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13 septembre 2013 5 13 /09 /septembre /2013 08:00

Biche, oh ma biche, lorsque tu soulignes...

 

biche.jpg


La route qui conduit du village de Saint-Sauve à la station thermale de La Bourboule est en descente et tout en virages. Denis, le coiffeur, se rend à son travail juché sur un Solex, lorsque deux gamins se jettent sous ses roues. Plus de peur que de mal, mais la fuite des enfants sur la voie était provoquée par leur découverte. Dans une grotte gît un cadavre. Déjà Denis image les belles histoires qu'il va pouvoir offrir dans le cornet auditif de ses clientes. Car cet individu n'est pas mort de sa belle mort, s'il en existe une, mais a été abattu par une arme à feu.

A Paris, le jeune inspecteur Georges Barberi est convoqué au siège de la Police judiciaire. Le commissaire Havet et le sous-directeur lui ont demandé de quitter Nîmes, ville où il se plait, pour lui confier une mission. Son père décédé était officier de policier et fort apprécié de ses supérieurs. Havet pense pouvoir compter sur le jeune homme afin de mener à bien l'enquête sur le meurtre de La Bourboule dont la victime n'est autre qu'un policier de sa brigade qui lui-même pensait résoudre le mystère d'un hold-up perpétré à Saint Denis, en proche banlieue parisienne, quelques mois auparavant.

Un hold-up qui s'est terminé tragiquement laissant quelques cadavres sur le bitume, des truands et des policiers. Le responsable de l'opération, un ancien employé de banque, était à l'origine du braquage du fourgon et il avait pu s'échapper. Il avait été retrouvé quelques jours plus tard, mort chez lui, ayant perdu tout son sang, ayant été touché dans l'affrontement entre ses complices et les forces de l'ordre. L'argent avait disparu et la jeune femme qui vivait avec le malfaiteur aussi.

Le mort découvert dans la grotte était donc un policier qui passait trois semaines de convalescence dans la station de cure thermale et il était tombé par hasard sur celle qui avait été surnommée La Biche en fouillant, l'indélicat personnage, son sac à main. Inadmissible de la part d'un policier ! Il avait envoyé aussitôt une missive à son chef précisant qu'il lui ferait parvenir son rapport ultérieurement. Rapport jamais écrit, envoyé et pour cause.

La première tâche pour Barberi est d'avoir une discussion avec Jo le Tatoué l'un des rares truands arrêté lors du vol et indic à ses heures, lequel lui apporte quelques renseignements. Ensuite destination La Bourboule muni d'une liste des noms de jeunes femmes susceptibles de figurer parmi les suspectes. C'est l'inspecteur Bonnard, qui le rejoindra plus tard en mission officielle tandis que Barberi devra se comporter en touriste, qui a établi cette liste en compulsant les fiches recueillies auprès des hôtels et des pensions de famille. Il a éliminé celles qui sont arrivées après le meurtre de leur collègue, celles qui y résidaient lors de l'attaque, celles enfin qui ont quitté La Bourboule avant la mort du policier. Restent donc cinq jeunes femmes que Barberi va devoir approcher.

Arrivé sur place, le jeune inspecteur n'est pas long à les situer. Il s'agit de Juliette Cabut, sans profession, résidant dans la station thermale pour des raisons de santé; Régine Royer, téléphoniste, auxiliaire de la Poste qui est venue pour le travail tout comme les trois autres; Tonia Jongault, barmaid; Nathalie Seguin, manucure dans le salon de coiffure tenu par Denis, et Florence Charron, infirmière. Elles sont logées soit à l'hôtel, dans une pension de famille ou sur leur lieu de travail. Barberi, ne tarde pas à les rencontrer dans le bar Le Refuge qui semble être le point d'ancrage de ces jeunes femmes.

Mais il semble bien que les événements se précipitent car l'une d'elle est assassinée peu après son arrivée. Puis une autre. Cela a l'avantage de réduire considérablement le champ des investigations.

 

Prenez soin d'ouvrir une fenêtre avant de vous plonger dans ce roman, car tous les protagonistes fument à qui mieux-mieux, un mégot servant de briquet pour en allumer une autre cigarette. Et l'alcool est lui aussi au rendez-vous comme dans les bons vieux polars des années 50 dont ce roman fait partie. Mais ce n'est pas l'inspecteur Barberi qui avale cognac sur cognac et whisky. Ce sont les jeunes femmes. Lui se contente de verres d'eau ou de jus de fruits. Barberi est un peu imbu de son statut de jeune inspecteur et il regarde ses collègues évoluer avec suffisance. Il est vrai qu'il est naturellement doué pour étudier, analyser mais il manque toutefois d'un peu d'expérience.

Au départ on se croirait un peu dans un roman de Simenon, puis l'intrigue se tourne vers Agatha Christie et les Whodunit, cette réunion de cinq femmes soupçonnées de plusieurs crimes, pour enfin, alors qu'on s'attend à un dénouement avec convocation des présumées coupables, aboutir à un épilogue tranchant, abrupt. Comme si Geneviève Manceron avait été obligée de clore son histoire rapidement, pagination oblige. Mais il reste l'avantage de ne pas se perdre en dialogues verbeux, déductions oiseuses et retournements de situations qui n'auraient rien apporté de plus dans le bon enchaînement du récit et sa conclusion.

Ce roman s'inscrit dans son époque mais se lit ou se relit avec plaisir. Et ceux qui ont eu l'occasion de visiter ou d'effectuer un séjour à La Bourboule ne seront pas trop dépaysés, seul l'hôtel de Charlannes étant devenu une ruine au début des années soixante-dix. Un petit air rétro qui peut s'apprécier comme un film en noir et blanc.


Lire également : Geneviève Manceron, un portrait.


Geneviève MANCERON : La Biche. Editions Ditis, collection La Chouette. N° 36 (1956). Réédition J'ai Lu Policier N° 10 (1964).

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commentaires

Z
je suis déjà dans un polar parlant des années passées avec le vocabulaire idoine, ça fait un drôle d'effet
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O
<br /> <br /> Oui et cela permet de mieux appréhender une époque révolue comme je l'ai écrit. Les jeunes découvrent ce que nous (enfin moi) vécu dans notre (ma) jeunesse...<br /> <br /> <br /> Amitiés Zazy<br /> <br /> <br /> <br />
J
C'est un signe des temps au cinéma ou en littérature plus personne ne fume dans les cafés. Il y a seulement 5 ans tout était différent...
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O
<br /> <br /> Bonjour<br /> <br /> <br /> Je fais partie de l'ancienne génération... Il parait qu'aujourd'hui nous sommes plus libres qu'avant. Il parait... L'intérêt de ces redécouvertes est pour la jeune génération de mieux appréhender<br /> une époque révolue. Et dire que l'on voulait supprimer la pipe de Tati. Et que serait le commissaire MAigret sans sa pipe? Cigarettes, whisky et p'tites pépées ne serait plus diffusé sur les<br /> ondes radio aujourd'hui...<br /> <br /> <br /> Amicalement<br /> <br /> <br /> <br />
A
Ah ben voilà, maintenant j'ai la chanson dans la tête. Mais bon, il y a pire.
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O
<br /> <br /> c'est gentillet même...<br /> <br /> <br /> Bon week-end<br /> <br /> <br /> <br />

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