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16 juin 2013 7 16 /06 /juin /2013 07:57

Hommage à Jean Forton né le 16 juin 1930.

 

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Ecrire un roman à la première personne, c’est mettre un peu de soi dans l’intimité du personnage-narrateur et il est parfois difficile de dissocier la fiction de la réalité. Renfermé, solitaire, notre héros (au sens de personnage principal) tient une sorte de journal de bord non daté, une façon personnelle de coucher sur le papier ses avatars afin de mieux les revivre.

Il n’a pas grand-chose à faire dans une existence oisive, percevant une rente mensuelle d’un héritage paternel. Son frère perpétue le négoce en vin qu’avait créé leur père et lui, il encaisse tous les mois sa quote-part. Il ne se plaint pas, même s’il pense être grugé, d’ailleurs que pourrait-il réclamer, lui qui à part se présenter pour toucher son obole ne participe en rien à l’entreprise familiale.

Il baguenaude, il vadrouille, il observe, habillé le plus souvent de fripes informes, se moquant totalement de son apparence, du regard des passants honnêtes comme le chantait Brassens. Il fréquente peu, et ne prend plaisir qu’en établissant des liaisons avec êtres blessés par la vie qui n’attendent plus rien de l’avenir. Ce sont les rares qui trouvent grâce à ses yeux « c’était un être frustre, et par bien des côtés plus proche de la bête que de l’homme. Mais il avait atteint un tel degré de misère qu’il avait bien le droit d’avoir une opinion ».

Il s’encanaille car ses fréquentations ne le jugent pas, négativement ou non : « En moi sommeillent de bas instincts, je ne participe vraiment aux joies collectives qu’avec des gens simples, des ivrognes. Ils ne me jugent pas, ils n’en ont pas le temps. Et s’ils le font malgré tout, ils ont la délicatesse de n’en laisser rien voir ». Un peu plus loin il écrit : « Ces rencontres d’un soir, ces amitiés d’une heure, m’ont toujours semblé précieuses. Il y a, dans cette intimité que rien ne vient troubler, une liberté, une franchise qu’interdisent les longs rapports ».

Une profession de foi qui se racornit un beau jour, lorsqu’il croise par hasard une jeune fille à la sortie d’un pensionnat. Il la trouve belle, en tombe amoureux et grâce à sa persévérance, sa volonté, sa patience, sa gentillesse, il va peu à peu apprivoiser ce petit oiseau et l’emmener dans sa cage. La belle, dont le père est lui aussi riche négociant en vin, est naïve. Faut dire qu’entre un père absorbé par son travail et une mère atteinte d’une sorte de maladie récurrente, Isabelle ne connait rien à la vie. Il va se charger de son apprentissage, lui apprendre à manquer l’école, à sortir de sa réserve, à s’émanciper. Il l’aime mais parfois regrette que sa présence soit trop effective, car il reste profondément solitaire dans l’âme. « Dieu sait que je l’aime, mais il arrive parfois que sa présence me pèse…On devrait interdire, même aux maîtresses les plus chères, certains lieux secrets où elles n’ont pas leur place ». Il n’est pas franchement cynique et pourtant il agit comme tel. Et sa grande question sera « A quoi me sert d’aimer si je dois souffrir ? ».

Par essence un lecteur est un être curieux, et ne dérogeant pas à cette assertion, j’ai entamé ce roman par la fin afin de recueillir quelques renseignements, le nombre de pages, la date d’imprimerie, la lecture de la postface sensible et érudite de Catherine Rabier Darnaudet, et plein de petites autres bricoles. Ainsi en apprenant que ce roman n’était tiré qu’a deux mille deux cent vingt deux exemplaires, je ne peux m’empêcher de penser qu’il n’y en aura pas pour tout le monde et que seuls les premiers seront servis, alors n’hésitez pas à vous le procurer.

forton1.jpgConsidéré comme son chef d’œuvre (je ne peux juger n’ayant pas lu les autres ouvrages de cet auteur, une lacune que je ne devrais pas tarder à combler), La Cendre aux yeux de Jean Forton pourrait passer pour un roman nombriliste. Cela se dément bien vite car le lecteur, qui suit les pensées du narrateur, peut se demander à juste raison si cette histoire n’est pas la sienne, ou tout au moins une aventure qu’il aurait pu vivre. Evidemment il faut s’investir, endosser le rôle et se plonger dans les années cinquante, quand les relations Filles/Garçons relevaient d’un code qui n’existe plus, d’une façon de penser et de se conduire qui sont devenues obsolètes. Il plane sur cet ouvrage comme un parfum d’authenticité qui relève plus de la confession que de l’imaginaire, avec un petit goût d’autodérision salutaire.


Jean FORTON : La cendre aux Yeux. Editions Le Dilettante. Postface de Catherine Rabier-Darnaudet. Octobre 2009. 320 pages. 19,00€.

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15 juin 2013 6 15 /06 /juin /2013 15:26

Comme disait ma grand-mère, on ne joue pas avec les couteaux...

 

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Figés tels des statues, simples soldats, samouraïs et ninjas attendent l’ordre de fondre sur la forteresse qui se dresse fièrement dans la vallée. Le daimyo, le roi dragon, envoie un cavalier porter un message à Dame Kachiko, la femme de Thoshiro le maître des lieux et vassal du daimyo. La réponse, négative, ne se fait pas tarder alors l’attaque est lancée et s’ensuit un véritable massacre.

Quinze ans plus tard, Hatanaka, un ancien samouraï devenu un yamabushi (guerrier de la montagne) et le jeune Ichirô rodent dans la montagne. Ichirô est âgé de quinze ans et un élève assidu du vieil Hatanaka qui lui apprend le maniement du Katana, une arme blanche redoutable, ainsi que la sagesse. Il lui fait également quelques révélations sur sa naissance.

Lors de l’attaque de la forteresse par le daimyo, les parents d’Ichirô qui étaient les seigneurs du lieu, sont décédés et Hatanaka, l’un des rares survivants, s’est occupé du nouveau-né. Depuis ils voyagent dans les montagnes. Ichirô est effondré par cette nouvelle et il est décidé à se venger. Ils recueillent un jeune paysan, qui erre dans la nature, rejeté de son village à cause de sa couardise. Mais Buta (porc en japonais), s’il est pleutre, est une force de la nature et il porte à lui seul les ballots contenant les affaires des voyageurs. Lorsqu’ils arrivent devant la forteresse du daimyo, un recrutement de samouraïs est organisé. Ichirô, malgré les avis contraires d’Hatanaka, s’inscrit dans ce jeu du quitte ou double. Heureusement les premières passes d’arme s’effectuent à l’aide d’un Bokken, un sabre en bois, réplique du katana. Ôno, le jeune samouraï recruteur, un individu imbu de son pouvoir, qui affiche sa morgue et son mépris avec ostentation, décide de changer les règles du jeu. Dorénavant ce sera avec le katana que les combattants se départageront, le perdant restant définitivement sur le carreau. Les candidats se pressent moins, mais que ne ferait-on pas lorsqu’on est un rônin, un samouraï sans emploi ? Et pour faire bonne mesure Ôno défie Ichirô. Malgré sa science des armes Ichirô encaisse les coups, son adversaire jouant au chat et à la souris avec lui. Et bientôt l’issue fatale se profile…

Lorsqu’il sort de son étourdissement, Ichirô, affaibli par de nombreuses blessures se rend compte qu’il a été déposé sur le charnier composé des corps des combattants défunts. Hatanaka et Buta confectionnent une civière de fortune et sortent de l’enceinte malgré les soldats qui gardent la porte. L’étrange convoi se replie sur la montagne enneigée et se terre dans une grotte, jusqu’au jour où Ôno rejoint les trois membres. Il est en fuite car il a enfreint la loi en laissant la vie sauve à Ichirô et que des gardes en charge de l’entrée, et donc par la même occasion de la sortie, ont péri sous la colère de Hatanaka. Il craint le courroux du daimyo, ce qui n’est pas une idée en l’air mais une réalité. Le Shogun a fait appel à un ninja pour retrouver, et pourfendre, les fuyards.

Les pérégrinations de la petite troupe se poursuivent, et ils seront bientôt rejoints par un voleur et un ninja.

Ce roman semi-fantastique, truffé de combats acharnés, de retournements de situation, réserve bien des surprises dont l’épilogue qui appelle une suite et offre déjà une résolution de certains mystères. Situé dans un Japon médiéval, il est destiné à ceux que l’on pourrait appeler de jeunes adultes mais il ne leur est pas uniquement réservé. Les lecteurs avides de sensations fortes, de fantastique pas trop appuyé, d’effets spéciaux dignes des films ou séries télévisées (genre Power rangers) aux arts martiaux japonais avec cascades réalisées par des ninjas n’ayant pas de problèmes de sciatiques et autres maladies articulaires, seront enthousiasmés par les prouesses des combattants et les nombreuses péripéties qui foisonnent dans ce roman. L’auteur habilement a préféré jouer sur les scènes d’action, reléguant une quelconque philosophie ennuyeuse au fond du placard.

Katana s’apparente donc à un roman d’aventures qui se lit avec une certaine jubilation. Si l’aspect nippon n’est pas appuyé, et les décors pouvant tout aussi bien être transposés au Tibet ou toute autre chaîne montagneuse, ce sont bien entendu les techniques de combat et les armes blanches utilisées ainsi que la présence de geishas qui situent le roman dans cette partie énigmatique du monde. Un divertissement qui ne s’encombre pas d’explications oiseuses. Cela fait du bien de temps à autres.


Jean-Luc BIZIEN : Katana. Vent rouge, volume 1. Editions Le pré aux clercs. Collection Pandore. Mai 2013. 336 pages. 16,00€.

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15 juin 2013 6 15 /06 /juin /2013 14:07

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Pas vraiment policier, pas fantastique, La Muraille emprunte aux éléments de ces deux genres pour mieux se démarquer. Roman noir également, un peu comme on l’entendait à l’origine de cette appellation et que l’on désigne aujourd’hui sous celle de roman gothique, dans une ambiance moyenâgeuse, historique, épique, chevaleresque, ce roman vous plonge dans un univers onirique composé de bruit, de fureur, de couleurs, de faux semblants, de miroirs aux alouettes et de drames sordides.

Troubadours et bateleurs se pressent pour participer à la fameuse fête des fous qui chaque année se déroule au village de Mornas, dont la forteresse se dresse fièrement au dessus d’un ravin. Thibault, Ninon et leurs compagnons, La Pie et Taureau arrivent alors que l’orgie bat son plein. Mais pour La Pie, comme pour Taureau, l’intérêt ne réside pas dans ce débordement d’énergie.

Ils sont obnubilés par l’hypothétique trésor du seigneur de Mornas, réputé pour ses nombreuses épousailles et les disparitions souvent prématurées de ses femmes. Tandis qu’Arlequins italiens subjuguent Ninon, pourtant en proie à des cauchemars destructeurs, que Thibault endosse tant bien que mal son accoutrement usurpé de chevalier, que La Pie et Taureau ne pensent qu’à remplir leurs sacoches, Côme de Blagnac et ses troupes assiègent la forteresse. Les villageois n’ont qu’une seule échappatoire, se réfugier dans la citadelle. Malgré le manque d’eau et de vivres qui ne va pas tarder à se faire ressentir, le seigneur de Mornas ne semble pas abattu. C’est le moment choisi par La Pie pour mener son enquête dans les souterrains.

Sur une trame historique, servi par une atmosphère lourde, angoissante, fantasmatique, ce roman de fureur et d’action, de cupidité et d’amour, d’honneur et d’humeur, de trompe l’œil et d’horreur, de comédie et de tragédie, souffle le froid et le chaud, décoiffe mais ne rase pas. Une plongée médiévale qui laisse peu de place à la réflexion tant l’auteur enchaîne rapidement les rebondissements, les morceaux de bravoure, les moments d’émotion, parfois entre rire et larme.


Jean Luc BIZIEN : La Muraille. Collection Moyen Format, Le Masque. Octobre 2001. 396 pages.

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14 juin 2013 5 14 /06 /juin /2013 08:55

Quel diplomate !

 

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La collection Angoisse du Fleuve Noir est devenue mythique au fil des ans, alors que du temps de son vivant elle n’a jamais connu l’aura et le succès de ses grandes sœurs Spécial Police et Espionnage. Aujourd’hui elle est très recherchée par les collectionneurs et donc pratiquement introuvable sauf à des prix souvent prohibitifs chez les bouquinistes spécialisés. Dans l’entretien accordé par Dominique Rocher à Richard D. Nolane, les ventes des romans de la collection Angoisse s’étalaient au début des années soixante-dix entre 10 000 et 35 000 exemplaires. Ce qui, comparé aux chiffres de ventes des deux collections citées ci-dessus (voir mon article sur les chiffres de vente du Fleuve Noir), ne comptait guère dans la balance commerciale. A cela une raison simple. Les lecteurs pensaient découvrir des romans dédiés au fantastique et comme ce genre littéraire ne fut guère prisé, et ne l’est guère plus aujourd’hui encore, ils n’ont pas été attirés par le contenu. Pourtant le titre même de cette collection annonçait la couleur : Angoisse. Et c’est bien l’angoisse qui prédominait, une angoisse parfois teintée de fantastique, mais également d’horreur ou de terreur.

L’Ambassadeur des âmes, courte nouvelle qui ouvre le recueil et donne son titre éponyme à l’ouvrage, m’a fait penser à un spot publicitaire tourné par George Clooney. Je vous laisse découvrir pourquoi et attardons nous sur le premier des deux romans qui figurent dans ce volume et ont été tous deux publiés dans la collection Angoisse au début des années 70.

L’homme aux lunettes noires. Marie a décidé de partir en Inde en compagnie de Marc, son amant. Avec Gilles son mari, ce n’est plus ça, quant à son fils Renaud, il est dans une institution en Suisse à cause d’une santé défaillante. Avant leur départ Marc et Marie dînent dans un restaurant chinois et sont abordés par une diseuse de bonne aventure. Bonne aventure, vraiment ? La Gitane « voit » du sang sur la main de Marie, une mort est annoncée. Pas de quoi refroidir les envies de Marie de tout quitter, Paris, son mari, son enfant, pour aller en Inde avec Marc. Car dans le bureau de son époux elle a découvert un dossier la concernant et révélant son incartade. Toutefois comme il n’est jamais inutile de prendre quelques précautions, elle propose à sa servante qui est enrhumée, le chauffage dans la chambre de bonne étant défaillant, de coucher dans sa chambre. De toute façon, ce n’est pas un problème puisqu’elle fait chambre à part avec son mari, comme cela est de coutume dans le grand monde, et ce soir là elle est ailleurs. Le seul petit hic, c’est qu’elle retrouve Anna assassinée avec toutes les conséquences que cela peut avoir sur son avenir. Tant pis, ce voyage, elle l’a voulu, elle le fera, et même si Marc n’est pas au rendez-vous au départ de l’avion, elle embarque comme cela était convenu. Elle remarque un homme portant des lunettes noires qui semble surveiller ses faits et geste. Arrivée sur place elle est prise en charge par un guide, Rani, qui s’impose à elle. Mais l’homme aux lunettes noires est souvent présent mais il possède la faculté de disparaitre aussitôt dès qu’elle tourne la tête. Elle le suspecte d’appartenir à la police, Interpol pourquoi pas. Et Marc qui n’arrive toujours pas alors que sa chambre d’hôtel est réservée.

Humeur le second roman présent dans ce volume, édité à l’origine sous le titre de Humeur rouge, met en scène un psychanalyste à la tendance masochiste refoulée, exerçant son métier pour le plaisir. Mais ses clients eux ont vraiment besoin de lui. Témoin ce patient du nom de Robert Hamelin, atteint d’un eczéma douloureux provoqué par sa nervosité, qui suit des séances de psychanalyse. Bizarrement ce psoriasis disparait lorsqu’il assiste à un accident, ou à un homicide, qu’il a provoqué. Son humeur, sa nervosité, son comportement caractériel peu à peu déteignent sur le médecin.

Les quatre autres nouvelles qui complètent l’ouvrage, La route du destin, Lov’machine, Meurtre à la page et Tu as dit vampire ? jouent sur le cauchemar, sur l’introspection des pensées de ceux qui côtoient le protagoniste auquel un docteur visionnaire a greffé une sorte de détecteur de mensonge, les effets parfois néfastes d’Internet, et enfin sur la visite intempestive d’un inconnu dans la chambre d’hôpital d’un jeune malade atteint de leucémie.


Ces romans et nouvelles d’une agréable facture se lisent avec plaisir, car si le fantastique n’est pas loin, c’est l’angoisse insidieuse qui se détache de ces textes. Pas de débordement d’hémoglobine, pas de complaisance, pas de sensationnel, pas de clichés, pas d’outrance dans l’horreur, tout réside le plus souvent dans la suggestion que dans la description.

Le lecteur retrouvera une constante dans pratiquement tous ces romans et nouvelles : la médecine représentée par des toubibs ou des infirmières. Pas étonnant puisque Dominique Rocher a fait des études d’infirmière avant de se tourner vers le journalisme. Elle explique d’ailleurs son parcours dans l’entretien réalisé par Richard D. Nolane. Alain Sprauel quant à lui a établi une bibliographie complète des œuvres de Dominique Rocher, romans nouvelles, et autres.

Vous serez sûrement intéressés de parcourir le catalogue des éditions Rivières Blanches. L’illustration de couverture est signée Arnaud Demaegd.


Dominique ROCHER : L’Ambassadeur des âmes. Collection Noire 23. Rivière Blanche. 336 pages. 20,00€.

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13 juin 2013 4 13 /06 /juin /2013 16:34

Au cas où il ne serait pas complètement mort !

 

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L’étrange découverte que viennent de faire le capitaine Mord-bœuf et les quelques sergents qui l’accompagne ne va sûrement pas leur remettre les idées à l’endroit, eux qui ont déjà des difficultés à comprendre même ce qui est simple. Alors trouver dans le cimetière de Cahors le cadavre d’un défunt, mort depuis quinze jours, sur la glèbe, hors de son tombeau et un poignard fiché dans la poitrine, cela a de quoi vous retourner le ciboulot et regarder alentours si le diable ne s’amuserait pas à la vue de leur visage déconfit.

Mord-Bœuf, en compagnie du sergent Pelfort Pasturat, fait part immédiatement de sa trouvaille pour le moins incongrue à Guillaume de Cardaillac, seigneur-comte et évêque de Cahors, qui se dit in petto que le sieur Enguerrand de Cessac, usurier de son vivant, continuera à l’enquiquiner même dans la tombe. Puisqu’il en est sorti. Aussitôt mission de renvoyer le cadavre dans le trou et ramener l’arme du crime, est confiée aux deux gens d’arme mais celle-ci est sabotée. La mission, pas l’arme. Pasturat a glissé le cadavre en sa destination finale dont il n’aurait jamais dû ressortir oubliant de ce fait le poignard dans le corps.

En époque bénie où ni Internet ni téléphone portable existaient, les rumeurs et mauvaises nouvelles se propagent sans l’apport de technologies. Et c’est ainsi que Dame Braïda, mariée avec Domenc et maman d’une jolie petite Ava de deux ans, apprend les avatars du corps de Cessac. Elle a repris les affaires de son père, finances et transports de ballots par gabarres sur la rivière l’Olt, mais de nature curieuse, sitôt qu’un mystère se présente à elle, elle le prend à bras le corps et il lui faut le résoudre, quitte à sacrifier les affaires en cours. Dans le ménage, c’est elle qui porte les braies, ce qui ne déplait en rien à son époux. Ava tient de sa mère, refusant de se coucher ou prendre son biberon si elle en a décidé ainsi et en proférant des litanies de no-no-no-no-no-no-non ! Un côté rebelle qui fait fondre ses parents.

Pendant ce temps, en sa maison forte, le chevalier Aimard de Roquebrune, au passé entaché de quelques vilenies, tient conciliabule avec son quintet de coupe-jarrets. Sont présents, Plate-couille dont l’historique du patronyme est décrit dans l’ouvrage, de Godet-fendu, une particularité due à l’apparence de son visage qui lui permet de renverser sur ses habits autant de liquide qu’il en boit, ce qui n’est pas peu dire, de La Feuille dont l’unique accessoire destiné à ouïr ressemble un peu à celle de Monsieur Spock, et enfin Les-Jumeaux, appelés ainsi pour des raisons évidentes dont point n’est besoin de s’attarder sur l’origine. Or Aimard s’aperçoit que sous la ceinture de l’un des jumeaux il manque un poignard. Le sicaire est incapable de s’expliquer sur cette vacuité ventrale. Passablement énervé, le chevalier demande à ses hommes, si tant est qu’ils puissent comprendre les ordres, de s’enquérir de cette disparition et de la rumeur qui se propage concernant la réapparition d’un cadavre affublé d’une arme blanche.

Braïda enquête de son côté, auprès de Giovanni Conti le Lombard et autres personnages ayant eu affaires avec Enguerrand de Cessac, ou de Jacob le médecin juif qui affirme que le défunt aurait succombé d’une mauvaise fièvre aggravée par les tergiversations de trois autres médicastres mandés par sa servante, Arsende. Mais il est persuadé qu’en réalité il y avait eu crime. Les deux serviteurs de Braïda qui lui font office de garde du corps, Géraud et Pisse-dru, point n’est besoin de justifier cet alias, traquent les informations dans les bouges et tripots, au Mouton embroché principalement, lieu de rendez-vous des hommes du guet et autres poivrots de gente compagnie.

Braïda se demande, si, j’insiste sur le si, l’origine de ce meurtre ne résiderait pas en la construction future d’un pont sur l’Olt, près de l’embarcadère. Ce passage de pierre étant édifié au détriment financier de l’évêque Guillaume de Cardaillac, qui tire profit du péage pour la traversée à l’aide d’un bac. Braïda aussi, dans une moindre mesure, mais elle n’est pas concernée dans ce (double ?) meurtre. Tandis que penser que l’évêque aurait fait occire l’un de concitoyens pour une vulgaire rentrée d’argent défaillante, serait pour le moins incongru.

 

Dans le cadre d’un roman historique, ce livre est aussi la chronique d’une petite ville au Moyen-âge, mais sans posséder la lourdeur des descriptions ennuyeuses que certains romanciers privilégient au détriment de l’intrigue. Le décor est simplement posé, l’auteur privilégiant les portraits physiques et intellectuels des personnages. Car il faut bien l’avouer et l’écrire, qu’ils soient hommes du guet ou coupe-jarrets, ceux-ci manquent singulièrement de finesse mentale. Les rouages de leurs cellules grises sont passablement grippés, et ceux qui s’adressent à eux doivent choisir des mots simples afin qu’ils saisissent le message qui leur est adressé. Ce qui ne va pas sans incompréhension de leur part, la plupart du temps, et je suis modeste.

 

Un humour frais, léger, primesautier, règne sur ce roman dont l’épilogue est pour le moins inattendu, dont l’intrigue est savamment amenée et agencée. Dame Braïda est une forte femme, psychiquement et non physiquement, et cela nous change des femmes fatales ou écervelées. On disait de Braïda qu’elle pourrait faire se mettre en rang les chênes têtus des causses. D’ailleurs c’est quasiment la seule femme au visage et au corps avenant présente dans ce roman. Les autres ressemblant plus à des fantômes ou à des fées Carabosse, ce dont elles n’ont pas toujours conscience. De plus Braïda est énergique, impulsive, ce qui ne l’empêche point de s’adonner à la réflexion lorsque son enquête l’exige. Ainsi elle se remémore un vieux précepte édicté par son père : Lorsque l’on veut dissimuler un objet, ou une lettre, la meilleure cache est de le laisser à la vue. Ceci ne vous rappelle rien ?

Après avoir fait sa connaissance dans La chair de la Salamandre, nous restons sous le charme de Braïda et espérons la retrouver prochainement dans de nouvelles aventures médiévales. En attendant je vous invite à déguster un bon petit Cahors gouleyant, mais attention, sans en renverser une goutte.


Jean-Louis MARTEIL : L’assassinat du mort. La Louve éditions. 240 pages. 15,00€.

challenge régions

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13 juin 2013 4 13 /06 /juin /2013 07:54

-C’est affreux de se faire dévorer par un requin !

-Pas tellement plus que d’être électrocuté par un grille-pain.

 

 

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  Cape-Town en Afrique du sud, le pays où l’apartheid a été théoriquement banni. C’est dans cette ville que Caryl Ferey nous propose d’effectuer un petit voyage en compagnie d’Alice, bientôt quinze ans, et vérifier si la ségrégation économique et raciale est toujours de mise.

La mère d’Alice, géographe de formation et éthologue, c'est-à-dire qu’elle observe les comportements des espèces animales dans leur milieu naturel afin de les comparer à ceux des humains, est toujours par monts et par vaux. Et Alice, en proie à un cauchemar récurrent, est élevée par son père. Aussi lorsque l’éthologue, coincée au Cap par des circonstances indépendantes de sa bonne volonté, leur propose de venir la rejoindre, c’est la meilleure des nouvelles qu’ils ont reçue depuis des mois.

Avec Montgomery, son collègue océanographe, elle avait projeté de créer un parc naturel marin ayant pour but la protection des requins blancs, une espèce en voie de disparition. Malheureusement, Montgomery a été attaqué par l’un des deniers représentants vivant dans la baie de Gordon, un squale non bagué, ce qui est préjudiciable dans leur entreprise. Montgomery est blessé, et a eu la chance de ne perdre aucun membre, mais une enquête policière est en cours.

Alice peut à loisir s’intéresser au paysage, aux agissements de leur voisin, propriétaire d’un hôtel de grand standing, Le Beach Palace. Et ce qu’elle aperçoit ne le rend pas franchement sympathique. Il se rend coupable d’agissements racistes envers une gamine vivant dans l’un des bidonvilles de la ville, le township de Khayelitsha. Deux hommes portant une bâche qu’ils ont prise dans le coffre d’un 4X4 s’entretiennent avec l’hôtelier et dans l’imagination d’Alice aussitôt s’élabore l’idée d’un trafic pas très catholique. Imagination débordante ou réalité ? Alice a-t-elle mis le bras dans un engrenage qui pourrait lui être fatal ?

Caryl Ferey propose une histoire simple, émouvante, captivante qui s’inscrit par petites touches dans un humanisme fondamental dénué du ton moralisateur généralement utilisé pour l’édification des jeunes lecteurs. Il expose des faits, place ses personnages devant des situations périlleuses, sans outrance, sans manichéisme, presque avec désinvolture, ce qui renforce le tableau qu’il livre, celui de la description d’un bidonville mais aussi des agissements de personnages peu scrupuleux, pour qui tout est profit. Et comme Caryl Ferey est un grand voyageur, ce qu’il décrit, il le connait. L’intrigue devient le support de la peinture d’une Afrique du Sud actuelle.

 

Caryl FEREY : L’Africaner de Gordon’s Bay. Collection Souris Noire, éditions Syros. 136 pages. 6,00€.

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12 juin 2013 3 12 /06 /juin /2013 13:56

Pour une poignée de  beagles...

 

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Une voiture plongée dans la Loire, ce ne pourrait être qu’un fait divers de plus dans la vie d’un gendarme ou celle du lieutenant Zollinger, de la police judiciaire du Loiret. Seulement ce véhicule a percuté quelques jours auparavant une adolescente qui circulait en scooter. Si sa vie est hors de danger, la gamine risque de perdre une jambe. Mais Zollinger n’a pas que ça à reprocher à cette automobile qui se lave dans la Loire. Elle aurait participé à un braquage d’un bar-tabac-loto (y’en a qui cumulent), une enquête qui lui a échu.

Zollinger est un fervent chasseur, et il sait se servir aussi bien de ses oreilles, de son nez que de ses yeux. Et ses yeux repèrent une trace rougeâtre sous le coffre. N’ayant pas la patience, vertu pourtant indispensable au Nemrod qu’il est, d’attendre l’arrivée des techniciens de la police scientifique, il force l’ouverture et découvre le cadavre d’un jeune homme. Il s’agit de David Lagardière, bien connu, sinon des services de police, dans le milieu des films classés X. Surnommé Woodendick, David possède un attribut viril défiant toute concurrence, et il était en tournage dans la région. Cécil Q2000, le réalisateur bien connu, déplore cette défection indépendante de la bonne volonté de son acteur. David a été passé à tabac avant d’arborer un sourire kabyle guère photogénique.

Le père de David, un homme politique qui a été secrétaire d’état et magouille dans la finance et les puits de pétrole déclare qu’il ne l’avait pas vu depuis des années. Toujours selon Cecil Q2000, David avait quitté le foyer familial à sa majorité ou presque, s’adonnant à la drogue et éventuellement à la prostitution à Paris, voyageant beaucoup, fréquentant les milieux homosexuels, et ne demandant aucun subside à son géniteur. Lagardière père s’est remarié et a eu une gamine, Mylène, avec sa nouvelle épouse Christine.

Reine, institutrice et amie de Zollinger, a justement Mylène dans sa classe. En attendant que la et (sa) maîtresse finisse quelques préparatifs, le policier assis à un pupitre proche de celui de Mylène, fouille dans les affaires d’icelle. Il trouve des dessins qui pour une gamine de huit ans démontrent un réel talent. Sur l’un d’eux des chiens, des beagles, sont représentés couchés. Mais leur positionnement n’est pas vraiment normal. Zollinger trouve même des traces rouges figurant du sang. Il s’invite dans l’immense propriété de Lagardière père et les chenils sont propres, nettoyés. Pas de chiens à l’horizon, pas d’aboiements. Plus tard Lagardière affirmera que ses beagles ont été décimés par un étrange virus et qu’il ne les a pas remplacés.

Alors qu’il baguenaude sur les routes solognotes, Zollinger se rend compte qu’il est suivi par un véhicule qui tente de l’envoyer au fossé. Zollinger connaît bien la région pour s’y promener souvent lors de parties de chasse. Il se réfugie en haut d’un mirador et brise le genou d’un de ses deux poursuivants à l’aide de sa carabine de chasse, une arme à feu qui ne le quitte jamais, rangée la plupart du temps dans le coffre de sa voiture. Il surprend une conversation entre les deux hommes, des étrangers, dont un au moins est Ukrainien.

Le commissaire Ferrand de la financière le contacte et lui livre quelques informations sur Lagardière, ses implications dans les puits de pétrole ou de gaz ukrainiens, et de possibles magouilles avec les anciens dirigeants du pays.

 

Fin d’Amérique, dont le titre est le nom d’un hameau, s’avère être une enquête policière comportant des imbrications politico-financières, avec en toile de fond l’ombre d’une secte. Mais c’est le personnage de Zollinger qui retient l’attention. Vieux sanglier solitaire, Zollinger se démarque de ses collègues car il ne boit pas ou peu. Il sacrifie volontiers à quelques bières, aux vins de pays, genre Cheverny, mais lorsqu’il rencontre des témoins il se contente d’une menthe à l’eau. Solitaire dans son travail, il a horreur d’être accompagné d’un équipier, laissant les taches technologiques et administratives à Sandy. Et s’il rencontre à plusieurs reprises Google, c’est parce que celui-ci est un indic fiable, et possédant d’énormes ressources quand aux informations qu’il peut lui apporter. Même sa relation avec Reine, il la vit presque en pointillé, étant profondément attaché à la jeune femme mais n’osant pas imaginer un avenir d’époux et de père.

 

En recevant ce livre, j’étais excité comme une jeune fille qui doit rencontrer son promis qu’elle n’a jamais vu. Et de loin, il est vrai qu’il a de la classe le Prince Charmant. Corps d’Adonis sculpté dans le marbre dont l’apparence athlétique ne doit rien aux salles de musculation ni aux anabolisants. Seulement cette jeune fille remarque peu à peu que le visage d’Apollon est constellé de comédon disgracieux.

Des mots tronqués, tel réal pour réalisateur, divi pour divisionnaire, opé pour opération, chir pour chirurgien, tech pour technicien, braco pour braconnier, cela peut peut-être plaire aux Djeuns qui ne lisent pas sauf leurs textos, mais pour les vieux lecteurs comme moi, cela défrise les globes oculaires. Et que dire de l’emploi immodéré de mots anglo-saxons qui font penser que l’auteur, au lieu de respecter son lecteur, se conduit comme un jeune cadre frimeur. Avec quelques bubons supplémentaires sous forme d’argot des années cinquante assaisonnés au nouveau parler. Mais, bien évidemment cela n’engage que moi, et sûrement que bon nombre de lecteurs ne seront pas dépaysés lors de cette lecture et y trouveront même leur compte. Cela relève de l’exercice de style, intention louable en soi, mais je suis profondément classique, sauf en quelques rares occasions. Pourtant de nombreux passages, bucoliques, pastoraux, forestiers, parsèment ce roman et m’ont fait songer à Raboliot, par exemple, de Maurice Genevoix. Une ode à la nature et à la faune, Zollinger se montrant chasseur invétéré mais respectueux et sachant apprécier cette Sologne qui l’accueille.


Damien RUZE : Fin d’Amérique. Editions Krakoen, collection Polar. 384 pages. 16€.

 

challenge régions

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12 juin 2013 3 12 /06 /juin /2013 10:00

Mais auparavant il faudrait le laver !

 

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Reporter criminel, Peter Callaway se voit confier par sa tante Caroline Donoland, qui vient de s'établir comme détective privée, une mission à première vue pas très dangereuse. Arozlan Smith a des doutes sur la fidélité de sa femme Lisbeth. Peter suit la jeune femme jusqu'à un pavillon de banlieue. Lisbeth se fait assassiner et Peter a juste le temps d'apercevoir l'un des agresseurs avant d'être assommé. Il se réveille en pleine campagne, démuni de son portefeuille, que les truands ont laissé sur les lieux de leur forfait, ainsi qu'une lettre signée Lisbeth et dénonçant un chantage. Smith est retrouvé abattu de plusieurs balles dans le corps. Washington Crofty, ennemi intime du journaliste, accuse Peter mais Caroline se montre persuasive. Peter est alors convié à participer à l'enquête en compagnie de l'inspecteur March. Kid Weiss, journaliste lui aussi et Déborah son épouse, Caroline, Mona la pulpeuse et nouvelle secrétaire, viennent renforcer les effectifs.

Une vieille dame, témoin d'allées et venues suspectes le jour du crime, est étranglée alors que March et Peter étudient les lieux. March soupçonne un temps Peter. L'associé de Smith déclare que celui-ci aurait détourné de l'argent. March et Peter se rendent dans un bar tenu par Sagourian et où Smith avait ses habitudes, y rencontrant une jeune femme dont la couleur de cheveux changeait selon les jours. Trois clients, qui s'avèrent être des hommes de main de Panastia, un gangster notoire, s'en prennent aux deux investigateurs. Ceux-ci mettent les gros bras en fuite et relèvent des indices les persuadant du passage de Smith à l'état de cadavre.

Peter passe l'après-midi agréablement avec Mona puis les choses sérieuses commencent selon les instructions de Caroline. March et lui même se mettent en planque dans un bar proche de celui de Sagourian. Peter suit l'un des hommes de Panastia jusqu'à une maison isolée. March est assassiné avec l'arme de Peter, cependant Crofty, malgré les apparences, sait que le détective amateur n'est pas le meurtrier. Lui aussi était sur place. En compagnie de Kid, Peter se rend à une autre adresse et échappe de peu à un attentat, grâce à la présence de Caroline. Peter met en action ses petites cellules grises et arrive à la conclusion que Mona Parker est à l'origine des fuites sur ses déplacements. Ce que confirme Caroline qui a enquêté sur l'identité de sa secrétaire.

Ce roman construit avec enchaînement de deux intrigues, dont une se révèle un peu légère au point de vue départ - d'ailleurs André Goss, par l'intermédiaire de Crofty le chef de la police, le concède en écrivant : "Comment Billy Finger et Mona May ont mis le nez dans cette affaire ? Je l'ignore et personne ne pourra le dire" - est résolument placé sous le signe de l'humour. Un humour utilisant surtout les métaphores mais qui se dilue au fur et à mesure que se décante l'intrigue. Un roman qui a légèrement vieilli mais dont le mobile lui est toujours d'actualité. Les fusillades fleurissent et les cadavres se ramassent à la pelle.

Citation : Je m'absorbe dans la contemplation de la moquette comme si j'étais occupé à rechercher un cachet d'aspirine dans un paquet d'ouate hydrophile.

A lire du même auteur : Sérénade aux colts et Après vous madame.

 

 

André GOSS: Repassez le suaire. Spécial Police N°55, Editions Fleuve Noir. 1954.

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11 juin 2013 2 11 /06 /juin /2013 08:06

Bon Anniversaire à Frédérick Tristan, né le 11 juin 1931, qui a signé une quinzaine de romans policiers sous le pseudonyme de Mary London.

 

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La soirée d’anniversaire de Lord Hamilton, organisée en sa villégiature de Villers sur mer près de Deauville, se clôt par un incident qui jette quelque peu le froid parmi l’assemblée. Lady Karen, la jeune femme du noble britannique, à la quarantaine superbe et éclatante, lacère à coups de kriss malais un tableau peint pour cette occasion par Andréa Pendleton, artiste peintre (du moins c’est ainsi qu’elle se définit) vivant aux crochets de Lord Hamilton. Dans la nuit le corps de la secrétaire du lord anglais est découvert sur les planches de la cité balnéaire. Elle a été poignardée. Le lendemain, Sir Malcolm Ivory, qui avait été invité par lord Hamilton, lequel lui avait promis de lui donner un ouvrage rarissime, arrive en plein pataquès. Et comme si cela ne suffisait pas le jour d’après c’est Hamilton lui même qui est découvert dans son lit, raide. Suicide ou meurtre ? La veille Hamilton avait annoncé son intention de modifier son testament, déclaration qui n’était peut-être pas au goût de tous. Sir Ivory va mener son enquête conjointement avec la commissaire Duvalier, Liliane pour les intimes dont il fera bientôt partie, auprès des habitants du domicile de Hamilton, Victoria Manor. Outre Lady Karen, vivent ou étaient présent les deux funestes journées, Robert, le fils qui s’adonne volontiers à la boisson, Andréa Pendleton, artiste peintre, Apolonius Tycoon, qui se prétend poète, tous deux ayant appartenu à une mouvance hippie à la fin des années soixante et surnommée les “ Fous de Cheyne Walk ”, enfin Sticker le banquier et Morgan le majordome.

Digne héritier des auteurs anglais de romans de suspense et de détection, Mary London, alias Frédérick Tristan, livre à chaque épisode des enquêtes de Sir Malcolm Ivory des intrigues sympathiques qui tiennent la route et plonge le lecteur dans des aventures délicieusement désuètes. Cette fois l’intrigue est placée aux alentours de Deauville, sur la Côte Fleurie, dans une région fort prisée des Anglais. Un roman rafraîchissant et divertissant à déguster entre deux romans noirs.

 

Mary London : Meurtre anglais à Deauville. (traduction de Jean-Paul Baudricourt), collection Les enquêtes de sir Malcolm Ivory. Editions du Rocher. Février 2005. 232 pages. 17,20€.

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11 juin 2013 2 11 /06 /juin /2013 06:47

Un Goss qui ne fait pas l'enfant...

 

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Peter Callaway est le témoin d'une tentative d'enlèvement. Trois hommes kidnappent une jeune fille. Mais ils se trompent de voiture, prenant celle de Peter pour la leur. Le journaliste les expédie au tapis et emmène la belle chez lui. Marjorie Pigella, fille unique et délaissée d'un riche veuf, s'est enfuie du collège où elle était sensée poursuivre ses études. Peter a écrit un article sur la traite de blanches sévissant dans la région ce qui ne plaît pas à un Mexicain qui le fait kidnapper. Son copain Grégory, qui a assisté à l'enlèvement, le sauve de la noyade. Peter est renvoyé, son patron ayant peur des retombées provoquées par ses articles. Marjorie narre ses avatars. Elle a fait la connaissance d'un Don Juan, nommé Juan qui a drogué sa boisson. Après une tentative avortée pour s'échapper, elle a été présentée à Sanchez, psychiatre, et Peter l'a tirée des griffes des Mexicains alors qu'ils regagnaient leur voiture.

En compagnie de Grégory et de Jimmy, spécialiste des coffres-forts, Peter s'introduit chez Sanchez, apprend par l'assistante que les kidnappées sont emmenées dans un ranch au sud du pays et s'empare de documents. Des gros bras les poursuivent jusqu'aux docks. Grégory est touché et Peter décide de l'emmener ainsi que Peggy, la petite amie de Greg et Marjorie chez sa tante Caro à Sunshine cottage. De retour en ville il apprend que Jimmy est décédé après avoir été torturé. Il revient au cottage lequel est dévasté. Caro lui explique que les autres ont été enlevés. Pigella, qui tient les flics dans sa main, l'accuse de séquestrer sa fille. Peter retrouve la trace de ses amis mais il tombe dans un piège. Lui et Grégory sont délivrés par Caro. Ils repèrent l'emplacement du ranch et arrivent au moment où les kidnappées allaient passer la frontière séquestrées à bord d'un camion leurre.

Tour à tour écrit sur un ton badin, humoristique, poétique, dur ou réaliste, ce roman n'a pas trop vieilli. Il s'inscrit dans la veine des romans noirs américains dus à de petits maîtres tels que M.E. Chaber. La femme ne joue pas forcément, comme il était de bon ton à l'époque, le rôle de la garce ou de l'ingénue. L'emploi de certaines métaphores qui se voulaient drôles pourrait cataloguer aujourd'hui l'auteur comme raciste. Lorsqu'il traite par exemple les Mexicains de pains d'épice.


Citation : Toutes les pièces restantes sont aussi vides qu'un cerveau de député.


André GOSS : Sérénade aux colts. Fleuve Noir Spécial Police N°37. 1953.

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