Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
19 décembre 2016 1 19 /12 /décembre /2016 13:58

Il ne s'agit pas du regard du patron !

Hugo BUAN : L’œil du singe.

Célèbre paléoanthropologue ayant découvert l’Homo Octavius, un de nos ancêtres néanderthaliens, Maximilien Lachamp en effectuant une randonnée solitaire à vélo en forêt de Rennes est tombé sur un os. Un caillou en réalité mais le résultat est le même.

Il se réveille trois jours plus tard dans une clinique rennaise, atteint d’une amnésie passagère. Certains mots le font frémir mais il n’arrive pas à comprendre pourquoi. Peu à peu la mémoire lui revient et il aurait bien aimé ne pas se souvenir ce qui lui était parvenu. D’autant qu’il n’apprécie guère le petit jeu de questions auquel se livre son neurologue. Il décide de raconter au commissaire Workan l’histoire invraisemblable qui lui est survenue.

Pourquoi Workan et pas un autre ? Tout simplement parce que l’un de ses amis, surnommé la Gélule, pharmacien de son état, joue dans la même équipe de rugby que le commissaire. Ce qu’il pense être une référence, mais il ne connaît pas le bonhomme. Il narre donc cette invraisemblable histoire à son interlocuteur. Alors qu’il pédalait sur son VTT afin de se ressourcer et évacuer les miasmes de ses recherches au CNRS, il a été abordé par deux hommes cagoulés qui l’ont obligé à creuser une tombe et enfouir un cadavre. Sur le chemin du retour, perdu dans ses pensées et traumatisé par cette rencontre, il butte et se retrouve à terre dans le coma. Sa femme inquiète de ne pas le revoir a fait appel à la gendarmerie et depuis il se demande s’il a rêvé, cauchemardé plutôt, ou non. Sur place, il est invité à pratiquer l’opération inverse, mais au fond du trou, rien. Le néant.

Seulement son histoire ne s’arrête pas là. La mésaventure se reproduit une seconde fois et là sous les yeux médusés du commissaire, et des siens évidemment, un emballage plastique git au fond du trou enrobant un cadavre. Mais pas n’importe quel cadavre, celui d’un cochon coupé par moitié.

Une autre affaire enquiquine l’existence de Workan et de ses subordonnés : le capitaine Lerouyer, les agents Roberto, Cindy Vitarelli et Leila Mahir. Et ce n’est pas parce qu’il couche parfois avec Leila qu’il oublie ses prérogatives de supérieur hiérarchique.

En cette fin de mois de juin, alors que la température est caniculaire, est-il normal de retrouver dans un placard frigorifique de la morgue un cadavre non recensé ? Et l’on ne peut même pas dire que ce cadavre dénudé est à poil puisqu’il a été entièrement rasé. Et comme il a été congelé, il est difficile d’appréhender avec exactitude sa date de décès. Seule la cause de la mort est déterminée. L’homme a été assassiné à l’aide d’un os de mammouth porté avec violence sur son crâne. Précision, il s’agissait d’un os prélevé sur un jeune mammouth, sinon, la tête aurait été entièrement pulvérisée.

 

Le commissaire Workan est quelqu’un d’acrimonieux, vindicatif, agressif, soupe-au-lait, et tout autre qualificatif que vous pouvez choisir dans la liste ci-jointe : acerbe, hargneux, rogue, belliqueux, atrabilaire et j’en oublie sûrement.

Il se conduit de façon désagréable tout autant envers ses supérieurs et la juge d’instruction, qu’avec ses subordonnés (sauf en de rares occasions dans lesquelles l’appel de la chair lui fait perdre ses défenses naturelles) et les témoins et supposés suspects.

Parfois il use même de la force physique pour appuyer ses propos et ses ressentiments. Son caractère est comme ça et de toute façon, ayant un lien profond avec le général de Gaulle, il se sent à l’abri de toutes représailles provenant des instances hiérarchiques. D’où lui vient ce caractère de cochon, le lecteur l’apprend dans cet épisode qui, tout comme le commissaire, est légèrement déjanté. Normal, qui se ressemble s’assemble, c’est bien connu.

Hugo Buan nous narre ce quatrième épisode des aventures, des enquêtes de Workan, avec verve, humour, nous dévoilant un peu plus les différentes facettes psychiques de son héros et son passé. Il nous emmène aussi dans l’univers feutré mais pas toujours aimable des scientifiques, univers qui ressemble à la guerre des anciens et des modernes sur fond de jalousie.

Un roman à conseiller lors de déprime passagère, ou simplement pour passer un bon moment de lecture.

Tuer ! Toujours tuer ! Ça lasse à la fin…

Première édition : Pascal Galodé éditeurs. Janvier 2011.

Première édition : Pascal Galodé éditeurs. Janvier 2011.

Hugo BUAN : L’œil du singe. Collection une enquête du commissaire Workan. N°4. Editions du Palémon. Parution 6 novembre 2015. 336 pages. 9,00€.

Partager cet article
Repost0
16 décembre 2016 5 16 /12 /décembre /2016 08:52

C'est le plus grand des voleurs
Oui mais c'est un gentleman

 

Philippe VALCQ : Le diamant jaune.

Après avoir été injustement accusé du meurtre d'un Boer six ans auparavant, Rémi d'Andrésy est de retour en France.

Il a quitté le Transvaal, recueillant le dernier souffle de Jacob Joubert, lequel détenait un magnifique diamant jaune, une rareté dont s'est emparé Ernst van Straaten, un lointain cousin du Boer.

En ce 21 septembre 1906, Rémi d'Andrésy arrive à Etaples, après avoir bourlingué durant dix ans, d'abord comme militaire puis ensuite en Egypte aidant des archéologues sur le site de Thèbes. De bonnes et mauvaises surprises l'attendent lorsqu'il arrive à la ville nouvelle de Paris-Plage.

Il retrouve Hortense, la femme de Jacob Joubert, et Anne, sa fille, qui étaient en Europe lors du drame. Elles vivent dans une villa chez Herlof von Straaten, le père d'Ernst. Celui-ci est absent pour quelques mois, en voyage d'affaire en Prusse. Ce pourrait être la bonne nouvelle. Quant à la mauvaise, c'est d'apprendre que ses parents adoptifs sont décédés. Le père guillotiné, accusé d'avoir tué une jeune femme, quoiqu'il s'en défendit. La mère est morte de chagrin quelques mois plus tard.

Grâce à la voisine, qui n'a pas vécu ces événements mais les a appris lors de son installation, il peut entrer dans ce qui est devenu son chez lui. Il se présente comme un parent éloigné, ayant changé de nom lors de sa cavale. Désormais il répond au patronyme d'Armand Lamier. C'est ainsi qu'il est engagé comme précepteur d'Anne afin de prouver l'innocence de son père nourricier.

Mais il apprend également qu'il possède un frère jumeau qui a été élevé comme lui par une nourrice, mais dans un autre village de leur Normandie natale. Il se rend chez le notaire, obligé de fournir sa véritable identité, afin de régler quelques problèmes concernant son héritage. Ce qui va l'aider à vivre quelque temps, étant complètement démuni et sa place de précepteur compromise.

En effet un individu s'était engouffré chez lui, narrant à Armand/Rémi ses origines, où du moins ce qu'il en savait, lui apportant d'autres précisions sur des dénommés Liebman, fabricants de canons, mais il ne peut poursuivre étant abattu par un coup de feu tiré de la fenêtre. La bonne de sa voisine, la jeune et belle Clarisse qui ne lui veut que du bien, a aperçu deux hommes. L'un dégingandé et attifé de vêtements clownesques, l'autre vieux joueur de limonaire. Notre héros décide de porter le corps sur l'estran où il sera découvert le lendemain.

Le commissaire Brochard, qui traque depuis des mois un monte-en-l'air dont les exploits défraient la chronique, s'introduisant chez de riches bourgeois afin de s'emparer de leurs bijoux, le commissaire Brochard ayant appris que ce malfaiteur aurait été vu à Etaples et sa région, est sur place et il hérite de l'enquête, le policier local étant absent pour des raisons familiales ou autres.

Il arrête Armand/Rémi, à cause de sa ressemblance avec son cambrioleur mais en coulisse d'autres personnages veillent. Et s'enchaînent alors une succession de péripéties toutes plus épiques les une que les autres.

Armand/Rémi s'évade du train dans lequel il est emmené à Paris en compagnie de Brochard et ses deux adjoints, grâce à Anne qui veillait. Mais Longues jambes, le dégingandé, et le joueur d'orge de Barbarie étaient eux aussi dans le train.

 

Philippe Valcq, tout comme le faisaient les feuilletonistes du XIXe et début XXe siècles, enchaine les mystères, les meurtres, les retournements de situation, les drames, les situations cocasses, les personnages ambigus, malsains, ou au contraire qui essaient de dénouer les avatars subis avec brio, une pointe d'espionnage et les idylles amoureuses, l'homme fiancé deux fois, la première étant à but lucratif, les courses poursuites, le double-jeu, les traitrises.

Il emprunte à ce que l'on pourrait prendre pour des clichés, le rarissime diamant disparu, les frères jumeaux ignorant tout ou presque de leurs origines, car leur mère, rejetée par un père n'acceptant pas la grossesse de sa fille, est décédée sans divulguer le nom du géniteur, les imbrications de secrets et d'histoires de famille, les quiproquos résultant de cette situation, et pourtant, cela semble neuf et inédit.

Si les feuilletonistes, étant payés à la ligne, écrivaient parfois plus vite que leur stylo, Philippe Valcq soigne sa narration et ses dialogues tout en laissant une part d'ombre et de suspense dans son intrigue légèrement complexe et parfois elliptique.

Des personnages atypiques tels que le commissaire Brochard, un policier imbu de lui-même, pontifiant, obtus, dont les déductions hâtives sont toujours à côté de la réalité, accusant sans preuve, ne voulant pas reconnaître qu'il puisse se tromper. Ses adjoints, répliques antérieures des Dupont/Dupont. Longues jambes et son compère le Limoneux, la cantatrice Hélène de Bouliquet, ancienne maîtresse de Raoul d'Andrésy, le poète Albéric de Gervisy, et la liste n'est pas exhaustive.

D'autres, ayant réellement existés ceux-là, font leur apparition au détour des pages, Louis Blériot par exemple qui procède à des essais sur son aéroplane, ou encore le préfet Lépine.

Paris-Plage, créé en 1882, sur la pointe du Touquet, par un Français et un Anglais, connu dès ses débuts une vogue touristique marquée par la construction de nombreuses villas huppées, habitées en saison par des Britanniques, des Belges et Hollandais, et naturellement des gens du cru. Mais l'auteur entraîne le lecteur également à Paris et en Allemagne, dans un rythme effréné, pour une histoire qui comporte des énigmes qui s'entremêlent.

Naturellement les lecteurs que la littérature populaire n'effraie pas, heureusement il en existe de moins en moins, connaissent l'identité de Raoul d'Andrésy, mais je n'en dis pas plus, laissant le plaisir de la découverte aux autres. Et certains épisodes font également penser à Gaston Leroux, surtout avec son roman Rouletabille chez Krupp. Mais les références à Rocambole d'Alexis Ponson du Terrail sont également présentes.

 

Et l'on s'aperçoit que le réchauffement climatique n'est pas un vain mot.

Le 11 octobre 1906, Armand déposa son bouquet de jonquilles sur le marbre et, un genou en terre, se recueillit.

De nos jours les jonquilles fleurissent de février à mai. Quant on vous dit que le temps est détraqué !

Philippe VALCQ : Le diamant jaune. Collection Belle époque. Pôle Nord éditions. Parution octobre 2016. 436 pages. 12,00€.

Partager cet article
Repost0
7 décembre 2016 3 07 /12 /décembre /2016 07:08

Ma grand-mère a un grenier

plein de toiles d'araignée ;

mais dans les coffres de bois

on y trouve des merveilles... (Claude CLEMENT)

Viviane JANOUIN-BENANTI : Le grenier magique. L'inimaginable crime de Châteauroux.

Mais dans le grenier évoqué dans ce roman, inspiré de faits réels, ce ne sont pas forcément la présence de jouets qui incite l'abbé Henri Tissier à inviter la jeune Clémence à s'y rendre.

Tout commence en 1853, lorsque le curé Georges, de la paroisse de Saint-Maur près de Châteauroux, tombe malade. Il a monté un mur, un beau mur tout le monde l'affirme, sous la pluie, et depuis il tousse à rendre l'âme et ne peut plus se lever. Sa bonne Marie est désolée, d'autant que le médecin n'arrive pas à juguler la maladie.

Le jeune abbé Henri Tissier est chargé par l'évêché de le suppléer dans ses tâches sacerdotales. Il est beau, charmant, affable, l'abbé Tissier et si les paroissiens se désolent de l'agonie du curé Georges, ils acceptent avec plaisir son remplaçant.

Le curé Georges demande à l'abbé d'aller voir Denise Mesure, la femme du garde-champêtre. Elle a la réputation de s'y connaître en plantes médicinales et elle pourrait peut-être lui préparer des potions susceptibles de l'aider à le soulager. Lors de sa visite à cette dame Mesure, dont l'habitation est sise non loin de la forêt, l'abbé Tissier remarque la jeune Clémence, neuf ans. La gamine est elle aussi impressionnée par cet abbé et lorsqu'elle se rend au catéchisme, elle n'a d'yeux et d'oreilles que pour lui.

Clémence est tellement subjugué par cet abbé aux allures de dandy, que lorsqu'à la fin du catéchisme, en cachette des autres enfants, il lui propose de visiter le grenier magique, elle ne refuse pas. C'est l'engrenage infernal qui débute et durera des années.

Clémence devient renfermée, parfois coléreuse, elle refuse même l'Eucharistie. Son père trop occupé à placer ses procès-verbaux ne se rend compte de rien. La mère, elle, se pose des questions, mais elle attribue ce changement d'humeur de sa fille à l'âge ingrat. Les parents confits en dévotion deviennent sourds et aveugles aux tourments de leur fille.

Le curé Georges vit toujours, alité, et l'abbé Tissier reste à demeure. Personne ne s'aperçoit de la transformation physique et psychique de la gamine, tout juste ose-t-on proférer qu'elle est dérangée. Elle doit subir seule son esclavage.

 

Triste histoire de cette fillette qui à l'âge de neuf ans connaîtra le loup comme il était de bon ton de le dire dans les campagnes. Elle va bientôt vivre repliée sur elle, dépendante de cet abbé exigeant, autoritaire envers elle et affable envers ses paroissiens.

Ce qui est le plus désolant dans cette affaire, c'est l'aveuglement des adultes, pour qui un homme de religion ne peut être que bon et aimant, dont les actes ne peuvent être contraires aux principes édictés par la charité chrétienne et dont la morale ne peut être prise en défaut.

Seulement, aujourd'hui encore nous apprenons tous les jours, ou presque, que de telles dérives existent toujours. Et que l'impunité prévaut sauf lorsque la voix populaire se fait assourdissante.

Une fois de plus Viviane Janouin-Bénanti emmène son lecteur dans une trouble affaire exhumée des archives provinciales. Au début on croit lire une histoire telle qu'aurait pu la narrer George Sand, champêtre, pastorale, voire bucolique, mais bien vite on entre dans le désarroi d'une gamine à cause de l'inconscience et le déni face aux comportements de religieux qui, après tout sont des hommes comme les autres avec leurs défauts.

Viviane JANOUIN-BENANTI : Le grenier magique. L'inimaginable crime de Châteauroux. Geste édition. Parution le 30 août 2016. 280 pages. 16,00€.

Partager cet article
Repost0
6 décembre 2016 2 06 /12 /décembre /2016 08:48

C'est le pied !

Jean-Christophe PORTES : L'affaire de l'Homme à l'Escarpin. Une enquête de Victor Dauterive.

En ce début de mois de juillet 1791, la chaleur est étouffante sur Paris, mais pour autant ce n'est pas cette canicule qui échauffe les esprits des Parisiens, mais l'incartade récente du roi Louis XVI.

Le monarque a tenté de rallier l'Autriche en calèche, mais a été reconnu puis arrêté à Varennes. Et cela gronde, d'autant que les diverses factions et associations, mouvements révolutionnaires se déchirent pour ou contre le roi, et surtout quel régime adopter.

Le jeune Victor Dauterive, pas même vingt ans, qui a préféré adopter ce nouveau patronyme afin d'abandonner toutes références familiales, est sous-lieutenant de la Gendarmerie nationale, nouvelle appellation de la maréchaussée. C'est le protégé de La Fayette, mais ce n'est pas pour autant qu'il ne garde pas sa liberté de penser et d'agir.

Des affiches fleurissent sur les murs. Des individus pleins de bonnes intentions les lisent aux badauds illettrés qui n'en perdent pas une miette. En substance ces libelles dénoncent l'impunité royale et ordonnent aux citoyens de ne plus lui obéir. Un vieil homme tente d'arracher celle apposée entre deux échoppes en place de Grève, mais la foule le conspue et le rejette. Victor, en compagnie de quelques gendarmes placés sous son autorité, le protège de ses agresseurs et l'enferme dans une pièce vide de l'Hôtel de ville. Il s'agit d'un aristocrate qui n'a plus toute sa tête. Mais le vieux fou s'échappe et il est écharpé par la foule.

Le commissaire Piedeboeuf de la section du Louvre, est avisé qu'un cadavre a été retrouvé dans la Seine. Il est presque nu. Un escarpin quasi neuf est découvert non loin. Le défunt au visage angélique, presque féminin, âgé d'une vingtaine d'années, porte une trace de coup sur la nuque. Le vol pourrait être le mobile de ce crime mais il importe d'abord de découvrir l'identité de l'homicidé.

Piedeboeuf met son honneur à découvrir le ou les coupables, et en partant de l'escarpin, essaie de découvrir le cordonnier qui l'a fabriqué afin de déterminer l'identité du noyé. Bientôt il découvre que l'homme fréquentait un milieu spécial, des sodomites, une pratique dont il aurait pu faire les frais. Le crime de sodomie entre adultes consentants a été dépénalisé dans le nouveau code pénal, mais ce n'est pas pour autant qu'il est accepté dans toutes les couches de la société.

Le lynchage du vieil aristocrate reste en travers de la gorge de La Fayette qui vire immédiatement, sans arme ni bagage, Victor. Le jeune homme est fort marri, ne comprenant pas et n'acceptant pas non plus cette sanction. Il apprendra un peu plus tard qu'il s'agit d'une manœuvre de la part de son mentor afin qu'il infiltre les rangs des Orléanistes et dénicher quelles sont leurs intentions, et surtout comment ils vont les mettre en œuvre. En effet le Duc d'Orléans, ou plutôt ses proches rêvent d'instaurer une régence, le futur Philippe-Egalité prenant la place de son royal cousin. Choderlos de Laclos étant le principal conspirateur.

Mais Victor n'en a pas fini de ses ennuis car la faction orléaniste le traite d'espion à la solde de La Fayette, et il se demande qui a pu le trahir. Heureusement il trouve soutien et         assistance grâce à un Titi, dont un pied est en vrac, et qui s'incruste dans sa vie, malgré ses objurgations. Mais Joseph, ainsi se prénomme le gamin de dix ans, en reconnaissance d'une bonne action se trouve toujours présent dans les moments délicats.

Car Garat, un ancien planteur de Saint-Domingue, dit Garat l'Américain, assisté de ses séides mettent les bâtons dans les roues de Victor, étant membres de la faction orléaniste. Piedeboeuf et Victor vont se rencontrer dans des conditions désagréables, surtout pour Piedeboeuf, leurs deux enquêtes devenant liées.

 

Un épisode historique qui se déroule du 11 juillet 1791 au 17 juillet 1791, et qui se clôt sur un drame dont parlent certains manuels scolaires. Les personnages réels et de fiction cohabitent et toute ressemblance avec des personnages ayant existé n'est pas fortuite. Ainsi Garat L'Américain est le clone d'un planteur ayant existé, mais sous un autre nom.

Nous retrouvons au détour des pages, La Fayette, Choderlos de Laclos, Danton, Olympe de Gouge, Louise de Kéralio, première femme à être rédactrice d'un journal, politique qui plus est, Fragonard qui prodigue les conseils auprès de Victor qui dessine à ses moments perdus, et autres figures de la Révolution.

Mais avec Garat, l'histoire bifurque vers d'autres possibilités, vers d'autres intrigues et personnages, car le passé du planteur est trouble et le rejoint. Il est entouré d'individus guère fréquentables dont Jean-Baptiste Retondo, surnommé le Professore, un agent provocateur.

Le rôle de Danton, figure historique des Cordeliers puis des Jacobins, en opposition avec Robespierre, est mal défini, et jusqu'à présent il n'a véritablement trouvé grâce qu'aux yeux d'Alexandre Dumas, dans son roman Le Docteur Mystérieux. Un personnage ambivalent, comme la plupart des hommes politiques qui sous couvert de servir la Nation, pensent également à eux, en premier.

Et le rôle du commissaire Charpier, dont on fait la connaissance dans le précédent ouvrage mettant en scène Victor Dauterive est tout aussi ambigu.

Mais le plus attachant de tous, c'est bien le petit Joseph, orphelin, boiteux, intrépide, courageux, fidèle, véritable Titi parisien association de Gavroche et de Poulbot.

Pour écrire son roman Jean-Christophe Portes s'est appuyé sur des références historiques ne souffrant d'aucune contestation, jusqu'à preuve du contraire.

On ne peut s'empêcher de comparer certaines situations de l'époque et celles d'aujourd'hui. Ainsi :

Un grand vent de liberté soufflait depuis 1790 sur les anciennes corporations, ces privilèges qui selon beaucoup de députés freinaient la liberté économique. Les fiacres et autres voitures de louage n'avaient point échappé aux réformes, et c'est ainsi que le monopole détenu jusqu'alors par une certaine compagnie du sieur Perreau avait été abolie.

Ce décret du 19 novembre 1790 prévoyait que n'importe qui pouvait tenter sa chance pourvu qu'il s'acquitte de la taxe de 5 sols par jour et respecte des obligations communes à tous. L'on peut mettre en comparaison aujourd'hui les taxis et les VTC (voiture de tourisme avec chauffeur) qui n'acquittent pas les mêmes taxes et dont le prix des licences est différent selon les catégories de ces moyens de transport. Mais ceci est une autre histoire.

Jean-Christophe PORTES : L'affaire de l'Homme à l'Escarpin. Une enquête de Victor Dauterive. Editions City. Parution le 9 novembre 2016. 432 pages. 19,00€.

Partager cet article
Repost0
4 décembre 2016 7 04 /12 /décembre /2016 06:38

Être né quelque part
Pour celui qui est né
c'est toujours un hasard...

Cicéron ANGLEDROIT : Nés sous X. Les enquêtes de Cicéron

Etre chargé de résoudre deux problèmes à la fois, pour Cicéron Angledroit, détective privé de rentrées financières, c'est beaucoup à la fois.

Pour autant, il ne peut se permettre de refuser une manne, même si cela va l'obliger à déléguer la garde de sa petite Elve à sa voisine Félicie, à remettre à plus tard quelques réchauffements climatiques sous la couette en compagnie d'une pharmacienne, voire même à se lever plus tôt que d'habitude.

Son ami René, le spécialiste du rangement de chariots à l'Interpacher, lui demande d'aller le voir à leur café habituel, il doit lui présenter un dénommé Margueron, lequel a une histoire bizarre à raconter.

Margueron, c'est un vieux motard, que jamais, qui a assisté à un hold-up. Curieux, le bonhomme a suivi les malfaiteurs, qui portaient leur butin dans des sacs publicitaires (plus facile à distinguer) jusqu'à un pavillon. Puis ensuite sur un parking où les malfrats ont changé de voiture, enlevant les cagoules qui protégeaient leur incognito. Je résume, j'abrège, je concatène...

Et c'est ainsi que, grâce à un article journalistique qui rendait hommage à deux policiers qui venaient de résoudre des affaires de hold-up, qu'il a reconnu ses deux voleurs.

Cicéron est intéressé par la narration de Margueron et il en fait part au commissaire de sa ville, lequel est fortement séduit par cette histoire. Il commençait à être agacé par les éloges rendus à la brigade d'une commune de l'Essonne et il se dit qu'il a un moyen pour rabattre leur caquet à ces collègues peu scrupuleux montrés du doigt par le ministère comme des éléments fiables et dignes de leur profession.

Le commissaire va même jusqu'à proposer de rétribuer, de la main à la main, en ponctionnant dans une caisse noire, notre détective qui n'en demandait pas tant mais un peu quand même. Cicéron doit démontrer la forfaiture des deux policiers tout en menant de front une autre recherche pour le compte d'un certain Mourad N'Guyen.

Malgré son patronyme, l'homme qu'il rencontre dans une cité rénovée et rebaptisée BHL pour des raisons indépendantes de sa volonté, l'homme ne correspond pas du tout physiquement à son nom. Il explique cette dichotomie par le fait qu'il est un enfant adopté par un couple de Vietnamiens musulmans. Or, un de ses amis lui a montré un article publié dans un journal, encore un, relatant un fait-divers peu banal. Un forcené habitant Maurepas a tiré sur sa famille, sa mère, sa femme et sa fille. Il a été arrêté mais la famille a subi quelques dommages. Ce n'est pas ce qui a attiré l'attention de Mourad, mais le fait que cet homme est son sosie. Il aimerait savoir s'il s'agit d'une coïncidence, ou d'autre chose qu'il a du mal à définir. Il paiera Cicéron en plein de carburant étant donné qu'il travaille à la station-service en face de l'Interpacher. Et au prix de l'essence, ou du diesel, c'est quand même cadeau.

 

Sous des dehors amusants, légers, voire futiles, ce roman est beaucoup plus profond qu'il y paraît et aborde un sujet sensible qui traite de problèmes de société, de comportement humain, de drame conjugal et d'un passé mal maîtrisé à cause d'un manque d'information.

Une double histoire dont celle des flics pourris est là pour mieux enfoncer le clou de l'autre affaire qui se trouve noyée, comme les informations primordiales sont délaissées au profit du sensationnel.

Un court chapitre légèrement érotique, plein de sensualité, les relations de Cicéron avec les femmes, les petites joies qu'il ressent au contact de sa fille, autant d'épisodes qui nous montrent que malgré tout la vie continue, et doit continuer malgré les vicissitudes.

L'auteur s'adresse en aparté au lecteur pour délivrer, non pas des messages, ce serait peut-être prétentieux, mais des notions de bon sens.

Je ne sais pas vous, mais moi quand je bouquine un polar j'aime pas trop les pages qui ne servent pas à grand-chose. C'est soit du remplissage soit un passage à vide de l'auteur.

Au fait, c'est dans ce roman que l'auteur décide de nommer le commissaire, qui devient donc Saint Antoine, un patronyme qui n'est pas sans rappeler qui vous savez.

Cicéron ANGLEDROIT : Nés sous X. Les enquêtes de Cicéron. Editions du Palémon. Parution le 15 novembre 2016. 240 Pages. 10,00€.

Première publication : éditions Publibook, 2005.

Partager cet article
Repost0
3 décembre 2016 6 03 /12 /décembre /2016 13:40

Bon anniversaire à Barbara Abel, née le 3 décembre 1969.

Barbara ABEL : L'innocence des bourreaux.

Il se fait comprendre quand il veut, Joachim Fallet, jeune drogué en manque et désargenté. Les rares clients de la supérette et le caissier sont stupéfaits et interloqués à cette annonce brutale qui les dérange alors qu'ils déambulent dans les travées.

En ce vendredi midi, il n'y a guère de chalands dans le magasin sis dans un quartier résidentiel. C'est ce qui a poussé Joachim, affublé d'une cagoule, à entrer et braquer le caissier. Il lui faut de l'argent au plus vite afin de s'acheter sa dose.

Une quadragénaire et son gamin de quinze ans, qu'elle a eu du mal à emmener avec elle, lui arrachant sa manette de jeu vidéo et balançant son téléphone portable avant de l'entraîner. Théo n'était pas emballé pour rendre visite à son papy, qui ne se souvient même pas de son nom et l'oublie aussitôt le seuil franchi. Non, Théo aurait préféré rester chez lui les yeux rivés sur son écran à s'abrutir devant un jeu de massacre. Elle l'a traîné presque de force et installé dans la voiture. Pour l'heure il n'est pas encore dans le magasin, il est assis à la place du mort, attaché sur le siège avant du véhicule.

Une vieille dame impotente, posée sur un fauteuil roulant conduit par une sexagénaire, son aide familiale, dame de compagnie, femme de ménage infirmière intermittente. La vieille dame est du genre acrimonieux, toujours à critiquer négativement tout ce qui constitue son quotidien, et surtout à houspiller son accompagnatrice.

Un couple adultère qui vient de passer un bon moment entre les draps défaits d'un hôtel proche. Eux aussi ont la mine défaite d'ailleurs. Et adultère pas trop. Lui il est marié, elle est célibataire. Adultère à moitié donc. Il a fourni à son patron un prétexte fallacieux pour justifier son absence, elle avait une liste de courses à acheter, et ils en ont profité pour comparer leur anatomie et plus si affinité.

Une jeune mère de famille, qui vit seule avec son gamin de trois ans, est descendu précipitamment de chez elle afin de palier un manque d'ingrédients, laissant son gamin scotché devant des dessins animés.

Et puis le caissier qui a remplacé au débotté sa collègue malade, enceinte paraît-il de ses œuvres, le résultat de l'unique fois où ils se sont retrouvés ensemble dans le même lit.

Huit personnes donc face à un homme en manque et surtout face à une arme à feu. Dévaliser la caisse, demander à tous ceux qui sont là, tétanisés, de vider leurs poches, de balancer leurs portefeuilles, et attendre le bon vouloir du braqueur qui se demande maintenant ce qu'il va faire de ses otages. Baisser le volet roulant afin d'empêcher d'autres clients d'entrer, et puis les attacher, et enfin prendre la poudre d'escampette. C'est sans compter sur l'impondérable, ce grain de sable qui n'était pas invité dans cette petite réunion.

D'abord la dame de compagnie qui rend l'âme en même temps que son cœur qui lâche, et d'autres incidents qui bientôt vont transformer le braquage en drame. Surtout quand l'ado, qui trouve que sa mère n'est pas assez rapide et étonné de voir le volet roulant s'abaisser, s'invite dans cette supérette-partie, prenant de revers le voleur surpris.

 

Avec brio Barbara Abel nous délivre un suspense implacable, décrivant tout d'abord les affres de ce drogué en manque, déclencheur de drames, puis revenant quelques moments en arrière afin de nous présenter les différents protagonistes de cet début d'après-midi mouvementé. Avec toutefois quelques cachoteries de bon aloi qui entretiennent le suspense.

Et le lecteur pourrait, à juste raison, penser que cette histoire va se clore avec l'arrivée salutaire de la cavalerie, gyrophares bruyants en guise de trompettes de la victoire. Eh non ! Car Barbara Abel, en romancière perverse (c'est un peu fort comme vocable mais c'est bien pour démontrer tout le talent de conteuse déstabilisante qui l'anime), nous offre une vie après la vie, un enchaînement inéluctable de scènes tragiques teintées parfois d'humour noir.

Car certaines victimes de ce braquage, ou ce qu'il en reste, ne réagissent pas selon des critères bien définis. Les moralisateurs et les technocrates peuvent toujours édicter leurs consignes à respecter lors d'un hold-up, on ne sait jamais quelle sera notre réflexe dans ce genre de situation particulière, le subconscient et le caractère inhérent à chaque individu réagissant parfois différemment à ce qui est programmé.

Un roman beaucoup plus sensible et percutant, à mon avis, Que derrière la haine et Après la fin, dont les prologues dévoilaient trop l'épilogue, ôtant de ce fait le sel de l'intrigue et la montée en puissance du suspense.

Barbara ABEL : L'innocence des bourreaux. Réédition Pocket Thriller. Editions Pocket. Parution 13 octobre 2016. 352 pages. 6,95€.

Partager cet article
Repost0
30 novembre 2016 3 30 /11 /novembre /2016 13:36

Hommage à John Dickson Carr, né le 30 novembre 1906.

John Dickson CARR : Patrick Butler à la barre

Lorsqu'Helen Dean, la fiancée de Hugh Prentice, du cabinet d'avoués Prentice & Vaughan, se moquait de celui-ci parce qu'il lisait en cachette des romans policiers, elle était à cent lieues de se douter que la phrase qu'elle venait de prononcer allait devenir réalité quelques instants plus tard.

D'un ton emphatique et dramatique, la jeune fille déclamait : Du brouillard épais surgit un inconnu au visage basané et à l'accent étranger qui déclare : Je suis Omar d'Hispahan. Il te parle d'un cadavre dans une pièce hermétiquement close...

Quelques minutes plus tard, alors que Londres en cette fin d'après-midi du mois de novembre est noyée dans le brouillard, entre dans l'étude un mystérieux inconnu qui dit s'appeler Abu d'Ispahan. Stupeur des protagonistes.

Hugh Prentice qui a rendez-vous avec Patrick Butler, un éminent avocat corpulent dont le point faible est le sexe, justement dit faible, et dont la devise est : Je ne me trompe jamais, Hugh Prentice donc consulte son associé et presque beau-frère James Vaughan.

Pendant ce temps Abu d'Ispahan se fait trucider d'un coup de poignard par... par... par qui au fait ? puisque les deux seules personnes qui se trouvaient dans l'étude à ce moment-là étaient en train de deviser.

 

Si la traduction en Français de ce roman favorise la découverte de l'assassin, sinon le comment tout au moins le par qui, ce roman de John Dickson Carr n'en est pas moins excellent, humoristique en diable et légèrement coquin, style quelque peu inhabituel à l'auteur.

 

En fait le mystère de la chambre close, thème trop cher à J.-D. Carr pour qu'il ne nous livre pas un roman comportant un meurtre apparemment insoluble, n'est que prétexte à une suite d'avalanche de gags, d'aventures loufoques, farfelues, avec un personnage haut en couleur, Patrick Butler, mais aussi quelques jeunes filles dont le moins que l'on puisse dire est qu'elles cachent bien leur jeu.

Le jeu de l'amour et du falzar en quelque sorte !

 

Réédition collection Le Club des Masques no 636. 1994. 220 pages.

Réédition collection Le Club des Masques no 636. 1994. 220 pages.

John Dickson CARR : Patrick Butler à la barre (Patrick Butler for the Defense - 1956. Traduction de Jean-André Rey). Le Masque Jaune N°1926. Librairie des Champs Elysées. Parution juillet 1988.

Partager cet article
Repost0
29 novembre 2016 2 29 /11 /novembre /2016 16:19

La parole est d'argent mais le silence est d'or...

Jean-Michel LECOCQ : Les bavardes.

Les vacances à Sainte-Maxime, le commandant Tragos les savoure au comptoir son hôtel restaurant.

Un peu plus loin, à une table, deux femmes dégustent leur thé en papotant. Le serveur très prolixe lui confie que le patron les a surnommées les Bavardes, en référence à un tableau de Noëlle Mauret datant de 1989. Effectivement le loufiat montre la toile à Tragos, mais celui-ci n'en n'a rien à faire. Ce n'est pas parce qu'il n'apprécie pas l'art pictural, mais parce qu'il a connu vingt ans auparavant.

Charlotte Visani était médecin légiste à Marseille alors que Tragos venait d'être affecté à l'Evêché au début des années 1990. Il avait travaillé quelques temps avec elle sur certaines affaires, puis elle était partie à l'étranger. Depuis, il est monté en grade mais est toujours en poste à la police judiciaire marseillaise. La compagne de Charlotte, Mélanie, fut également en poste à la Crim, durant dix ans, partie juste avant sa nomination.

Mais ce n'est pas parce qu'il est en vacances que les affaires sont en suspens. D'abord il y a le cas Pavlidis, un truand qui vient de se faire la belle. Il faisait partie en 1980 à une bande appelée les Beaux Gosses, dirigée par Max Germanos et réalisé le braquage d'un fourgon blindé. Les membres de la bande ont été arrêtés, le cerveau de l'opération braquage est décédé dans sa voiture accidentée, et l'argent n'a pas été retrouvé. Mais peut-être y aurait-il eu un des braqueurs qui n'aurait pas été identifié, c'est ce que tout laisse supposer.

Un cadavre est découvert dans le port azuréen. Particularité, il lui manque un bras et la tête. Aucun doute, le coupable voulait dissimuler une marque pouvant l'identifier.

Normalement cette affaire ressort du domaine de la gendarmerie, mais comme Tragos est déjà sur place, et qu'éventuellement ce crime pourrait être mis sur le compte de Pavlidis, il est chargé par son patron de s'atteler à l'enquête. Il se rend à la morgue en compagnie de la toujours belle et sexagénaire Charlotte Visani, qui peut apporter un œil de spécialiste sur ce crime. Tout comme son collègue officiel qui a procédé à l'autopsie, elle remarque que le membre a été découpé dans les règles de l'art.

Tragos, toujours officiellement en vacances, met ses fidèles adjoints sur la piste du meurtrier qui se conduit en Petit Poucet, semant des cadavres autour de Sainte-Maxime mais également dans l'Ariège. Pivlatis est le premier suspecté, lui sur lequel se focalisent tous les soupçons, mais il ne faut pas négliger d'autres pistes, peu apparentes mais réelles.

 

Pour peu que le lecteur lise attentivement le texte, et ne saute pas des lignes ou des passages, si j'en connais qui le font pour avancer plus vite, il se doutera assez rapidement de la solution finale, ou tout au moins de l'identité du coupable. Ou des coupables.

Mais outre l'intrigue, malgré tout bien menée, ce sont les personnages qui gravitent dans cette histoire qui entretiennent l'intérêt. Comme le jeu des acteurs sans qui une pièce de théâtre ne passionnerait pas.

Tragos, policier qui joue parfois avec les règles et n'hésite pas à les enfreindre afin de parvenir à son but, mouillant par là-même ses adjoints, les plaçant dans des positions délicates vis-à-vis des autorités, gendarmerie, procureurs, voire ministère. Vergne, l'ancien, Venot, le jeune, tout est relatif, se voient confier des missions périlleuses. Mais Vergne jalouse plus ou moins son jeune collègue, croyant celui-ci plus dans les petits papiers du commandant, et par ce fait aspirant plus rapidement à une promotion, un grade qu'il pense lui être dévolu vu ses années de bons et loyaux services.

Les Bavardes également, Charlote Visani, l'ancienne légiste, et Mélanie Le Guen, l'ancienne policière, qui interfèrent plus ou moins dans l'enquête et ont été plus ou moins mêlées dans l'affaire des Beaux Gosses trente ans auparavant.

Maud, la jeune journaliste du quotidien local et se comporte en reporter aguerrie, fouillant et n'hésitant pas à donner de son corps pour faire avancer son article. Elle est ambitieuse, certes, mais pragmatique, reconnaissante, et amoureuse.

Sans compter ceux qui sont réduits aux cailloux du Petit Poucet meurtrier, dont on découvre peu à peu les antécédents, et accessoirement les corps.

Pour ses vacances, Tragos a emporté un roman de Linwood Barclay, auteur dont dit Jean-Michel Lecocq en exergue : Un des meilleurs conteurs que je connaisse...

Linwood Barclay, j'en ai entendu parler, mais je n'ai rien lu de lui. Et ce n'est pas près d'arriver, car si Jean-Michel Lecocq effectue de temps à autre un résumé de ce que Tragos vient de lire, le policier ne semble pas passionné. En effet, du 17 juin 2012, au 6 juillet, de la même année je vous rassure, Tragos n'a pas le temps de lire entièrement ce livre. Une hérésie, même s'il a d'autres occupations, car au début tout du moins, il a du temps libre.

 

Jean-Michel LECOCQ : Les bavardes. Collection Zones noires. Editions Wartberg. Parution le 3 octobre 2016. 276 pages. 12,90€.

Partager cet article
Repost0
27 novembre 2016 7 27 /11 /novembre /2016 13:38

Hommage à Phyllis Dorothy James décédée le 27 novembre 2014 à l'âge de 94 ans.

P. D. JAMES : Sans Les mains.

Adam Dalgliesh, inspecteur de police londonien, rend visite à sa tante sur la côte du Suffolk.

Il veut se changer les idées, les esprits, se mettre au vert, après une enquête particulièrement pénible. De plus il a à résoudre une affaire de cœur : doit-il épouser ou non Déborah ? Mais ces quelques jours qu’il s’octroie afin de faire sa mise au point sentimentale vont être perturbés par la découverte d’un cadavre aux mains coupées, flottant au fond d’un canot.

Il s’agit de Maurice Seton, un auteur de romans policiers. Pourquoi cet assassinat et cette mise en scène morbide ?

C’est l’inspecteur Reckless qui mène l’enquête, enquête que suit de loin Dalgliesh et dans laquelle se trouvent impliqués sa propre tante et ses voisins. Voisins qui d’ailleurs ont tous un rapport avec la littérature, soit comme écrivain, soit comme critique littéraire.

Une enquête qui réservera bien des surprises aussi bien à Dalgliesh qu’à son homologue Reckless lequel ne souhaite aucune intrusion, même de la part d’un célèbre collègue londonien.

 

P. D. James déploie dans ce roman toute la palette d’un savoir-faire aux touches subtiles, délicates, savamment dosées, que ce soit dans la description d’un paysage ou la présentation d’un personnage.

Sans les mains est un suspense psychologique au final cataclysmique !

Fayard/Mazarine. Parution 21 novembre 1989. 240 pages 13,80€.

Fayard/Mazarine. Parution 21 novembre 1989. 240 pages 13,80€.

Réédition Le Livre de poche N°6835. Parution le 03/01/1990 256 pages.

Réédition Le Livre de poche N°6835. Parution le 03/01/1990 256 pages.

P. D. JAMES : Sans Les mains. (Unnatural Causes - 1967. traduction Lisa Rosenbaum). Fayard/Mazarine. Parution 21 novembre 1989. 240 pages 13,80€. Réédition Le Livre de poche N°6835. Parution le 03/01/1990 256 pages.

Réédition format Kindle 16 octobre 2016. 2,99€.

Partager cet article
Repost0
26 novembre 2016 6 26 /11 /novembre /2016 14:00

Oh Marie si tu savais
Tout le mal que l'on me fait
Oh Marie si je pouvais
Dans tes bras nus me reposer

Denis FLAGEUL : Jagu.

Dix ans qu'il n'était pas revenu à Guingamp, cette charmante cité costarmoricaine qui accueilli durant des décennies les futurs appelés pour effectuer leurs trois jours.

Et en débarquant sur les quais de la gare, Guénolé Le Maout plus familièrement surnommé Guéno, se sent un peu perdu, lui qui sort de deux ans de taule, pour des bricoles non avouables mais qu'il a fini par avouer, dans la capitale. En attendant la correspondance pour Paimpol, le train vert avec ses trois voitures, il s'enfile quelques bières dans un troquet. Pas grand monde dans l'établissement, juste une fille un peu plus loin. Son regard est attiré par ses cheveux bruns courts. Comme s'il l'avait déjà vue, voire connue.

Allez, c'est l'heure de monter dans la micheline. Paimpol, ses mythiques falaises, chantées par Théodore Botrel, le bout du voyage. Et sur le quai, un contrôleur qui l'interpelle. Malard, l'ineffable Malard, un ancien condisciple, dont il a du mal à se débarrasser.

Guéno trouve réconfort et soutien auprès de Serge, un ami, un vrai, qui tient un bar à Paimpol. Serge ne lui demande rien, pas même de raconter ses années de galère. Il lui propose, pour s'occuper, de retaper un appartement qu'il vient d'acquérir et lui prête la maison de ses parents à Guingamp afin qu'il ait un pied à terre où se loger. Marché conclu.

Guéno fera donc tous les jours le trajet Guingamp-Paimpol aller-retour. Ce n'est pas le Transsibérien, celui qui va à Moscou, la ville aux mille et trois clochers et aux sept gares d'après Cendrars, un auteur qu'il lit et relit avec plaisir, mais ce train aux trois voitures va l'emmener dans une aventure mouvementée.

D'abord il reconnait sa belle inconnue lorsqu'elle monte en gare de Traou-Nez, une gare à l'abandon. Les voyageurs qui désirent descendre doivent prévenir le contrôleur, tandis que ceux qui veulent monter font du train-stop. Oui, c'est bien elle, celle qu'il appelait Cousine, comme la plupart de ses condisciples. Cousine, de son prénom Marie-Jeanne, mais plus familièrement Marie tout court.

Il revoit Marie, tous les jours. Marie qui est contente de le voir. Bref ils sont contents tous les deux de se voir, de se revoir, de parler ensemble le temps du trajet, de prendre un pot ensemble, de partager le même lit, chez elle, dans un vieux manoir de Traou-Nez.

Seulement, car bien évidement il existe un seulement, Marie n'est pas seule. Elle a perdu son père et son jeune frère dans un accident, sa mère est décédée ensuite, et il ne lui reste plus que son frère Richard. Mais Guéno ne le sent pas Richard, et encore moins Tino, cet homme aux yeux de poisson mort d'amour qui l'accompagne en permanence mais ne dit rien.

Cherchez la femme disait, ou plutôt écrivait, Alexandre Dumas dans Les Mohicans de Paris. Là, Guéno n'a pas eu besoin de la chercher, il l'a trouvée, seulement il a également trouvé son frère et le copain de celui-ci. Et les ennuis qui se profilent à l'horizon, plus rapidement que la micheline qui effectue le trajet Guingamp-Paimpol, vont bientôt s'abattre sur les épaules du pauvre Guéno qui n'en demandait pas tant. Et tous ça à cause d'une histoire de vengeance.

 

C'est un beau roman, c'est une belle histoire comme chantait Michel Fugain. Le lecteur se trouve transporté dans une histoire courte mais intense. Sous cette histoire d'amour se cache une sombre intrigue ferroviaire qui nous ramène au bon vieux temps des déplacements au cours desquels le voyageur pouvait s'intéresser au paysage, et dont les voitures ne sont pas bondées.

Mais cette nostalgie ne dure guère car outre l'aspect touristique pas trop appuyé mais avec des lieux de passage remarquables, comme le château de La Roche-Jagu ou le viaduc du Trieux, ce sont bien les personnages auxquels il faut s'intéresser. Guéno, dont le passé est juste effleuré, Marie dont le passé recèle bien des drames, Malard le contrôleur qui effectue les navettes en réclamant les billets avec une pointe de facétie, et les deux vilains car il en faut bien dans toute histoire noire qui se respecte.

Nous sommes loin de la Madone des Sleepings, quoi que, mais cette idée du Transsibérien qui trottine dans la tête de Guéno nous y fait penser insidieusement. Ainsi que de lire, ou relire Blaise Cendrars. Mais indépendamment de ces deux réflexions, c'est l'ambiance même du roman qui fascine.

Un court roman aux courts chapitres, légèrement déstructuré, avec un épisode qui s'intercale dans la narration du retour de Guéno au pays et cette rencontre avec Marie et la suite. Si au départ, du train, cela peut sembler perturbant, le rythme prend tranquillement sa cadence, et ces intercalaires sont comme autant de stations dans ce voyage dramatique.

Denis FLAGEUL : Jagu.

Denis FLAGEUL : Jagu. Collection Goater Noir N°16. Editions Goater. Parution le 24 novembre 2016. 160 pages. 16,00€.

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
  • Contact

Recherche

Sites et bons coins remarquables