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29 septembre 2020 2 29 /09 /septembre /2020 04:18

Un roman terriblement actuel !

Freddie LAFARGUE : Ibrahim Lancelot.

Ibrahim Guezmir a purgé de dix années d'exil un meurtre jamais prouvé puisque le corps de la victime présumée n'a jamais été retrouvé. Dix années à Chastelmort, dans le Grand Nord au cours desquelles il a végété, abruti par les drogues, mis hors circuit du monde dit normal.

Blummenfeld a décidé de le libérer et de lui donner une petite chance de réinsertion. Ibrahim théoriquement n'est plus qu'une larve intellectuelle, du moins c'est ce que croit le Maître de Chastelmort.

Dans une mine de l'Est vivote Arthur Bronstein réfugié en compagnie d'une poignée de dissidents et attendant le signal annonciateur de liberté. Or il apprend qu'Ibrahim aussi appelé Lancelot vient de rejoindre la Capitale. C'est le moment pense-t-il de relancer le Gral, nom de code du programme Génie Rayonnant de l'Action Libératrice. Il confie à Yvain la mission de contacter Lancelot.

 

Reprenant le mythe des Chevaliers de La Table Ronde, et le transposant dans un futur assez proche, Freddie Lafargue, alias Gérard Guégan, nous livre une fable moderne qui se voudrait optimiste. La quête de l'identité, la quête de la liberté, la quête de l'inaccessible, la quête éternelle d'un avenir qui ne serait que paix. Mais pour accéder à cette paix, il faut la gagner par la guerre.

Sous la fable l'auteur livre ses réflexions, son angoisse presque de la vision d'un monde moderne incontrôlable, et qui se cherche sous la férule de dictateurs, la science étant l'un de ces maîtres auxquels on se plie avec plus ou moins bonne grâce.

Une anticipation philosophique et caustique mais une anticipation malheureusement proche et inexorable, la poésie étant étouffée par le modernisme et le scientisme que l'on nous impose.

 

Freddie LAFARGUE : Ibrahim Lancelot. Collection Furies. Editions Dagorno. Parution 1er mai 1994. 180 pages. 70 francs

ISBN : 978-2910019143

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28 septembre 2020 1 28 /09 /septembre /2020 04:07

Entre le rêve et la réalité, il n’y a que l’épaisseur d’une paupière…

Sylvie HUGUET : Rêve de Licorne.

Depuis quelques temps, la jeune Louise n’est plus assidue dans son travail scolaire, pour des raisons qui échappent à madame Dorgueil, son enseignante. Mais lorsque celle-ci fait remarquer à son élève, qu’elle a prise en affection, les erreurs disséminées dans ses rédactions aussitôt Louise les corrige sans difficulté.

Madame Dorgueil a effectué sa petite enquête mais à première vue, rien dans sa vie familiale ou autre n’a pu conduire la jeune Louise à ce comportement inhabituel et bizarre. Alors, elle lui propose de relire un manuscrit qu’elle vient d’achever, car elle écrit des livres pour adolescents, et de lui donner ses impressions. Une occupation que Louise accepte avec plaisir. Et c’est ainsi que nous découvrons en même temps que l’adolescente cette histoire intitulée Rêve de Licorne.

Diane est une gamine qui vit dans un élevage de chevaux et elle s’épanouit dans ce paradis de vallons et de bocages, au domaine de la Châtaigneraie. Mais c’est bien connu, les châtaignes sont enfermées dans des bogues protégées par des piquants. Et les piquants sont ce que l’on pourrait appeler les réactions de sa mère lorsqu’elle a ses nerfs. Pourtant le père est prévenant, mais la mère est une forte femme qui sait s’y prendre pour que ses envies ou ses refus soient satisfaits sans barguigner de la part de sa fille ou de son mari.

Diane a appris à monter sur un poney toute jeune puis elle a eu droit de posséder un magnifique poulain qu’elle nomme Brume de Neige à cause de sa robe. Elle a assisté à l’accouchement de la jument, qui en est décédée, a élevé le poulain au biberon, couchant même dans le box la nuit, au grand dam de sa mère. Entre Brume de Neige et Diane, c’est une entente parfaite, presque ou autant qu’avec le père. Quant à la mère elle a toujours ses nerfs, et cela va se compliquer le jour où le père décède dans un accident.

Près d’un an après, la mère se remarie avec Alex le palefrenier embauché du vivant du père. Et Alex ne trouve rien de mieux que de complimenter Diane sur sa féminité naissante, de l’importuner par des propos inconvenants et d’effectuer des gestes déplacés trop bien placés. Diane veut en parler à sa mère qui réfute ses allégations, et les confidences avortent dans des crises de nerfs maternelles. Il ne faut pas dire du mal d’Alex en qui elle a trouvé un bel étalon. Alors Diane se réfugie dans ses rêves, dans un pays qu’elle découvre peu à peu, l’Outre-Monde.

Elle est subjuguée par un animal magnifique qui ressemble un peu à Brume de Neige mais portant au front un rostre en ivoire : une Licorne. Cet animal fabuleux est accompagné de Vif-Argent, un cheval qui mène une harde, ainsi que d’autres animaux qui vivent, malgré leur antagonisme ancestral, en bonne intelligence. Il y a Vent-d’Orage, le loup, et sa meute, Lame de Saphir, le tigre, Œil-de-Silex, l’aigle, et surtout Vieux Cerf, le vieux sage qui explique à Diane qu’ils sont toutefois sous la menace des Ténébriens, vivant de l’autre côté et les pourchassant impitoyablement. Mais bientôt cette douceur va connaître des heures sombres. Car le rêve devient cauchemar à cause d’un épisode réel vécu avec peine par l’adolescente.

 

Cette histoire, Rêve de Licorne, est enchâssée entre le prologue et l’épilogue, ce qui est normal me direz-vous avec juste raison, et seule elle aurait pu constituer un aimable conte bucolique rédigé sur le thème de la Fantasy.

Seulement, les deux barrières qui l’entourent donnent toute la saveur à ce court roman, une saveur amère et très actuelle. L’auteur retombe ainsi sur ses pieds tout en fournissant une histoire familiale qui se tient, trop bien, et le lecteur navigue entre rêve et cauchemar, dans ce que l’on pourrait définir comme une réalité virtuelle.

De beaux moments de poésie, une ode à la nature, et une dégringolade dans un concept dont malheureusement il est question tous les jours depuis la nuit des temps. Et la présence des loups et des chevaux n’est pas dénuée d’innocence, car ces animaux alimentent l’actualité malgré eux. Une coïncidence ?

Sylvie HUGUET : Rêve de Licorne. Editions Assyelle. Parution 15 septembre 2020. 140 pages. 12,00€.

ISBN : 9782378550219

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27 septembre 2020 7 27 /09 /septembre /2020 03:43

Je préfère le vin d’ici à l’eau de-là (Pierre Dac)

André HELENA : Passeport pour l'au-delà.

Jo vient d'effectuer un stage de six mois à l'hôpital. Six mois, ça compte, surtout lorsque le dit stage a été occasionné par la rencontre inopinée de quatre balles de revolver et d'un corps humain. Encore, s'il n'y avait eu que ça !

Pendant six mois ou presque, Jo a dû affronter les questions insidieuses d'un certain nombre de flics soupçonneux et dépassés par les événements. Pourquoi lui avoir tiré dessus, lui qui arrivait du Venezuela et ne se connaissait pas d'ennemis ?

Jo va donc tenter de découvrir le pourquoi du comment et essayer de retrouver Mireille, la jeune femme qui l'accompagnait le soir où il a essuyé les pruneaux, comme l'on dit d'une façon imagée dans ce milieu interlope. Ses pas le conduisent de Montmartre à Pigalle, de bars en tripots.

Jo furète, interroge, questionne truands et prostituées, à la recherche du fil conducteur qui le mènera jusqu'à ceux qui ont vainement tenté de lui faire passer le goût du vin et du cognac. Des boissons qui le rendent quelque peu euphorique et déprimé à la fois, vindicatif, quinteux, dans un Paris printanier. Pour Jo c'est le début de la perte de ses illusions et du peu d'argent qui lui restait en poche.

 

Ce parcours, cette longue descente aux enfers, cette déchéance accompagnée de sursauts, c'est un peu ce qu'André Héléna a vécu toute sa vie.

Brillant écrivain, Héléna n'a jamais été reconnu par ses pairs et la critique. Comme le fait si bien remarquer Georges-Jean Arnaud dans sa postface : Héléna possédait une grande facilité d'écriture mais il était prodigue. C'est un don qu'on vous pardonne rarement, non seulement les critiques mais aussi les confrères. Un roman laborieux et sans originalité écrit en un an l'emportera toujours dans l'estime sur celui qui aura été pondu en quinze jours.

L'alcool a eu raison d'Héléna qui avec une ironie amère écrit : Le Corse haussa les épaules. Il n'avait que mépris pour les gens qui boivent. Réflexion amère d'un écrivain désabusé mais bourré (!) de talent. Trop peut-être !

 

André HELENA : Passeport pour l'au-delà. Série les Compagnons du destin. Couverture Jef de Wulf. Collection Fanval Noir. Editions Fanval. Postface de Georges-Jean Arnaud. Septembre 1988. 192 pages.

ISBN : 9782869284104

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25 septembre 2020 5 25 /09 /septembre /2020 04:29

C’est un homme comme un autre…

Barbara CARTLAND : Le Diable amoureux

Quelle n’est pas la désillusion de la famille Stanton lors du décès du père Sir Beaugrave Stanton. Celui-ci a dilapidé toute sa fortune dans des voyages et dans des livres couteux et rares pour satisfaire sa passion sur l’Antiquité grecque.

Une passion qui s’était étalée jusque dans le choix des prénoms de ses quatre filles et de son unique fils. L’aînée, Cynthé, dix neuf ans, Larrissa, dix-huit ans, Athéna, dix-sept ans, Delos la petite dernière, quinze ans. Enfin le fils, Nicias, dont bien vite le prénom fut transformé en Nicky, afin d’éviter les moqueries de la part de ses condisciples. Ils vivent dans le château familial, Redmarley, sis dans la campagne anglaise, non loin de Gloucester, mais comme le portefeuille commence à se rétrécir en peau de chagrin, il va falloir opérer quelques coupes dans le train de vie.

Nicky est destiné à poursuivre ses études à Oxford afin de devenir diplomate, mais cela semble compromis. Ses sœurs n’acceptent pas qu’il sacrifie sa carrière à cause d’un manque pécuniaire. Aussi ses sœurs et leur mère envisagent diverses solutions pour pallier cette infortune. Larrissa écrit à sa marraine qui vit à Londres, laquelle connaît une vieille dame établie en France, la comtesse de la Roche, dont le frère, le comte de Barmont recherche une gouvernante pour son petit-fils Jean-Pierre.

Une situation en poche de gouvernante, ou plutôt de préceptrice, ne peut se refuser, aussi afin de paraître à son avantage en France, Larissa restaure quelques vieilles robes de ses sœurs ou de se mère, en leur ajoutant dentelles et les réaménageant. Puis c’est le départ, l’arrivée sur le continent. Dans le train qui l’emmène vers la capitale, Larissa fait la connaissance de Madame Madeleine qui s’extasie sur ses robes. Elle est une coutière renommée et apprécie le travail de rénovation. Elle parle également du comte Raoul de Barmont, le père veuf du jeune Jean-Pierre, mais ce n’est pas à l’avantage du trentenaire. Raoul est un fêtard bien connu dans les clubs de la capitale et des endroits de débauches comme les Folies-Bergères.

En gare un coche attend Larissa qui va enfin connaître les aîtres et les êtres. Le comte de Barmont père est un sexagénaire froid et distant qui ne voit que par son petit-fils, ne désirant pas entendre parler de son fils qu’il veut répudier. Madame de Savigny sa sœur qui vit au château accueille Larissa avec sympathie, ainsi que le personnel dont la nourrice de Jean-Pierre qui fut également celle du père, le comte Raoul.

Larissa doit enseigner surtout la langue anglaise à Jean-Pierre, un petit bonhomme de six ans qui ne pense qu’à jouer. C’est un gamin rêveur qu’un rien distraie, n’essayant pas de retenir les leçons de sa préceptrice. Au contraire, comme s’il en faisait exprès. Larissa s’aperçoit rapidement qu’il manque quelques neurones dans le cerveau de Jean-Pierre ce dont, à part son grand-père, tout le monde s’est aperçu. Et elle ne peut mettre en doute l’intelligence du gamin, au risque de se faire renvoyer au bout de quinze jours comme les gouvernantes précédentes.

Un jour, Jean-Pierre, toujours dans la lune, manque se faire écraser par un cheval qui galope dans une allée du château. Il s’agit du comte Raoul venu prendre des nouvelles de son fils, de la nouvelle préceptrice, et proposer une affaire à son père. Celui-ci refuse sans même étudier la proposition, engoncé qu’il est dans sa morgue et sa prévention envers le fils qui n’est pas prodigue. Mais le jeune comte Raoul tape dans les yeux et le cœur de Larissa et apparemment, c’est réciproque.

 

Sous cette ébauche d’histoire d’amour, qui se déroule en 1890, se niche un drame familial, un épisode imprévisible, dans sa conclusion, mais dont Barbara Cartland avait déjà posé les prémices par quelques péripéties sentant le roman policier. En effet, le comte Raoul manque être empoisonné, selon l’un des serviteurs toujours à l’affût des ragots, par une des bouteilles de Champagne ramenées du domaine. Car le comte, ne pouvant déshériter son fils, avait imaginé un meurtre afin que son petit-fils devienne l’héritier.

Mais Larissa, mise au courant, sauvera la vie de Raoul, en se précipitant à Paris, découvrant par la même occasion les lieux supposés de débauche du père de Jean-Pierre, à l’insu de son patron. Mais ce n’est pas fini.

 

Barbara Cartland se pique également de psychologie, mettant en parallèle les sociétés huppées britanniques et françaises, et leurs conceptions du mariage.

Les Français ont la réputation d’être très audacieux avec les femmes affirme Lady Stanton, qui ajoute : Un Anglais, s’il est homme d’honneur, ne courtisera une jeune fille que si ses intentions sont honnêtes, que s’il compte lui offrir le mariage.

On pourrait longtemps gloser sur ces deux affirmations tendancieuses. Mais laissons les philosophes s’écharper sur ces allégations, Ah bon, il n’existe pas de Français homme d’honneur, et que font les Anglais qui ne sont pas hommes d’honneur, comme il en existe partout ? Vaste sujet de dissertation, n’est-il point ?

Alors que le comte Raoul lui déclare qu’elle est infiniment ravissante, et qu’il suppose que de nombreux admirateurs le lui ont déjà dit, Larissa rétorque :

En Angleterre, monsieur, les hommes sont bien élevés.

Elle avait eu l’intention de le rabrouer, mais elle vit Raoul sourire. Ses yeux pétillaient.

Serait-il mal élevé de dire la vérité ? demanda-t-il. A vous voir, j’aurais cru que, plus que quiconque, vous apprécieriez la franchise.

Peut-on penser qu’il s’agit d’un cas de harcèlement ou d’un compliment mérité ?

Ce qu’un enfant ne connait pas ne lui manque pas.

Barbara CARTLAND : Le Diable amoureux (The devil in love – 1974. Traduction de Denyse Renaud). Collection Nous Deux N°358. Les Editions Mondiales. Parution juillet 1976. 222 pages.

ISBN : 2707413585

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23 septembre 2020 3 23 /09 /septembre /2020 03:14

Le parfum du roman noir américain !

Serge LAFOREST : Une poigne de fer.

A trente neuf ans, seize ans de service et trente-six enquêtes résolues à son actif, le lieutenant Sol Barker peut enfin espérer obtenir ses trois ficelles et devenir capitaine. Il est affecté dans un commissariat de Brownsville, et est célibataire depuis que sa jeune compagne Gail a déserté le foyer conjugal.

Elle était danseuse et n’a pas supporté les horaires de travail de Barker. Alors depuis seize mois, elle a repris sa liberté. Ce qui n’a pas empêché Sholto, dit Sol, Barker de s’intéresser à ses faits et gestes.

L’annonce que son dossier va enfin être déposé sur le bureau du maire, communication signifiée par son patron le commissaire Haraden, lui fait évidemment plaisir mais la nouvelle d’un meurtre vient gâcher l’avis de cette promotion, pas encore signée. Et ce meurtre a été signalé à l’adresse d’une certaine dame Namara, nouveau nom de Gail, née Owens mais ayant théoriquement gardé son nom d’épouse puisque le divorce n’a pas été prononcé entre eux.

Il s’agit d’un jeune gangster du nom de Buggsy Lazlo, qui avait fait ses armes avec Fredo le Sicilien puis, depuis que la bande avait été détruite, évoluait dans le sillage de Goldie Gaione. Sol, de la Brigade Criminelle, arrive sur place alors que deux policiers gardent l’entrée et interroge la femme de service qui était dans les escaliers. La concierge est toujours dans l’escalier ! Les ambulanciers partent avec le cadavre et Sol farfouille dans la pièce, retrouvant les objets et les vêtements chics de Gail. En sortant il se trouve nez à nez avec celle-ci.

Au début elle nie connaître Buggsy puis avoue qu’il la courtisait. Elle lui avait prêté une clé mais jure que jamais il n’a couché avec elle. Sol n’est pas convaincu par ses affirmations. Sol se rend ensuite chez Vito Lazlo, le frère de Buggsy, qui a quinze ans de plus que le défunt et qui tient un bar. Il lui annonce la mort violente de son frère, ce dont Vito n’est guère surpris, sachant les relations que celui-ci entretenait avec la pègre.

Dice Appledoe s’invite dans la pièce où se tient Vito, Sol s’étant caché derrière une porte. Appledoe est envoyé par Goldie Gaione pour que Vito lui refile un pourcentage sur ses recettes et fournit un endroit pour que le shylock, prêteur sur gages aux taux usuraires, puisse s’y installer. Vito refuse catégoriquement, ne mangeant pas de ce pain-là. C’est à ce moment que Sol se dévoile et embarque Appeldoe pour diverses infractions. Il demande au policier de garde de relâcher Appledoe au bout d’une heure.

Se faisant passer pour Bix Skouris, un concurrent de Goldie Gaione, il téléphone, d’un drugstore, au truand, l’informant qu’Appledoe aurait craché le morceau concernant Buggsy Lazlo. Car Sol est déterminé à donner un grand coup de pied dans la fourmilière. Il veut monter l’un contre l’autre les deux truands, chefs de bandes rivales, mais le résultat n’est pas tout à fait conforme à ses prévisions.

Haraden l’informe que son dossier pour obtenir les trois ficelles a été mis à la poubelle. Le district attorney et le maire mangeant dans la main des truands. Sol pense que quelqu’un d’autre manipule les tygoons (gangsters).

 

Une poigne de fer, si ce roman était signé d’un pseudonyme américain et traduit par Serge Laforest, aurait très bien pu passer pour la traduction d’un livre en provenance d’Outre-Atlantique. On sent l’influence d’auteurs américains, dans le style de Bruno Fisher, de Day Keene et de quelques autres, de par le contexte. Et il ne faut pas oublier que Serge Laforest fut le premier auteur français publié dans la Série noire, sous le pseudonyme de Terry Stewart en 1948.

Il est étonnant qu’au départ Sholto Barker évolue à Brownsville puis au court du récit ce quartier ou cette ville devient tout simplement Brooklyn. Mais ce n’est qu’un détail, ce qui importe c’est le traitement de l’intrigue.

Un policier qui veut à tout prix, et par tous les moyens, se débarrasser de deux bandes de gangsters, mettant sa vie en jeu. Et le lecteur n’est pas étonné du résultat ni du nom de la personne qui tire les ficelles.

Un roman solide comme les écrivait Serge Laforest, et chez lui il n’y avait guère de déchet. Il fut l’un des piliers des collections Spécial Police et Espionnage jusqu’à son éviction ( ?) du Fleuve Noir en 1969.

 

Serge LAFOREST : Une poigne de fer. Collection Spécial Police N°60. Editions Fleuve Noir. Parution 3e trimestre 1954. 224 pages.

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22 septembre 2020 2 22 /09 /septembre /2020 03:57

Une plongée dans le Paris des années 1950.

André HELENA : Le demi-sel.

Heureuse initiative que celle des éditions Fanval de rééditer l’un des romans composant la série « Les Compagnons du destin » d’André Héléna.

André Helena, un auteur peu ou mal connu, redécouvert cycliquement par des maisons d’édition qui ne mènent pas jusqu’au bout leur entreprise dont 10/18. Mais rééditer son œuvre, même partiellement, n’est que justice. Des romans qui malgré un petit air désuet n’ont pas pris une ride. Paradoxal ? Non.

Ceux qui n’ont pas connu ces endroits chauds que sont Pigalle, Barbès, La Goutte d’Or, n’ont pas connu Paris à la fin de la guerre, n’ont pas connu ces bouges avec les comptoirs en zinc, et la sciure sur le sol, ne peuvent pas se rendre compte de la force d’évocation des écrits d’Héléna. Si les mauvais garçons et les filles écument encore les trottoirs entre l’avenue de Clichy et Barbès, les lumières, les musiques, les devantures accrocheuses ne sont plus les mêmes et c’est le Paris d’aujourd’hui qui semble superficiel.

Les romans d’Héléna n’ont pas pris une ride car son écriture possède toujours cette force d’évocation, ce mélange acidulé de langue française et d’argot que l’on retrouve chez les grands anciens comme Francis Carco dans certains de ses romans. De même les histoires sont de tout temps. Cette mouise dans laquelle se débattent les acteurs des drames de la ville, cette déchéance dans laquelle ils sont aspirés comme dans des sables mouvants, cette misère qui s’accroche à leurs basques et avec laquelle ils s’habituent à vivre, tout cela existe encore.

Les demi-sels qui veulent se prendre pour des caïds ou qui sont jugés à tort comme tels, des victimes de la société, des autres, d’eux-mêmes ou du hasard qui complique toujours la vie.

Ce roman d’Héléna publié pour la première fois en 1952 retrouve une nouvelle jeunesse, et ce n’est que justice. Mais une fois de plus l’auteur, comme bien d’autres, ne jouira pas de ce regain d’intérêt porté à son œuvre car il est décédé en 1972. Restent ses compagnons de route, ses admirateurs, ses condisciples qui rendent hommage ici ou là à un romancier trop tôt disparu, dans l’indifférence générale et qui n’eut jamais de chance auprès des éditeurs ou alors trop tard.

Sans oublier qu’il fut spolié, réédité sous des noms d’emprunts pseudo-américains, ou obligé d’écrire à la va-vite chez des éditeurs plus ou moins véreux afin de gagner la pitance quotidienne. Et ceux qui aiment chiner dans les vide-greniers tenteront de retrouver ses romans parus dans la collection La Chouette sous le pseudonyme de Noël Vexin qui pour certains critiques sont des ouvrages mineurs, mais pour les nostalgiques des romans populaires des ouvrages dignes de figurer sur les étagères des bibliothèques populaires.

Réédition Collection Noir Rétro. Editions Plon. Parution septembre 2010. 220 pages.

Réédition Collection Noir Rétro. Editions Plon. Parution septembre 2010. 220 pages.

André HELENA : Le demi-sel. Les Compagnons du destin. Postface de Léo Malet. Collection Fanval Noir. Editions Fanval. Parution avril 1988. 192 pages.

ISBN : 9782869284074

 

 

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20 septembre 2020 7 20 /09 /septembre /2020 04:24

Hommage à Jimi Hendrix décédé le 18 septembre 1970.

Stéphane KOECHLIN : Blues pour Jimi Hendrix.

S’il existe un fan, gardien du temple de la mémoire de Jimi Hendrix, c’est bien Yazid.

Il lance des invitations, pour une soirée destinée à commémorer la disparition du guitariste légendaire, décédé le 18 septembre 1970. Il envoie des cartons à Noël Redding, Eric Burdon, Curtis Knight, Janis Joplin… Janis Joplin qui en apprenant le décès de Jimi, se jura de surveiller ses consommations de drogue et d’alcool, confiant à Mary Friedman, son amie et biographe : Je ne peux tout de même pas partir la même année que lui, vu qu’il est plus célèbre que moi. Elle décèdera le 4 octobre 1970 ! D’une overdose.

Né en 1965, Yazid est un petit gars de la banlieue parisienne et ses parents, originaires du Bénin, se sont séparés alors qu’il avait quinze ans. Il a touché du piano et autres bricoles, mais sans jamais vraiment s’y intéresser. Le déclic de sa passion pour Jimi Hendrix s’effectue en 1977, en regardant à la télévision Point chaud, une émission d’Albert Raisner, l’harmoniciste présentateur de l’émission culte Age tendre et tête de bois. L’annonce de Jimi Hendrix comme le plus grand guitariste du monde le laissa rêveur mais bien vite il fut conquis, et s’enticha de Jimi, se faisant offrir des disques, en parlant à ses amis, devenant peu à peu un inconditionnel. Une quête qu’il effectua comme s’il recherchait un assassin, la drogue.

A la suite d’un documentaire des Enfants du rock, en 1980, il se rend compte que l’entourage de Jimi est plus souvent accroché à l’argent qu’à la musique. Particulièrement Mike Jeffery, le manager escroc controversé de son idole, jusqu’à ce que le père, Al Hendrix, le chasse pour confier l’exploitation de l’héritage Hendrixien à l’avocat noir Leo Branton, lequel s’occupa aussi de Nat King Cole. Personnage sulfureux qui selon certaines personnes serait à l’origine de la mort par overdose de Jimi. Ce n’est pas pour autant que Yazid voue un culte particulier en collectionnant colifichets et autres bricoles témoins du fan obsessionnel, tout au moins au début.

Peu à peu l’âme de Jimi s’infiltre en lui. Il traine au New Morning, se met en relation avec d’autres fans dont Nona, une femme qui habite les Etats-Unis et avec laquelle il correspond longuement, et rêve de réaliser une soirée spéciale Jimi, un hommage gigantesque avec d’anciens musiciens et de nouveaux artistes dilettantes qui jouent du Hendrix pour le plaisir et par passion.

Il va concrétiser son rêve, organiser une soirée spéciale Jimi Hendrix à l’Olympia en septembre 1990, mythique scène parisienne sur laquelle son idole s’est produit par trois reprises. Son jour de gloire lorsqu’enfin il concrétise ce à quoi il aspire avec comme artistes Noel Redding, Eric Burdon, Randy California, Curtis Knight, et dans les coulisses Monika Dannemann, celle qui découvrit Jimi mort dans son lit et que beaucoup accusèrent de ne pas avoir alerté les urgences rapidement, ou même de l’avoir drogué, en lui faisant ingurgiter des somnifères. Bref de l’avoir laissé à son sort, des versions encouragées par sa rivale Kathy Etchingham, laquelle déclarait aimer Jimi mais ne se privait pas de le tromper lorsqu’il était absent et s’était mariée par ailleurs.

En narrant le parcours de Jimi Hendrix via celui plus sage de Yazid Manou, Stéphane Koechlin nous invite à pénétrer l’univers des adorateurs, des idolâtres même, du guitariste décédé à près de 28 ans, mort controversée, mais également à restituer aussi celui des musiciens qui ont gravité dans son sillage (et ses sillons).

Plus qu’une simple biographie, Blues pour Jimi Hendrix est un peu une poupée russe littéraire, colorée, pétillante, additionnée de nombreuses anecdotes et l’on entend presque les riffs de guitare que ceux qui ont assisté à un concert à l’Olympia le 18 octobre 1966 en première partie de Johnny Hallyday puis en vedette en 1967 s’en souviennent encore.

Et ceux qui comme moi n’ont pas eu le privilège de pouvoir s’acheter des places, Europe 1 était là pour suppléer et enregistrer les concerts, et l’émission Musicorama était fort prisée. J’aurais pu évoquer également les relations avec Eric Clapton, Chas Chandler (des Animals tout comme Eric Burdon), Mitch Mitchell, et combien d’autres qui apportèrent leurs pierres à son édifice musical, lui-même n’étant pas en reste de contributions.

J’aurais pu parler de son groupe le Jimi Hendrix Experience (qui ne vécu que quelques semaines) et d’Electric Ladyland, et de bien d’autres choses encore, mais je vous laisse le plaisir de découvrir ce superbe petit ouvrage signé par un connaisseur qui a baigné dans la musique dès sa plus tendre enfance, son père Philippe étant le cofondateur Rock & Folk

Stéphane KOECHLIN : Blues pour Jimi Hendrix. Collection Castor Music. Editions du Castor Astral. Parution avril 2010. 200 pages.

ISBN : 9782859208202.

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17 septembre 2020 4 17 /09 /septembre /2020 04:10

Quand on vous dit de ne pas laisser traîner vos déchets un peu partout !

Jean FAILLER : Brume sous le Grand pont.

Deux gamins découvrent un cadavre dans un square désert situé près du pont de Saint Nazaire, et il n’en faut pas plus pour que la grande maison, la Chancellerie, demande à Marie Lester de se rendre sur place afin d’enquêter sur ce meurtre apparemment banal.

Sauf que le cadavre lui n’est pas banal. L’ex juge Ménaudoux, le défunt, n’avait bonne presse aussi bien dans ses anciennes relations professionnelles que dans son voisinage. Un homme renfermé, qui avait côtoyé l’extrême-gauche et dont les jugements allaient à l’encontre de celle de la justice. Sa femme, acariâtre, n’est guère appréciée non plus. Tous les jours, à la même heure, il sortait son chien, effectuant le même parcours immuable. Le commissaire local et ses adjoints ont rapidement conclu à un crime de rôdeur. Quant au petit chien il gisait mort dans une mare, comme s’il avait reçu un coup de tatane mortel.

Pour Mary Lester, qui a été détachée de son commissariat de Quimper, tout est à reprendre de zéro. Son arrivée dans la cité portuaire, dans laquelle flotte encore l’ombre de Tintin, est entachée de quelques incidents. D’abord elle est accueillie par un gardien de la paix rébarbatif, puis comme elle est en retard, le commissaire est parti déjeuner. Tant pis, après son repas, elle retourne à son lieu d’affectation provisoire, et se fait remonter les bretelles car elle est élastique sur les horaires.

Seulement la belle et jeune officier de police n’est pas une personne à se laisser monter sur les pieds, et elle remet tout ce petit monde en place, sans s’énerver, ce qui énerve encore plus ses interlocuteurs. Elle prend une chambre puis se rend sur les lieux du drame à la recherche d’un indice omis par ses collègues. Bingo, elle trouve près d’un feu de camp un bout de papier. La notice d’emploi d’une pellicule photographique peu courante. Un premier indice important qu’elle recueille.

Elle revient sur place le lendemain matin, armée d’un appareil photo et d’une pellicule idoine en noir et blanc, et commence à prendre quelques clichés. Le manège de deux hommes autour d’une camionnette et d’une femme l’intriguent mais d’autre faits également. Elle s’inscrit dans le club-photo local afin de développer sa pellicule, se liant avec le responsable de l’association ainsi qu’avec d’autres membres de ce club. L’un des adjoints du commissaire reconnait sur l’une des photos un ancien rugbyman, une gloire qui était fort connue pour ses coups de poings, sur et en dehors des terrains et qui, en véritable brute, a eu maille à partir avec la justice. Devenu petit truand, il était arrivé à Saint-Nazaire incognito et totalement désargenté.

Or il circule des billets de deux cents francs reconstitués, laissant à penser qu’une moitié des billets avaient été donnés comme acompte, puis l’autre moitié lors de la réalisation du petit travail demandé.

 

Peu à peu Mary Lester remonte le fil de cette enquête linéaire, ce qui ne veut pas dire que les péripéties sont inexistantes, au contraire, pour arriver à une solution simple et subtile dans sa résolution, malgré les sarcasmes du commissaire local et de ses adjoints. Au début ils se gaussent d’elle mais bientôt ils sont obligés de rabattre leur caquet.

 

Si la trame de cette énigme n’est pas trop tarabiscotée, ce sont surtout l’humour qui se dégage principalement dans les dialogues, et les réflexions pleines de bon sens émises principalement par l’auteur qui priment et en donnent le sel.

Une lecture agréable qui ne s’embarrasse pas trop de digressions philosophiques de comptoir mais dont le contenu met le doigt parfois sur les travers de la société. Et Mary Lester possède une répartie que bon nombre de personnes aimeraient détenir face à leurs patrons, les remettant en place lors de leurs délires sans pour autant user de propos mal sonnants. L’art de la dialectique et de la rhétorique, le tout asséné avec un sourire plein de candeur mais efficace pour démonter les interlocuteurs.

 

De cette plate-forme elle avait une vue plongeante sur feu le magasin. Comme dans le bureau, il restait des ferrailles tordues, les squelettes métalliques de ces présentoirs appelés gondoles non par souci d’introduire un vocabulaire poétique dans cet univers de rentabilité à tout prix, mais, qui sait, pour signifier ironiquement au chaland qu’on le menait en bateau à grand renfort de promotions bidons et de faux prix coutants.

Jean FAILLER : Brume sous le Grand pont. Mary Lester 10. Editions du Palémon. Parution 2e trimestre 1997. 270 pages.

ISBN : 9782907572057

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15 septembre 2020 2 15 /09 /septembre /2020 03:55

Alexandrie
Alexandra
Alexandrie où l'amour danse au fond des draps…

Francis CARCO : Palace Egypte.

Labellisé sobrement Roman, cet ouvrage est surtout un récit de voyage, une histoire d’amour et une autobiographie romancée.

Au moment où cette histoire débute, le narrateur, qui n’est autre que Francis Carco, est installé dans un vieil hôtel opulent et bourgeois du Caire. Son ami Poloche, guide dans le pays depuis dix-huit ans, l’informe qu’il a obtenu des prix au Sémiramis, un établissement plus sélect, et surtout la chambre qu’il a réservée est avec vue sur le Nil.

En investissant sa nouvelle chambre, l’auteur s’aperçoit que son balcon est mitoyen avec la chambre voisine. Une ravissante jeune femme blonde l’occupe et une autre femme qui se tient dans la rue l’appelle par le prénom de Naïla. Un bien joli prénom, Poloche précisant que Naïla veut dire Soupirante en arabe. N’écoutant que son courage, Francis s’avance et lorgne dans la pièce où évolue cette charmante personne. Elle ne s’offusque pas de cette curiosité déplacée, au contraire, cela l’amuse de même ainsi que la brune qui l’a rejointe.

Naïla partage son lit avec Freddy, mais, et cela Francis l’entend de sa chambre, les deux amants se disputent souvent, se réconciliant après, en personnes bien élevées. Francis est attiré par cette femme, et il fait la connaissance de Freddy, un individu qu’il n’apprécie pas plus que cela. Grâce à Naïla, le narrateur fera connaissance également de Yasmine, cette amie brune qui hélait de la rue sa copine. Deux inséparables et Francis se demande même si, des fois, afin de changer d’herbage, les deux amies ne batifoleraient pas du côté de Lesbos.

Yasmine est mariée et elle change souvent d’amant. Elle n’en est plus à compter ses aventures. Mais comme le déclare Freddy, On ne lui avait jamais connu deux amants à la fois. Francis est attiré par Naïla mais bientôt c’est Yasmine qui la supplante dans son cœur. Il est invité chez l’une ou chez l’autre, il visite la ville et surtout les quartiers chauds, en compagnie la plupart du temps de Naïla, puis il se rend à Louxor puis à Alexandrie, retrouvant Yasmine de plus en plus souvent.

 

L’auteur nous fait partager ses aventures amoureuses platoniques avec Naïla et Yasmine, ses élans, ses retenues, mais également jette un œil critique sur la société égyptienne et la condition féminine. Il évolue dans les milieux huppés, et reçoit les confidences de Naïla et Yasmine. Les femmes égyptiennes étouffent, et à Yasmine qui déclare à une plantureuse et jolie créature : Tu as de la chance, ton mari te laisse partir, celle-ci lui rétorque :

Eh bien rends-toi malade. Ce n’est pas sorcier. Veux-tu l’adresse de mon docteur ? il te donnera des gouttes ou une potion…

Naïla, qui les écoutait, me dit :

Entendez-les. Toutes ne pensent qu’à s’enfuir. Chaque année, vers la fin de l’hiver, elles s’arrangent avec des médecins qui prescrivent une cure à Vittel, Vichy ou Brides. C’est une comédie !

Mais pourquoi ce besoin de départ, Naïla ?

Pour être libres ! Vous ne savez pas ce que c’est… Ici aucune indépendance. Tout se sait immédiatement. A moins d’avoir le toupet de la princesse qui a loué, dans la maison de son coiffeur, une garçonnière…

 

Cet état de fait, depuis ne s’est pas amélioré, au contraire ! Mais restons dans le sujet, ce livre, qui traite également de la drogue. Ainsi Naïla, qui se promène en compagnie de Yasmine, déclare à Francis lors de la visite d’un quartier :

On passait autrefois de la drogue par ici.

Quelle drogue ?

Haschich, opium, héroïne, coco.

Et maintenant ?

Oh ! on en a toujours.

Naïla, objecta timidement Yasmine, qu’en sais-tu ?

Il suffit de lire les rapports de Russel Pacha. Ils sont édifiants. Ainsi les trafiquants plaçaient les tablettes de haschich sous les touffes de poils de chameaux, et ils fixaient ces touffes à l’aide d’un peu de glu, entre la bosse et le flanc de la bête.

Un peu plus loin, Naïla dévoile de quelle façon les mercantis débarquent leur drogue :

Ils recourent à diverses méthodes. Certains utilisent des suppositoires que se mettent des gamins, à bord, avant de descendre. D’autres fraudeurs se servaient des jarretelles que portaient des jeunes filles complices.

 

Un livre intéressant à plus d’un titre, loin de l’univers argotique et montmartrois de Jésus la Caille, le premier roman de Francis Carco publié en 1914, mais dans lequel on retrouve certains thèmes, comme la prostitution. Et l’on ne peut s’empêcher de penser à Henry de Monfreid et à Joseph Kessel dans certains passages du livre.

Francis CARCO : Palace Egypte. Editions Albin Michel. Parution juillet 1933. 252 pages.

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13 septembre 2020 7 13 /09 /septembre /2020 04:08

Faty, moins offensant que Le Gros ?

Frédéric FAJARDIE : Gentil, Faty !

La première fois que j’ai lu un roman de Fajardie, c’était en 1987. Pourquoi avais-je évité cet auteur, jusqu’alors ? Parce que les critiques négatives concernant l’auteur et sa production, et les quelques pages lues au détour d’un étalage chez les libraires ne m’avaient guère incité à mieux me pencher sur sa production.

Le déclic s’est effectué à la découverte d’Une charrette pleine d’étoiles paru chez Payot. L’occasion m’étant donnée de découvrir cette réédition d’un roman paru en 1981 dans la défunte collection Fayard Noir, j’ai abordé ce roman sans préjugé, sans parti pris, sans opinion préconçue, en ayant fait abstraction de tout ce que j’avais pu entendre ou lire auparavant concernant la production littéraire de Fajardie.

Et je dois avouer que Gentil, Faty ! m’a fait découvrir un univers fajardien glauque, triste, plein de détresse, et en même temps porteur d’espoir. Les personnages sont des marginaux malgré une certaine banalité environnante et enveloppante comme une gangue.

Prenons l’exemple du commissaire Stievet et de ses adjoints Kasbarian et Teissère. Stievet est intérieurement rongé par le Mal, pourtant l’enquête qui lui est confiée, qu’il dirige, il veut la mener au bout, malgré le peu de temps qui lui reste à vivre. Kasbarian, un inspecteur d’origine arménienne, et Teissère, inspecteur lui aussi qui ne manque pas d’asticoter son collègue pour des raisons personnelle mais obscures. Et Amar, l’Algérien, la cinquantaine triste et désabusée, témoin, désire garder l’incognito. Enfin, Faty, le monstre, le tueur, dont la vie a basculé le jour où il a perdu sa mère.

En phrases courtes, concises, rapides, Fajardie entraîne son lecteur sans lui donner le temps de respirer, de reprendre son souffle, et plus que l’histoire de Faty, le tueur de jeunes femmes, ce sont les à-côtés, les personnages qui comptent à ses yeux.

Une histoire, oui, mais peut-être aussi une façon de dire son amour de l’humanité, de l’homme en général, surtout celui du déstabilisé, du marginal, du déséquilibré, de l’immigré. Toute une aura de tendresse baigne ce roman dans une subtilité qui dénote une profonde pudeur. Comme un halo de sensibilité nimbant une morbidité agressive.

Les couvertures de Jean-Claude Claeys sont à l’origine de la renommée et l’engouement pour cette collection dont les titres sont recherchés justement pour leurs illustrations.

Première édition Fayard Noir en 1981.

Première édition Fayard Noir en 1981.

Frédéric FAJARDIE : Gentil, Faty ! Collection Le Miroir Obscur N°150. Edition Néo. Couverture de Jean-Claude Claeys. Parution août 1988. 192 pages.

ISBN : 9782730405072

Première édition Fayard Noir en 1981.

Réédition Babel Noir N°21. Editions Actes Sud. Juin 2008.

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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