Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
4 juillet 2018 3 04 /07 /juillet /2018 08:45

N’ayons pas peur des mots : ce livre, c’est le Pérou !

Michel AMELIN : La colère du Puma Inca.

Ayant perdu ses parents trois ans auparavant dans un accident d’avion, Nina Santamaria se retrouve orpheline, n’ayant plus que son grand-père pour seule famille.

Depuis elle est trimballé de pension en pension, accompagnée d’une gouvernante qui assure sa protection et son éducation, son riche aïeul, qui vit dans un palais à Cuzco au Pérou, n’hésitant pas à débourser une petite partie de sa fortune pour son bien-être.

Elle n’a que quatorze ans, mais aller dans un parc d’attractions à Miami, elle juge que ce n’est plus de son âge. Pourtant, Janet Paxton, sa nouvelle gouvernante depuis un an environ, tient à l’emmener dans cette usine à plaisirs préfabriqués. Et les voilà toutes deux à bord d’une Cadillac, Janet surveillant ses rétroviseurs tout en conduisant. Elle est persuadée qu’elles sont suivies, prémonition qui se vérifie lorsqu’un véhicule les talonne puis les percute. Coincée par l’airbag et sa ceinture, Janet ne peut rien faire et lorsqu’elle parvient à s’emparer de son arme à feu, c’est trop tard. Un homme leur projette des giclées de gaz paralysant.

Nina est enlevée sans ménagement et enfermée dans une minuscule pièce aux murs bétonnés. Elle perçoit de l’autre côté de la porte des bruits de voix, le mot Puma revenant à plusieurs reprises. Alors qu’elle se pose la question de savoir si une rançon a été demandée à son grand-mère qui vit à Cuzco, trois individus entrent dans la pièce dont un affublé d’un masque de…Puma.

Le problème réside dans le fait qu’elle a vu le visage de deux de ses kidnappeurs. Le troisième, masqué, abat froidement ses deux compagnons, puis la délivre, annonçant qu’elle ne lui sert plus à rien dorénavant. Nina peut sortir de ce piège et se retrouve en plein désert. Elle était prisonnière dans une station-essence abandonnée. A ce moment Janet Paxton arrive en compagnie d’agents du FBI. Elle apprend alors que son grand-père vient d’être assassiné à Cuzco, un poignard inca planté dans le cœur.

Raimondo Loza, le secrétaire, est maintenant le seul à gérer la demeure familiale et les affaires de l’aïeul. Alors direction Cuzco, la capitale des Incas, une ville en tout point remarquable pour ses vestiges archéologiques et ses musées. Le grand-père Santamaria et la municipalité s’opposaient à l’agrandissement de certains édifices, dont l’hôtel Atahualpa, dont les propriétaires souhaitaient noyer les environs sous une chape de béton, détruisant par là-même de nombreuses ruines ancestrales.

C’est dans une atmosphère enfiévrée que Nina arrive sur les lieux, car la population fête le solstice d’hiver, la fin de l’été et l’entrée dans l’hiver. Les rues pavoisent, les habitants revêtent les vêtements traditionnels, des orchestres jouent dans les artères et sur les places, des acteurs sont déguisés et l’un d’eux est affublé d’un masque grimaçant, ses compagnons déclarant que le Puma va dévorer le soleil.

Ce qui plonge Nina dans l’anxiété, d’autant que par téléphone Loza lui a intimé de se méfier de tous, même de sa gouvernante.

 

Dans une région propice aux légendes, chargée d’histoire, dont les traditions Quechua se mélangent aux rites imposés par les envahisseurs catholiques Espagnols, l’angoisse rôde. La mort aussi. Nina devra se garder à gauche, à droite, se défier de tous, car nul doute que sa présence dérange, étant la seule héritière de Santamaria.

Elle devra affronter de nombreux dangers, ne sachant pas si ceux qui veulent la protéger ne sont pas en réalité ses ennemis. Et au dessus de sa tête plane l’ombre du Puma, ombre qui va l’accompagner jusque dans des tunnels à la découverte d’une statuette. Mais, est-ce que tout ce qui brille est or ?

 

Un roman plaisant, bourré de rebondissements, avec un épilogue cataclysmique, destiné aux jeunes à partir de dix ans. Mais comme chantait Alain Souchon, J’ai dix ans, Je sais que c'est pas vrai Mais j'ai dix ans Laissez-moi rêver Que j'ai dix ans…

Action, suspense, angoisse sont indéniablement les maîtres mots de ce court roman, pourtant il est également empreint d’une réflexion sur l’antagonisme entre modernisme et traditions, sans oublier le côté historique et légendaire du Pérou.

 

Ce roman a bénéficié d'une réédition en version numérique sous le titre Dans les griffes de mon ennemi.

Pour le commander, voir le lien ci-dessous :

Michel AMELIN : La colère du Puma Inca. Collection Polar gothique N°407. Editions Bayar Poche. Parution le 12 février 1998. 144 pages.

ISBN : 978-2227738126

Partager cet article
Repost0
1 juillet 2018 7 01 /07 /juillet /2018 06:52

Ça tombe bien, le lit de la rivière était à sec… Ou presque !

Alexis AUBENQUE : Des larmes sur River Falls.

Ancien reporter de guerre, Stephen Callahan est revenu au bout de treize ans de journalisme à travers le monde au pays natal à River Falls. Il est maintenant rédacteur au journal local, spécialisé dans les pages Culture et Loisirs.

Et il a retrouvé avec un certain plaisir, plaisir partagé, Lindsay Wyatt, celle avec laquelle il sortait lorsqu’ils avaient vingt ans à peine, et avait abandonnée. Depuis ils couchent ensemble, et dorment même dans la même chambre mise à leur disposition par la sœur de Stephan dans le manoir ou elle vit avec ses trois enfants.

Le shérif Mike Logan, élu et en poste depuis quelques mois après avoir exercé des fonctions policières à Seattle, est heureux entre un travail guère prenant, et Hurley sa femme psychanalyste attachée au FBI. Elle doit se rendre dans la capitale de l’état de Washington de temps à autre, y restant à chaque fois quelques jours, mais le travail prime.

A l’aube de ce lundi 4 septembre, la petite ville de River Falls se voit placée sous les feux des projecteurs. Un fermier a été crucifié dans un champ, une mise en scène qui le transforme en épouvantail, avec un panneau accroché à ses vêtements : Là est ta place !

Naturellement, la première chose à faire est de se renseigner auprès de la famille du défunt, William Waugh, sa femme qui est par la même occasion devenue sa veuve, et ses deux filles, Michelle et Betty. Des offres d’achat de terrains lui avaient été proposées, offres qu’il avait repoussées. Ce pourrait-il que ceux qui désiraient acquérir ces terres, afin de s’agrandir, aient trouvé ce moyen expéditif pour forcer la main ? Mais d’autres événements, d’autres situations posent également problèmes.

Alors Logan, Lindsay, Stephen se lancent chacun de leur côté ou presque dans cette enquête, avec des apports extérieurs non négligeables. Ainsi l’aide apportée par Beverly, la nièce handicapée de Stephan Callahan et qui ne se déplace qu’en fauteuil roulant se révélera précieuse. Mais une intruse s’immisce dans cette enquête. Leslie Callwinn, journaliste et romancière à succès. Sa présence enchante certains des protagonistes tandis que d’autres la déplorent. On ne peut pas plaire à tout le monde, mais il est vrai que Leslie possède une réputation assez sulfureuse.

En deux journées intenses, avec quelques nouveaux cadavres à la clé, cette enquête sera résolue. Mais au prix de bien des avatars. Des cadavres sortiront des placards, la métaphore habituelle pour indiquer que des secrets seront dévoilés, des confidences qui n’auraient jamais dû être divulguées, mais parfois cela fait du bien de se soulager ou d’être soulagé. Parfois cela se transforme en confessions douloureuses, aussi bien à avouer qu’à entendre.

 

L’aspect psychologique est toujours présent mais englué dans un voile, car décrit en quelques lignes. Ce côté narratif s’intègre avec douceur dans le développement car ce qui importe, tout autant pour l’auteur que pour le lecteur, c’est l’action. Une aventure trépidante servie par des dialogues millimétrés, vifs, rapides, des réparties tranchantes ou doucereuses comme des billes de flippers qui se bousculeraient ou se frôleraient sans déclencher le tilt fatal.

 

Dans cet excellent roman de divertissement, Alexis Aubenque aborde également des sujets sensibles, familiaux, professionnels, de société, d’intolérance, comme ça en passant, comme si de rien n’était, et pourtant il se montre un excellent observateur et analyste. Comme le démontrent les quelques citations placées en fin d’article, citations parfois finement humoristiques et pourtant si vraies, si justes.

On retrouve quelques personnages ayant déjà gravité dans d’autres ouvrages d’Alexis Aubenque, tel Ryan Bonfire, ce motard marginal affilié à la bande des Hommes en noir, une association qui s’est donné pour but de traquer des assassins ayant échappé aux filets de la police. Et ces personnages, dont la participation est plus ou moins prégnante dans le récit, entretiennent un lien entre chaque volume de la série River Falls mais également avec d’autres romans de l’auteur. Le tout constitue une saga qui peut se lire soit en abordant les romans les uns après les autres, dans l’ordre de parution, ou indépendamment, chaque volume possédant son histoire propre et complète.

 

Plus les années passaient, plus il devenait difficile de fumer sans passer pour un malotru.

Le journaliste a besoin d’une vision globale d’un sujet. Il ne s’arrête jamais aux évidences, il va toujours creuser plus loin. Le policier n’a qu’un souci, trouver un coupable à donner en pâture à la population.

Franchement qui pouvait prétendre que la météorologie était une science ? Les rares fois où les prévisions concordaient avec la réalité, ce n’était que pure coïncidence. Voilà pourquoi, dans les journaux, la rubrique se trouvait placée à côté des prédictions fantaisistes des astrologues.

Aucune femme, quelle que soit l’époque, ne supportait de se faire cocufier. Il n’y avait que dans les mauvais romans écrits par des hommes qu’elles acceptaient d’être trompées sans réagir.

Si l’esclavage des Africains et le génocide des Indiens étaient les deux piliers de l’infamie de la domination blanche sur le continent, les sort des Asiatiques, pourtant tout aussi intolérable, était souvent absent des manuels d’histoire.

Pourquoi écrivons-nous sur le nazisme, sur l’holocauste ? Un film pourrait suffire, mais non, il ne faut jamais banaliser la violence et toujours la dénoncer.

Alexis AUBENQUE : Des larmes sur River Falls. Collection Bragelonne Poche. Editions Bragelonne. Parution le 13 juin 2018. 384 pages. 7,90€.

ISBN : 979-1028109042

Partager cet article
Repost0
30 juin 2018 6 30 /06 /juin /2018 12:49

Un cataphile peut-il faire carrière ?

Gilbert GALLERNE : Sous terre, personne ne vous entend crier.

Quand deux équipes de police se retrouvent au même endroit, en même temps, mais ayant à accomplir des missions différentes, inévitablement il en résulte… une bavure !

Alors que le commissaire Jonzac, qui dans deux ans devrait pouvoir briguer une retraite bien méritée, est en planque avec ses adjoints afin d’arraisonner le Serbe, un malfrat tueur de flics qu’ils pistent depuis des mois, l’équipe de la jeune commissaire Nadia Brochart est elle aussi en intervention. Pour alpaguer un autre individu, responsable de nombreux braquages. Seulement aucune concertation n’a eu lieu et le Serbe se rend compte qu’il est dans une nasse. Des coups de feux sont échangés, et résultat du match, un mort et des blessés, dont l’inspecteur Michel qui devait quitter le 36 quai des Orfèvres deux semaines après. Il est entre la vie et la mort.

A la Tour Pointue, les oreilles de Jonzac chauffent, et naturellement Nadia Brochard, qui a les dents longues, l’accable auprès de Panaffier, le grand patron de la P.J.

 

Claire fête avec quelques amis la fin de l’année scolaire. C’est Erwan qui organise cette réunion, et il a choisi, pour changer un peu, qu’elle se déroulerait dans une salle souterraine non loin du Sacré-Cœur. Au moins ce sera moins morbide que le cimetière du Père-Lachaise ou Montparnasse, les sorties précédentes auxquelles elle avait assisté. Il s’agit de galeries creusées à la fin du XIXe siècle afin d’extraire les pierres destinées à la construction de la pièce montée montmartroise.

Mais Claire n’est pas en forme, un inconvénient menstruel, et son petit copain l’a mauvaise. Tant pis pour lui, d’ailleurs il préfère rester à la surface et boire un coup, voire plusieurs, tout seul. A un certain moment, Claire ressent une envie pressante et s’éloigne de la petite bande. Funeste décision, car elle sera retrouvée morte, mal en point.

 

Car dans l’ombre des galeries, Mikael, un marginal, est tapi. Il survit dans des squats, mangeant au petit bonheur la chance, déambulant dans les souterrains, galeries, carrières et autres tunnels, dont il connait les entrées, les chatières, indécelables à l’œil nu. Il n’est pas vraiment nyctalope mais peut quand même se déplacer sans trop de difficultés. Et il abrite en lui, dans son esprit, l’Autre, son double, qui lui aussi réclame son dû.

 

Lorsque le cadavre de Claire est découvert, le ciel tombe sur la tête de Jonzac. Il s’agit de sa nièce ! Or, non seulement la bavure avec la commissaire Nadia Brochart n’est pas digérée, mais comme Claire fait partie de sa famille il ne peut s’immiscer dans l’enquête, pour des raisons déontologiques.

Mais cela ne va pas l’empêcher de se mêler dans l’enquête, même si l’affaire est confiée à Nadia, et ce malgré l’absence d’atomes crochus entre eux. L’enquête tourne d’abord autour des relations de Claire et peu à peu le cercle s’élargit car d’autres cadavres sont à dénombrer. Une descente dans les arcanes des bas-fonds de la capitale est prévue au programme.

 

Gilbert Gallerne nous propose un roman étouffant, angoissant, stressant. La Bête, Mikael en l’occurrence, jouant avec les nerfs à cause de sa double personnalité, sachant défier les forces de police et tous ceux qui le traquent. Et l’atmosphère des galeries souterraines, des tunnels du métro parisien, des stations fantômes, des souterrains, des égouts, augmente cette angoisse latente qui étreint le lecteur. Lequel découvre tout un monde caché, qui a fait les beaux jours de certains romans feuilletons dont Zigomar de Léon Sazie. Ou encore dans Dernier homicide connu d’Olivier Kourilsky qui nous avait entraînés dans les stations fantômes du métropolitain.

Mais Gilbert Gallerne est un vieux (relativement) routier du roman policier et d’angoisse, et il a mijoté un roman particulièrement poignant, parfois à la limite du fantastique, dans lequel il donne sa pleine mesure. Une intrigue et des personnages qui happent le lecteur, lequel ne peut refermer le livre qu’une fois arrivé au mot Fin et ne laisse pas justement sur sa faim.

 

Gilbert GALLERNE : Sous terre, personne ne vous entend crier. Collection Polar. French Pulp éditions. Parution le 21 juin 2018. 368 pages. 18,00€.

ISBN : 979-1025103708

Partager cet article
Repost0
20 juin 2018 3 20 /06 /juin /2018 08:17

Déjà que le passé simple n’est pas si simple…

Patrick S. VAST : Passé double.

Son rêve d’aller en Australie, de côtoyer les kangourous, c’est dans la poche, ou presque pour Cindy, jeune marginale qui habite dans un squat près de la Gare du Nord à Paris.

Alors qu’elle se demande comment se sustenter, n’ayant pas un fifrelin en poche, Cindy s’assied sur un banc dans un square. Une préoccupation qui revient tous les jours. C’est alors qu’une vieille dame, assise non loin, vient la voir et lui fait une étrange proposition. Une amie recherche une dame de compagnie et Cindy serait toute désignée pour remplir cet office. Comme une forte somme lui est promise, Cindy accepte, nonobstant qu’elle vit avec Paulo, marginal comme elle. Mais elle le quitte sans aucun regret.

En voiture pour Rang-du-Fliers, près de Berck et du Touquet. Les deux voyageuses arrivent devant une demeure imposante, sorte de grand manoir, et Cindy est époustouflée. Encore plus lorsqu’elle pénètre dans cette résidence, car l’intérieur est encore plus luxueux. Rosemonde, la propriétaire des lieux, vit en compagnie d’un couple de serviteurs, Octave, l’homme d’entretien, et Henriette, femme de ménage et cuisinière.

Cindy doit changer de vêtements, Rosemonde a tout prévu, même des chaussures à talon, mais également couper ses cheveux et les teindre. Elle va s’appeler dorénavant Hélène, ce qui surprend encore plus la jeune fille, mais son travail ne devrait durer que six mois et après, à elle l’Australie. En fait de dame de compagnie, Cindy, alias Hélène, va remplacer la fille décédée de Rosemonde. Un rôle de composition. Mais dans quel but ?

Gérard Alvès est directeur d’une société dont les finances sont précaires. Il est même près du dépôt de bilan. Cinq ans auparavant il a eu un terrible accident de voiture dans lequel est décédée sa fiancée. Il possédait déjà avec un associé une société qui a périclité mais depuis il s’est marié avec Agathe et il pensait pouvoir s’en sortir. Or son passé le rattrape, lorsqu’il aperçoit Cindy, ou plutôt Hélène. A moins que ce soit le contraire.

Débute une machiavélique machination orchestrée par Rosemonde, dans laquelle gravitent quelques personnages pas toujours vraiment irréprochables, dont le fils poivrot de Rosemonde, l’ancien associé de Gérard, mais également Paulo, l’ancien petit copain de Cindy qui s’inquiète de sa disparition, d’une caissière qui a reconnu en Cindy Hélène, un mystérieux individu qui surveille la demeure le soir du cimetière voisin. Entre autres.

 

Rosemonde se tient telle la Veuve noire au centre d’une toile d’araignée qu’elle a patiemment tissée, mais quelques frelons, asiatiques ou pas, pourraient bien venir la perturber dans son entreprise.

L’intrigue monte progressivement en puissance, car si le lecteur se doute dès le départ que Cindy va jouer un rôle à cause de sa ressemblance avec Hélène, l’affaire se révèle plus complexe qu’il y parait. Patrick S. Vast joue avec ses personnages, les imbriquant dans cette histoire tout en leur réservant une part de mystère. Mais c’est pour mieux nous appâter et l’on se prend à lire ce roman comme une mygale dévore ses proies, même si certaines se rebiffent, se rebellent, se débattent dans la toile, quitte à la trouer en certains endroits.

Si dans ma chronique concernant Potions amères, j’avais évoqué Louis C. Thomas et Boileau-Narcejac, ce roman confirme mes références littéraires, mais je m’aperçois que j’ai omis de citer également deux grands noms de la littérature de suspense : Georges-Jean Arnaud, durant une certaine période, celle par exemple des Jeudis de Julie, de L’homme noir, et d’autres, et surtout l’Américain Cornell Woolrich plus connu en France sous le pseudonyme de William Irish.

 

Vous pouvez commander cet ouvrage chez votre libraire en indiquant le numéro d'ISBN signifié ci-dessous, ou en vous rendant directement sur le site, pas besoin de prendre le train, indiqué ci-dessous :

 

Patrick S. VAST : Passé double. Le Chat moiré éditions. Parution le 1er juin 2018. 240 pages. 9,50€.

ISBN : 9782956188315.

Partager cet article
Repost0
13 juin 2018 3 13 /06 /juin /2018 13:16

Cela ne devrait pas l’empêcher de jouer au foot !

Maurice LIMAT : Le manchot.

Être frustre, Pascal est en proie à une obsession, qu'il impute à sa main. Il a des envies de trancher des têtes, une impulsion qu'il essaie de contrôler avec peine.

Il a sauvé la vie, lors d'une battue au sanglier, à monsieur Velier, le maire du village, en abattant la bête à coups de couteau. Il est devenu une gloire locale mais n'a pas pris la grosse tête pour autant. Il n'est guère instruit, désolant sa vieille institutrice. Alors il demande à monsieur Féras, le retraité lepidoptérophile qui possède également des milliers de livres, de lui en prêter. Pas des romans, non, des ouvrages instructifs, pédagogiques.

Pascal travaille à la scierie de la Plaine, mais pas comme ouvrier qualifié. C'est ce que l'on appelle une petite main, avec toujours comme unique pensée, celle de se couper la main droite avec une hache. En entendant un de ses compagnons d'atelier se vanter de ses bonnes fortunes auprès des femmes, une envie soudaine de l'occire à coups de bûches le prend. Heureusement il ne peut passer à la réalisation de ce souhait mortifère. Mais une autre idée lui traverse l'esprit en voyant la scie circulaire débiter des troncs d'arbres.

Il se coupe délibérément la main à l'aide de la scie, profitant d'un moment d'inattention du personnel. Après quelques semaines de convalescence, Pascal ne pouvant plus travailler à la scierie est employé comme jardinier chez monsieur Féras ainsi que chez les voisines du vieil homme, les dames Vaison, la mère et Corinne, sa jeune et belle-fille veuve. Corinne a vécu en Asie de longues années avec son mari et a acquis par mimétisme la particularité physique de ce continent. Pascal, malgré son handicap, effectue toutes sortes de petits boulots de jardinage chez ces particuliers, et sa main gauche devient habile et forte.

Une fin d'après-midi, alors que l'orage menace, Loulou, une gamine de dix-sept ans, et son ami Renaud, un peu plus vieux, batifolent dans une grange. Elle veut bien mais pas trop et alors qu'elle s'apprête à quitter son ami, tous deux aperçoivent une silhouette. Pour Loulou et Renaud, aucun doute, il s'agit de Pascal qui traîne dans les parages. Le jeune homme sort de la grange à la poursuite de cette silhouette mais lorsqu'il revient bredouille, c'est pour constater que Loulou est morte étranglée. Les examens médicaux concluent qu'elle a été étouffée par une seule main, la main droite.

Pascal est soupçonné mais la présomption d'innocence est rapidement avancée. Il ne peut avoir tenté à la vie de Loulou pour cause de main droite manquante. Un main qu'il croit toujours posséder, les terminaisons nerveuses le travaillant. De plus cette fameuse main n'a pas été retrouvée lors de l'incident à la scierie. Une véritable obsession qui le tenaille.

Un soir il entend Corinne crier. Aussitôt il se précipite. Quelqu'un a tenté de l'étrangler. Une main sans visage. Il possède un alibi, mais pas Renaud qui est arrêté puis relâché, faute de preuve. Puis c'est au tour de Renaud de subir une tentative d'étranglement. Là encore Pascal possède un alibi irréfutable. A sa demande il était attaché par des chaînes à la cave lorsque l'incident s'est produit.

 

La tension monte, l'angoisse est palpable et cette main qui lui fait toujours défaut mais qu'il accuse des méfaits qui se produisent. Tout tourne autour de monsieur Féras, de Corinne et sa belle-mère, de Renaud et Pascal. Et de cette main invisible comme maniée par un fil de marionnettiste, gravée comme une empreinte indélébile dans son esprit. Sans oublier le fidèle chien de Pascal, Faraud, qui le suit partout, malgré un incident au cours duquel il aurait pu perdre la vie.

A de rares exceptions près, comme la séance de batifolage dans le foin entre Loulou et Renaud, tout est narré à la première personne par Pascal. Il se décrit lui-même comme un simplet, un demeuré, n'ayant guère d'instruction même s'il en acquiert auprès de monsieur Féras. Or il s'exprime avec un vocabulaire assez riche, en légère contradiction avec ce qu'il est sensé être.

 

Réédition collection Super Luxe N°165. Editions Fleuve Noir. Parution février 1985. 192 pages.

Réédition collection Super Luxe N°165. Editions Fleuve Noir. Parution février 1985. 192 pages.

Maurice LIMAT : Le manchot. Collection Angoisse N°117. Editions Fleuve Noir. Parution 1er trimestre 1965. 224 pages.

Partager cet article
Repost0
11 juin 2018 1 11 /06 /juin /2018 06:35

Allongés sur la plage

Les cheveux dans les yeux

Et le nez dans le sable

On est bien tous les deux…

Alexis AUBENQUE : La fille de la plage.

Dès les premières pages, le lecteur quinquagénaire ou plus se retrouve plongé dans des images issues de son passé de téléphage amateur de séries américaines. Des séries qui comme Happy Days ou Santa-Barbara ont marqué leur imaginaire, à cause de leur ambiance, leur atmosphère, leurs décors.

En ce samedi 6 juin, quatre amis se préparent pour la petite fête organisée pour la fin de l’année universitaire. Jason, riche et beau, Keith, beau mais pas riche, Nathan, riche mais qui à la place des tablettes de chocolat abdominales de ses amis possède des rondeurs de pâtes à tartiner, et Sandy, le garçon manqué. Tous quatre ont gravé leur amitié lorsqu’ils avaient douze ans dans leurs mains et les cicatrices sont encore présentes. Maintenant, à vingt ans, ils se protègent, se conseillent, s’encouragent toujours, sans une once de jalousie entre les uns et les autres.

Jason a une petite amie, Tiffany, un peu peste. Keith aussi a une petite amie, mais comme elle est en voyage, on la délaissera. Nathan aimerait bien, mais il est timide et il n’ose pas avouer à Laura qu’il est fort attiré par elle. Quant à Sandy, elle redoute cette épreuve de la fête, car il va lui falloir s’habiller en robe, elle qui néglige sa touche de féminité.

Pourtant, au cours de la soirée, elle se laisse entraîner par Peter, et au grand étonnement de ses amis, elle danse merveilleusement. Elle a pratiqué la danse quelques années auparavant, mais elle s’est détournée de cette pratique pour diverses raisons. Bref, à part un accrochage avec Victor, le mauvais garçon, et une interruption momentanée dans les toilettes alors que Tiffany avait entrepris une gâterie à Jason, mais ceci ne nous regarde pas, tout se passe bien.

Nathan et Laura se sont trouvé des affinités réciproques et ils décident de comparer leurs atomes crochus sur une plage à l’écart de Santa-Barbara. Alors qu’ils sont entrain de batifoler et Nathan conclure ce qu’il n’avait jamais osé espérer, il aperçoit une ombre sur un rocher. Comme si quelqu’un les épiait. Nathan, n’écoutant que son courage, et peut-être pour épater sa copine va voir. Il s’agit d’une jeune fille, vivante, ayant probablement échappé à la noyade et ayant reçu un coup sur la tête. Et lorsqu’elle reprend ses esprits, cette jeune fille déclare ne se souvenir de rien, s’appeler Chelsea, et puis c’est tout. De tout ce qu’il s’est déroulé avant, elle ne se souvient plus. C’est quand même embêtant, d’autant qu’elle ne possède pas de pièces d’identité.

Nathan fait appel à ses amis et en attendant décide de la cacher dans son yacht, pardon, le yacht de son père. L’un des plus beaux du port. Et durant quarante huit heures, nous assistons à cette histoire qui développe plusieurs intrigues, car tour à tour les actions de chacun des quatre amis sont développées.

Ainsi Jason se voit remettre les clés d’un petit appartement en ville et il ne va plus subir la famille à son grand soulagement. Mais en même temps il va accueillir sa grand-mère Dodi, qui malade s’est échappée d’une clinique. Elle est atteinte d’un symptôme rare, se déclare en rémission et veut profiter d’un week-end au soleil.

Keith va tomber amoureux de Chelsea, tandis que Nathan se voit rabrouer par Laura. Elle reçoit des photos, via son téléphone, la montrant nue sur la plage, avec des messages d’intimidation. Elle en est toute déboussolée et se retranche dans sa chambre. Quant à Sandy, sa prestation comme danseuse a laissé des traces et Peter la conjure de venir rencontrer un professeur de danse qui a connu bien des vicissitudes familiales.

Dans un commissariat où Chelsea se rend accompagnée, elle distingue au mur la photo d’un délinquant recherché par la police. Des images l’agressent, des souvenirs qu’elle ne peut canaliser, mettre en concordance, jusqu’à ce que tout se mette en place, peu à peu grâce à des événements extérieurs.

Quarante huit heures dans la vie de quatre amis et de leurs compagnons, de leur famille, parents, sœurs, qui vont les marquer, et qui se déroulent à un rythme effréné, sans aucun temps morts. Quarante huit heures intenses qui mêlent amour, humour, tension, angoisse, peur, et qui pourraient se révéler dramatiques, voire tragiques.

 

La fille de la plage aurait pu être une romance, mais l’auteur joue avec les sensations, les sentiments, entraîne le lecteur dans un tourbillon qui s’emballe peu à peu pour devenir une véritable tornade infernale. Une nouvelle réussite à mettre à l’actif d’Alexis Aubenque, quelque soit le domaine qu’il aborde.

Avec un pincée de drogue, quelques caresses érotiques, une larme d’alcool (les moins de vingt et un ans aux USA n’ont pas le droit de boire des boissons éthyliques dans les bars et lieux publiques), et une grosse dose de suspense et d’angoisse assaisonnée d’humour, d’émotions et de nostalgie, telle est recette pour écrire un bon roman. Encore faut-il que le maître queux soit à la hauteur et réussisse à marier tous ces ingrédients et leur exhausser la saveur. Alexis Aubenque mérite amplement ses quatre étoiles. Il est encore un peu jeune pour en obtenir cinq.

Quelque chose me dit qu’on devrait retrouver tout ou partie des différents personnages de ce roman dans un prochain ouvrage.

 

Ne cherche jamais à comprendre les filles, tu auras plus vite fait d’apprendre le chinois.

Les flics sont parfois des abrutis, mais pas des assassins.
Va dire ça à tous les Noirs qui se font tirer comme des lapins chaque année.

Je te l’ai dit, il n’y a rien de plus apaisant qu’un cimetière. Il n’y a plus de souffrance, plus de violence, plus de guerre. Il n’y a que de la paix et de la sérénité.

Alexis AUBENQUE : La fille de la plage. Editions Hugo. Parution le 16 mai 2018. 480 pages. 17,00€.

ISBN : 978-2755637021

Partager cet article
Repost0
27 mai 2018 7 27 /05 /mai /2018 06:50

Voici pour cent francs du thym de la garrigue

Un peu de safran et un kilo de figues

Voulez-vous, pas vrai, un beau plateau de pêches

Ou bien d'abricots ?

Louis PIERRISNARD : La bastide des ombres.

Dans ce coin du Var, le département précisé-je puisque le fleuve côtier homonyme ne le traverse pas, près de Belgentier sur les hauteurs de la vallée du Gapeau, s’érige une bastide dans laquelle arrive un beau jour le narrateur.

Cela fait bien des années qu’il ne s’est pas rendu dans ce lieu qui transpire le calme, la sérénité. Il venait autrefois avec ses parents et ils étaient logés dans le bastidon, petite construction à l’écart de la bastide. La mère était apparentée aux actuels propriétaires, une famille composée d’Alrieu, le grand-père, d’Anaïs, une vieille femme, et de quatre autres personnes, Simon, Médard, Jeannette et Yvette.

Il est accueilli comme un ami de la famille, mais vu son statut d’adulte et d’ouvrier de la ville, et en référence à son père défunt, le Papé le vouvoie. Et il aura le privilège de manger à la même grande table et dormir dans une chambre à l’étage. La cuisine est bonne, les effluves l’indiquent avant même de tremper sa cuiller dans la soupe.

Mais au cours de la nuit des événements étranges se produisent. Les lumières s’allument toutes seules et une longue plainte, comme un cri prolongé, retentit en provenance de nulle part et de partout. Il a bien entendu une réflexion émanant de Jeannette, à moins que ce soit d’une autre habitante, qui parlait de la lumière, mais sans plus. Au petit matin lorsqu’il fait part de son étonnement, le Papé détourne la conversation en lui demandant s’il a entendu le vent souffler. Les yeux du Papé pétillent de malice.

Foin de ces événements, la journée est belle, et notre narrateur vacancier se promène dans la campagne, admirant la flore, respirant ces senteurs inconnues de la ville, et regardant le Papé faucher à l’ancienne la luzerne. Un environnement bucolique qui incite à déguster la provende de la bastide.

Deux ouvriers de l’EDF, oui, à cette époque on savait quelle était la signification des sigles attribués aux entreprises d’état, deux ouvriers donc viennent pour changer un poteau électrique. Ils doivent remplacer le vieux mât en bois accolé au mur par une érection métallique qui ôte tout charme à la façade de la bastide.

Et justement le charme est rompu lorsque les deux électriciens d’état mettent au jour un squelette. Alors que les deux hommes préviennent la gendarmerie, le Papé et le narrateur font une autre découverte stupéfiante et pourtant ils n’ont pas fumé d’herbe. Une chevalière accrochée à un doigt et un oignon, enfin une montre pour ceux qui n’ont pas connu cet objet. Deux reliques qui sont aussitôt associées à un nom par le Papé.

Pour un mystère, c’en est un, et un gros qui plus est. Notre vacancier va se trouver au cœur d’une enquête menée par le patriarche, et la vieille Anaïs voit se réveiller de vieux fantômes.

 

Naturellement, en cours de lecture, le liseur ne peut s’empêcher de penser à de grands noms de la littérature provençale. Jean Giono, Marcel Pagnol, Alphonse Daudet, et il souffle comme un air de Mistral, le poète pas le vent. Si, le vent aussi. Pour le décor, les senteurs, les bruissements, les personnages, le parler, tout un ensemble qui fait croire que… et pourtant Louis Pierrisnard possède son univers particuliers, sa façon de décrire, sa faconde même, son onirisme, sa poésie, son sens du détail et de la mise en scène, mais également celui du non-dit.

Les mystères s’enchaînent, se suivent et ne se ressemblent pas, se laissent dévoiler comme des poupées russes qui s’emboîtent ou se déboîtent à volonté. Un roman fantasque limite fantastique qui est une ode à la nature, à la Provence et à ses habitants, humains, flore et faune.

 

Vous savez bien, ces étagères de la mémoire où chacun va chercher ce qu’il veut, pour en faire ce qu’il voudra, le gardant intact ou le déformant à loisir grâce à l’outil du temps qui, plus qu’un marteau, une lime ou une pince, peut détruire des merveilles et valoriser des vieilleries !

Louis PIERRISNARD : La bastide des ombres. Collection Terre d’Histoires. Editions City. Parution le 29 novembre 2017. 224 pages. 17,50€.

ISBN : 978-2824611105

Partager cet article
Repost0
16 mai 2018 3 16 /05 /mai /2018 08:31

Le nouveau Bussi ? Non, un ancien Bussi rénové !

Michel BUSSI : Sang famille.

Comme l’explique Michel Bussi dans sa préface, Sang Famille est l’un de ses premiers romans écrits, mais son quatrième roman publié chez son premier éditeur, les éditions des Falaises/PTC. Donc il ne s’agit pas là d’une véritable nouveauté, mais il ne nous trompe pas sur la marchandise. Pour cette réédition aux Presses de la Cité, il a légèrement réécrit son ouvrage effectuant des corrections de forme. Mais il a apporté une modification qui pourrait sembler mineure mais est qui est d’importance, la substitution d’un élément masculin par un personnage féminin.

Mahina remplace donc l’un des deux compagnons de Colin, le personnage central du roman, et cette touche de féminité s’inscrit dans l’air du temps tout en nous ramenant à quelques lectures anciennes juvéniles ancrées dans notre mémoire. Je pense notamment au Club des cinq d’Enid Blyton.

Pour autant il ne s’agit pas de respecter une certaine parité politiquement correcte, mais de fournir au texte un bain de fraîcheur, une présence féminine émotionnelle mais pas niaise, de jouer avec les codes ségrégationnistes des camps de vacances, d’enrichir le propos du comportement humain, de mieux se calquer sur la vie sans ériger de barrières.

 

Ce qui suit, est le texte que j’avais rédigé lors de la parution de ce roman en 2009, et je n’ai rien changé, par respect envers l’auteur.

 

“ Les jolies colonies de vacances, merci maman, merci papa… ” comme chantait Pierre Perret. Colin n’est pas un accro des colonies, des camps de vacances, des stages et encore moins ceux consacrés à la voile. Et s’il doit remercier quelqu’un, c’est lui même car il est orphelin depuis dix ans. S’il s’est inscrit pour participer à un stage à l’île de Mornesey, c’est qu’une idée bien ancrée dans sa petite tête d’adolescent de seize ans le turlupine : retrouver la trace de son père disparu et dont il pressent que tout ce qu’on a pu lui dire depuis des années ne sont que mensonges et compagnie. Effectuant des fouilles dans les ruines de l’abbaye de Saint Antoine dans l’île de Mornesey avec quelques amis et sa femme, Jean Rémy se serait suicidé en mer après des incidents ayant coûté la vie à trois ouvriers. Sa mère aurait eu un accident de voiture peu après et Colin a été recueilli par son oncle et sa tante. Ses soupçons ont été étayés par de petits indices qui mis bout à bout formaient un faisceau de preuves irréfutables, du moins à son avis.

L’île de Mornesey, située dans la Manche au large de Granville, possède deux particularités : depuis plusieurs siècles une prison y est édifiée, servant autrefois de transit pour les bagnards, mais aujourd’hui encore débordante d’activités. Pour preuve, cette évasion de deux prisonniers, dont l’un est multirécidiviste, donc dangereux, et l’autre devant être libéré dans deux mois. L’autre particularité réside en une légende, celle d’un trésor nommé la Folie Mazarin qui serait caché probablement dans l’un des nombreux souterrains qui traversent l’île de part en part. Tandis que Colin cherche à confirmer ses soupçons, Simon Casanova, jeune agent de sécurité temporaire sur l’île, entame sa petite enquête sur cette étrange évasion. Une investigation qui va le mener loin, très loin, jusqu’à Nice, et qui ne sera pas sans rapport avec les tribulations de Colin.

Sang famille, titre jeu de mots qui rappelle un célèbre roman d’Hector Malot, se révèle justement le prototype même du roman populaire de la fin du XIXème siècle et du début du XXème. Avec son lot de mystères, de courses poursuites, de trésors supposés (ou non), d’un adolescent narrateur, pour une partie du texte, et héros malmené, des méchants, des bons, des personnages secondaires qui ne le sont pas tant que ça. Ainsi Clara employée de mairie à la recherche de l’amour, ou tout au moins une amourette pour faire passer le temps et adepte du karaoké sur ordinateur ou Delpech journaliste indépendant et rédacteur du seul journal de l’île. Quelques bévues et incohérences dans le déroulement de l’histoire émaillent le récit. Pour preuve ce problème de datation : sur la tombe des parents de Colin, il est indiqué que le père est né en 1962 et la mère en 1965, or l’on apprend qu’ils avaient tous deux 19 ans lorsqu’ils se sont rencontrés. D’autres petites erreurs, toujours dans le décompte des années, attireront l’attention du lecteur, mais ce n’est pas grave en soi. Autre petite anomalie, en l’an 2000, puisque l’action se déroule en août 2000, on ne parlait pas encore en euros, et il eu peut-être été plus judicieux de laisser les prix en francs, quitte à signaler la conversion dans une petite note en bas de page. Quoi qu’il en soit, ce roman est très agréable et nous offre plus qu’un roman policier, un véritable roman d’aventures et de mystères.

Première édition : Editions des Falaises/PTC. Parution juin 2009.

Première édition : Editions des Falaises/PTC. Parution juin 2009.

Michel BUSSI : Sang famille. Edition Presses de la Cité. Parution 16 mai 2018. 496 pages. 21,90€.

ISBN : 978-2258113091

Partager cet article
Repost0
9 mai 2018 3 09 /05 /mai /2018 06:59

Ange ou démon ?

Sylvie HUGUET : La noirceur du cristal.

Jeune, on n’a qu’une hâte : vieillir afin de profiter de la vie à pleines dents, de se sentir libre, ne plus dépendre des parents. Un leurre car l’on dépend toujours de quelqu’un ou de quelque chose.

Arrivé à l’âge des vétérans de la vie (j’ai horreur du mot senior qui n’est qu’une hypocrisie, senior étant réservé dans le monde du travail ou médical à des quadragénaires et des quinquagénaires), on se retourne sans cesse, quitte à attraper un torticolis, sur son passé avec nostalgie. En général.

C’est ainsi qu’en octobre 2028, Olivier, le narrateur, se souvient d’un épisode de sa vie durant l’été 1994 alors qu’il était en vacances avec son ami le commissaire Gilles Verneuil, décédé depuis peu, dans un petit village des Pyrénées.

Aude et son frère Tristan, ainsi que leurs parents, possèdent un centre équestre, et Gilles est attiré par les chevaux, lui qui est un cavalier accompli. Mais Olivier rechigne, ayant eu dans son enfance des problèmes avec ces animaux au caractère parfois ombrageux. Selon ceux qui les élèvent et les montent. Cette phobie, Olivier la doit en particulier à sa mère, pourtant Gilles parvient à lui faire surmonter sa répulsion. Gilles mais également Aude et Tristan qui lui promettent un cheval doux, facile à manier.

Aude est fiancée à Marc, un propriétaire voisin dont les terres seraient propices à agrandir le centre équestre. Malgré tout Gilles et Olivier sont parfois déroutés par l’attitude de la jeune fille qui se comporte en coquette. Quant à Tristan, marié avec Thérèse, il veille jalousement sur sa sœur.

Gilles et Olivier ne sont pas les seuls à fréquenter le centre et à effectuer des randonnées en compagnie d’Aude laquelle sait quel cheval réserver aux participants. Certains de ces touristes se montrent entreprenants auprès d’Aude. Des goujats qui se font remettre à leur place vertement, ou qui sont plus ou moins encouragés dans leurs démarches de Don Juan qui ne doutent de rien.

Gilles et Olivier observent ces tentatives, ce marivaudage avec amusement, d’autant qu’Aude et Tristan deviennent leurs amis. Mais le batifolage, plus ou moins encouragé au départ, se transforme souvent en propos acerbes et acrimonieux. Parfois ils se sentent gênés, comme des témoins qui ne seraient pas à leur place. Et un soir un drame survient. L’un des touristes indélicats est retrouvé blessé à mort sous les sabots du cheval que conduit habituellement Tristan, un animal qui ne connait que son maître.

Un autre accident se produit un peu plus tard, dans des conditions similaires et sans le témoignage de Marc, notamment, l’animal aurait été abattu. Mais Gilles et Olivier sont circonspects.

 

Les rapports entre Aude, qui parait nettement plus jeune qu’elle l’est réellement, et Tristan son frère, sont équivoques. Comme s’ils étaient des jumeaux siamois, de cœur et d’esprit. De même les relations maritales entre Tristan et Thérèse sont constituées de hauts et de bas. Cela dépend s’ils sont au lit ou non.

Gilles et Olivier, quant à eux, s’ils sont amis depuis quelques décennies suite à une affaire menée par l’ancien commissaire de police et concernant Olivier, ils se vouvoient toujours, par respect et courtoisie l’un envers l’autre. Des relations amicales qui ne sont entachées d’aucunes arrière-pensées.

 

Le lecteur découvre cette histoire par deux biais. La narration d’Olivier, qui est professeur et romancier, est entrecoupée par des passages extraits du journal de Tristan. Un journal qui révèle peu à peu le caractère du frère et de la sœur, dont les relations sont fusionnelles et ambigües. Mais également celles de Marc envers Aude et Tristan.

Un roman bucolique, animalier dans lequel on retrouve une passion pour la campagne secrète et les chevaux. Sans oublier les chiens. Et l’être humain qui n’est qu’un animal un peu plus évolué, parait-il, mais dont les sentiments se révèlent plus complexes.

Le style plaisant de Sylvie Huguet m’a fait penser parfois à celui d’anciens auteurs du début du XXe siècle, Anatole France, Hector Malot qui écrivit d’admirables romans d’étude sociale dont Les Millions honteux, ou encore Rosny Aîné, par exemple. Ils savaient camper des personnages, étudier leurs comportements, décrire les paysages et les actes des protagonistes, sans pour autant se montrer agressifs, vulgaires, dédaigneux de la langue française comme chez bien des écrivains de nos jours. Leur style était peut-être parfois un peu pompeux, voire précieux, de nos jours désuets, mais quel plaisir on ressent en les relisant, car au moins ils ne se moquaient pas de leurs lecteurs en peaufinant leurs phrases, leurs dialogues.

Sylvie Huguet fait partie de ces amoureux des lettres et de la belle phrase. Un véritable rafraîchissement pour l’esprit. Et pour autant, l’intrigue n’est pas dédaignée, au contraire.

 

Sylvie HUGUET : La noirceur du cristal. Collection Signé Polar. Editions La Main multiple. Parution 15 mars 2018. 122 pages. 15,00€.

ISBN : 978-2356960597

Partager cet article
Repost0
5 mai 2018 6 05 /05 /mai /2018 08:31

Et s’il n’en reste qu’un, je serai celui-là…

David COULON : Je serai le dernier homme…

Afin d’éviter de se faire contrôler par la maréchaussée qui trouve toujours une bonne occasion pour défourailler leurs éthylotests, le narrateur emprunte ce qu’avec sa femme Mathilde il a surnommé l’autoroute des alcooliques. Un itinéraire qui lui évite les grandes nationales et rentrer chez lui dans un petit village situé entre Rouen et Le Havre, sans se faire importuner.

Or ce soir là, alors qu’il revient, alibi auprès de son épouse, d’un entretien d’embauche mais qui en réalité était une relation de débauche en compagnie de sa maîtresse, il entend comme un coup de pétard. Ce n’est pas un pneu qui vient d’éclater, il est rassuré, mais cela ressemble fort à des coups de feu.

Il sort de sa voiture et à ce moment là une jeune femme débouche d’un champ de blé et s’engouffre dans sa voiture, coté conducteur. Il l’en extrait violemment, la jeune femme tombe sur un caillou et c’est l’accident mortel. Le narrateur est bien embêté. Il tergiverse mais n’appelle pas la police ou les secours. Une erreur qui va l’entraîner dans des pérégrinations dramatiques.

Il met le cadavre dans son coffre, en attendant de trouver une solution, et au lieu de rentrer chez lui, il prend une chambre dans un hôtel franchisé. L’anonymat parfait.

Il était ouvrier dans une usine pétrochimique mais tous les employés ont reçu leur feuille de licenciement quelque temps auparavant. Sa femme est institutrice et pour l’heure c’est elle qui assure la pitance de leur gamine Emma. Il recherche bien un emploi, mais il se retrouve toujours avec des réponses négatives.

Avec ses indemnités, un chèque qu’il vient juste de recevoir, il met une option sur une vieille grange afin de pouvoir y cacher le corps, et il se met en tête de découvrir par qui et pourquoi cette femme nue avait été enlevée. Car d’autres disparitions sont à signaler dans la région, dont celle d’un adolescent qui a eu la main tranchée.

Commence alors un périple qui le rapproche peu à peu des ravisseurs, mais si Mathilde lui envoie des Je t’aime sur son téléphone lorsqu’il est absent, théoriquement pour la recherche d’un emploi alors qu’il copule avec Anna, ou se baguenaude sur les routes, il sent que son environnement familial se délite.

 

C’est l’histoire d’un mec, comme disait Coluche, qui accumule les fautes et les erreurs, car lui-même est fautif. Il se comporte comme un coupable alors qu’en réalité il est une victime. Mais il est vrai que se retrouver avec un cadavre sur les bras n’est pas une situation que l’on rencontre tous les jours.

David Coulon a choisi une voie et il la développe avec un machiavélisme diabolique. On ne voudrait vraiment pas être à la place du narrateur, et pourtant on voyage dans son esprit et on assiste à son enquête, à ses errements, à ses déceptions, à ses peurs, à son effroi. On a envie parfois de le morigéner comme un gamin, de lui dire d’arrêter de se comporter tel qu’il le fait, de s’ériger en adulte responsable, mais que pouvez-vous exiger d’un narrateur qui n’en fait qu’à sa tête !

Mais peut-être pourrait-on avancer au moins une explication, sinon plusieurs, à ce comportement. Si, une hypothèse, le narrateur n’avait pas été licencié comme ses autres collègues, aurait-il eu du temps pour aller batifoler avec Anne, et prétendre qu’il se rend à des entretiens d’embauches ? Et rentrer tard le soir, l’obligeant à un détour ? Ce n’est qu’une théorie et elle vaut ce qu’elle vaut, mais on peut toujours se poser les questions.

David Coulon assène ses phrases comme un boxeur ses coups sur un punching-ball et pourtant certains passages se révèlent poétiques, des vers libres. Des vers de poésie et non des vers, animaux invertébrés qui parait-il se nourrissent de cadavres. On navigue entre deux eaux, et peut-être est-ce du masochisme, on en redemande.

 

David COULON : Je serai le dernier homme… Roman policier mais pas que… Editions Lajouanie. Parution le 9 mars 2018. 300 pages. 18,00€.

ISBN : 978-2370470911

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
  • Contact

Recherche

Sites et bons coins remarquables