disait

"Mange ta soupe, Herman..."

Jean-Noël LEVAVASSEUR : Herman dans les dunes.

Depuis il a bien vieilli, connu des vicissitudes, la guerre, la démolition du mur de Berlin.

Installé dans son fauteuil, Herman a du mal à suivre les documentaires sur sa télévision. Pourtant les documentaires sont intéressants, tels que la vie sexuelle des mygales roses ou la masturbation des escargots en période de reproduction. Non, ce qui est dérangeant, c'est cette neige qui tombe continuellement et en permanence dans son petit écran.

Il est vrai que son téléviseur grand écran, vu de côté, n'est plus de toute première jeunesse, mais quand on a soixante-trois ans, que l'on a une jambe dans le plâtre, que l'on vit à Berlin dans ce qui était encore il y a peu Berlin-Est, que le mur est tombé depuis six mois, il faut bien occuper son esprit. Et justement son esprit vient d'être accaparé par un reportage sur les plages du Débarquement.

Les plages du Débarquement, il connait. Il les a visitées en 1944, alors qu'il n'avait que dix-sept ou dix-huit ans. Et d'un seul coup, en cette année 1990 (et non 1994 comme précisé en quatrième de couverture) une figure bien connue quoiqu'effacée s'inscrit sur son écran. Jeanne, sa Jeanne, la jeune fille qu'il a connue et aimée... Il la reconnait, elle n'a pas changé.

Herman a été marié, il a eu un fils, mais les aléas de la vie font qu'il est seul maintenant. Sa femme et son fils ont préféré le laisser vaquer à son sort. Alors, puisque rien ne le retient à Berlin, sauf ses béquilles car il s'est cassé une jambe, il décide de retourner sur les lieux de sa jeunesse militaire, là où il a connu et aimé Jeanne, la retrouver peut-être, lorsqu'il sera remis sur patte. Les souvenirs qu'il garde d'Isigny-sur-Mer, des marais, des plages, des fossés et des haies, sont encore tenaces. Il a été soldat, il le fallait, on ne leur demandait pas leur avis, mais il n'a jamais considéré les Français, les Normands, comme des ennemis. Il devait plus se préserver qu'abattre des hommes comme lui lancés dans une guerre qui n'était voulue ni par les uns ou par les autres, en grande majorité. Et puis c'étaient les Américains qui les traquaient.

Herman réunit son pécule, puis il prend le train, Paris, Caen, où il effectue une station, avant de rejoindre Isigny et tenter de retrouver Jeanne, qui a dû bien changer elle aussi, s'est sûrement mariée, à moins que l'après-guerre lui ait réservé de mauvaises surprises. Une quête, la quête d'un amour improbable.

 

A Isigny, Alain est une vedette locale ayant connu au plan national son heure de gloire. Il avait enregistré un disque qui a connu le succès, avec sa chanson fétiche Marie-France, a donné des concerts, est passé à la télé, mais depuis il est passé à la trappe. Un peu par sa faute. Beaucoup à cause de l'alcool et de la drogue.

Pourtant Marie-France, sa compagne l'aime et ne le laisse pas tomber. Elle travaille à Isigny, d'ailleurs elle est quasiment la seule à faire vivre le ménage. Parfois il trouve un petit boulot de remplacement, un gala pour des fêtes de village, rien de bien enthousiasmant. Et son addiction à la drogue lui coûte cher. Dragan, un mafieux qui lui a prêté de l'argent sait se rappeler à son bon souvenir. Et comme Dragan en a marre de le relancer téléphoniquement, il envoie sur place deux de ses sbires qui devraient le raisonner, par les grands moyens s'il le faut.

Le Petit Tonio et Le Shérif ne sont pas des tendres, ne sont pas très futés non plus, surtout le Shérif, mais ils prennent leur travail à cœur, ne ménageant pas leur peine. Et naturellement leur chemin va croiser celui d'Herman, revenu à Isigny à la recherche de sa belle, ainsi que celui d'Alain pour le plus grand déplaisir de celui-ci.

 

Avec une certaine pudeur dans la narration, Jean-Noël Levavasseur narre deux histoires en une. Celle d'Herman vieillissant, entretenant son corps et découvrant qu'il y a une autre vie derrière le mur, désirant retrouver les origines d'un amour contrarié par la guerre. Pudeur sur la guerre, le débarquement, les agissements des soldats Allemands qui n'en pouvaient mais, mais aussi sur ces amours singulières fort décriées, vilipendées, honnies entre hommes et femmes de nationalité différente et adversaire. Pudeur aussi sur ce qui advint par la suite.

L'histoire d'Alain est plus proche de nous, et nul doute que le lecteur n'hésitera pas à mettre quelques noms sur ces vedettes d'un jour, célèbres le temps d'un disque ou deux, retombant rapidement dans l'anonymat mais gardant à l'esprit l'espoir de revenir un jour sur le devant de la scène.

Les personnages de Dragan, Petit Tonio ont déjà effectué des apparitions remarquées dans des nouvelles tandis que l'on retrouve le journaliste Léo Tanguy au détour des pages et d'un comptoir de café.

Jean-Noël LEVAVASSEUR : Herman dans les dunes. Collection Goater Noir N°14. Editions Goater. Parution le 20 avril 2016. 224 pages. 18,00€.

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21 juin 2016 2 21 /06 /juin /2016 14:01

Gilles Maurice Dumoulin alias G. Morris, G. Morris-Dumoulin ou encore Vic Saint-Val, est décédé le 10 juin 2016. Il était né au Havre le 16 janvier 1924.

G.M. Dumoulin en compagnie de Brice Pelman, à la Bilipo en octobre 1999 pour les 50 ans du Fleuve Noir

G.M. Dumoulin en compagnie de Brice Pelman, à la Bilipo en octobre 1999 pour les 50 ans du Fleuve Noir

Il travaille dès l’âge de treize ans chez un importateur de coton. De fil en aiguille, cet autodidacte qui apprend plusieurs langues étrangères grâce à la méthode à « six mille » et aime imiter Charles Trenet, monte une troupe de théâtre en 1942, puis se tourne vers la littérature en devenant tout d’abord traducteur de Mickey Spillane, d’Irwin Shaw (Le Bal des Maudits) ou de Robert Ruark (Le carnaval des dieux) et enfin, sous la pression amicale de critiques éclairés, se lance dans la production de romans policiers, d’espionnage puis d’anticipation.

Une œuvre aujourd’hui évaluée à plus de deux cents titres.

Il reçoit en 1955 le grand prix de littérature policière pour «Assassin mon frère» paru dans la collection «Un Mystère» aux Presses de la Cité dans lequel il prend pour décor le fameux camp Philipp Morris implanté à la fin de la guerre près du Havre et où il a été employé comme interprète.

Il intègre l’écurie du Fleuve Noir en 1963, produisant des romans pour les collection Spécial Police, Espionnage, Anticipation et la collection Vic-Saint-Val dont les premiers titres sont écrits en collaboration avec Patrice Dard. Parallèlement il écrit des chansons et des scénarios de films dont les réalisateurs s’appellent Henri Decoin ou Edouard Molinaro.

Pour en savoir plus sur cet auteur prolifique dont certains ouvrages ont atteint les 100 000 exemplaires, chiffre dont aimerait s’enorgueillir bien des best-sellers d’aujourd’hui, le meilleur moyen est de lire sa biographie, même si parfois on reste sur sa faim, «Le forçat de l ’Underwood» paru chez Manya en 1993.

 

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21 juin 2016 2 21 /06 /juin /2016 13:27

Hommage à Gilles-Maurice Dumoulin,

alias G. Morris, Vic-Saint-Val, décédé le 10 juin 2016.

G. MORRIS-DUMOULIN : Paris sera toujours pourri.

Entrant par hasard dans un bistrot, Peter Warren, le détective privé franco-américain, reconnaît Jo Carven, un vieil ami boxeur reconverti en restaurateur. Les retrouvailles se déroulent bon enfant et Warren ne manque pas de retourner chez ce copain à la table accueillante.

Ce jour là, alors qu’il dîne en compagnie de Jo et d’un autre ami de l’ancien boxeur, Warren aperçoit un jeune homme qui semble se défier d’une voiture puis s’engouffre précipitamment dans le bar. Ce n’est autre que Franck, le neveu de Jo, qui six mois auparavant s’était envolé pour les Etats-Unis, après s’être largement servi dans le tiroir-caisse du tonton, et n’avait plus donné de ses nouvelles. Franck qui revient avec une mallette bourrée de dollars, plus de deux cents mille ce qui est un joli pécule pour recommencer dans la vie. Warren est intrigué par ce pactole et il file Franck jusqu’à un immeuble trop bourgeois pour être honnête.

En effet la personne que le neveu rencontre, Yossip Maresco, se révèle selon Jo comme une authentique crapule magouillant dans tous les domaines. Il prévient Jo et tous deux s’invitent dans la résidence de Maresco, lequel les accueillent sourire aux lèvres. Mais Jo n’apprécie vraiment pas la collusion entre Franck et l’homme qui tripatouillait les matchs de boxe et est devenu maquereau, fournisseur de drogues et autres délits.

Alors Mallard propose de le prendre dans on entreprise d’informatique, la NALS, “  Nous Avons La Solution ”. Franck devrait s’acheter une nouvelle conduite. Mais elle n’est qu’extérieure et cela forcément lui retombe sur le museau. Warren va être obligé de louvoyer entre un ninja plutôt svelte, un truand serbe et un ingénieur japonais, aidé par sa secrétaire Sophia, qui elle aussi sera frustrée. On ne peut pas tout avoir.

Une nouvelle aventure pour notre ami Warren, qui prouve une fois de plus que l’amitié n’est pas un vain mot, malgré les emmerdements que cela procure parfois. Il ne cherche pas systématiquement les embrouilles, mais celles-ci lui tombent sur le paletot au moment où il ne les attend pas, malgré un métier à risques. Un humaniste qui sait que le chemin de la vie est empierré et qu'il doit marcher sur des œufs afin d’éviter les explosions en tout genre. C’est un dur au cœur tendre qui ne cède pas à la facilité, même si elle s’appelle Sophia, et qu’elle tente de démontrer à son patron qu’elle accepterait volontiers d’effectuer des heures supplémentaires chez lui.

G. MORRIS-DUMOULIN : Paris sera toujours pourri. Collection Dur à cuire. Editions de L’Arganier. Parution 18 septembre 2008. 232 pages.

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21 juin 2016 2 21 /06 /juin /2016 09:27

Je crois bien que rien n'y ferait...

Frédérique TRIGODET : Même si tu revenais.

Deux crimes en une semaine, dans deux villages situés à l'opposé du département, mais dans des conditions similaires. Deux femmes retrouvées dans leur baignoire, électrocutées.

Le capitaine Pistoléas est dubitatif en contemplant sa petite brigade composée de François Perrin, du lieutenant Misogin et de Laurence la stagiaire qui reste accrochée à son bureau se considérant comme une profileuse.

Le commissaire Vellin lui a remonté les bretelles le sommant de conduire son enquête le plus rapidement possible, imposant à son équipe un stage de formation, plaçant sa nièce comme stagiaire, et débrouillez-vous les gars, y a du pain sur la planche, et un tueur en série en liberté.

Alors tout ce petit monde récapitule, émet des hypothèses, enfin ceux qui pensent, se tortillonnent les neurones, mais cela ne va pas bien loin. Deux femmes, entre deux âges, habillées de paillettes et de strass, qui se prénomment toutes les deux... Rien de bien important à se mettre sous les dents, les yeux et les mains. Ah si, elles portaient des traces de violence.

 

Lui se sent investi d'une mission, perpétrer le souvenir du Chanteur. Il y ressemble fortement, il en possède même la voix, d'après une charmante dame qui est venue l'écouter à une fête de la bière. Tout serait parfait s'il n'avait pas un problème. De taille. Ses danseuses qui n'égalent pas celles de son Idole.

 

Rien que le titre de cette nouvelle vous aura mis sur la voie et la voix. Mais la chute, là chut... est intéressante, et montre un personnage plus vrai que nature dans son idolâtrie, son besoin de s'identifier à quelqu'un dont la notoriété défie les années.

Une nouvelle humoristique dont les protagonistes principaux, le capitaine Pistoléas et les membres de sa petite équipe, semblent complètement à la ramasse, étant obligés à se réunir pour échanger leurs opinions et à se servir d'une calculette pour additionner deux plus deux et se rendre compte que cela fait quatre.

Et ils me font penser aux bras cassés du cinéma, dans les films je précise car dans la vie courante ils n'étaient pas aussi niais, à Bernard Blier, Jean Lefèvre, Jean Carmet, Mireille Darc... Si vous avez d'autres suggestions, n'hésitez pas, vous connaissez mon adresse...

Ce pourrait n'être qu'une parodie de comédie policière, mais le personnage du Chanteur-bis nous plonge dans les affres de ceux qui se veulent à l'égal, s'identifient, mais ne sont que de tristes clowns blancs pitoyables.

Frédérique Trigodet, une nouvelliste à suivre... en tout bien tout honneur !

 

Pour commander ou consulter le catalogue de SKA éditeur :

Frédérique TRIGODET : Même si tu revenais. Nouvelle numérique. Collection Noire sœur. Editions SKA. 1,49€.

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20 juin 2016 1 20 /06 /juin /2016 08:34

Hommage à Michel Lebrun décédé le 20 juin 1996.

Michel LEBRUN : Sex-voto.

En 1939, dans Esquisse d'une psychologie de cinéma, André Malraux concluait : Par ailleurs le cinéma est une industrie. Cela a-t-il vraiment changé ? Pour Michel Lebrun, en 1975, cette affirmation était toujours de mise.

Et pourtant, Simon Malaterre, producteur, est à la recherche d'une forme d'esthétisme dans le cinéma qu'il finance. De l'art et d'essai plutôt que de lard et d'essais. Il prône un cinéma moralisateur, vertueux, et a même l'intention de réaliser un film ambitieux sur sainte Thérèse de Lisieux. Seulement il n'a que les yeux pour pleurer car il lui manque une grande partie du financement.

Pourtant il a déjà prévu des grandes vedettes pour participer à ce film. Marlène Jobert et Charles Bronson dans les rôles principaux. Il ne leur pas demandé leur avis, mais il est persuadé qu'ils ne manqueront pas de signer à l'annonce d'un tel projet. Seulement il faut de l'argent, car la vedette coûte cher, n'est-ce pas Mère Denis ?

Des retombées sur des films précédents sont promises à condition de commencer un nouveau tournage avant les trois mois. Il y aurait bien une solution, demander aux collaborateurs, le metteur en scène et l'auteur, de différer leurs défraiements, mais ils sont égoïstes. Ils refusent. Et Simon Malaterre est vraiment en colère, lui qui peut se vanter d'avoir obtenu un Oscar, le Grand Prix de l'Office Catholique du Cinéma, et quelques autres trophées prestigieux. Et il ne peut s'empêcher de vitupérer contre les pratiques administratives.

 

Je vais donner un coup de semonce à tous ces fossoyeurs. Je vais pondre un article soigné que je ferai passer dans le Cinémato. Nous allons reprendre la liste de tous ces films merdiques qui ont obtenu des avances sur scenario et des primes à la qualité, ça fait toujours rire. Puis je vais parler de mon projet, et leur mettre le nez dans leur caca. L'Etat subventionne des films contestataires, scatologiques, voire pornographiques comme La grande bouffe et autres saloperies, et quand un producteur entre mille ose préparer une vie de Sainte-Thérèse, on lui rit au nez !

Un repas d'affaires en compagnie d'un autre producteur spécialisé dans des films Q, devenus X, tourne au vinaigre. L'homme veut bien lui prêter de l'argent mais à condition que Malaterre se tourne vers des films moins cultes et plus cul. Malaterre refuse et s'obstine, ce qui fait que les ponts sont coupés entre les deux hommes, et les fonds aussi.

Si Malaterre manque d'argent, il n'est pas dénué de ressources et d'idées. D'abord confier le nouveau scénario à un ami, qui grenouille dans les Lettres, même s'il n'a jamais écrit pour le cinéma, et comme il lui a sauvé la vie, quelques décennies auparavant, de le pistonner auprès de la commission qui attribue les aides à la création. Après tout cet ami est membre de cette commission, alors un petit coup de pouce de sa part, ce serait un juste retour des choses.

Seulement, outre ses problèmes financiers, Malaterre connait quelques désagréments à cause de l'attitude de sa fille. Et acculé, il acceptera, à contrecœur de tourner un film, dérivé de Sainte Thérèse et le monde interlope, dans lequel les scènes de sexe seront simulées. Les attributs masculins n'apparaitront pas à l'écran. Bref un film avec une introduction, un développement et une conclusion. Seulement, les scènes dites osées, explicites, seront réservées pour la revente du film à l'étranger, afin de satisfaire à des exigences provenant de pays qui ne rechignent pas à admirer la beauté de jeunes hommes et filles batifolant ensemble.

 

C'est bien l'hypocrisie cinématographique que Michel Lebrun dénonce ici avec humour, ironie et causticité dans une trame policière. Il suffit qu'un film soit catalogué comme un véritable chef d'œuvre pour qu'il soit encensé et que le réalisateur peut tout se permettre. Les Galettes de Pont-Aven, Les Valseuses et plus tard 37.2 le matin ou encore L'amant bénéficient d'une aimable tolérance, tandis que les films catalogués X sont relégués dans des salles dont la réputation en pâtit.

Michel Lebrun connaissait bien le monde du cinéma et de la télévision, ayant œuvré comme scénariste ou dialoguiste pour des films impérissables tels que Estouffade à la Caraïbe, Ces dames s'en mêlent, La dernière bourrée à Paris, Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas, mais... elle cause !, La tête du client... et pour la télévision quelques épisodes de la Série Les cinq dernières minutes ainsi que pour Le sang des Atrides.

Alors ce microcosme du cinéma, Michel Lebrun le écrit avec réalisme et humour féroce, car le dieu Argent règne en maître et que sans lui, opérateurs du son, éclairagistes, cameramen, metteurs en scène et acteurs ne pourraient vivre. Seulement pour réaliser un film, il faut accepter quelques compromissions.

 

Mon problème est un problème d'éthique. Durant toute ma carrière, j'ai réussi, seul sur la place de Paris à garder mon nez propre. Je n'ai jamais un film pour gagner de l'argent facilement en flattant les goûts du public, et cette politique s'est avérée payante sur la longueur. Je me sens avili, crasseux, d'entrer dans le système, dans l'épicerie.

Michel LEBRUN : Sex-voto. Editions Presses de la Cité. Parution 1er trimestre 1975. 254 pages.

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18 juin 2016 6 18 /06 /juin /2016 18:47

Et pourquoi les magazines féminins seraient-ils

destinés uniquement aux femmes ?

Magazine Nous Deux N°3598 du 14 au 20 juin 2016.

Ne serait-ce pas de la ségrégation ?

Faisant fi du ricanement de certains, et sachant que le ridicule ne tue pas, la preuve, je me suis acheté puis ai offert à ma femme le dernier Nous Deux en date.

Pour des raisons simples qui se nomment littérature et découverte.

En effet les magazines, les périodiques qui proposent des nouvelles inédites et variées sont de plus en plus rares. Plus rares que les vulgaires revues consacrées au voyeurisme ciblé stars et politiciens en mal de publicité et qui font tout pour attirer le regard sur eux.

Donc revenons à Nous Deux que j'ai feuilleté, comme il m'arrive souvent de parcourir des revues dans mon hypermarché, que ce soit musicales, historiques ou politiques, de moins en moins ces dernières puisqu'elles ne reflètent que le bon vouloir de leur financier de patron, donc en feuilletant le Nous Deux en question, j'ai découvert qu'au sommaire figuraient deux nouvelles signées par des figures littéraires qui ne m'étaient pas inconnues : Frédérique Trigodet qui est publiée chez SKA éditeur, et Jean-Marie Palach chez Pavillon Noir et Daphnis et Chloé.

Pour 2,10€, je me suis dit in petto, oui je me parle à moi-même parfois ne craignant pas la contradiction, que pour ce prix-là je pouvais me l'offrir, et qu'éventuellement je l'offrirai à quelqu'un d'autre, femme ça je l'ai déjà dit, filles, belle-sœur, voire pourquoi pas mon médecin afin qu'il renouvelle son stock, en ayant soin au préalable de mettre de côté les textes des deux auteurs cités et hypothétiquement d'autres textes qui me sembleraient intéressants.

Pour une fois, je vais essayer de faire court, ça me changera, dans la présentation de ces deux nouvelles, sachant qu'il y en a quatre au sommaire, plus des romans-photos pour ceux qui s'intéressent à ce genre romanesque.

 

Frédérique Trigodet : Le pavillon d'été, catalogué sentiments.

Avoir un master de Lettres et Communication peut être pénalisant, Coraline s'en rend compte et en est fort marrie. Elle est obligée de rabaisser son niveau d'études afin d'obtenir un emploi, loin de Paris, dans le bassin d'Arcachon. Quatre mois sans emploi, quatre mois de repos forcé, et le loyer à régler, Coraline a accepté le statut d'employée polyvalente pour l'été, pour une famille de la bonne société bordelaise. Elle va loger dans un pavillon d'été, un cabanon de jardin, non loin de la mer et de la villa de ses patrons.

Entre divers petits boulots qui lui prennent son temps, au potager, à la cuisine, au ménage, lecture au maître de maison dont les yeux sont défaillants, Coraline n'a guère le temps à batifoler. Pourtant il lui semble bien que l'un des fils, Antoine, le célibataire, charmant et irritant à la fois, la drague. Mais son ton mielleux l'importune.

Une nouvelle romanesque charmante, pleine de douceur, et le personnage de Coraline est attachant et sympathique. Les autres protagonistes, à vous de voir si leur comportement vous agrée.

 

Jean-Marie Palach : Justice céleste. Suspense.

A quelques semaines de son départ à la retraite, le capitaine Didier Virnois est en planque dans sa voiture banalisée devant un hangar désaffecté face à une cité en banlieue parisienne. C'est son collègue le lieutenant Christophe Coton, un gars taciturne, sérieux, cachant jalousement sa vie privée, qui lui a donné rendez-vous. Ils sont sur la piste du Gang des oiseaux, des malfaiteurs qui détroussent les clients des restaurants et hôtels de luxe de la capitale, attifés de masques de volatiles.

Au dehors, la tempête fait rage, les éclairs illuminent par à-coups le parking, le tonnerre gronde, la pluie ne cesse de tomber et le vent arrache des tôles. En attendant une accalmie, Virnois pense, revoit des épisodes du passé, notamment un de ses collègues qui s'est suicidé, des affaires qui remontent à loin, lorsqu'il était jeune et fringuant.

Un suspense habilement maîtrisé et qui réserve son lot de surprises. Aide-toi, le ciel t-aidera, paraît-il. Jean-Marie Palach a dû imaginer son historiette lors d'un orage.

Une petite rectification toutefois : Le théorème de l'uppercut n'est pas le dernier roman en date de Jean-Marie Palach, comme annoncé en marge de la nouvelle mais Du sang sur le tapis rouge dont vous pouvez découvrir la chronique ci-dessous.

Conclusion : Dorénavant et désormais, toutes les semaines, je surveillerai le sommaire de Nous Deux, en solitaire, afin de découvrir si un nom connu ne s'est pas glissé au sommaire des nouvellistes, et en n'oubliant pas que de nombreux romanciers ont fourni à Nous Deux des nouvelles, ne serait-ce qu'André Caroff et d'autres. Malheureusement, souvent ce fut sous pseudonyme, et il est parfois difficile de traquer qui est qui.

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