En 1988 j'ai eu le privilège de pouvoir correspondre avec Gilles Manceron, le neveu de Geneviève Manceron, journaliste, romancière et collaboratrice de Frédéric Ditis pour les collections Détective-club et La Chouette.
Je livre ici la réponse qu'il m'avait envoyée le 9 mai 1988.
Monsieur,
Je vais essayer de répondre à vos questions à l'aide des éléments que j'ai pu rassembler. Ma tante Geneviève Manceron, qui vit maintenant dans une maison de retraite à Groslay, dans le Val d'Oise, ne garde plus de souvenirs précis et mes réponses vous paraîtront certaines lacunaires sur son activité de journaliste et d'écrivain.
Geneviève Manceron est née en effet à Cherbourg, le 7 avril 1906. Mais elle n'est pas Normande de souche. Son père, Henry Manceron était officier de Marine et avait été nommé en février 1906 à la Majorité Générale du port de Cherbourg. Sa mère, grecque de Turquie, était venue en France pour épouser ce jeune officier de Marine. Ils s'étaient installés à leur arrivée à Cherbourg, au 24, rue Victor Hugo, dans une maison meublée de 7 pièces où elle est née - indique un carnet tenu par sa mère - Un samedi veille des Rameaux. Sa famille paternelle comprenant deux autres générations d'officiers de Marine était quant à elle fixée à Lorient.
Geneviève Manceron a bien peu vécu à Cherbourg : le 15 février 1907, son père a été nommé à Brest où elle a résidé jusqu'à septembre 1908. Ensuite, son père a été affecté au commandement d'un torpilleur de la flottille de la Manche qui relâchait à Dunkerque et Cherbourg... mais la famille s'est installée près de Dunkerque, où elle est restée jusqu'en 1910, puis, en raison d'une nouvelle nomination, s'est établie près de Toulon jusqu'à la fin de la guerre de 14. En 1920 la famille est allée à Berlin - Henry Manceron faisant partie de la Commission d'armistice - puis est venue vivre à Paris, Geneviève faisant ses études à Sainte-Croix de Neuilly, puis commençant une licence de lettres à la Sorbonne.
Elle entre au journal Optima en 1928, puis travaille chez Hachette de janvier 1930 à janvier 1931. Elle fait ensuite un séjour comme gouvernante en Tunisie (octobre 193 à août 1932) puis passe six semaines à Deauville. En 1933 elle reprend des études de littérature comparée à la Sorbonne puis fait un séjour en Angleterre à nouveau comme gouvernante. En octobre 1934, elle entre comme rédactrice au journal l'Ordre puis collabore à Marianne.
En mai 1939, Geneviève Manceron entre comme professeur au château de la Guette, près de La Bourboule, dans un internat accueillant des enfants juifs austro-allemands recueillis par la Baronne de Rothschild. Pendant toute la durée de la guerre elle s'occupe de ces enfants qu'elle s'efforce de répartir dans des familles (certains survivront d'autres seront déportés, elle se souvient de l'un d'entre eux, revenu de déportation qu'elle a vu mourir à l'hôpital à Paris en lui disant Geneviève pas de boniments). Elle participe également à la Résistance.
A la Libération, elle entre au journal Ce soir où elle en particulier avec Louis Aragon; elle est proche du Parti Communiste mais n'y adhère pas. Elle y assure différents reportages, en particulier des comptes-rendus judiciaires et couvre en particulier le procès de Charles Mauras. Elle travaille ensuite au journal Paris-Presse où elle dirige le service politique étrangère, puis, au début des années 50, elle quitte le journalisme pour travailler dans l'édition. Elle devient lectrice au Détective-club puis collabore avec Frédéric Ditis et écrit les romans policiers et d'espionnage que l'on sait. Comme journaliste, elle se passionnait notamment pour les faits divers et les affaires criminelles (sa bibliothèque contenait un grand nombre d'ouvrages de criminologie); il faut peut-être voir là le lien chez elle entre plus jeune que Geneviève Manceron et Michel Averlant - restée elle-même célibataire et sans enfants - elle a noué avec lui à la fin des années 50 une forte relation d'amitié, l'aidant à apprendre les métiers de l'édition et l'incitant à écrire lui-même.
Je puis vous confirmer votre information sur le livre signé Claude Chevalon. Claude Manceron est né à Paris le 5 février 1923.
... j'ajoute qu'elle était la filleule de Victor Segalen, ami de son père Henry Manceron: la relation de Segalen avec Henry Manceron est le sujet du livre Trahison fidèle que j'ai fait paraître aux éditions du Seuil en 1985, il comprend, outre les lettres des deux amis, une lettre de Segalen à Geneviève Manceron.
Croyez...
Certains spécialistes de la littérature populaire avancent comme pseudonyme possible de Geneviève Manceron celui de John Baynes. Gilles Manceron n'a ni infirmé ni confirmé cette assertion. La consultation auprès de la BNF n'a rien donné.
Geneviève Manceron a travaillé jusqu'à sa retraite comme directrice littéraire dans le sein des éditions J'ai Lu. Elle est décédée à Groslay, dans le Val d'Oise, le 17 juillet 1994.
Liste des romans sous le nom de Geneviève Manceron :
Collection La Chouette :
La Biche.N° 36 (1956). Réédité chez J'ai Lu policier N° 10 (1964).
Pauvres petites crevettes. N° 54 (1957). Réédité chez J'ai Lu policier N° 44.
La Puce à l'oreille.N° 66 (1957).
Anguille sous roche. N°96 (1958).
Les Brebis tonduesN° 134 (1959). Réédité chez J'ai Lu policier N° 26
Liste des romans sous le nom de Bruno Bax :
Collection La Chouette:
H et le dossier 136. N° 2 (1955)
H et l'opération corrector. N°6 (1955)
H et l'espionne ingénue. N° 10 (1955)
H et la bouée baladeuse. N° 16 (1956)
H et le sous-marin volé. N° 20 (1956)
H et la petite Irlandaise. N° 24 (1956)
H et l'opération Manchot. N° 32 (1956)
H contre le réseau Baleine. N°46 ( 1957)
H et le Hollandais volant. N° 59 (1957)
H et l'opération Fado. N° 77 ( 1957)
H et la dangereuse Africaine. N° 100 (1958)
H et l'opération mer libre. N° 114 (1959)
H et le dossier rouge. N° 123 (1959)
H et l'accusée de Varsovie. N° 148 (1959)
Collection Jean Bruce Espionnage. Presses de la Cité
Un coup de H. N° 27 ( 1959)
Aurore mortelle. N° 42 (1959)
Office de mort. N° 54 (1959
La bête fauve. N° 65 (1959)