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10 février 2020 1 10 /02 /février /2020 05:57

Y’a un truc !

Paul FEVAL Fils : L’escamoteur de femmes.

Trois enlèvements de jeunes filles se produisent quasiment simultanément en trois endroits différents et les journaux relatent abondamment cette affaire qui met en transe bon nombre de personnages.

En premier, il s’agit de la disparition mystérieuse d’Yvonne de Pergartin, fille du comte et député résidant à La Chapelle-sur-Erdre en Loire-Inférieure, ancienne appellation de la Loire-Atlantique. Alors qu’elle s’apprêtait à se marier avec le vicomte Gérard de Sousgarde, elle regarde son fiancé et s’évanouit. Le jeune homme prend précipitamment la jeune fille dans ses bras et l’emporte dans sa chambre. La porte est enfoncée et personne dans la pièce. Disparue Yvonne ! Le vicomte est retrouvé un peu plus tard évanoui dans une autre pièce. Et des relents de chloroforme se dégagent.

En Italie, c’est une jeune nonne, Carlotta Borgerelli fille d’un puissant industriel, qui devait prendre le voile qui disparait dans des conditions tout aussi mystérieuses dans la chapelle où devait se dérouler la cérémonie. A Londres selon le même principe et dans des conditions similaires, Maud Samseton, la fille d’un riche banquier, est enlevée.

Trois affaires qui ont toutefois quelques points communs dont la presse se fait l’écho. Lors de l’enlèvement d’Yvonne, une auto noire a été vue dans les parages, en Italie un avion peint de la même couleur et en Angleterre, un navire quittant les eaux de Brighton. Trois moyens de transports différents mais tous de couleur noire. Et les trois jeunes filles vont voyager ensemble mais séparément, c’est-à-dire qu’elles seront confinées chacune dans une cabine, pour être emmenées dans une bâtisse bien gardée sur une île de l’Océan Atlantique.

Mais cette affaire ne s’arrête pas là car le coffre-fort du notaire de la famille de Pergatin a été cambriolé. Les policiers locaux préfèrent passer la main à la Police Judiciaire parisienne et deux inspecteurs sont dépêchés à la Chapelle-sur-Erdre pour mener leur enquête.

Et à l’Agence L’œil à Tout, les événements sont suivis attentivement par le patron de l’agence de détectives, Bernard Curville. Cette officine privée possède de nombreuses agences de par le monde. Tout en classant des dossiers, aidé par sa secrétaire la belle Violette Dreux, il écoute les messages diffusés sur un petit poste TSF, messages dont la teneur est relative à des hirondelles convoyées par mer et arrivées dans une île. Surnommé l’Homme à la pince, d’après une affiche publicitaire vantant les mérites de Curville à qui aucun secret ne résiste, le détective est satisfait.

 

Changement de décor et d’époque. Vingt ans auparavant, à Paris.

De Pergartin, Borgerelli et Samseton étaient étudiants à Paris et surtout ils étaient amis. Dans leur sillage ils traînaient Yves de Trévenec, lui aussi étudiant. Ils étaient surnommés les Mousquetaires, Trévenec endossant quelque peu le rôle de d’Artagnan. Invités par de Pergartin chez son oncle le comte de Buittieux, un riche nobliau de province, ils se rendaient parfois à La Chapelle-sur-Erdre. Trévenec fit la connaissance de Solange la fille du comte et les deux jeunes gens étaient liés par un sentiment amoureux. Mais le comte refusa l’idée de ce mariage et exigea des fiançailles officielles avec de Pergartin. Seulement Solange fut enlevée dans des conditions mystérieuses deux jours plus tard le comte était mortellement blessé avec un couteau. Avant de décéder il eut le temps de léguer sa fortune à de Pergartin. Yves de Trévénec fut accusé du crime et Solange informée des événements dans sa retraite refit son apparition, se mariant alors avec son cousin. De Trévenec fut appréhendé et envoyé au bagne en Guyane malgré ses dénégations.

C’est en substance ce que narre le procureur général Gouchard au ministre de l’Intérieur. Cette affaire s’était déroulée en 1912, dont il fut chargé de l’instruction. Comme elle refait surface, il demande qu’exceptionnellement, sa fonction de procureur lui soit retirée et qu’il soit nommé juge d’instruction pour instruire cette nouvelle affaire d’enlèvements des filles des anciens amis. Des amis qui d’ailleurs ne se parlent plus, s’ignorent même depuis l’assassinat du comte vingt ans auparavant.

Déporté au bagne, à Cayenne, Yves de Trévedec n’est pas un forçat comme les autres. Affable, prêt à rendre service, discipliné, il sait se faire aimer aussi bien de ses codétenus que des matons et même du directeur de l’établissement. Grâce à ses notions de médecine il sauve même la fille de monsieur Bouvet et celui-ci, en reconnaissance l’aide à s’évader. Et c’est ainsi qu’Yves de Trévedec découvre un placer dans la jungle et peu à peu il construit sa fortune.

Aidé par des amis dévoués, il devient Joao Marco, riche Portugais et il fréquente assidument ou échange des informations avec notamment Curville, le détective surnommé L’homme à la pince.

 

On ne peut s’empêcher en lisant ce roman de penser aux feuilletonistes célèbres que furent Alexandre Dumas, Michel Zévaco, Paul d’Ivoi, et bien d’autres, par cette fougue qui anime l’auteur, son imagination, ses délires et son côté fantasque, par une légère approche de la fiction scientifique avec des inventions qui plus tard deviendront réalités.

Naturellement, le personnage d’Yves de Trévenec possède un lien évident de parenté littéraire avec Edmond Dantès, le fameux comte de Monte-Cristo, mais pas que. La vengeance qui l’anime, cette richesse qu’il se constitue, ce retour sous une identité d’emprunt forment le socle de cette intrigue. Et comme dans tout bon roman d’aventures, se greffe une histoire d’amour, le petit plus savoureux qui offre une pause dans toutes ces péripéties débridées. Sans oublier l’humour qui se révèle par-ci par-là afin de dédramatiser certaines situations.

Roman d’aventures, roman policier, roman de frissons et d’angoisse, de suspense, L’escamoteur de femmes est tout cela à la fois, et de nos jours on pourrait le classer dans le genre Frileur (ou Thriller pour les puristes anglophones) même si certains osent déclarer qu’ils ne lisent jamais ce genre d’ouvrages. A croire qu’ils ne connaissent pas la signification exacte de Thriller dont au cinéma le plus célèbre représentant est bien évidemment Alfred Hitchcock.

 

 

Paul FEVAL Fils : L’escamoteur de femmes. Roman posthume. Collection Les Grands Romans. Editions Albin Michel. Parution 8 décembre 1941. 192 pages.

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6 février 2020 4 06 /02 /février /2020 05:56

Le cheval, la plus belle conquête de l’Homme ? Parfois ce serait plutôt le contraire…

Henry V. LAROM : Un poney des Rocheuses

Pour la première fois de sa courte existence, le jeune Andy Marvin passe des vacances dans la ferme de son oncle dans le Wyoming, et plus précisément dans les Montagnes Rocheuses. Il profite du grand air et de la nature. Et surtout, si ses travaux l’accaparent, cela ne lui pose aucun problème car il s’occupe des chevaux, et plus particulièrement du poney qui lui a été attribué, la petite Snippy.

Un jour qu’il revient du village, il aperçoit un homme maltraitant un magnifique alezan. L’animal est jeune, pas encore dressé, et se rebiffe. Au lieu d’user de douceur et de fermeté, l’homme nommé Garland lui assène des coups de cravache, tire sur le mors, et l’animal apeuré a la bouche ensanglantée.

N’écoutant que son courage et son amour des chevaux, Andy s’interpose et propose d’acheter l’alezan. Les négociations sont âpres mais Andy parvient à ses fins, au prix de quarante dollars. Et l’oncle Wes n’est guère satisfait, ayant un vieux contentieux avec le nommé Garland.

Un bronco, c’est-à-dire un alezan qui n’a jamais été sellé, ne se monte pas si facilement, surtout lorsqu’il a subi des sévices. Alors Andy ne parviendra à se tenir dessus et à le diriger qu’au bout de nombreuses heures de dressage, et de patience, entouré et encouragé par son oncle et la fille adoptive de celui-ci, la pétulante Sally, véritable garçon manqué de dix-huit ans.

Des chevaux se sont échappés d’un corral voisin et une prime est offerte à qui les retrouvera. Naturellement Andy se propose de participer aux recherches bien juché sur Sunny, son alezan presque docile, et il s’enfonce dans les Rocheuses. S’il parvient à les retrouver et les ramener, ce sera tout bénéfice pour lui, ainsi que pour Sally qui l’accompagne et l’aide.

Mais d’autres amateurs sont sur les rangs dont Garland et une bande de Dudes, des petits voyous venus de la ville et qui ne lésinent pas sur les coups de feu le cas échéant. Et les dangers se dressent sur la route d’Andy qui ne s’arrête pas en si bon chemin. Car des vols de chevaux sont signalés et Andy accompagne son oncle Wes qui a confiance en lui. Heureusement car la pluie, la tempête, le froid, la neige plus les bandits qui s’invitent dans cette chasse, sans oublier les blessures occasionnées à cause des voleurs de chevaux et des éléments naturels perturbent leurs recherches.

Andy peut compter sur Sunny et il parvient à prévenir le shérif grâce à un téléphone de campagne installé dans une baraque réservée aux garde-chasses qui eux aussi viennent à la rescousse.

 

Un roman dont le Wyoming sert de décor naturel et dont les chevaux, dont la petite Snippy et l’ombrageux Sunny, sont parties prenantes parmi les hommes se pourchassant.

Un roman réaliste pour jeunes et moins jeunes lecteurs, et qui décrit la nature et la vie quotidienne des éleveurs de chevaux au milieu du XXe siècle en cet état rural. Un roman que l’on pourrait cataloguer comme un épisode du Far-West mais sans les Indiens.

Il n’y a pas de temps morts dans cette aventure d’un jeune citadin qui découvre la campagne et s’y trouve à son aise. Un roman d’aventures plaisant qui est également un reportage et un documentaire sur la vie des ruraux aux USA.

Henry V. LAROM : Un poney des Rocheuses

Henry V. LAROM : Un poney des Rocheuses (Mountain Pony – A story of the Wyoming Rockies. 1946. Traduction de Charlotte et Marie-Louise Pressoir). Illustrations de Jean Reschofsky. Collection Bibliothèque Verte. Editions Hachette. Parution 1952.

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4 février 2020 2 04 /02 /février /2020 05:47

Qu’il se dépêche, ils sont en train de fondre !

Serge BRUSSOLO : Le voleur d’icebergs.

Pilote et unique membre d’équipage de son vaisseau spatial, Daniel Sangford ramène sur Terre, en guise de frêt, des tonnes de minerai énergétique, mais également pour son compte personnel, en fraude en quelque sorte, des gemmes qui pourraient bien être des pierres précieuses.

En fait de pierres précieuses, ce sont des œufs qui, grâce à l’humidité ambiante, ont muté et sont devenus de bizarres monstres préhistoriques, genre ptérodactyles et autres réjouissances.

Daniel Sangford est obligé d’atterrir en catastrophe sur la plus proche planète. Celle-ci est recouverte de glace. Aucun être humain, aucun signe de vie.

Seule la carcasse d’un autre vaisseau spatial et les cadavres de ses membres d’équipage.

Au cours de ses recherches, Dan pense avoir déniché un trésor. Mais comme tout trésor, celui-ci n’est-il pas porteur d’une terrible malédiction ?

 

Que dire de ce roman ? Que c’est du Brussolo. Addictif et irritant à la fois. Avec certaines répétitions, des erreurs de non-relecture (Daniel devient à un certain moment David), des idées pas toujours bien exploitées.

Comme si Serge Brussolo, pressé par le temps, c’est vrai que les glaçons fondent vite, et peut-être par son éditeur, n’avait pas eu le temps d’exprimer tout le potentiel de son intrigue et qu’il lui fallait le nombre de pages imposées par le cahier des charges.

Mais à ne pas négliger pour tout collectionneur des romans de Brussolo en particulier et des ouvrages de la collection Anticipation en général. Mais peut-être a-t-il repris ce thème dans un autre de ses romans et en a-t-il tiré une intrigue nouvelle et plus aboutie. Ce ne serait pas la première fois, tant certains de ses livres donnent l’impression de déjà lus.

Serge BRUSSOLO : Le voleur d’icebergs. Collection Anticipation N°1615. Editions Fleuve Noir. Parution mars 1988. 192 pages.

ISBN : 2-265-03797-4  

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1 février 2020 6 01 /02 /février /2020 05:36

Il était une fois… dans trois mille ans !

Kurt STEINER : Aux armes d’Ortog.

Jeune berger, Dal Ortog est chargé de surveiller le troupeau de mégathériums parti pâturer dans les bois environnant le village de Galankar. Une occupation qui demande son attention car les mouches, aussi grosses que des mains s’attaquent aux yeux des imprudents. Heureusement il possède un masque aux multiples usages. Quant aux hybrides, il les repousse à l’aide d’un coagulant.

Mais ce jour là, lorsqu’il rentre au village, tout est calme. Trop calme. Son père, âgé de soixante ans, vient de décéder. Soixante ans c’est jeune, pourtant le Maisonnier-Banneret Jaral Kerr Jaral lui parle de sénescence, euphémisme pour désigner la vieillesse.

Trois clans s’affrontent ouvertement ou non. Les nobles, les prêtres et les Sopharques, par doctrines interposées, dont celles de la gérontologie. Et lorsque le prêtre Akar, lors de son homélie parle de Rédemption, de Félicité suprême, de fallacieux amour de la vie terrestre, Dal jure de lutter pour sa race et quitte la cérémonie funèbre. Il n’accepte pas l’attitude de résignation de la plupart de ceux qui composent l’assistance, et naturellement, il est recherché pour sacrilège par Jaral Kerr Jaral lui-même, qu’il considérait comme son ami.

En réalité, c’est pour mieux le soustraire à la vindicte des nobles et de la prêtrise et en compagnie de quelques fidèles et de Jaral Kerr Jaral, Dal s’enfuit juché sur un Equus (une nouvelle race de cheval) vers Lassénia, la capitale.

Mais les épreuves en tout genre s’élèvent devant la petite troupe. Les Mlols, les hybrides, des habitants d’autres villages, et la cohorte armée partie à leur recherche déciment les compagnons de Dal qui parvient presque seul à la capitale. Et ses aventures ne s’arrêtent pas là car prisonnier, il doit affronter d’autres prisonniers dans une arène puis il sera promu Chevalier-Naute avec la mission de se rendre dans les environs de Bételgeuse, en tant que commandant d’un d’équipage composé de différents soldats et scientifiques à la recherche de documents sur le passé et vérifier la présence ou non du Prophète.

 

Kurt Steiner nous offre avec Aux armes d’Ortog un roman hybride jouant aussi bien sur les thèmes de l’anticipation et de la science-fiction que sur celui de la fantasy.

L’action est censée se dérouler à l’aube du cinquantième siècle (et non au XXXe comme écrit sur les quatrièmes de couvertures des rééditions chez Robert Laffont et J’Ai Lu), et deux cent cinquante ans après la Guerre Bleue qui a anéanti une grande partie de la population répartie sur les trois planètes, Terre, Mars et Vénus. Non seulement les habitants ont subi les conséquences de cette Guerre, mais elle a également effacé les traces des civilisations des millénaires précédents.

Tout en possédant des armes et du matériel sophistiqué, les survivants qui peu à peu repeuplent la Terre oscillent entre âge médiéval et civilisation avancée. Pour preuve les mégathériums qui constituent les troupeaux d’élevage, mais également les joutes organisées dans des arènes et qui font penser aux combats de gladiateurs romains, mais dans des conditions quelque peu différentes, adaptées à l’époque. D’où ce côté fantasy avec combats épiques à l’aide d’arcs, et une épreuve se déroulant dans un labyrinthe dans lequel les participants se dirigent ou se perdent grâce à un système qui pourrait être une forme de réalité virtuelle. C’est ainsi que Dal Ortog fera la connaissance d’un personnage haut en couleur, le Maisonnier-Baron Zlotan Charles Henderson de Nancy, imprégné de connaissances anciennes entre mythologie et Ancien régime et capable de décrypter des langues anciennes. Le thème de l’opéra de l’espace qui était en vogue à l’époque n’est pas omis non plus avec cette mission vers Alpha du Centaure et Betelgeuse à bord d’un engin sophistiqué.

Mais l’aspect scientifique et épique ne pourraient se satisfaire de cette intrigue que si une idylle amoureuse ne se glissait dans entre une jeune fille, celle d’un notable de la capitale, et Dal Ortog, le jeune berger déterminé à l’ascension fulgurante dans la hiérarchie sociale.

Quant au titre de ce roman, il se justifie par le blason que devra se choisir ce jeune homme lors de sa nomination comme Chevalier-Naute, ce qui nous ramène à la période médiévale.

Réédition : Collection Ailleurs et demain. Editions Robert Laffont. Parution 1975.

Réédition : Collection Ailleurs et demain. Editions Robert Laffont. Parution 1975.

Réédition : Collection science-fiction J’ai Lu. 1er trimestre 1981.

Réédition : Collection science-fiction J’ai Lu. 1er trimestre 1981.

Kurt STEINER : Aux armes d’Ortog. Collection Anticipation N°155. Editions Fleuve Noir. Parution 2e trimestre 1960. 192 pages.

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29 janvier 2020 3 29 /01 /janvier /2020 05:49

C´est un fameux trois-mâts fin comme un oiseau, hissez haut…

Françoise d’EAUBONNE : Chevrette et Virginie.

En cet an de grâce 1777, le Duras, un fier trois-mâts, quitte l’île de France, l’ancien nom de l’île Maurice, emportant à son bord la charmante Jeanne Perthiviers, à peine vingt ans, et la douce Virginie Goupil des Sermeuses, seize ans. Toutes deux se rendent à Pondichéry, Jeanne pour rejoindre son mari épousé peu avant et en poste dans ce comptoir français, et Virginie sa mère qu’elle n’a pas vue depuis des années.

Jeanne a été surnommée Chevrette par son grand-père, un vieux marin ayant bourlingué sur toutes les mers du globe et se nommant Chevreau, et elle aime qu’on l’appelle ainsi, le réclamant même. Elle est un véritable garçon manqué, et a appris à monter à cheval, à pratiquer l’escrime et autres amusements mâles. Elle est accompagnée de Flicq-en-Flacq, un négrillon de dix ans qui est son majordome et son filleul. Tandis que la frêle Virginie, qui a été élevée dans un couvent, est sous la houlette de Marie-Marie, sa servante noire. Elles passent leur temps à papoter tandis que Flicq-en-Flacq s’amuse avec Toine, le mousse de son âge, à des jeux de pirates.

La vie est douce à bord et l’ennui n’est point de mise. Le capitaine Freton de Vaujas préfère jouer au violon ses airs favoris, dont Les Indes Galantes de Rameau, déléguant la conduite du navire à son second Louis de Barre. Il possède un magnifique herbier qu’il montre avec fierté à ses passagères. Ce qui ne l’empêche pas de s’éprendre de Virginie, ce qui n’échappe à personne sauf peut-être à la principale intéressée. Il offre même à Virginie une magnifique perle.

Le voyage est toutefois perturbé par une tempête due à la mousson d’équinoxe et bientôt le navire est en perdition. Grâce à l’esprit d’initiative de Louis de Barre et de Chevrette, un radeau est rapidement fabriqué, les barils de poudre et autres denrées entreposés dessus, sans oublier les passagers et les marins, et bientôt ils parviennent à une petite île des Maldives. Ils sont accueillis par le chef de la tribu locale, Tupahiac, d’autant plus facilement que Louis de Barre s’exprime parfaitement en leur idiome. Heureusement.

Mais des pirates qui abordent sur une autre île située non loin, repèrent le Duras échoué et se rendent sur l’île où sont réfugiés les Français et l’idée leur vient de s’emparer de Chevrette et Virginie. Mais c’est sans compter sur les trublions que sont Flicq-en-Flacq et Toine.

 

L’histoire est censée se dérouler en 1777, et la jeune Virginie fait souvent référence à son roman de prédilection, Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre. Louable intention et prémonition car ce roman n’a été publié qu’en 1788 !

Françoise d’Eaubonne, née le 22 mars 1920 et décédée le 3 août 2005, était une femme de lettres ayant touché un peu à tous les genres. Romans pour enfants, romans engagés (elle fut une féministe libertaire), essais et biographies, et son œuvre est plus riche que celle proposée par Wikimachin. En effet elle usa de nombreux pseudonymes dont celui de Nadine de Longueval au Fleuve Noir pour les collections Grands Romans et Présence des femmes. Elle était la sœur de Jehanne Jean-Charles, écrivaine elle aussi, mariée avec Jean-Charles, le célèbre auteur de La foire aux cancres et des Perles du facteur, entre autres.

Quant à Chevrette et Virginie, il s’agit d’un roman d’aventures maritimes qui n’en pas sans rappeler par certains côtés Paul et Virginie, mais pas que, car les rebondissements sont multiples et l’épilogue est nettement plus heureux.

Françoise d’EAUBONNE : Chevrette et Virginie. Collection Bibliothèque Verte N°46. Editions Hachette. Parution 3e trimestre 1958. 254 pages.

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26 janvier 2020 7 26 /01 /janvier /2020 05:27

Un Maurice Limat sous pseudonyme…

Maurice d’ESCRIGNELLES : Stop… Secret.

Une jeune femme au bord de la route et qui faisant du stop (l’ancêtre du covoiturage) manque être écrasée par un conducteur roulant à toute vitesse. Comme s’il avait le feu ou la police aux trousses.

D’ailleurs cela se précise rapidement car des motos de la police de la route se font entendre. Et un peu auparavant, la radio du bord avait annoncé que Serge Dermond, fondé de pouvoirs d’une banque parisienne, était en fuite, coupable de graves malversations et responsable d’une agression sur la personne de son directeur de succursale.

La jeune femme, qui se prénomme Pola, est tour à tour moqueuse, apeurée, téméraire, angoissée, pourtant elle refuse de descendre de voiture lorsque Dermond l’y invite. Elle préfère continuer ainsi jusqu’à sa destination qui est le port de Dieppe.

Afin d’échapper aux motards, Dermond vire brusquement dans un petit chemin qui s’offre à eux au milieu d’un bois juste après un virage pris sur les chapeaux de roues. Pola, entêtée, prend l’initiative et longeant des rails, ils arrivent à Neuchâtel en Bray, puis prennent le train pour Dieppe où ils arrivent sans encombre.

Pola l’entraîne dans un café où elle a rendez-vous avec un certain Worms. Elle s’entretient d’abord seule avec cet individu puis Dermond est prié de la rejoindre. En se référant aux antécédents récents de Dermont, le vol dans la caisse et l’assassinat du directeur de l’agence bancaire, Worms propose une mission au fondé de pouvoirs en fuite.

Après quelques heures passées agréablement dans une chambre d’hôtel, enfin je suppose car je n’y étais pas, Pola et Dermond se rendent près du pont tournant. Dermond doit aborder un homme transportant une serviette et s’en débarrasser, d’une façon ou d’une autre et récupérer les documents contenus dans le cartable.

L’opération se déroule sans incident notable et Dermond, toujours accompagné de Pola, monte à bord d’un canot qui l’emmène jusqu’au Vampire, un navire qui doit prendre la mer vers une destination inconnue. Le capitaine et ses marins ne sont pas du genre enfants de chœur et Dermond n’est guère rassuré. Il vient de voler les plans du port à un agent de la Sécurité Maritime.

Au cours du voyage qui s’ensuit, Dermond se montre moins falot qu’il y paraissait au début de l’histoire, tandis que Pola joue avec le feu, avec son caractère versatile.

 

Ce roman d’espionnage est inscrit dans une veine très mouvementée, chaque personnage jouant au chat et à la souris.

Car le lecteur se doute, dès le début du récit, que tout autant Dermond que Pola jouent un rôle et qu’ils ne sont pas les personnages qu’ils prétendent être.

Une intrigue rocambolesque, voire grandiloquente, l’action prédominant dans une histoire qui aurait pu se dérouler à la fin des années 1930 et non fin 1950, car les documents convoités recèlent une réelle importance pour la sécurité du port de Dieppe, en cas d’une invasion par la mer.

D’ailleurs ce roman est l’adaptation d’une pièce radiophonique, mais sans autre précision. Ce fut le dernier roman publié avant l’entrée de Maurice Limat aux éditions du Fleuve Noir.

Certains rechigneront, prétendant que ceci n’est pas de la grande littérature, mais le principal est de prendre du plaisir à la lecture et d’oublier pour un temps les aléas de la vie quotidienne liés aux décisions parfois aberrantes de nos politiciens.

Maurice d’ESCRIGNELLES : Stop… Secret. Collection Service Secret 078. Editions S.E.G. Parution 3e trimestre 1959. 96 pages.

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23 janvier 2020 4 23 /01 /janvier /2020 05:50

Un cavalier, qui surgit hors de la nuit
Court vers l’aventure au galop…

Jacqueline MIRANDE : Le cavalier.

En cette fin de novembre 1765, ayant fini de ramasser des sarments de vigne, de les fagoter puis de les mettre sur le dos de sa mule, Jean-Baptiste quitte le petit village de Vaugirard et s’apprête à rejoindre le quartier de Saint-Germain-des-Prés dans Paris.

Tout en marchant dans le brouillard, Jean-Baptiste rêve de voyages, de Louisiane, de Mississipi ou encore des Indes. Ce n’est pas qu’il est mal traité chez Dame Anne-Françoise Floche comme commis marchand-drapier, mais l’aventure le tente, le tenaille.

Il longe le mur du clos Périchot, préférant prendre le petit chemin herbu à la grande route, trop encombrée. C’est alors que surgit un cavalier devant lui et il n’a que le temps de se jeter contre le mur. Un vif échange s’établit entre ce jeunot d’une quinzaine d’année et ce cavalier vêtu de gris et qui paraît la trentaine. Toutefois Jean-Baptiste raconte quelque peu sa vie d’orphelin, vivant chez la marchande-drapière devenue veuve et mère de Pernette, treize ans, et indiquant son adresse. Et ils se quittent, le cavalier promettant de se revoir car il doit se rendre justement dans le quartier de Saint Germain.

Jean-Baptiste aide de son mieux Dame Anne-Françoise mais les temps sont durs. Il n’y a plus guère de clients car la pénurie de tissus se fait sentir. Pourtant le vieil Eloi Picard reste attaché à cette boutique, vivant au dernier étage dans le grenier. De plus la boutiquière est criblée de dettes, à cause d’un voisin maître-rôtisseur qui pratique l’usure. Jean-Baptiste narre sa rencontre à Dame Anne-Françoise, laquelle est fort intéressée. Cela lui remémore sa jeunesse, ses quinze ans, avant qu’elle se marie avec Floche, la quarantaine sonnée, auprès de qui elle avait trouvé refuge.

Un soir, le jeune Gilles fait irruption dans la boutique. Il n’en peut plus d’être maltraité par son grand-père, perruquier de son état et qui n’est autre que le frère d’Eloi. Alors n’écoutant que leur bon cœur, Eloi et sa patronne recueillent le gamin de quatorze ans, un facétieux qui ne rêve lui que de devenir comédien et se produire sur les planches.

L’entente cordiale ne règne pas toujours entre Jean-Baptiste, Gilles et Pernette, qui est quelque peu capricieuse, mais bientôt ils se ligueront contre l’adversité. En effet Eloi, qui est considéré comme un oncle, possède des livres interdits et il a été dénoncé par le perruquier et son ami le rôtisseur. Mais quelqu’un se cache derrière cette délation. Heureusement, grâce à l’esprit de décision de Jean-Baptiste et aussi à sa bravoure, la situation peut s’arranger provisoirement. Et le cavalier inconnu, surnommé le Marquis Carême, va aider la veuve à se dépêtrer de ces malheurs.

 

Ce roman pour enfants, non interdit aux adultes, met en avant deux points cruciaux en cette fin de règne de Louis XV. L’interdiction d’ouvrages considérés comme des livres incitant à la révolte, écrits notamment par Voltaire et Jean-Jacques Rousseau, et qui sont bannis par la censure. Des ouvrages qu’on ne pouvait que se procurer sous le manteau et imprimés la plupart du temps à l’étranger.

Mais un autre point, pas assez développé à mon goût, est celui qui secoua le début des années 1750, lorsque des enfants, considérés la plupart du temps comme orphelins mais ne l’étaient pas forcément, étaient traqués et enlevés par la maréchaussée puis déportés vers la Louisiane et le Mississipi, avant que ces possessions françaises tombent sous la domination britannique en 1763.

Jacqueline MIRANDE : Le cavalier. Collection Pocket Jeunesse N°497. Editions Pocket. Parution janvier 2010. 128 pages.

ISBN : 9782266137393.

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20 janvier 2020 1 20 /01 /janvier /2020 05:19

La vague en douceur vient mon cœur
A la Guadeloupe,
Les algues, les fleurs
Ont mille couleurs
A la Guadeloupe…

Henri Salvador.

Richard CARON : Saintes pour sang.

Emergeant péniblement d’un rêve aussi bizarroïde qu’étrangeoïdal après une réception arrosée, le jeune Lionel Sehauvagnac, attaché de cabinet au ministère de l’Intérieur en charge des relations avec la presse, est dérangé en pleine nuit, alors qu’il aimerait pouvoir se rendormir, par un appel téléphonique d’un certain Mortimer O’Donnell, golfeur, bridgeur (jeu de cartes et non odontologue), et accessoirement attaché culturel à l’ambassade des Etats-Unis à Paris.

L’homme, réputé comme pratiquant l’humour potache, a pris une voix mourante, et son discours est incohérent. Il parle de Sécurité, chef ambassade, CIA, noyautée, mauvais pour la France, Marcel, Guadeloupe… le tout entrecoupé de points de suspension qui ne sont discernables que par écrit et qui pourraient se traduire par des blancs. Puis un silence, un corps tombant sur un tapis.

Une farce pense Lionel Sehauvagnac, qui après un stage dans sa salle de bains se décide à rappeler son correspond, désirant lui signifier qu’il ne croit pas à cette farce morbide. Mais c’est un policier qui lui répond tout en le questionnant et lui demandant ses coordonnées. Peu après l’inspecteur-chef Filatelli accompagné d’un subordonné dont on apprend qu’il se nomme Macherin, débarquent chez le diplomate diplômé.

Ils ont découvert le fameux Mortimer O’Donnel, qui par ailleurs possédait plusieurs jeux de papiers d’identité, différents dois-je préciser, mort et donc incapable de narrer ce qui lui est arrivé, ainsi qu’un autre larron, inconnu, et que les deux hommes se seraient entretués.

L’entretien entre Lionel Sehauvagnac (ai-je omis de vous dire qu’il faut prononcer Sauvagnac ?) et les deux policiers est plutôt âpre et cela finirait mal si l’arrivée impromptue ne venait interrompre le début d’un échange qui de verbal est devenu musclé, du commissaire Poitoux, de la DST. Au cours du transfert de Lionel Sehauvagnac à la DST, Poitoux lui apprend que Mortimer était un faux diplomate mais un véritable agent secret professionnel.

Grâce, ou à cause, de ses relations extraprofessionnelles avec Mortimer et parce qu’il pratique couramment la langue de Mark Twain, Lionel est convié à se rendre à la Guadeloupe puis dans l’archipel des Saintes, effectuer une mission pour le compte du gouvernement français. Et il rencontrera quelques connaissances américano-canadiennes, des insulaires, des truands, des membres de la CIA, ainsi que de chaleureuses partenaires qui ne comptent pas leurs efforts pour lui enchanter ses nuits.

S’ensuit une histoire au cours de laquelle on pourra dénombrer quelques cadavres, des dommages collatéraux dont un pauvre gamin qui sert de petit facteur, et qui met aux prises membres de la Mafia et de la CIA, Lionel servant de tranche de jambon dans ce sandwich antillais appétissant.

 

Roman parodique oscillant entre le policier et l’espionnage, Saintes pour sang est franchement humoristique au début. Par la suite il prend un cours plus classique mais pour autant il reste d’une lecture très abordable et agréable.

Richard Caron était, outre un romancier et un scénariste, un journaliste dont les opinions royalistes affichées le mirent quelque peu au ban du cénacle des romanciers de littérature policière.

Dans ce roman, outre l’humour parfois potache, il pratique également l’ironie. Rappelons que le ministre de l’Intérieur de l’époque était le descendant d’un célèbre maréchal d’Empire qui a donné son nom à l’un des boulevards extérieurs de la ceinture dite Boulevards des Maréchaux à Paris, Poniatowski.

Et, dès cette époque, et même avant, des problèmes de Grandes Oreilles perturbaient le Français moyen, et donc les services de l’Etat :

Je puis vous jurer qu’il n’y a plus, depuis l’élection de Giscard, aucun travail de surveillance sonore au détriment de citoyens français, quels qu’ils soient… Nous n’agissons dans ce domaine uniquement sur les étrangers suspects.

Ouf, nous voilà rassurés. Mais depuis ?

Lionel Sehauvagnac, qui est, rappelons-le, attaché de cabinet au ministère de l’Intérieur en charge des relations avec la presse, doit rédiger un mémoire intitulé Pour donner une meilleure image de marque de la police en France, rapport qui je le précise n’a jamais dû être rédigé, et s’il le fut, mis rapidement dans une case Oubliettes, se pose certaines questions dont les réponses ne seront jamais fournies. Mais il a au moins le courage de se les poser.

D’aucuns prétendent que nous autres technocrates sommes coupés de la base. Je me suis demandé s’il n’y avait pas un peu de vrai là-dessous. D’autant que j’écrivais clairement dans mon rapport que le visage de notre police, recevait, d’une façon générale, un accueil favorable auprès du public français. C’est du moins ce que tous les directeurs de service et les commissaires divisionnaires m’avaient affirmé. Souffrant moi-même et présentement d’une réalité un peu rude – bien que sûrement non généralisée – il est évident que certains termes de mon rapport s’en trouveraient modifiés et qu’à l’avenir je me promettais de rencontrer des fonctionnaires de police de moindre niveau.

Eh oui, il y a les faits et la réalité. Ne pas croire ce que les ministres énoncent doctement et ce qu’il se passe en réalité.

Mais nous parlons d’une autre époque, et de nos jours, il ne faudrait pas comparer ce qui était de mise sous Giscard, ou un autre, et ce qu’il se déroule de nos jours. Aucun policier ne se permettrait une bavure au risque de voir l’image de marque de sa profession en pâtir.

 

Richard CARON : Saintes pour sang. Collection Spécial Police N°1293. Editions Fleuve Noir. Parution octobre 1976. 224 pages.

ISBN : 2265001899

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17 janvier 2020 5 17 /01 /janvier /2020 05:08

O Corse île d'amour
Pays où j'ai vu le jour
J'aime tes frais rivages
Et ton maquis sauvage…

Gustave GAILHARD : La fille du bandit.

Le petit village de Campolino, sis quelque part dans un coin perdu de l’île de Beauté, est en deuil.

Gelcomina Malati vient de décéder et les pleureuses se tiennent autour du cercueil, égrenant leurs lamentations et leurs souvenirs. Un homme regarde discrètement par la fenêtre. Parmi ceux qui se recueillent, Matteo Malati, son mari, maire de la commune, propriétaire de deux scieries. Et la fille Giovanna, réputée pour être la plus belle fleur du canton avec ses dix-huit printemps arborés fièrement.

Une vieille femme, ayant terminé son service de veille et de recueillement, sort de la maison en deuil. Elle est abordée par Nazarello, l’homme qui regardait à travers les carreaux. Il est en fuite depuis de longues années après avoir exécuté une vengeance. Le hors-la-loi demande à celle qu’il nomme Assunta et fut la mère de son ami, traitreusement assassiné et dont il vengé la mémoire, de déposer discrètement un scapulaire dans le cercueil de Gelcomina. Assunta accepte.

La célébration mortuaire se déroule sans incident notable. Matteo depuis ce décès est songeur tandis que Giovanna est réconfortée par son ami de cœur, Paolino. Ils sont jeunes, ils s’aiment. Mais, malgré son statut de contremaître dans l’une des scieries de Matteo, il ne peut prétendre épouser Giovanna. En effet le père de la jeune fille préfère qu’elle se marie avec Enrico.

Et Enrico surprend les jeunes gens en plein conciliabule amoureux. Enrico est jaloux et il provoque Paolino avec son couteau. Le drame éclate. Enrico reste sur les pierrailles du maquis et Paolino est suspecté de meurtre alors qu’il ne s’agit que d’un malheureux accident.

Heureusement Nazarello le hors-la-loi veille au grain, mais pour autant Paolino sera-t-il disculpé et quel sera son avenir avec Giovanna ? Et qu’adviendra-t-il de Nazarello ?

 

Le titre de ce roman est assez ambigu car l’épilogue ne confirme pas ce que le lecteur pourrait attendre de cette affirmation. Comme si l’auteur ne désirait pas expliquer davantage ce qu’il sous-entendait au départ, ou comme s’il s’était rétracté.

Le personnage de Nazarello est présent comme une ombre furtive, fugitive, et pourtant il imprègne les esprits à cause de son passé d’assassin présumé.

Pour autant, qui n’est pas considérée comme un roman d’amour mais un roman dramatique, cette historiette est agréable à lire, nous plongeant dans le système d’une vendetta ancienne agrémentée d’une double histoire d’amour. Mais il est difficile d’en écrire plus, sauf à déflorer l’intrigue et l’épilogue.

Comme on n’est jamais si bien servi que par soi-même, il faut rappeler que Gustave Gailhard, auteur de fascicules et de romans chez Ferenczi, était en même temps directeur de collection chez le même éditeur. Pourtant il avait débuté chez Fayard et a fourni parallèlement des romans chez Tallandier.

Dans Panorama du roman historique, style et langage Éd.SODI, 1969, Gilles Nélod écrit : Gustave Gailhard, comme Albert Bonneau, a ouvert l’éventail des époques et des lieux. Ses romans, souvent longs, assez mal bâtis, cherchent les situations paroxystiques, les supplices atroces, les amours impossibles.

Ce n’est pas l’impression d’ensemble dénoncé par Gilles Nélod que reflète de ce roman, et peut-être faudrait-il lire d’autres romans pour se forger sa propre opinion. Mais le lecteur n’est pas obligé d’abonder dans le sens d’un critique littéraire, les goûts divergeant selon le lectorat, et il peut posséder sa propre sensibilité sans être obligé de suivre telle ou telle ligne imposée par un analyste.

 

Gustave GAILHARD : La fille du bandit. Le Petit Roman N°657. Editions Ferenczi. Parution le 2 juin 1938. 32 pages.

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15 janvier 2020 3 15 /01 /janvier /2020 05:19

Papy fait de la Résistance…

NOËL-NOËL : Le père tranquille.

Avec son feutre noir un peu cabossé, ses lunettes et sa serviette, Edouard Martin passe quasiment inaperçu dans les rues de Moissan (Charente) et ses environs. L’homme de la rue, que tout le monde connait, que tout le monde salue, mais qui est si effacé qu’il est oublié dès que les passants l’ont croisé.

Le brave homme type, qui ne fait pas de vagues. Il est marié avec Madeleine, qui l’appelle Edouard. Ses enfants, Monique, dix-huit ans, et Pierre, seize ans et demi, lui disent papa. Mais pour tous ses amis et ses concitoyens en général, c’est le Père Tranquille. Une référence pour ce représentant régional d’une compagnie d’assurances.

Sa passion consiste en la culture des orchidées, des plantes fragiles qu’il garde soigneusement dans sa serre, pratiquant des boutures, recherchant la perfection. Ses pots sont placés sur des étagères, il les manipule avec précaution, et parfois il se glisse derrière les rayonnages, à l’abri de la vue de tous, sa famille y compris.

En ce 23 mars 1944, alors que les Allemands sont présents partout, et construisent une usine non loin de chez Martin, celui-ci sort tranquillement du Café de la République. Il croise sans y faire attention un homme qui entre et ne lui jette pas un regard. Cet homme, qui prétend se nommer Jourdan, demande à parler au patron en toute intimité. Le bistrotier, un homme à la carrure de catcheur, se demande bien ce que lui veut cet homme mais celui-ci a les mots qu’il faut pour le mettre en confiance. Les mots et les papiers.

Il a été parachuté depuis l’Angleterre afin de recruter de jeunes gens pour servir dans la Résistance et deux adolescents sont convaincus. Ils partent alors pour Aubusson mais on ne les reverra jamais.

Les jours passent, Martin tient souvent des conciliabules avec deux jeunots dont l’un est amoureux de Monique. Et inversement proportionnel. Et Monique, qui n’a ni ses yeux, ni ses oreilles dans sa poche, se rend compte que son géniteur n’est pas le Père Tranquille comme tout le monde l’a surnommé. Il œuvre pour la Résistance, mais de façon si subtile que personne ne soupçonne son appartenance à cette armée secrète. Et Pierre, le fils, se désole de cette attitude nonchalante voire quasi sympathique avec l’ennemi. Alors il décide d’entrer lui aussi dans la Résistance, mais il est bien jeune et inexpérimenté.

 

Adapté du film au titre éponyme et dont Noël-Noël a écrit le scénario et les dialogues, Le Père Tranquille revient sur un épisode réel de la fin de la guerre 39/45. Episode qui s’est déroulé en Moselle, à Woippy exactement, et dont le héros était horticulteur.

Si ce roman est destiné aux jeunes lecteurs, il n’en est pas moins vrai que les adultes vont pouvoir s’en inspirer pour leurs lectures. Il s’agit d’un hommage aux héros anonymes de la Résistance, de ceux qui travaillaient dans l’ombre et à la fin de la guerre ont préféré rester anonymes, tandis que les Résistants de la dernière heure, ceux qui étaient collabos ont tourné leur veste en même temps que le vent. Ce sont bien de ceux là que l’histoire se souvient même si les opportunistes sont souvent décriés de nos jours.

Noël-Noël possède un humour subtil, retenu, qui lui est propre, et le récit n’en prend que plus de force. Point n’est besoin de scènes d’action violentes pour donner à cette intrigue un réalisme poignant et l’épilogue joue sur les contrastes de l’époque.

Mais ce roman, et ce film, étaient nettement plus dans l’atmosphère de l’époque lors de leur parution, les cicatrices étant encore vives. De nos jours, il ne s’agit que d’un épisode durant la guerre. Mais à la fin des années 1950, cela devait rappeler de nombreux souvenirs aux lecteurs adultes voire adolescents, des souvenirs peut-être parfois honteux.

NOËL-NOËL : Le père tranquille. Collection Bibliothèque Verte N°43. Editions Hachette. Parution juillet 1959. 190 pages.

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