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12 août 2017 6 12 /08 /août /2017 12:39

Ô mon île au soleil

Paradis entre terre et ciel...

Pascal MARTIN : Le Seigneur des Atolls.

Mai 1968. Alors que dans Paris volent des grenades lacrymogènes, noix de coco en réduction, dans l’archipel polynésien d’énormes champignons, vesces de loup trop mûrs, éclatent en dégageant une fumée noire et de vives lueurs. Chrétien, caméraman à l’ORTF, en déplacement au Liban afin de couvrir le voyage diplomatique en Iran de Pompidou, alors Premier Ministre, est rappelé par 3D, son chef des informations, Denis Desmond Doriant de son nom complet, afin de filmer les débordements des étudiants et des prolétaires en rébellion contre la politique du gouvernement. Et ce qu’il enregistre sur sa petite caméra le dégoute. Des CRS et des gardes mobiles qui prennent en nasse des étudiants, les forçant à se réfugier dans un square où les attendent des katangais, milice fasciste. Ou des étudiants, ou pseudo tels, qui tire délibérément avec une arme à feu chargée sur les policiers, ajustant froidement leurs cibles. Mais 3D ne peut diffuser les images, pas toutes du moins. Ecœuré Chrétien prend une mappemonde, la fait tourner, pointe le doigt dessus, puis s’envole pour la Polynésie. Destination l’îlot de Tureia, l’un des nombreux grains de beauté qui essaiment l’Océan.

Arrivé sur l’île de Tahiti, il s’enquiert d’un petit avion susceptible de l’emmener sur place. Mais les informations qu’il recueille ne sont guère encourageantes. L’île de Tureia serait habitée par des anthropophages dirigés par le général Arakino et les blancs, les popa’a, ne sont pas les bienvenus. Malgré toutes ces recommandations, Chrétien persiste dans son désir et finit par obtenir gain de cause. L’avion affrété depuis le petit aéroport d’Hao le dépose sur Tureia sans s’arrêter. Personne pour réceptionner Chrétien, sauf des chiens. Le village est désert. Lors de sa déambulation il remarque une cabane sur pilotis dans le lagon. Soudain une lueur embrase le ciel, la terre se met à tanguer. Les habitants de l’atoll prévenus par les autorités qu’une charge allait exploser s’étaient réfugiés sur une île voisine. Les premiers contacts entre Chrétien et Arakino sont houleux mais à force de persuasion les deux hommes se lient d’amitié.

Chrétien surnommé Upo (fêlé en Maori) est avide d’intégration. Il apprend le Maori, il se plie aux coutumes locales qu’il découvre et parcourt le nouveau domaine qui l’accueille. Domaine par ailleurs pas si accueillant que cela. Tureia est divisée en deux parties séparées par un ruisseau. Celle où vivent les insulaires, et de l’autre côté, une bande de terre, la presqu’île de Taravo, gardée par des légionnaires. Entre les deux des crabes carnivores, entassés les uns sur les autres et qui forment une véritable frontière. C’est Moto Guzzi, un coureur de nuit qui doit son pseudonyme au fait qu’il se déplace à bord d’une moto. Il est l’équivalent d’une estafette chargée d’assurer la liaison entre les deux communautés, qui leur fournit des renseignements, ceux qu’il juge nécessaire sans entrer dans les détails ou les secrets. Moto Guzzi n’est guère prolixe, néanmoins Upo apprend que l’homme, d’origine italienne, a tué ses père et mère ainsi que ses frère et sœur. Emprisonné il a échappé à la guillotine en acceptant de se prêter à des expériences nucléaires d’abord dans le Sahara puis dans l’archipel polynésien.

Pascal MARTIN : Le Seigneur des Atolls.

Upo prend de l’ascendant autant sur le général Arakino, appelé ainsi parce que son livre de chevet est un ouvrage contant les biographies de militaires français ayant joué un rôle prépondérant durant les différentes guerres engagées ou subies par la France. Upo apprend que la cabane est une ferme dans laquelle Motu élève des huitres perlières. Ces perles noires à la valeur inestimable, servent à l’achat des denrées alimentaires et autres, permettant aux Maoris de subsister. La livraison est effectuée par Joe, un commerçant louche de Hao qui livre les provisions par bateau. Maïna, une jeune fille, est retrouvée assassinée, égorgée. Près de son corps, gît l’harmonica de Moto Guzzi. Tout indique que le coureur de la nuit est le coupable, tout, sauf que la mise en scène est trop grosse selon Upo. Parallèlement Upo comprend que les îliens se font gruger et il se rend à Papeete et passe un contrat, non sans mal et sans horions auprès d’un Japonais qui s’avérera plus fiable que Joe. Désormais c’est lui qui règle les dépenses et il en profite pour acheter une petite caméra qui jouera un grand rôle quelques mois plus tard.

Il se marie selon les us et coutumes Maori avec Hina et est intronisé par Arakino le père adoptif de deux gamins de treize ans, Téva et Hiro. Des gamins débrouillards qui lui vouent une admiration sans borne et sans faille. Mais l’orage gronde au dessus de Turiea à cause d’un film pris par les deux enfants dans la presqu’île de Taravo, à l’insu des légionnaires et de leur chef un certain Albinos. Upo change une nouvelle fois de nom à l’initiative d’Arakino. Désormais il devient Foch, pour tout le monde. Comme le Maréchal. Seulement ce nouvel alias n’éloigne pas les nuages constitués par des paras et des hommes de la DST qui débarquent un beau ( ?) jour sur l’atoll. Sans oublier les nouvelles déflagrations des essais nucléaires.

Des images fortes se dégagent de ce roman : la culture des huîtres perlières et le prélèvement par Muto des perles, le combat d’Upo contre un requin blanc, la fuite de Foch et des deux enfants et d’Hina à bord d’une pahis (pirogue) construite avec le bois d’un arbre auprès duquel a été enterré le pito des enfants, leur combat dans les éléments déchainés lors du passage d’un typhon, et bien d’autres…

Ce nouveau roman de Pascal Martin permet de comprendre la série des Coureurs de la nuit (huit volumes qui se lisent indépendamment dont La traque des maîtres flamands, La Vallée des cobayes et L'ogre des Landes) et dévoile la genèse du maître de l’Œuvre, une organisation dont les membres sont des orphelins recrutés dans les prisons françaises. Et le lecteur découvre un homme à double facette. Sensible, humain, consensuel, froid, sec, dur, autoritaire, selon les circonstances, qui non seulement s’intègre parfaitement dans sa nouvelle condition, mais par certains côtés devient plus Maori que les natifs de l’archipel. Un condensé de Popa’a et de Polynésien, n’hésitant pas à affronter les militaires et le pouvoir politique, les faisant plier par le charme ou le chantage.

Difficile après avoir lu ce livre que l’on referme avec une pointe de regret qu’il soit déjà terminé, malgré ses cinq cent huit pages, de prendre dans la pile de romans en instance celui qui saura autant captiver. C’est assurément l’un des ouvrages de la rentrée, à ne pas négliger, d’autant qu’il offre aventures, exotisme réel et non surfait, humanisme et plongée historique. Pascal Martin a connu cette époque des essais nucléaires puisqu’en 1968 il s’est rendu à Tahiti avec sa famille. Son père, employé au Centre d’Energie Atomique, a été rapatrié un an plus tard, emportant dans ses bagages un cancer. Alors pour clore cette chronique, certains lecteurs pensant peut-être que Pascal Martin a par trop enjolivé quelques éléments de cette histoire, qui n’est qu’un roman, (quoi que !) j’emprunte cette citation de Foch, le patron des Coureurs de nuit : « Lorsque le vrai est faux, c’est que le faux est vrai ».

Pascal MARTIN : Le Seigneur des Atolls.

Pascal MARTIN : Le Seigneur des Atolls. Presses de la Cité. Parution 18 août 2011. 510 pages. 22,00€. Version numérique 15,99€.

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11 août 2017 5 11 /08 /août /2017 09:02

Par ce jeu de dupes :
Voir sous les jupes des filles.


 

François FIEROBE: Les spectres d'Eiffel.

Ou sous celle de la Demoiselle en fer, surnom donné à la Tour Eiffel !

Combien de visiteurs de toutes nationalités se pressent entre ses quatre piliers afin d'apercevoir ce qui se cache sous cette structure métallique s'élançant à l'assaut des nuées ?

Mais tous ces touristes savent-ils que cette Demoiselle en fer n'est pas en réalité la vraie, qu'il ne s'agit que d'une simple copie ? Du moins, c'est ce que longtemps le grand-père a voulu faire croire au narrateur, lui contant une affabulation que longtemps celui-ci prit pour argent comptant. Ce n'est que bien plus tard que le narrateur s'aperçut de cette supercherie, pourtant il était tombé amoureux de ce monument qui gratte les nuages. Et par la suite il s'installa près de la Tour Eiffel afin de la voir le plus souvent possible et de rechercher, traquer les secrets qui l'entourent.

Et parmi cet entourage invisible, les Eiffelines, des ectoplasmes qui hantent la Tour sans indisposer qui que soit, comme de petits papillons invisibles.

Mais bientôt il s'aperçoit qu'il n'est pas le seul à rechercher les secrets de la Tour. Les Eiffeliens, les Eiffelopathes, les Eiffelographes et autres amoureux de la Demoiselle en fer tournent autour des piliers, grimpant les étages, s'arrêtant aux plateformes, recueillant témoignages, épisodes, historiettes, plans, tout ce qui peut avoir un rapport quelconque avec les structure et son constructeur. Son constructeur mais également tous ceux qui travaillèrent à son érection, car Eiffel n'était pas seul à dessiner les plans, à imaginer cette toile d'araignée.

C'est ainsi qu'il fait la rencontre de Hugues Larigaudière, ancien ingénieur passionné d'histoire des sciences et aux découvertes scientifiques des siècles précédents, et d'un autre historien, Henri de la Vergondière. Et de rencontres en rendez-vous, le narrateur approfondit ses connaissances et surtout il va se plonger dans un véritable conte eiffelien grâce à Cressot-Blossière, guide touristique érudit qui enchante les visiteurs grâce à des péripéties qu'il invente pour happer l'intérêt de ses interlocuteurs. Seulement tout ce qu'il dévoile n'est pas à prendre au pied de la lettre et encore moins à ceux de la Tour Eiffel.

 

Un voyage onirique, scientifique, merveilleux, fabuleux, inspiré d'histoires réelles et de fictions, mais si bien narrées, enrobées de détails si réalistes que le faux devient vrai et inversement. Des histoires charmantes, étonnantes, merveilleuses, fabuleuses, à vous faire perdre la tête parfois, mais toujours empreintes d'une certaine forme de réalisme qui confine à une authenticité que l'on ne peut mettre en doute tellement l'auteur y apporte des détails sur des événements qui auraient pu réellement se dérouler.

Ce roman est suivi de Folklore, fictions et fantômes de Jean Mazepin, un texte édité dans une petite revue, Le piéton singulier, un fascicule édité à l'usage de sa famille et ses amis.

 

Avec ce roman le lecteur prendra de la hauteur.

François FIEROBE: Les spectres d'Eiffel. Collection LoKhaLe N°5. Editions de La Clef d'Argent. Parution 22 juillet 2017. 210 pages. 9,00€.

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10 août 2017 4 10 /08 /août /2017 13:41

Faut-il toujours suivre son instinct ?

Vincent VILLEMINOT : Instinct 1.

La vie de Timothy Blackhills a basculé en même temps que la voiture, dans laquelle il rentrait à la maison familiale, effectuait des tonneaux sur la route qui le conduisait, lui et ses parents ainsi que son frère Ben, de Seattle à Missoula.

Il était tout content de retrouver son frère ainé qui revenait du Canada quand soudain l’accident se produisit, sans cause particulière. Assommé, il se réveille ensanglanté. Plus grave ses parents sont décédés, quant à son frère il n’est pas sûr qu’il respire encore. Mais Tim ne se sent pas dans son état normal.

Il essaie de s’extraire du véhicule, avec difficulté, comme si ses mains n’étaient plus des mains, comme s’il ne pensait plus en adolescent, comme s'il réagissait en animal. Lorsqu’il se réveille de son coma quelques heures plus tard, il est entièrement nu, près d’une cascade, loin du lieu de l’accident. A l’hôpital où il a été emmené par les secours, alertés par un couple d’automobilistes, il se confie auprès d’un psychiatre.

Il se souvient qu’il était, mais n’est-ce qu’un rêve ou un cauchemar, un grizzli, une bête assoiffée de sang. L’expert après lui avoir fait passer un IRM afin de déterminer l’état de son cerveau lui annonce qu’une sommité va s’occuper de son cas. En attendant c’est Warren, un policier du DEA, Drug Enforcement Administration, qui l’interroge sans ménagement. D’ailleurs il lui annonce sans détour qu’il suppose que Tim est à l’origine de l’accident ainsi que de la mort de son frère, qu’il sait pertinemment que Ben et lui s’adonnaient à la prise de produits illicites, herbe et amphétamines, et peut-être d’autres produits dont un qui circule depuis peu et à l’origine de meurtres.

Warren le harcèle mais heureusement le docteur McIntyre lui propose de le soigner dans un institut spécialisé, l’Institut de Lycanthropie, situé dans les Alpes françaises. Tim, qui est bilingue car sa mère était française, accepte bien évidemment, ce qui lui permet d’échapper à Warren, d’autant que le médicastre lui affirme qu’il pourra, s’il le désire, quitter l’établissement au bout d’un mois de soins.

L’Institut de Lycanthropie est une sorte de petit village accueillant de nombreux résidents ressentant les mêmes effets de métamorphose. McIntyre réfute un quelconque délire schizophrénique mais parle plutôt de métamorphanthropie. Pour une raison ou une autre, le sujet atteint de cette forme de pouvoir de transformation, devient un anthrope et plus particulièrement comme dans le cas de Tim d’arktanthropie.

Tim est installé dans un petit chalet, un mazot, dans lequel vivent déjà deux autres résidents : Flora, quinze ans et férue d’informatique, et Shariff, douze ans qui ponctue ses dialogues de citations empruntées à Lao-Tseu, Rousseau, Victor Hugo…

Dans le bâtiment principal un étage est réservé à la bibliothèque contenant des milliers de volumes anciens traitant de la lycanthropie et des métamorphoses, essais, recueils de contes, légendes diverses du monde entier. Mais Tim n’a qu’une idée en tête, s’échapper. Et aussitôt qu’il le peut il met son projet à exécution, malgré les mises en garde des surveillants-éducateurs-encadrant.

En compagnie de son frère Ben il escaladait souvent des falaises, des escarpements, des montagnes, et son escapade ne lui fait pas peur. Gravir des hauteurs rocheuses difficiles pour le commun des mortels n’est qu’un jeu pour lui. Ce qui l’est moins, c’est de se retrouver nez à nez avec des chasseurs qui sillonnent les environs, n’attendant qu’une proie se présente devant leurs bâtons fumants.

 

Le lecteur pourrait se sentir frustré d’attendre quelques mois, comme dans la plupart des séries, pour connaître la suite des aventures de Tim et de ses nouveaux compagnons, Flora et Shariff, car tout n’est pas explicité dans l’épilogue.

L’éditeur signale que ce roman est destiné aux plus de quatorze ans. Je dirais même plus, de quatorze à cent-quatorze ans. En effet l’auteur déclare : Je voulais faire un roman pour adolescents et jeunes adultes qui ait une certaine dureté dans un certain nombre de scènes, pour être en confrontation avec un réel qui peut, pour eux, être effrayant. Et en effet certaines scènes se révèlent fortes, comme dans un thriller pour adultes. Et même si le thème du roman emprunte au fantastique, certains faits décrits peuvent mettre l’imaginaire des enfants en confrontation avec des images dures, mais pas forcément insoutenables.

Les enfants sont habitués à pire, ne serait-ce que dans certains jeux vidéo, quoi qu’en disent les concepteurs. Mais les relations entre les personnages amènent le lecteur à comprendre qu’il faut savoir se montrer tolérant, réagir en ne pensant pas qu’à soi, se mettre en osmose avec les autres, comprendre les sentiments, les émotions, les réserves, qui nous animent et animent ceux avec lesquels on vit. Faire la part des choses, et accepter les différences. De mettre en commun ses ressources physiques et mentales afin de dénouer les problèmes, les pièges qui se présentent. Bien sûr ce n’est qu’un roman, et l’auteur ne cherche pas à énoncer une morale comme bon nombre d’auteurs du XIXème et du XXème siècle le faisaient, mais à rendre une histoire vivante, pleine de bruit, de fureur et d’émotions.

Je ne jure jamais, parce que tout ce que je dis est vrai, Timothy. Seuls les menteurs ont besoin de jurer, pour indiquer qu’il leur arrive parfois de dire la vérité.

Première édition Collection BLAST. Editions Nathan. Parution avril 2011.

Première édition Collection BLAST. Editions Nathan. Parution avril 2011.

Vincent VILLEMINOT : Instinct 1. Réédition Pocket Jeunesse. Parution août 2014. 480 pages. 6,95€.

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7 août 2017 1 07 /08 /août /2017 08:55

Hommage (tardif) à Michel Durafour, homme

politique et romancier, décédé le 27 juillet 2017.

Pierre JARDIN : Agnès et les vilains messieurs.

Les lectures de l'Oncle Paul étant un blog sérieux, il n'est pas question pour le scripteur de se dévoyer en rédigeant une chronique politique mais de garder la barre sous le vent de la littérature populaire.

Aussi le propos n'est pas de rendre hommage à un politicien qui a œuvré sous différents ministères, qui a été maire de Saint-Etienne lors de l'apogée des Verts (quand même !) mais à un romancier qui a écrit de nombreux romans policiers et d'espionnage. Une carte de visite plus glorieuse que celle d'homme politique, et ceci ne s'adresse pas uniquement à Michel Durafour mais à tous ceux qui magouillent sous les ors de la République.

 

Fille d'un industriel ancien épicier qui a fait son beurre en inventant une crème dessert-minute, Agnès Lorin n'est âgée que de vingt ans mais elle sait déjà ce qu'elle veut. Surtout pas le mari que son père espère qu'elle épouse car elle a des vues sur Marc Bérard, représentant en machines agricoles. Du moins c'est ce qu'il lui a indiqué.

Mais Marc Bérard n'exerce pas du tout ce métier. Il est agent secret et pour l'heure, il est en conversation avec son patron, au sujet de plans du Guyenne, la nouvelle fusée française. L'homme chargé de les transporter a été assassiné et bien entendu, les plans ont été dérobés. Et l'enquête confiée à Blaise Saron, un jeune agent, piétine. Bérard a connu Blaise un an auparavant et le jeune homme se réclamait d'une amitié entre leurs parents, bien des années auparavant. Et c'est ainsi qu'il est devenu agent secret, avec l'appui de Bérard.

Le grand patron des Services secrets montre une lettre anonyme indiquant que les plans seront restitués contre une forte somme et que l'échange pourrait avoir lieu à l'Hôtel Athena à Rhodes. Il est également signifié qu'une place vacante de barman pourrait convenir à un collaborateur des Services Secrets. Comme Blaise est en charge de l'affaire, il sera envoyé sur place, après une rapide formation, mais Bérard n'est pas du tout d'accord. Il le signifie à son patron et va prendre des vacances... à Rhodes.

Il en informe également Agnès lors d'une repas vespéral et en tête à tête, alors que celle-ci lui a réservé une petit surprise. Pour elle, c'était leur repas de fiançailles.

A l'hôtel Athena, ou il est reçu par le directeur italien Pipardi, lequel ne semble guère intéressé par l'arrivée de nouveaux pensionnaires, il a la surprise de retrouver Alexis, un confrère espion russe qui doit se produire dans un club comme chanteur. Au cours du voyage il a fait la connaissance d'une charmante vieille dame, pas indigne mais presque, septuagénaire, et d'un professeur, archéologue syrien. Plus un couple d'amoureux, lui Irlandais, elle Espagnole du doux prénom d'Adoracion.

Sans oublier les employés de l'hôtel, un Turc et un Grec, ce qui naturellement donne de l'ambiance sachant que les deux peuples n'entretiennent guère de relations amicales. Et Blaise qui semble à l'aide dans son rôle de barman, sans oublier Agnès qui arrive inopinément.

 

S'ensuit un chassé-croisé dans une réunion d'espions, déclarés ou non, de contrebandiers sans scrupules, de vrais faux amoureux, un ensemble de quiproquos alimentés par l'humeur versatile d'Agnès. Car la jeune fille, qui croit que son prétendu fiancé et Marc sont à Rhodes pour effectuer un cambriolage de banque, pique ses colères aussitôt éteintes pour redevenir la tendre fiancée, exerçant un chantage auprès de Bérard, devenant sans prévenir une tigresse. Elle fait un peu penser à l'héroïne caractérielle de Charles Exbrayat, Imogène McCarthery, mais sans sa propension à ingurgiter du whisky. Cette boisson est réservée à Mrs Galiday, l'Américaine septuagénaire, au caractère bien trempé.

Les malentendus, les situations équivoques s'enchaînent avec un humour débridé qui n'a rien perdu de sa saveur, même si certains passages paraissent un peu longuets. Malgré son statut d'homme politique en devenir, car à l'époque où parait ce roman, Michel Durafour n'est que maire-adjoint de Saint-Etienne, depuis 1947 toutefois, et fut conseiller général du canton de Saint-Etienne Nord-Est. Parfois, il se permet quelques piques, concernant les communistes notamment, mais celles-ci sont rapidement contrebalancées, comme dans une conversation entre deux personnes honnêtes mais de confession politique différente.

 

Curiosité : Le copyright est attribué à Jean Claude Fiard, lui-même auteur dans la même collection de quelques romans dont Des raisons pour mourir et Quand chante le tambour, auteur dont on ne sait rien, sinon qu'il a également publié Une tombe sous les hévéas, dans la collection Vidocq N°1 aux éditions Cœur de Vey en 1959. D'après l'étude de Jacques Baudou et Jean-Jacques Schleret, Le Vrai visage du Masque paru aux éditions Futuropolis en 1984, Jean-Claude Fiard serait né à Montluçon, sans plus de précision.

Alors erreur de l'éditeur ? Pierre Jardin alias Michel Durafour se cacherait-il sous le pseudonyme de Jean-Claude Fiard ? Ou le contraire ? Toutes les suppositions sont à envisager.

Pierre JARDIN : Agnès et les vilains messieurs. Collection Espionnage Charles Exbrayat N°3. Editions Librairie des Champs Elysées. Parution juin 1963. 192 pages.

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5 août 2017 6 05 /08 /août /2017 06:59

Entre Fantômette et Madame Atomos, n'hésitez pas : Panthéra est là !

Pierre-Alexis ORLOFF : Panthéra contre Faustus.

Mais qui est cette Panthéra qui défraie la chronique, pas plus tard que la semaine dernière, c'est à dire en temps compensé, le 22 octobre 1963 ? Nul ne saurait le dire, pas même François Renouard, journaliste au quotidien Soir-Nouvelles, pourtant toujours bien informé.

Maître Joseph Gorvain, notaire à Corbeil-Essonnes, a été retrouvé mort dans son étude, et si le crime n'est pas formellement établi, une carte signée Panthéra sur laquelle est suscrite la phrase suivante, la vengeance est mienne, a été déposée près du corps.

Or une semaine auparavant, à quinze kilomètres de là, à Saint-Firmin sur Essonne, Mrs Margareth Arlington avait été assassinée, et les témoins, Percival le fils de la victime, et Mireille, la domestique, avaient décrit la meurtrière comme féline. Et coïncidence c'était ce même notaire qui avait procédé à la vente des Peupliers, la propriété des Arlington, à la fin de la guerre.

Un article journalistique qui n'échappe pas à Antoine Duchard, l'héritier de Marcel, industriel dans l'armement et l'aéronautique. Enfin, fils de Marcel, c'est à voir, car il s'agit de Marcel qui grâce à un artifice, disons démoniaque, est resté jeune et pour la galerie a pris sa propre succession. Antoine Duchard fait part de sa lecture à son amie Berthe Windgassen qu'il a connue durant la guerre, grâce à des accointances avec un officier Allemand. Bertha est devenue Bertha Camden, Lady Dunsmore, a hérité de la propriété les Peupliers, et de temps à autre se mue en miss Jane Camden, sa nièce. Elle vit actuellement dans le Devon, secondée par son majordome et amant occasionnel James Fischer.

Il demande, ordonne pourquoi ne pas employer les termes exacts, à Faustus, le satyre, le faune, et son compagnon Dorilien, le farfadet, tous deux faëriens, de découvrir qui se cache sous l'enveloppe de Panthéra. Les Faëriens sont issus d'une lointaine entité ayant pignon sur rue, puisqu'une ambassade de Faërie est implantée à Londres.

 

Alice de Sérigny est depuis peu la secrétaire de Marie-France d'Aygues-Vives, romancière et rédactrice d'un hebdomadaire féminin, ce qui déplait fortement à Tanya Morin, son amie d'enfance et même plus, puisqu'elles ont été élevées ensemble, mais pas que. Tanya, dont le nom d'emprunt est Farnèse, est chercheuse auprès du professeur Bellières, dans un domaine particulier, celui de l'influx nerveux face à l'envoi de fausses informations. Tanya, qui est handicapée, bossue et pied-bot, est quelque peu jalouse mais il faut bien faire avec sa colocataire-amie. D'autant qu'Alice doit ressortir ce soir, après la réception littéraire à laquelle elle a assisté, et redevenir le temps de quelques heures Panthéra, celle dont tout Paris et la France parle, et pas obligatoirement en bien.

Ayant enfilé sa combinaison noire et sa cagoule, Panthéra se rend aux Peupliers afin de vérifier, parmi les papiers, l'acte de vente de la propriété. Seulement l'inspecteur (stagiaire) Carlier a disposé deux hommes afin de garder la demeure et ses occupants. Une demeure dans laquelle elle a vécu les premiers mois de sa vie et dont le blason porte encore les armes de la famille Sérigny. Elle s'introduit dans la pièce où se trouve déjà Percival et celui-ci est tout de suite subjugué par la jeune femme. Mais Mireille, qui a subi les foudres peu avant de son amant de patron, ne peut s'endormir et elle perçoit des bruits. Curieuse, elle aperçoit Panthéra qui s'introduit dans la pièce et immédiatement alerte le policier en faction. Le drame couve, car lorsque le policier veut intervenir, le démon qui est en Panthéra prend du poil de la bête et non seulement se défend mais attaque. Le policier est grièvement blessé, Panthéra peut s'échapper mais le mal est fait.

 

L'inspecteur (stagiaire) Carlier, ami de Renouard le journaliste, est aussitôt sur les lieux, enquêtant et accusant Percival de connivence. Carlier possède d'autres accointances, dont Erynia, la nymphe, et lui fait part de la présence possible d'un démon. Erynia révèle cette information à son compère Sargo, le centaure, et celui-ci embarque pour l'Angleterre et plus précisément dans le Devon, chez lady Dunsmore. Sargo, le faune, et Erynia, la nymphe, sont deux Faëriens, chasseurs de démons, et ne jouent pas dans la même cour de récréation que Faustus et Dorilien.

 

Cette histoire prend sa genèse, du moins une grande partie, durant la seconde guerre mondiale, et en cette année 1963, soit vingt ans après, rien n'est effacé, rien n'est oublié, rien n'est terminé.

A l'instar des grands feuilletonistes des siècles précédents, de Dumas à Léon Sazie, en passant par Féval, Zevaco, Arnould Galopin, Souvestre et Allain, et quelques autres, Pierre-Alexis Orloff, qui est un pseudonyme bientôt dévoilé, construit avec Panthéra une œuvre magistrale, dont les différents volumes se lisent indépendamment mais se suivent, l'épilogue relançant l'action, et comme l'on sait, action - réaction. Car les réactions sont nombreuses et les épisodes s'enchaînent sans discontinuer, le lecteur ne prenant même pas le temps de souffler, à peine celui de boire et de manger.

Un roman épique mélangeant avec bonheur les genres, allant du fantastique au policier, du dramatique au mystérieux, avec incursion historique, et un côté sentimental et familial dont étaient friands les auteurs précités, sans oublier Xavier de Montépin et Hector Malot.

Mais les personnages ne sont pas tous issus de la fiction et de l'imaginaire de Pierre-Alexis Orloff. Ainsi sous le nom de Marcel Duchard, puis de son "fils" Antoine, industriels dans l'armement et l'aéronautique, on ne manquera pas d'accoler ceux d'industriels ayant réellement existé ou vivant encore, le fils entretenant quelques indélicatesses avec la justice. Quant à Maître Roger Formellot, il possède un air de ressemblance avec René Fleuriot, célèbre avocat d'après-guerre.

Et l'on pourra poursuivre les aventures de Panthéra bientôt avec les autres titres de cette série qui ne manque pas d'allant, d'humour, de piquant, et d'imagination. Et surtout on apprendra que les amours entre personnes de même sexe parfois peuvent sauver la vie, ou pas.

 

Pour commander ce livre, version papier, une seule adresse :

 

Mais si vous préférez la version numérique, n'hésitez pas, c'est par ici :

Pierre-Alexis ORLOFF : Panthéra contre Faustus. Collection Noire N°30. Editions Rivière Blanche. Parution juillet 2011. 228 pages. 17,00€.

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4 août 2017 5 04 /08 /août /2017 10:02

Ne la laissez-pas ouverte, cela risque

de s'évaporer...

Laurent GENEFORT : Une porte sur l’éther.

Lors de la parution de ce roman, Laurent Genefort n'avait que 32 ans, mais il possédait déjà à son actif plus de vingt cinq titres.

Imaginez deux planètes, Favor et Dunaskite reliées par une espèce de tube, l’Axis, un peu comme les haltères soulevés par les athlètes lors des derniers jeux olympiques. Ce tube, long de 126 000 km pour un diamètre de 815 km, est un peu le régulateur des deux planètes puisqu’il sert de conduit navigable et aérien au pollen de l’Ambrozia, une plante qui pousse sur une des deux planètes et sert à la survie commerciale de l’autre.

Jarid Murray, envoyé de la DemeTer est chargé de régler diplomatiquement l’animosité qui règne entre les deux planètes jumelles, voire siamoises, animosité qui pourrait bien conduire à leur destruction commune. L’Axis n’est pas vierge mais est habité par les Kunis et les Ogounistes, divisés en nombreux clans marginaux, pouvant pencher en faveur de l’une ou l’autre planète ou profitant de l’état belliqueux qui les animent pour développer une indépendance et une reconnaissance de leur situation de marginaux.

Comme tout roman de science-fiction, ce livre pourrait être une parabole sur les arrivistes qui privilégient une carrière personnelle au détriment de la communauté, sur le risque d’anéantissement d’un monde lorsque le déséquilibre économique, avec tout ce comporte de disfonctionnements entre deux états, est engendré par les phantasmes dictatoriaux d’un clan politique résolu à devenir le maître du monde au détriment des autres humains, au nom d’un système, d’une religion, d’une idéologie.

Le vecteur de la science fiction est parfois plus souple, plus anonyme, que le roman noir afin de mieux cerner la réalité actuelle et la mettre en évidence, de dénoncer les dangers qui nous guettent devant les prises de positions de certains chefs d’état.

 

Réédition J'ai lu Science-fiction N°6544. Parution 10 avril 2003. 252 pages.

Réédition J'ai lu Science-fiction N°6544. Parution 10 avril 2003. 252 pages.

Laurent GENEFORT : Une porte sur l’éther. Grand format SF, Fleuve Noir. Parution 16 mai 2000. 266 pages.

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3 août 2017 4 03 /08 /août /2017 10:06

En 1969, le Fleuve Noir passe en mode Tête-bêche. Erotique, non !

Une collection : FLEUVE NOIR DOUBLE

Cette collection, appelée aussi “ Tête Bêche ” de par sa présentation originale - deux romans en un seul volume reliés en tête bêche - n’aura rencontré que peu de succès. Pourtant l’initiative était intéressante en elle-même car elle avait l’avantage de rééditer des ouvrages anciens parus dans les principales collections du Fleuve Noir, avec toutefois une prépondérance pour les reprises d’Espionnage et de Spécial Police, et de faire découvrir les différentes collections proposées par l'éditeur

Sur les douze volumes parus en 1969 il y eut 10 Espionnage, 8 Spécial Police, ceux-ci étant plus souvent couplés, 2 Angoisse, 2 Aventurier et 2 Anticipation extraits du fond des années 50 avec quelques romans représentatifs de cette période. A noter toutefois que si le nom de Paul Kenny, l’auteur vedette en Espionnage, n'est pas présent, ses auteurs sont représentés de façon détournée puisque Graham Livandert (2 fois) et Jack Murray (2 fois), deux autres pseudonymes de l’auteur bicéphale, ont été sélectionnés. Quatre titres de Serge Laforest sont réédités. Le reste étant représenté par Peter Randa, M.G. Braun, Alain Page, Adam Saint Moore Jimmy Guieu, André Lay, J.B.Cayeux, D.H. Keller et Richard-Bessière.

Serge Laforest, qui s’inscrit ici un peu comme une locomotive sera quelques années plus tard mis sur la touche, et coïncidence, cela correspondra au début du déclin du Fleuve Noir.

On ne peut pas dire que le choix des titres fut malheureux ni heureux, mais si l’entreprise avorta, c’est bien parce que l’amateur pouvait encore trouver facilement chez les bouquinistes, à des prix très abordables, ces titres souvent réimprimés dans leurs collections respectives et que la production du Fleuve Noir commençait à devenir inflationniste. Alors le lecteur, qui recherchait l’inédit, ne voyait pas forcément l’avantage de telles rééditions. Les couvertures, qui figurent elles aussi en tête-bêche, ne sont pas des dessins dus à Gourdon.

 

1 - Livandert Graham : Prison à vie  Rééd. Esp. 58

2 - Laforest Serge : Une poigne de fer  Rééd. SP 60

 

3 - Cayeux J.B. : Aveux spontanés  Rééd. Esp. 37

4 - Lay André : Je condamne et j'oublie  Rééd. SP 103

 

5 - Braun M.G. : Jeux sans loi Rééd. Esp. 47

6 - Page Alain : L'Ombre joue à cache-cache  Rééd. Avent. 21

 

7 - Laforest Serge : Choc sans merci Rééd. Esp. 39

8 - Randa Peter : Le libéré Rééd. SP 105

 

9 - Murray Jack : Justice à minuit  Rééd. Esp. 72

10 - Saint-Moore Adam : La mort sort de l'ombre  Rééd. SP 94

 

11 - Richard-Bessiere  : Croisière dans le temps Rééd. Ant. 6

12 - Randa Peter : L'escalier de l'ombre Rééd. Ang 11

 

13 - Laforest Serge : Mort en vue Rééd. Esp. 57

14 - Braun M.G. : Le chemin du couteau  Rééd. SP 65

 

15 - Livandert Graham : Terre brûlée  Rééd. Esp. 44

16 - Randa Peter : Impasse à la dame  Rééd. SP 96

 

17 - Braun M.G. : Route suicide Rééd. Esp. 78

18 - Page Alain : L'Ombre gagne la belle Rééd. Avent. 26

 

19 - Murray Jack : Réseau secours Rééd. Esp. 84

20 - Laforest Serge : Du sel dans la plaie Rééd. SP 66

 

21 - Cayeux J.B. : Activités suspectes  Rééd. Esp. 33

22 - Saint-Moore Adam : Corrida en musique  Rééd. SP 99

 

23 - Guieu Jimmy : Le pionnier de l'atôme  Rééd. Ant. 5

24 - Keller D.H. : L'aile de l'abîme  Rééd. Ang. 9

Un autre essai de relance ou de mise en vente des invendus par des volumes doubles, sous couvertures neutres et qui ne se présentaient pas tête bêche comme dans la collection décrite ci-dessus fut tenté.

Une collection : FLEUVE NOIR DOUBLE
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2 août 2017 3 02 /08 /août /2017 08:07

Où il est démontré qu'un bon vaudeville vaut mieux qu'un mauvais bœuf de campagne...

Jerry JOSNES : Flic flaque.

Les romanciers qui se cachent sous divers pseudonymes, cela ne manque pas en littérature. Par exemple Frédéric Dard/San-Antonio, Romain Gary/Emile Ajar, Agatha Christie/Mary Westmacott, la liste est trop longue pour la continuer, mais si vous avez d'autres noms, rien ne vous empêche de les ajouter dans votre Ford intérieure.

Et pourquoi se dissimulent-ils sous des noms d'emprunt, me demanderez-vous avec juste raison. Pour différentes raisons, le changement de style et donc pour ne pas perturber leurs lecteurs habituels, à cause de contrats d'exclusivité avec leur maison d'édition, ou encore plus rarement pour échapper au fisc.

Donc, sous le pseudonyme de Jerry Josnes, j'ai ri jaune comme me le souffle dans le creux de l'oreille l'auteur du livre, se tient à l'affût Gérard Boutet, son double, son jumeau, son siamois, son nègre qui sait. Et pourquoi Josnes, tout simplement parce que... Attendez, je vérifie sur mon Atlas, papier, et oh surprise, il s'agit du nom d'un village du Loir et Cher (Ma famille habite dans le Loir et Cher, Ces gens-là ne font pas de manières... comme le chantait Michel Delpech) et qui plus est le village natal de l'auteur. Au moins, on sait d'où il vient mais pas où il va. Mais penchons-nous, sans tomber, sur cette prose qui devrait vous ébouriffer, comme la mignonne que le héros, mais s'agit-il vraiment d'un héros, recueille un soir de pluie d'avril. Oui, je me dépêche, je ne veux pas vous laisser vous languir d'autant que la belle Babette, Babie pour les intimes, va prendre froid, mouillée comme elle est. Par la pluie ai-je besoin de préciser.

 

Parlez-moi de la pluie et non pas du beau temps,

Le beau temps me dégoûte et m' fait grincer les dents,

Le bel azur me met en rage,

Car le plus grand amour qui m' fut donné sur terr'

Je l' dois au mauvais temps, je l' dois à Jupiter,

Il me tomba d'un ciel d'orage.

C'est beau, c'est du Brassens, et c'est de circonstance, mais les conséquences ne seront pas celles évoquées dans la chanson. D'ailleurs le narrateur, Jeanjean de son prénom, gendarme de son statut professionnel, à Colombier-Sainte-Croix, nous plonge dans le bain dès les premières pages. Et depuis quelques mois il folâtre avec Babie mais cela ne lui suffit pas. Il est marié avec Letty, mais les rapports ne sont plus ce qu'ils étaient au début de leur mariage. Pas besoins de préciser quels rapports, vous êtes assez grands pour comprendre à demi mot.

Tandis qu'avec Babie, c'est nettement mieux. Babie il la connait depuis tout petit et même avant ou presque, car ils habitaient des maisons mitoyennes. Et arrivés à l'âge où ils auraient enfin pu se démontrer l'inclinaison qu'ils se portaient, Babie n'a pas voulu, car selon une croyance populaire, s'il l'avait embrassée, ne serait-ce qu'une fois, elle serait tombée enceinte. Ce qui ne l'a pas empêchée par la suite de fréquenter d'autres garçons et de jouer à touche-pipi, comme on disait dans la bonne société, mais ce ne sont que des on-dit que personnellement je n'ai pas vérifié.

Donc il rencontre Babie à la faveur d'une pluie d'orage. Il était à bord de l'estafette, et oui, ce fut sa fête, de la gendarmerie, et quelques mois plus tard, il manigance de tuer Paulo, le mari de Babie, garagiste de son état, qui préfère jouer aux boulons qu'au vice. Une envie qui a mûri sous son képi et une Juvaquatre remisée au fond d'un garage de la maréchaussée lui servira à perpétrer son forfait. Normalement Paulo devrait remettre en état le véhicule qui appartient tout de même à l'Etat, et Jeanjean peaufine son stratagème dont je ne vous dévoile pas les détails, mais sachez que l'on entre de plain-pied dans un vaudeville alambiqué et humoristique que Donald Westlake n'aurait pas désavoué, d'ailleurs il s'est servi d'une combinaison approchante, presque, pour écrire Un jumeau singulier. Et puisque nous sommes dans les comparaisons, nous pouvons affirmer que Day Keene, Bruno Fisher, Brett Halliday et James Hadley Chase, pour ne citer que les principaux, se seraient régaler à écrire ce genre d'aventures, même si eux-aussi parfois s'en sont approchés.

 

Jerry JOSNES : Flic flaque.

Je sens que je vous laisse sur votre faim, mais je peux toutefois vous préciser que l'histoire se déroule en 1972, mais écrite en 1976, et pour ceux qui avaient vingt ans à cette époque, ils ne seront pas dépaysés par certains événements décrits, certains personnages évoqués, et ou magazines de référencés.

Avec un humour proche de celui de San-Antonio, mais qui n'était pas uniquement la marque de fabrique du seul Frédéric Dard, d'autres autres auteurs avant lui écrivant dans ce style, et d'autres après lui prolongeant cette manière d'écrire, Cicéron Angledroit et Maxime Gillo, pour n'en citer que deux.

Un vaudeville plaisant, avec une brigade de gendarmerie tirée d'un film de la série des Gendarmes avec Louis de Funès et qui démontre que sous des airs parfois niais un gendarme peut en avoir sous le képi, à lire et à conseiller, mais pas à exécuter même si vous connaissez des problèmes familiaux et que vous êtes du bon côté de la loi.

 

Jerry JOSNES : Flic flaque. Collection Les Polars du terroir. Editions Marivole. Parution le 27 avril 2016. 224 pages. 20,00€.

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1 août 2017 2 01 /08 /août /2017 08:42

Et si Django Reinhardt n’avait pas succombé à une congestion cérébrale le 16 mai 1953 ?

Patrick WILLIAMS : Les quatre vies posthumes de Django Reinhardt.

Partant de ce postulat Patrick Williams, éminent connaisseur du guitariste, imagine, en empruntant trois identités, quatre chemins parcourus par Django, quatre destins vécus par le musicien sorti du coma.

Dans cette première vie, relatée par un journaliste du nom de Guy Leclère, intitulée Sensationnel ! Un concert de Django Reinhardt et Thelonius Monk en duo, le 16 mai 1973 Django se tue dans un accident de la route entre Fontainebleau et Paris. Ce journaliste est chargé d’écrire l’article nécrologique et c’est pour lui l’occasion de revenir sur les deux journées qu’il a partagées avec le Gitan quelques années auparavant. Deux jours composés de déambulations dans le 18ème arrondissement parisien, en évitant toutefois certaines rues, certains quartiers, revisitant les lieux où Django aime manger, boire, jouer. Il va s’infiltrer dans des clubs de jazz en compagnie du musicien, prendre le train pour Samois, l’une des résidences de Django, et l’écouter parler, de Bud Powell, de sa conception de la musique, de l’improvisation, de Bud Powell, des artistes avec lesquels il a joué et enregistré des faces mémorables, de Bud Powell, de son concert programmé avec Monk, de Bud Powell qui inlassablement revient comme une antienne, comme une fixation, un refrain entre deux couplets plus ou moins longs.

A signaler qu’une discographie posthume est recensée, comprenant des enregistrements effectués en compagnie de Mary-Lou Williams, Gerry Mulligan, Henri Crolla, Dizzy Gillespie, Benny Golson, Donald Byrd, Ben Webster ou encore le trio Arvanitas. Que de disques perdus dans la nature !...

 

Dans A room with a view, 43e étage, James D. Cszernynk, critique littéraire nous entraîne à New York sur les traces de Django et de sa femme Naguine dans Manhattan où le guitariste s’est installé après sa sortie du coma. Il vit dans un grand appartement dont les murs sont remplacés par d’immenses baies vitrées et il peut ainsi voir la Grosse Pomme quasiment à 360 degrés. Le plus surprenant n’est pas son insouciance légendaire, ses flâneries dans le quartier, mais bien qu’il se soit reconverti, avec succès, dans la musique électro-acoustique. Une hérésie, peut-être, pourtant le succès discographique est au rendez-vous. Il décède le 23 avril 1983, paisiblement endormi dans son fauteuil préféré, face à l’ouest, rêvant, méditant, contemplant le décor, une ouverture sur l’espace, la liberté.

Laissons les grincheux (de moins en moins nombreux) se lamenter en rappelant que le succès n’est pas obligatoirement synonyme de qualité – il est vrai que l’industrie de la musique populaire en a apporté de multiples preuves dans la seconde moitié du XXème siècle. Il serait étonnant, pouvons-nous leur répliquer, en leur rappelant le caractère spontané de l’emballement populaire, que l’humanité tout entière se trompât. Quel crédit apporter à ce dogme élitiste que la faveur du plus grand nombre dévalorise ce qui en est l’objet ?

 

Dans Sous une pluie de fleurs d’acacias, l’auteur qui se cache sous le pseudo de Bertrand Journens, romancier, nous montre un Django flâneur, bucolique, champêtre, adepte éphémère d’une existence pastorale, puisqu’il fréquente durant un moment l’Eglise Pentecôtiste. Django, se réveillant après un coma de dix-huit mois fin octobre début novembre 1954, déclare avec un surprenant Bonjour ! à l’infirmière de garde, qu’il n’a jamais dormi durant son long séjour dans l’au-delà de la vie active, malgré toute les visites que lui ont rendu sa famille, ses proches, ses amis, des visites souvent bruyantes peu propices au repos. S’est-il reposé, a-t-il réfléchi à un avenir musical ?

Il reprend sa guitare, avec difficulté, à force d’obstination retrouve sa dextérité, mais la foi n’est plus le même. Il apprécie plus les longues balades solitaires sur les bords de la Seine que les concerts, et lorsqu’il se rend dans les clubs de jazz, c’est pour écouter ses amis, ses confrères que pour participer. Et lorsqu’il accepte d’enregistrer à nouveau, fidèle à son habitude, il oublie les rendez-vous. Ensuite il s’établira avec Naguine à Paris, enfin il s’établira, c’est un bien grand mot, disons qu’il vagabondera d’hôtel en hôtel et qu’enfin il s’installera dans une petite maison de ville dans le quartier de Charonne.

Avec Naguine ou seul, de plus en plus souvent seul, il déambulera à Belleville, Ménilmontant, La Chapelle, Barbès, Pigalle, Clichy arpentant l’allée centrale située entre les deux voies des boulevards, là où s’érigent platanes et acacias (en réalité faux-acacias ou robiniers), des arbres presque incongrus comme ceux qui défient les immeubles des deux côtés de cette longue voie qui sépare les 9ème, 10ème, 11ème arrondissements des 17ème, 18ème et 19ème arrondissements ou, plus au nord, les rues parallèles aux boulevards des Maréchaux. Et lorsque Naguine ne pourra plus le suivre dans ses déambulations il continuera, même lorsqu’elle sera hospitalisée. Il la quittera endormi sur un banc, embaumé par la senteur de fleurs d’acacias, trois jours avant le décès de sa compagne de toujours.

 

Enfin la dernière partie de cet ouvrage Une postérité à n’en plus finir, signée Patrick Williams porte bien son titre puisque Django Reinhardt règne toujours dans les cœurs et les oreilles de tous ceux qui apprécient sa musique, jazz manouche, et dont les nombreux émules et membres de la famille des Gitans, portent encore le flambeau, qu’il s’agisse d’Angelo Debarre, Bireli Lagrène, pour citer les plus connus, mais aussi Ninine, Tchavolo Schmitt, Romane, Babik, Coco et David Reinhardt, la famille Ferret : Boulou, Matlo, Sarane, Elios et bien d’autres sans oublier Patrick Saussois et le tout jeune et prometteur Swann.

Un ouvrage dans lequel fiction et réalité se disputent la prépondérance, et qui démontre la connaissance et la virtuosité de Patrick Williams, le djangologue le plus averti des connaisseurs de la vie de Django et de sa musique, et qui lui permet d’imaginer ce qui aurait pu être et ne sera jamais.

Patrick WILLIAMS : Les quatre vies posthumes de Django Reinhardt. Collection Eupalinos. Editions Parenthèses. Parution mars 2010. 288 pages. 16,00€.

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31 juillet 2017 1 31 /07 /juillet /2017 09:15

Les nouvelles aventures de Blade et Baker, à ne pas confondre avec Blake et Mortimer ou encore Black et Decker...

Rémy GALLART : Les otages de Maalsthrom.

Alors qu'il voyage à bord d'un nouvel engin, l'aérobulle, concocté par le professeur Zébulon Krasbaueur, afin de se rendre à l'astroport de Nylghur, sur la planète Joklun-N'Ghar, et récupérer ses amis Baker, Samantha Montgomery et le jeune Xhyvor, Ronnie Blade est tiré en sursaut de ses rêveries par la voix métallique de Robic, le cerveau cybernétique.

Robic est un robot multifonctions, aussi bien domestique que chien de garde, qui vient de changer de statut grâce, ou à cause, du professeur Zébulon, lequel l'a intégré à la nouvelle machine volante.

Donc Blade est tiré de ses rêveries par Robic qui lui indique qu'un engin est en difficulté non loin. Il récupère, non sans mal, une jeune femme sur le point de se noyer, son engin gîtant fortement sur les eaux de l'océan. Elle dit s'appeler Xolvianne, une Centaurienne, mais ses assertions concernant des problèmes techniques sont réfutées par Robic, toujours aussi véloce dans ses interventions.

Comme si ce que dément Robic ne la touchait pas, la Centaurienne sort un poudrier et commence à souffler dessus. La poudre se disperse et Blade se retrouve dans les bras de Morphée.

 

Pendant ce temps, Blake et consorts sont tout étonnés de ne pas être accueillis par Blade à l'astroport. Le lendemain alors qu'ils devisent devant la télévision, les journalistes déblatèrent sur la disparition de l'homme d'affaires. Soudain l'un d'eux prend la parole pour diffuser un reportage en provenance d'Hisspaniola, une planète dont la réputation est douteuse. Le reportage, effectué en caméra cachée, montre Blade dans une taverne malfamée, jouant aux cartes, et abattant l'un des participants sous prétexte que celui-ci l'aurait accusé de tricherie.

Pour Samantha, Blake et Xhyvor, il s'agit d'un montage grossier, un trucage. Seulement, auprès du public, la réputation de Blade est entachée, et les bourses commencent à dévisser sur les actions de la multi-planétaire dont ils sont les propriétaires. Et Xhyvor déplore de ne plus être en possession de ses facultés psy, ce qui évidemment se révèle être un handicap.

 

Blade se réveille sur Maalsthrom, et Xolvianne est présente lorsqu'il ouvre les yeux. L'un de ses gardes du corps se montre quelque peu agressif mais la Centaurienne le remet à sa place, puis elle explique à Blade le motif de son enlèvement. Le sous-sol est riche en matière première, par exemple le diamant alpha qui à moindre coût peut remplacer avantageusement les autres combustibles ou minéraux.

Mais Maalsthrom est en proie à une révolution interne, opposant les deux ethnies l'habitant. La configuration de la planète a évolué à cause d'une légère rotation et les territoires désertiques empiètent maintenant sur les marécages, obligeant les b'athrax qui vivent dans les zones humides à se replier tandis que les fromiis préfèrent les zones plus sèches.

 

Le professeur Zébulon est lui aussi kidnappé, selon un informateur inconnu et lorsque Baker et Cie se rendent vers la villa qu'ils ont dû abandonner pour vice de construction, ils sont attaqués par des thermiques. La situation est grave, mais pas désespérée. Quoique...

 

Reprendre des personnages de la littérature populaire après que leur créateur ait passé la main, n'est souvent pas chose facile. Il faut respecter le fond et la forme, tout en inventant de nouvelles histoires, de nouvelles aventures, en conformité avec les précédentes, respecter, peut-être, un cahier des charges, même si toute latitude est laissée au scripteur.

Rémy Gallart, est un auteur méconnu car trop longtemps caché derrière les noms des romanciers dont il a poursuivi l'œuvre, son patronyme n'apparaissant pas sur la couverture mais à l'intérieur des romans, aussi bien pour la série des Blade et Baker de Jimmy Guieu que des Bob Morane d'Henri Vernes. Il faut également préciser que pour les Blade et Baker, il avait pris le pseudonyme de Frank Walhart, ou écrit sous son nom en collaboration avec Roland C. Wagner, qui lui signait Richard Wolfram, et qui lui avait mis le pied à l'étrier,.

Alors Rémy Gallart, dont le talent explose dans ce roman, le dix-huitième de la série Blade et Baker qu'il a écrit et qui est inédit, devrait pouvoir se faire un nom, le sien, en inventant des personnages nouveaux, peut-être ressemblant à des Héros ayant vécu moult aventures, mais faire œuvre personnelle. Il en a les capacités, l'aptitude, une écriture maîtrisée, d'ailleurs s'il a prolongé les aventures de Blade et Baker et Bob Morane, ce n'est pas un hasard.

 

Pour commander ce roman, voyagez sur la Rivière Blanche en cliquant sur le lien ci-dessous.

Rémy GALLART : Les otages de Maalsthrom. Collection Blanche N°2154. Editions Rivière Blanche. Parution juin 2017. 224 pages. 18,00€.

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Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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