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31 mars 2019 7 31 /03 /mars /2019 07:23

Et un cœur de pierre ?

Valérie LYS : Un amour de statue.

Du haut du vingt-huitième étage de son nouvel appartement dans la tour Les Horizons à Rennes, l’un des premiers immeubles dit de grande hauteur en France, le commissaire Velcro s’imprègne du paysage qu’il contemple jusque là-bas tout au loin. Il vient d’être muté et sa femme ne va pas tarder à le rejoindre.

Son rêve est exaucé, il vient d’intégrer la P.J. bretonne et sa première mission officielle en compagnie du commissaire Delcourt l’envoie à Perros-Guirec sur la Côte de Granit rose. Eva Myla, la célèbre diva, vient d’être découverte morte sur le carrelage de la piscine de la Thalassothérapie du Trestaou. Elle possède une maison sur les hauteurs de Perros-Guirec et y réside lorsqu’elle n’est pas par monts et par vaux pour des concerts. Elle est mariée sans enfant, seulement son mari, dont l’avenir de violoniste était prometteur, a été obligé de ranger son archet à la suite d’un incident. Depuis il est dipsomane, ce qui l’amène parfois à se quereller pour des vétilles.

Selon toute vraisemblance, la mort de la diva n’est pas accidentelle, et l’autopsie le confirmera. Ce n’est pas une surprise, l’étonnement réside dans l’affirmation selon laquelle Eva Myla aurait eu un enfant quelques vingt ans auparavant.

Velcro est scotché en apercevant Deborah, sa coéquipière qui enquête sur une autre affaire dans la région. Elle explique qu’une statue érigée dans la Vallée des Saints (à na pas confondre avec le sillon mammaire) à Carnoët, petite ville située selon les itinéraires entre 66,830 et 77,170 kilomètres (ceci pour ceux qui aiment les précisions), a été vandalisée. Ils se rendent sur le site et questionnent les trois sculpteurs présents en charge de ces nouveaux monuments façon Île de Pâques.

Velcro s’entretient avec les employés de la Thalasso et le directeur. Le docteur qui suit les malades, le jeune kinésithérapeute de pas même vingt-cinq ans, la masseuse esthéticienne, et la réceptionniste enrobée. Mais chacun d’entre eux cultive son jardin secret et cela ne va sans polémiques et pointes de jalousie.

Mais une autre statue est vandalisée et apparemment il n’y aurait aucun rapport, les dégâts n’étant pas conçus de la même façon. Les deux collègues vont enquêter, de concert, c’est de circonstance, ou de conserve, on est en pays marin, sur ces deux affaires qui possèdent un lien, pas évident au départ mais de plus en plus prégnant.

 

Entre les deux collègues s’établit une complicité ponctuée de marivaudage. Car Velcro est attirée par la jolie quinquagénaire, et il semble bien que cela soit réciproque. Mais il est également un épicurien qui savoure les huîtres en ressentant un attrait sexuel dans cette dégustation.

Naturellement les connaisseurs et amoureux du cru suivront les différentes pérégrinations de Déborah et Velcro en visitant des lieux superbes, des lieux historiques, à la mémoire ancienne ou proche, avec la tombe de Thierry le Luron notamment, incontournable pour certains mais dédaignée, et apprécieront les références littéraires et musicales, notamment le lien qui unit Céline, le romancier encensé par bon nombre d’intellectuels de gauche et de droite, mais qui ne m’a personnellement jamais attiré et ce non pas pour ses idées fascistes et antisémites, quoi que, mais à cause de son écriture en pointillé, entre Céline alias Louis-Ferdinand donc et son ami Igor Stravinsky, le célèbre compositeur de L’Oiseau de feu et du Sacre du printemps.

Mais un autre personnage apparait en superposition, celui de Milan Kundera dont l’ex majordome s’est installé dans la tour des Horizons, nichant deux étages au-dessus de Velcro.

Parfois l’on peut se demander où Valérie Lys veut entraîner son lecteur, mais le roman terminé, force est de constater que tout se tient, tout est agencé avec justesse, et que l’on a passé un bon moment en compagnie des deux policiers, ce qui n’est pas chose si courante en ces moments de tension.

 

Les gens intelligents ne savent pas être heureux, ils réfléchissent trop. Ils ont besoin de plaisirs trop sophistiqués.

Valérie LYS : Un amour de statue. Série le commissaire Velcro N°7. Editions du Palémon. Parution le 15 février 2019. 224 pages. 10,00€.

ISBN : 978-2372605427

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20 mars 2019 3 20 /03 /mars /2019 05:48

Attention aux courants d’air !

Les neurones vont éternuer !

 

Evelyne BRISOU-PELLEN : Le crâne percé d’un trou.

L’estomac et la bourse vides, Garin Troussebœuf fait la rencontre près du Mont-Saint-Michel d’un gamin légèrement plus jeune que lui. Louys s’est trouvé une occupation qu’il espère rémunératrice, il vend des reliques. Elles sont fausses, mais en cette époque de superstitions, de catholicisme exacerbé, il n’est pas toujours besoin de démontrer l’exactitude de ses affirmations. Les acheteurs sont si crédules !

Il a remarqué dans les bois un soldat, enfin le cadavre d’un individu qu’il pense avoir été un soldat, nu. En cette période de troubles entre Anglais et Français, il n’est pas rare de tomber sur une petite troupe de combattants. D’ailleurs ceux-ci rôdent mais ce ne sont pas des soldats que Garin et Louys aperçoivent cheminant paisiblement, mais deux moines qui rejoignent l’abbaye de la Merveille. Deux Bénédictins habillés de noir. Des pèlerins rejoignent également le Mont.

Enfin les deux jeunes adolescents arrivent dans le petit village composé de commerces au pied de l’abbaye. Louys essaie de se placer chez un boutiquier en attendant la bonne fortune tandis que Garin décide de se faire embaucher comme scribe. Ce qui arrange bien les affaires du père abbé, car le scribe officiel, le copiste frère Robert commence à se faire âgé et l’abbaye enregistre une pénurie de copiste à cause de l’épidémie qui a sévi il n’y a guère.

L’aumônier et le chantre le prennent successivement sous leur coupe, l’emmenant au scriptorium où se tient habituellement frère Robert. Pour l’heure il n’est pas là, mais c’est sans importance. Le chantre lui promet également de lui montrer le crâne percé d’un trou de Saint Aubert, qui fit construire la première chapelle qui plus tard s’étendra et prendra des proportions gigantesques en devenant l’abbaye. Il suffit de respecter quelques règles dont le silence. Une règle pas facile à appliquer à Garin mais il essaiera de la suivre du mieux qu’il peut. Une autre exigence l’importune un peu, assister aux messes. Heureusement il ne sera pas obligé d’être présent à tous les offices.

Garin retrouve également les deux moines entrevus dans la forêt, frère Raoul, un jeune moine, et frère Sévère, à l’aspect plus rébarbatif. Un peu Laurel et Hardy avant l’heure. Si Garin et Frère Raoul font plus ample connaissance, durant les heures permises aux dialogues dans le cloître, frère Sévère est nettement moins abordable. Quant au crâne il a disparu du reliquaire dans lequel il était enfermé.

Garin est chargé de dresser l’inventaire des reliques, le bras d’un saint, quelques gouttes du lait de la Vierge, deux épines provenant de la couronne du Christ et autres objets précieux. Frère Robert qui avait l’habitude de se réchauffer près de la cheminée dans le scriptorium disparait. Il est retrouvé un peu plus tard, mort, la paume d’une main brulée, le crâne de Saint Aubert gisant près de lui.

 

Garin va devoir enquêter, il s’en sent l’obligation morale, mais il a bien du mal à évoluer dans les couloirs, les corridors, les galeries, les nombreuses pièces composant l’abbaye, les passages plus ou moins secrets, dans les ténèbres car il n’y a pas encore l’éclairage électrique au Mont. Juste quelques chandelles et torches dispersées ici ou là.

Les moines et les novices résidant au Mont ne sont guère nombreux, un peu plus d’une vingtaine. D’ailleurs l’un des novices, qu’il avait surpris pleurant, ne fait plus partie de la congrégation. Quelques pèlerins viennent également se recueillir et une délégation venant de Dol doit être reçue. Une ombre noire, un moine armé d’un couteau, rôde dans ce qui constitue un véritable labyrinthe. Garin va même devoir sauver sa peau, empêtré dans les sables mouvants alors qu’il était parti à la pêche aux coques, accompagné d’un des moines.

Une aventure périlleuse pour Garin et une enquête qui ne manque pas de lui réserver de nombreuses surprises. De même qu’à Louys également car son statut de revendeur de reliques ne plaide guère en sa faveur, surtout avec la disparition des objets sacrés appartenant au Mont.

Pour le lecteur, c’est une aimable histoire doublée de la découverte du Mont et de son abbaye en cette année 1357, abbaye qui n’avait pas encore pris les proportions qu’elle possède de nos jours avec les ajouts qui se sont succédé au fil des siècles. D’ailleurs des pièces avaient été murées, et certaines n’ont été redécouvertes que depuis quelques décennies, à la faveur de rénovations.

Un roman plaisant, historique inspiré d’une légende, celle de l’archange Saint Michel obligeant le moine Aubert à édifier sur le mont Tombe une église en son honneur en lui appuyant un doigt sur le crâne et y laissant sa marque, roman doublé d’une enquête menée difficilement par Garin qui ne connait guère les aîtres et se trouve plus ou moins soupçonné.

Un roman humoristique également, car Garin est un affabulateur, un adolescent aimant déguiser la vérité en sa faveur, s’inventant des ancêtres prestigieux.

 

Le problème du mensonge, c’est la mémoire : il faut se rappeler tout ce qu’on a dit.

Garin ne prit même pas le temps de réfléchir : inventer une vie de saint, c’était facile, car on pouvait vraiment raconter n’importe quoi, au besoin en s’inspirant de bribes de vie d’autres saints.

Réimpression le 7 mai 2013. 208 pages. 6,60€.

Réimpression le 7 mai 2013. 208 pages. 6,60€.

Evelyne BRISOU-PELLEN : Le crâne percé d’un trou. Folio Junior N°929. Gallimard Jeunesse. Parution le 2 novembre 1998. 210 pages.

Réimpression le 7 mai 2013. 208 pages. 6,60€.

ISBN : 978-2070519460

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18 mars 2019 1 18 /03 /mars /2019 05:25

Quand on vous dit qu'il vaut mieux prendre le car !

Alain GANDY : Un week-end meurtrier.

Un car qui plonge dans les gorges de l’Aveyron, lors d’un violent orage en cette semaine de Pâques 1980, et c’est la fin du voyage pour une trentaine de touristes venus en pèlerinage dans leur région natale. Ils étaient partis heureux de Paris et les voilà coincés dans une carcasse de ferraille ou flottant dans l’eau. Le juge d’instruction Massac convoque son ami Combes, ex-gendarme reconverti en détective privé, afin d’enquêter sur ce drame.

Théoriquement trente cinq victimes sont dénombrées, plus les deux chauffeurs, mais des désistements ont eu lieu, juste avant le voyage, pendant et même à l’arrêt de Bescatel, lieu où s’est produit l’accident. Combes n’est pas très chaud pour se substituer à la maréchaussée, mais sur les instances de la magistrature il se soumet. Il se rend donc sur place en compagnie de Massac et en apprend de bonnes.

Quatre personnes ont faussé compagnie à Rodez, et un jeune couple à Bescatel même. Mais le plus surprenant, ce sont les déclarations des rares témoins. Certains auraient entendu des coups de feu, un autre aurait aperçu un homme en compagnie d’un chauffeur qui dirigeait la manœuvre du car. La plus grosse surprise qui attend Combes et le juge, c’est de retrouver le conducteur à son volant avec un trou au milieu des yeux. Une balle tirée délibérément.

Un voyageur repose au fond du car, lui aussi atteint mais à l’arrière de la tête. Il vit encore, mais il est plongé dans le coma. Combes ne rechigne plus à la tâche qui lui a été confiée et se rend même à Paris afin d’interroger le patron de l’agence qui a organisé le voyage. Et il ira de surprises en surprises. Claire sa femme et ses deux enfants, Robert et Clairette seront mis à contribution afin de dénouer les fils de cette intrigue.

 

Une fois de plus Alain Gandy nous propose une aventure palpitante, solide, pleine de rebondissements, dans une région française pourtant pas réputée pour ses délits et ses crimes de sang.

Il ne se perd pas en descriptions oiseuses et l’épilogue tombe comme un couperet, sans traîner en longueur.

Le personnage de Combes prend de plus en plus d’épaisseur, et ses confrontations avec le juge Massac, et le procureur Proutès le montrent en homme déterminé, mais également humain, sensible. Mais que serait Combes sans l’apport et le soutien efficace de sa femme et de ses enfants ?

Alain GANDY : Un week-end meurtrier. Collection Polar de France. Production J. Balland. Presses de la Cité. Parution 20 mai 2009. 240 pages. 22,00€.

ISBN : 978-2258076808

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12 mars 2019 2 12 /03 /mars /2019 05:15

Un graffiti original !

Xavier-Marie BONNOT : La première empreinte.

Michel De Palma, commandant au SRPJ de Marseille, surnommé Baron par ses amis et ses collègues, réputé comme un policier sérieux et efficace, se voit confier une enquête sur le décès d’une préhistorienne retrouvée noyée dans la calanque de Sugiton.

Le fils d’un ancien chimiste de morphine, reconverti comme limonadier est lui aussi découvert noyé, un accident semble-t-il, au même endroit. Cette calanque de Sugiton recèle, par 38 mètres de profondeur, une grotte préhistorique dans laquelle ont été découvertes des reproductions de bisons et autres animaux, ainsi que celles de mains en négatif ou l’effigie sommaire de l’homme tué, sensée représenter l’image du premier meurtre de l’histoire.

Une main en négatif, comme celle retrouvée auprès de corps de jeunes femmes assassinées apparemment sans raison. Pourtant il existe un lien entre ces meurtres, un lien ténu que De Palma rembobine avec obstination, comme un fil d’Ariane fragile et prêt à casser à tout moment. Mais le policier, féru de musique classique et principalement d’opéra, est têtu et même s’il traîne derrière lui un boulet, cela ne l’empêche pas de persévérer, contre vents et marées.

 

Malgré quelques longueurs, La première empreinte de Xavier–Marie Bonnot est un roman remarquable autant par l’écriture que par la maîtrise du sujet, son sens du détail précis et minutieux (trop peut-être) et par le décor, lieux magiques chargés d’histoire. Il faut signaler aussi que ce livre, lors de sa première parution, possédait un glossaire, parfois superfétatoire, et était expurgé d’un exotisme marseillais qui alors faisait florès.

Première édition : Spéciales 6 Editions L’écailler du Sud. Parution 2002.

Première édition : Spéciales 6 Editions L’écailler du Sud. Parution 2002.

Réédition Pocket Thriller N°13206. Parution 31 Aout 2007. 472 pages

Réédition Pocket Thriller N°13206. Parution 31 Aout 2007. 472 pages

Xavier-Marie BONNOT : La première empreinte. Réédition Editions Belfond. Parution le 7 mars 2019. 400 pages. 12,00€.

ISBN : 9782714481276

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24 février 2019 7 24 /02 /février /2019 05:46

Mais bon pied, bon œil ?

Gilbert GALLERNE : Mauvaise main.

Il suffit de traverser la rue pour trouver du travail, qu’il a dit, l’homme aux piques plus nocives que le frelon asiatique.

Alors Eric, informaticien au chômage, et sa femme Elise, employée dans une boutique de chaussures, renvoyée par son patron parce qu’elle est enceinte, peut-être n’avait-il pas trouvé chaussure à son pied, ont décidé de quitter Annecy pour se rendre dans les Vosges. Mais retrouver sa famille vingt ans après l'avoir quittée, pour Eric c'est comme un espoir de repartir d'un bon pied à défaut d'une bonne main.

Suite à un accident à l’âge de cinq ans à la scierie familiale, il avait été envoyé chez une tante qui l’avait élevé et servait également de famille d’accueil. C’est là qu’il a rencontré Elise, une enfant de la DASS. Vingt-cinq ans, une prothèse à la place d'une main perdue dans un accident, Eric n’a guère de débouché et c’est pourquoi il revient dans ce coin des Vosges, près de Saint-Dié, perdu dans la nature et la scierie ne tourne qu'au ralenti.

Il retrouve la tribu avec appréhension. Et il faut avouer qu'il arrive un peu comme un chien dans un jeu de quilles. Eléonore, sa mère lui affirme qu'il a fait un mauvais choix en revenant, mais de toute façon s'il ne l'a pas vue depuis l'âge de ses cinq ans et son accident à la scierie, c'est un peu sa faute.

Eléonore, c’est la matriarche mais elle n’a pas réussi à dresser Léo, le lion, son frère aîné, dix ans de plus que lui, marié avec Rose-Marie et père de quatre enfants dont Bernard, qui est un peu le chef de bande des gamins. Michel, son autre frère, fait ce que Léo commande. C'est un être frustre marié avec Annabelle, et ils ont trois gamins dont Ludovic et Solange. Enfin Marcel, son oncle qui ne sait pas parler. Il couine, il glapit, il végète et est considéré comme le simplet de la famille. Pourtant il en aurait des choses à dire, Marcel, qui s'accroche comme un pantin à la grille d'entrée, pour voir au-delà, mais rien ni personne ne passe.

Léo s'érige en maître incontesté de la scierie. Il décide pour tout le monde, impose sa loi et éventuellement exerce le droit de cuissage. Comme les tyranneaux du temps jadis. A croire que le temps s'est arrêté à la scierie. D'ailleurs la scie ne tourne plus guère, juste pour faire du bruit. Pourtant la famille ne manque de rien, et Léo possède même une Peugeot 607 qu'il remise dans l'un des bâtiments. Parfois ils sortent ensemble le soir, Michel et lui, pour aller Dieu, ou le Diable, sait où. Eric se rend à Saint-Dié, effectue une petite visite à madame Paule Emploi, il rédige des CV, des lettres, mais rien n'y fait, il ne reçoit aucune proposition d'emploi.

L'ambiance dans la scierie est lourde, délétère, et Elise souhaite repartir, mais sans argent comment survivre. Et puis l'enfant frappe à la porte et c'est Eléonore qui procède à l'accouchement, comme pour les autres femmes de la famille. Heureusement Elise trouve en Annabelle une complice ainsi qu'avec Ludovic. Mais Annabelle possède elle aussi un fil à la patte. Quant à Ludovic, contrairement à son cousin Bernard, c'est un enfant calme, qui aime lire, souhaite pourvoir prolonger ses études. Léo l'oblige à manquer parfois l'école, pour aider à la scierie, mais il se demande bien pourquoi, car il n'y a que peu de travail. C'est le dédain et la jalousie qui guident Léo.

Chaque famille possède son habitation, en bois, et les dépendances se dressent tout autour d'une cour centrale, donnant l'impression d'un village de western. Afin de justifier son appartenance à la famille Eric est sollicité, avec autorité, par Léo à participer à une des virées nocturnes. Le côté obscur des rentrées financières.

 

Le lecteur entre de plain pied dans une ambiance qui ne sera pas sans lui rappeler quelques romans de Pierre Pelot. Le décor, les forêts vosgiennes, un lieu quasi abandonné en pleine nature; les personnages, des hommes âpres, durs, avec un chef de famille qui s'érige en dictateur sans scrupule, imposant sa loi par tous les moyens, une véritable brute qui aime broyer ceux qui sont sous sa coupe. On pourrait également évoquer Jim Thompson dans certains de ses romans âpres et durs.

Mais peu à peu, l'histoire bifurque, et le lecteur se lance sur la route, à pleine vitesse, s'arrête à une aire de parking et assiste à des actes illégaux. Puis c'est le début d'une lente décomposition familiale qui explose dans un cataclysme que l'on pouvait pressentir tout en le redoutant. Pourtant un jour à Saint-Dié, une sorcière l'avait lu dans les lignes de la main d'Elise, mais peut-on croire une vieille femme un peu folle.

Véritable roman noir, violent parfois, qui malgré la nature environnante ne joue pas dans le thème bucolique (ce serait plutôt Bu, alcoolique) Mauvaise main conte l'histoire d'un homme qui abandonné recherche avec espoir une famille à laquelle se raccrocher. Si au départ on apprend pourquoi il possède une prothèse plastique, les conditions dans lesquelles il a perdu sa main sont peu à peu dévoilées, même si au cours du prologue certains éléments sont mis en place.

Un roman qui s'articule autour de la famille, l'explore, la dissèque, l'analyse, les parts d'ombres étant mises au jour avec subtilité et sans concession. Pourtant il existe quelques scènes où l'humour se fraie une petite place, mais un humour pathétique comme la scène au cours de laquelle Marcel, qui ne se lave jamais, est nettoyé à l'aide d'un jet d'eau dans la cour devant la tribu réunie.

Gilbert GALLERNE : Mauvaise main. Collection Polar. Editions French Pulp. Parution le 10 janvier 2019. 272 pages. 18,00€.

ISBN : 979-1025104613

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19 février 2019 2 19 /02 /février /2019 05:10

Aven que pourra, et pour la galette on repassera…

François LANGE : La bête de l’Aven.

Il pleut toujours en Bretagne ? Préjugé ! Car en ce début de mois de juillet 1858, il fait chaud et beau. Ou inversement.

L’inspecteur de police François Le Roy est assoiffé et pour éteindre le feu qu’il a dans la gorge, il se rend à l’Auberge du Lion d’or, déguster avidement quelques bolées de cidre rafraîchissant. Nonobstant, il remarque que trois individus attablés au fond de la salle semblent tenir un conciliabule dont il aimerait connaître la teneur.

Comme le patron est une mouche (un mouchard ou indic en argot) il lui demande d’écouter ce qu’ils se disent et de lui en rapporter la teneur. Car l’un des hommes, un borgne, ne lui dit rien qui vaille. Et c’est ainsi qu’il apprend que le borgne envisage l’attaque d’une malle-poste, chargée d’or et d’argent destiné à des banques de Bretagne, du côté de Pont-Aven. Un braquage qui devrait se dérouler à la Croix Saint-André très exactement. Voilà une affaire qui l’intéresse au plus au point et qui va le changer de la monotonie dans laquelle il commence à s’engoncer.

Alors qu’il s’apprête à exposer à son supérieur hiérarchique, le commissaire Montépin (qui ne se prénomme pas Xavier), sa décision d’enquêter sur une possible attaque de diligence, son patron lui signifie qu’il est chargé d’aller résoudre une affaire de meurtres de jeunes filles dans la région de Pont-Aven. Normalement cela ne ressort pas de sa juridiction, mais l’ordre vient d’en-haut, du ministère via le préfet.

Alors direction Pont-Aven et François Lange espère bien faire d’une pierre deux coups. Contrer le ou les dévaliseurs de diligence dans la plus pure tradition du Far West breton aux pruneaux (oui, il y aura échange de coups de feu !) et résoudre le mystère des jeunes filles attaquées par une mystérieuse bête aux griffes acérées.

L’inspecteur de police sera aidé dans son enquête par un lieutenant de gendarmerie, un ami dont il a fait la connaissance lorsque tous deux étaient sur le front de Crimée. Ce qui aide dans les relations, parfois difficiles, entre les représentants de la gendarmerie et ceux de la police.

 

Comme souvent, l’une des deux affaires se trouve opportunément résolue en conclusion de l’autre. Hasard heureux, oui, mais l’on sait que le hasard est le Dieu des policiers. Sans le hasard, souvent, ils passeraient à côté d’indices troublants. Et il ne faut pas oublier qu’à cette époque, ils ne possédaient pas l’arsenal technologique dont ils disposent maintenant, avec la police scientifique qui déblaie bien le terrain.

Un récit intéressant qui mêle histoire et terroir, sans pour autant que l’un de ces deux thèmes empiète sur l’autre et affadisse ou ralentisse le roman. Le suspense est soutenu et l’angoisse s’infiltre doucement, même si le lecteur sent dès le départ que l’animal est une bête humaine. L’auteur joue sur l’ambigüité du personnage qui pourrait évoluer aussi bien aujourd’hui, peut-être dans des conditions différentes mais avec une approche similaire.

Plaignons ces pauvres gendarmes qui, si j’ai bien lu et bien compris, sont des vétérans des campagnes napoléoniennes. Comme il semble que ces références ne soient pas relatives à celles de Napoléon III, il est donc nécessaire de se reporter à celles de Napoléon 1er. La dernière, celle de Waterloo, datant de 1815, soit quarante trois ans auparavant, on peut penser sans se tromper que nos braves gendarmes sont alors âgés d’au moins soixante-trois ans. Bigre ! Et on se plaint !

Ce petit point d’histoire éclairci, ou non, reste que ce roman est plaisant, agréable, et l’on suit les aventures de François, dit Fañch, Le Roy avec intérêt, tout autant pour l’aspect historique que pour le développement de l’intrigue. Et personnellement, j’ai découvert un peintre, Camille Bernier, aux toiles naturalistes classiques et minutieuses, qui ne fut pas l’un des peintres de l’école de Pont-Aven mais exerça son art dans la région bien avant l’heure.

 

François LANGE : La bête de l’Aven. Série Fañch Le Roy 2. Editions du Palémon. Parution le 15 février 2019. 208 pages. 10,00€.

ISBN : 978-2372605519

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15 février 2019 5 15 /02 /février /2019 05:17

Et pour l’héritage, on fait comment ?

Alain GANDY : Une famille assassinée.

Gendarme à la retraite à Villefranche-de-Rouergue, Joseph Combes s’est reconverti en tant que détective privé, avec pour effectifs, avoués ou non, sa femme et Berthier, un de ses anciens collègues. Sans oublier ses deux enfants qui ne rechignent pas à la tâche lorsque le besoin s’en fait sentir. Un plaisir autant qu’un travail et son agence acquière une réputation assez flatteuse.

Assez pour inciter le lieutenant-colonel Alexandre Dupont-Magloire, en retraite depuis une douzaine d’années, de solliciter un entretien. Dix ans auparavant, le garde-chasse de Dupont-Magloire, Pierre Rougnac, est décédé dans l’incendie de sa maisonnette située dans le parc du château d’Estrelloux, demeure du militaire en retraite. Dupont-Magloire a adopté Martin, le jeune fils du défunt.

Le garde-chasse aurait poursuivi de ses assuidités Julie, la fille aînée de Dupont-Magloire, alors âgée d’à peine quinze ans. Martin ne s’est jamais vraiment intégré dans sa nouvelle famille, exerçant toutefois une emprise certaine sur François et Clémence, les jumeaux benjamins du châtelain. Les aînés, Raoul et Julie, ne peuvent pas sentir Martin, tandis que François en a peur. Quant à Clémence elle est subjuguée.

Martin est un être sauvage et exècre les Dupont-Magloire. Le militaire a peur d’un drame et souhaite que Combes reprenne l’enquête, ne serait-ce que pour le disculper ainsi que sa famille de la mort du garde-chasse, mort considérée comme un accident mais que Martin s’obstine à qualifier de meurtre.

Les événements s’enchaînent, accident de parapente pour Raoul en compagnie d’un de ses amis, sabotage de l’automobile de Dupont-Magloire et autres incidents qui se révèlent tragiques.

 

Roman policier rural, Une famille assassinée reflète une certaine image de la France profonde, loin du médiatique battage des banlieues désespérées, soumises à la violence, à la drogue et au chômage.

Le roman d’une famille déchirée à la suite d’un décès, même si le mort n’est qu’un employé d’une famille bourgeoise, les conséquences qui découlent de ce drame, les heurts, les tensions, les vengeances, les acrimonies qui régissent les uns et les autres, les rancunes.

Avec sobriété Alain Gandy tisse sa toile et ce roman de suspense subjugue le lecteur qui découvre derrière les charmes de l’Aveyron, une frange de la noirceur provinciale. Les préjugés sont tenaces et l’opinion néfaste est rapidement établie par des protagonistes persuadés de leur jugement sans posséder les preuves de ce qu’ils avancent.

 

Alain GANDY : Une famille assassinée. Collection Terre de France suspense. Editions Presses de la Cité. Parution le 1er février 2007. 240 pages.

ISBN : 978-2258070370

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10 février 2019 7 10 /02 /février /2019 05:01

Réglez vos montres… !

KÂÂ : On commence à tuer dans une heure.

Un vieux truand qui appelle le narrateur afin que celui-ci disculpe son fils dans une affaire de meurtre, quoi de plus normal pour un avocat de recevoir par téléphone une telle demande.

Sauf que le narrateur, on ne sait pas trop s’il est réellement avocat ou tueur à gages. Ceci ne nous regarde pas.

Donc le narrateur est dérangé alors qu’il se prélasse béatement en compagnie de Florence qu’il doit emmener à la neige. Mais une mission l’attend. Il doit, contre monnaie sonnante et trébuchante, faut pas le prendre pour un altruiste non plus, régler une petite affaire.

Malgré les affirmations de son père, le jeune Pierre Manusbec s’est accusé d’un crime qu’il n’aurait pas commis. Du moins c’est Emile, le paternel, qui l’affirme. Et comme Emile fut un copain de son vieux, le narrateur accepte de se rendre dans un petit village de Haute-Lozère afin de démêler un embrouillaminis qu’il compare à une affaire digne d’Agatha Christie.

Et c’est ainsi que le brave avocat, ou supposé tel, se rend près de Saint-Chély se présentant comme un touriste lambda. Dans la petite auberge où il s’est installé, il fait la connaissance de quelques habitants du patelin dont Abélard, l’ancien, abonné du comptoir du café-tabac-hôtel.

Il n’y a plus grand-monde sauf les Algériens là-haut, selon Abélard, mais il est rapidement contré par la tenancière qui rectifie, les Marocains. Et lorsque le narrateur demande où habite le maire, la brave personne ne mâche pas ses mots. La pute, vous voulez dire, monsieur. Et oui, c’est bien elle, madame Dessaintes, vétérinaire en plus d’être le premier édile du village.

Mais au moins, la p…, la vétérinaire consent à lui raconter le drame qui s’est déroulé. Elle avait accompagné les gendarmes sur les lieux du drame. Pierre Manusbec avait été trouvé par un garde-forestier avec une serpe pleine de sang à la main à côté du corps défunté. Le cadavre avait un nom, Manuel Ricorba, qui était arrivé cinq ans auparavant pour travailler à la tannerie. Mais ce don Juan ne se contentait pas des vieilles peaux de la tannerie, il fricotait également avec les jeunes femmes du patelin. Drame de la jalousie ?

C’est ce que le narrateur va essayer de démêler dans une atmosphère réfrigérée. Vrai qu’à part Abélard, les villageois ne sont guère aimables, mais surtout à cause de la neige qui tombe en abondance. Et bientôt les communications sont coupées. Impossible de sortir trop loin du bourg. Pourtant il lui faut se déplacer, aller chez Bajauges fils, qui a repris la tannerie paternelle. La politique des ressources humaines a toujours été de se constituer un vivier d’étrangers. Avant c’était des Espagnols maintenant des Marocains.

Et puis rencontrer aussi le docteur Henri de Villagray, qui n’exerce plus son art, il tenait une clinique psychiatrique fermée dans le milieu des années 1970, et sa fille dont la réputation n’est pas très flatteuse. Mais il est vrai également que celle du père ne l’est pas non plus, mais pour des raisons différentes.

Et, je ne vais pas effectuer le recensement complet, il ne faut pas non plus oublier cette silhouette noire qu’aperçoit le narrateur. Une silhouette difforme qui se promène avec un fusil le soir dans la neige.

 

La neige, partout présente. Celle du ciel qui tombe en abondance. D’accord, ça je l’ai déjà écrit. Mais il y l’autre neige, celle qui ne fond pas au premier rayon de soleil.

Une enquête en vase clos qui se déroule quasiment en grande partie dans ce patelin de la Haute-Lozère mais qui verra son épilogue se tenir à Marseille.

Une enquête qui prend sur les nerfs, surtout pour le narrateur, qui doit faire attention à ses abattis et lui permet de discuter avec un ancien nazi ayant appartenu à la division Charlemagne. Que du beau monde. Et pour corser le tout quelques personnes dérangées du ciboulot. Mais ça, on le peut comprendre, à vivre dans une telle ambiance délétère.

Comme dans tous les romans de Kââ, en général, il subsiste des zones d’ombres fugitivement éclairées, comme les buissons sur un talus qui sont mis en lumière par les phares d’une voiture qui passe en trombe. Et peut-être plus que l’histoire, un enfouissement dans la neige, ce sont les personnages, et leurs profils psychologiques, qui sont mis en valeur. Entre roman noir et roman de terroir acerbe, On commence à tuer dans une heure joue dans un registre particulier, et l’on oublie un peu vite le propos du début : réhabiliter un innocent qui s’accuse pour des raisons propres à lui.

Sur un site, que je ne nommerais pas afin de ne pas lui faire de l’ombre, j’ai lu que Kââ était le James Ellroy français. Ce n’est guère flatteur pour Pascal Marignac, patronyme de notre auteur qui vaut beaucoup mieux que ça.

 

Il n’y avait pas plus de morphine base là-dedans que de moralité dans la tête d’un journaliste.

K : On commence à tuer dans une heure. Collection Spécial Police N°2026. Editions Fleuve Noir. Parution le 1er décembre 1986. 192 pages.

ISBN : 9782265034181

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9 février 2019 6 09 /02 /février /2019 05:56

A la recherche d’une grand-mère perdue…

Karine LEBERT : Pour l’amour de Lauren

Continuant ses recherches sur sa grand-mère originaire de Normandie, Gemma s’est installée près de Honfleur.

Elle a appris incidemment l’existence de Philippine par sa mère Lauren qui juste avant son décès trois mois auparavant avait découvert une photo cachée dans un vêtement d’enfant. Lauren elle-même ne connaissait pas sa mère Philippine dont on lui avait toujours tu le destin. Il est vrai qu’elle était toute jeunette lorsque Philippine était décédée en Normandie, à Barfleur.

C’est en remontant le passé que Gemma s’était lancée sur les traces de sa grand-mère maternelle mariée à un soldat américain dont elle avait fait la connaissance dans le camp Philip Morris à Gonfreville-l’Orcher, près du Havre. Un camp cigarettes comme étaient surnommés ces terrains militaires américains dans lesquels travaillaient quelques normands. Et le destin avait voulu que Philippine s’éprit d’Ethan et qu’elle devint une war bride. Une épouse de guerre.

Gemma a eu bien du mal à retrouver la famille Lemonnier, dont son oncle et ses cousins sis à Pont-l’Evêque. Car Philippine avait été en quelque sorte bannie par sa famille à cause de sa décision de se marier avec un soldat américain, puis de le suivre dans son pays natal alors que l’un des leurs a été tué par un G.I. dans des circonstances mal définies.

Gemma a décidé, parallèlement à sa quête, de s’installer à Honfleur et d’y ouvrir une boutique. Elle s’est fait quelques amis et est tombée amoureuse de ce coin de terre dont sa grand-mère était originaire. Elle rencontre quelques anciennes war bride qui, tout comme Philippine, étaient parties aux USA mais dont le destin, pour des raisons diverses, fut contrarié. C’est ainsi qu’elle parcourt la Normandie, se rendant à Etretat, à Bayeux ou encore à Barfleur.

Mais elle se rend également en Louisiane, à La Nouvelle-Orléans, où vit encore une partie de la famille d’Ethan, son grand-père. Elle tient à découvrir pourquoi on lui a toujours caché cette existence, et surtout le fait qu’Ethan serait retourné en Normandie sur les pas de Philippine, au début des années 1950, et pourquoi la figure de Philippine a toujours été occultée auprès de Lauren. Il ne faut pas retourner le passé comme l’on retourne la terre fertile, mais les secrets sont bien enfouis, comme honteux.

 

S’intercale dans ce récit, celui de Philippine, rédigé à la première personne tel un journal, narrant son arrivée à New-York puis les désillusions et les déceptions enregistrées par la jeune war bride.

Désillusion d’abord car la maison familiale d’Ethan ou vivent parents, frères, cousins, ne correspond pas à la photo qu’il lui avait montrée. Au lieu de dépendances, il s’agit d’une immense demeure coloniale mal entretenue. Car les affaires ont peu à peu périclité. Philippine participe à la vie de la communauté, et après avoir cueilli les pommes en Normandie, elle cueille le coton. Une activité qui lui semble plus pénible.

Le caractère d’Ethan évolue et il ne s’empresse plus auprès de sa jeune femme. Il se met à boire et le soir se rend dans des bars au Carré Français ou ailleurs. Une dipsomanie qui n’est pas seulement due à la chaleur moite, étouffante de la Louisiane, chaleur à laquelle Philippine a du mal à s’habituer. La naissance de Lauren, un bébé auquel il prodigue sa tendresse, n’améliore guère son caractère vindicatif et acrimonieux. De plus, tout autant lui que les membres de sa famille se montrent racistes, ce qui ne convient guère à Philippine. Philippine garde des contacts épistolaires avec ses anciennes compagnes de voyage mais les lettres qu’elle poste à l’intention de ses proches en Normandie restent sans réponse.

 

Un double récit donc dans ce roman, celui d’une quête et celui de la découverte de l’Amérique des années d’après guerre. Pour Philippine c’est le rêve américain qui se précise, lorsqu’à New-York elle a peur de monter dans un ascenseur, et qu’elle découvre ces immenses constructions appelées gratte-ciels. Mais c’est un rêve américain qui s’effiloche au contact de sa belle-famille.

Avec ce roman double, Karine Lebert reconstitue la saga d’une famille éclatée pour de multiples raisons dont la principale n’est précisée qu’à la fin. Pour Gemma, c’est le départ d’une vie nouvelle, sur les terres de son ancêtre, son désir de s’installer, malgré les objurgations de son père, riche industriel, et de son intention de lui couper les vivres si elle n’obtempère pas.

Deux destins de femmes, deux femmes qui réagissent différemment dans des époques perturbées ou dans des lieux dont elles n’ont pas l’habitude, qu’elles ne connaissent pas et découvrent petit à petit, avec les aléas qui se dressent devant elles.

Philippine tend à se démarquer de sa famille, à se montrer une jeune fille puis une jeune femme aspirant à la liberté, mais contrainte par son statut de sexe féminin à se plier à l’homme, le maître de maison. Gemma est une jeune femme moderne, qui au contraire refuse la domination patriarcale et n’en fait qu’à sa guise. Presque.

Mais toutes deux sont volontaires, tenaces, pugnaces comme bien des femmes confrontées à un destin frondeur. Karine Lebert nous brosse deux beaux portraits de femmes fortes, mais elle évoque également le destin des celles qui ont connu bien des déceptions, transportées dans un pays dont elles découvraient les us et coutumes auxquels elles n’étaient pas préparées, une épopée méconnue mais poignante. Et c’est avec tendresse et émotion qu’elle nous invite à partager ces destins qui furent hors du commun.

 

Ce sont toujours les riches qui se plaignent le plus.

Karine LEBERT : Pour l’amour de Lauren. Les amants de l’été Tome 2. Collection Terres de France. Editions Presses de la Cité. Parution le 17 janvier 2019. 416 pages. 20,50€.

ISBN : 978-2258161955

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7 février 2019 4 07 /02 /février /2019 05:51

Mais de la belladone bio, de préférence !

Daniel MORVAN : Miss Bella Donna.

Des jeunes filles, agressées par un herboriste fétichiste, sont retrouvées inconscientes avec enfoncées dans la bouche des fleurs jaunes pâles et droguées à l’aide d’un cocktail hallucinogène.

Un assortiment de jusquiame noire, une fleur qui n’est pas vraiment courante, et celles qui font partie de la panoplie des herbes soulageantes des sorcières, comme la belladone ou la morelle.

Pour le commissaire Fleck et son adjoint Cédric, voilà qui sort de l’ordinaire mais s’avère une affaire pour le moins compliquée.

Awen est coiffeuse, et ils se confient volontiers à elle, narrant notamment leur combat contre ce psychopathe. Awen est conviée à coiffer, lors d’une manifestation genre Woodstock, une chanteuse irlandaise, qui connut en compagnie de son groupe son heure de gloire avec un tube devenu mythique.

Une sorte de (bête) rave dans le Finistère profond. C’est lors de cette foire musicale que tout se dénouera.

 

Daniel Morvan nous propose un roman basé sur les agissements d’un tueur en série bizarre, et de la course poursuite qui s’engage. Miss Bella Donna s’inscrit dans le genre du roman policier ou roman noir atypique.

Mais surtout un roman dont l’écriture est tout à la fois poétique, foisonnante, et rigoureuse.

Ce n’est plus une Bretagne de carte postale que nous découvrons, de Nantes à Ouessant en passant par l’Argoat. Un premier roman, une réussite.

Daniel MORVAN : Miss Bella Donna. Collection Latitude Ouest. Editions Ouest France. Parution 31 mai 2002. 218 pages.

ISBN : 978-2737330728

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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