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19 février 2019 2 19 /02 /février /2019 05:10

Aven que pourra, et pour la galette on repassera…

François LANGE : La bête de l’Aven.

Il pleut toujours en Bretagne ? Préjugé ! Car en ce début de mois de juillet 1858, il fait chaud et beau. Ou inversement.

L’inspecteur de police François Le Roy est assoiffé et pour éteindre le feu qu’il a dans la gorge, il se rend à l’Auberge du Lion d’or, déguster avidement quelques bolées de cidre rafraîchissant. Nonobstant, il remarque que trois individus attablés au fond de la salle semblent tenir un conciliabule dont il aimerait connaître la teneur.

Comme le patron est une mouche (un mouchard ou indic en argot) il lui demande d’écouter ce qu’ils se disent et de lui en rapporter la teneur. Car l’un des hommes, un borgne, ne lui dit rien qui vaille. Et c’est ainsi qu’il apprend que le borgne envisage l’attaque d’une malle-poste, chargée d’or et d’argent destiné à des banques de Bretagne, du côté de Pont-Aven. Un braquage qui devrait se dérouler à la Croix Saint-André très exactement. Voilà une affaire qui l’intéresse au plus au point et qui va le changer de la monotonie dans laquelle il commence à s’engoncer.

Alors qu’il s’apprête à exposer à son supérieur hiérarchique, le commissaire Montépin (qui ne se prénomme pas Xavier), sa décision d’enquêter sur une possible attaque de diligence, son patron lui signifie qu’il est chargé d’aller résoudre une affaire de meurtres de jeunes filles dans la région de Pont-Aven. Normalement cela ne ressort pas de sa juridiction, mais l’ordre vient d’en-haut, du ministère via le préfet.

Alors direction Pont-Aven et François Lange espère bien faire d’une pierre deux coups. Contrer le ou les dévaliseurs de diligence dans la plus pure tradition du Far West breton aux pruneaux (oui, il y aura échange de coups de feu !) et résoudre le mystère des jeunes filles attaquées par une mystérieuse bête aux griffes acérées.

L’inspecteur de police sera aidé dans son enquête par un lieutenant de gendarmerie, un ami dont il a fait la connaissance lorsque tous deux étaient sur le front de Crimée. Ce qui aide dans les relations, parfois difficiles, entre les représentants de la gendarmerie et ceux de la police.

 

Comme souvent, l’une des deux affaires se trouve opportunément résolue en conclusion de l’autre. Hasard heureux, oui, mais l’on sait que le hasard est le Dieu des policiers. Sans le hasard, souvent, ils passeraient à côté d’indices troublants. Et il ne faut pas oublier qu’à cette époque, ils ne possédaient pas l’arsenal technologique dont ils disposent maintenant, avec la police scientifique qui déblaie bien le terrain.

Un récit intéressant qui mêle histoire et terroir, sans pour autant que l’un de ces deux thèmes empiète sur l’autre et affadisse ou ralentisse le roman. Le suspense est soutenu et l’angoisse s’infiltre doucement, même si le lecteur sent dès le départ que l’animal est une bête humaine. L’auteur joue sur l’ambigüité du personnage qui pourrait évoluer aussi bien aujourd’hui, peut-être dans des conditions différentes mais avec une approche similaire.

Plaignons ces pauvres gendarmes qui, si j’ai bien lu et bien compris, sont des vétérans des campagnes napoléoniennes. Comme il semble que ces références ne soient pas relatives à celles de Napoléon III, il est donc nécessaire de se reporter à celles de Napoléon 1er. La dernière, celle de Waterloo, datant de 1815, soit quarante trois ans auparavant, on peut penser sans se tromper que nos braves gendarmes sont alors âgés d’au moins soixante-trois ans. Bigre ! Et on se plaint !

Ce petit point d’histoire éclairci, ou non, reste que ce roman est plaisant, agréable, et l’on suit les aventures de François, dit Fañch, Le Roy avec intérêt, tout autant pour l’aspect historique que pour le développement de l’intrigue. Et personnellement, j’ai découvert un peintre, Camille Bernier, aux toiles naturalistes classiques et minutieuses, qui ne fut pas l’un des peintres de l’école de Pont-Aven mais exerça son art dans la région bien avant l’heure.

 

François LANGE : La bête de l’Aven. Série Fañch Le Roy 2. Editions du Palémon. Parution le 15 février 2019. 208 pages. 10,00€.

ISBN : 978-2372605519

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commentaires

C
Bonjour<br /> C'est effectivement un roman tout à fait sympathique. Il met notamment en scène mon arrière-arrière grand oncle Camille Bernier qui a bien trainé ses pinceaux dans la région, mais à l'été 1858, ce dernier se trouvait très probablement chez lui à Brest où sa femme accouchait. Il n'est venu à Bannalec, chez son ami Vidal qu'à partir de 1866. Il n'y a pas de trace d'un passage à Pont Aven dont il n'a pas fréquenté les peintres (à la différence de Guilloux et Deyrolles à Concarneau).<br /> cb
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F
Bonjour Oncle Paul.<br /> Belle critique, sympa et constructive, tout ce que j'aime. Un grand merci.<br /> Pour les "campagnes napoléoniennes", je faisais plutôt référence à celles du "neveu". Mais le terme était, sans doute, mal choisi. Outre la Crimée, les gendarmes du lieutenant Kerloc'h auraient pu participer aux escarmouches du Sénégal, avec le général Faidherbe ; ou bien à la "pacification" de la Grande Kabylie avec les généraux Randon, Bourbaki et Mac-Mahon, où zouaves et légionnaires du 2° Etranger réglèrent prestement l'affaire à coups de baïonnette. <br /> Mais, il y a tout de même un vétéran des guerres de l'Empereur Napoléon 1er dans le polar... le capitaine Vigouroux, demi-solde et patron de l'auberge de la Croix-Verte.<br /> Bravo pour votre sagacité et pour ce résumé très accrocheur du roman. J'espère continuer à être "dans les petits papiers" de l'Oncle Paul, digne descendant de celui que je suivais, avec délices, dans le magazine Spirou de mes jeunes années. Kenavo ! FL
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O
Bonjour et merci d'avoir lu ma modeste prose.<br /> Certains auteurs en font de trop et "pondent" un pavé de 500 pages alors que 300 suffiraient. Un délayage qui n'est pas indispensable. D'autres, comme vous, tentent d'aller à l'essentiel et je vous en félicite. Le lecteur ne s'ennuie pas. Mais parfois, certains détails méritent à être précisés. Mais je suis un vieux ronchon, un grognard de la lecture, et j'aime relever les petites notes salées dans une sucrerie. C'est mon défaut...<br /> Donc je me suis amusé à planter quelques banderilles afin de vous inciter à parfois apporter quelques précisions. Il faut avouer que l'histoire, en classe, n'est plus une matière noble comme de mon temps, et les jeunes générations ont besoin de compléments d'informations. Parfois. Encore le vieux grognard qui s'exprime.<br /> <br /> Bien à vous
A
Il me tarde de retrouver ce personnage dont j'avais apprécié la première enquête.
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F
Bonjour Onc' Paul<br /> <br /> Je ne m'en tirerais pas toujours comme cela. Les "banderilles salées" sont bien acérées et les remarques historiques tout à fait recevables. Je "bétonne" le 3° opus... on en reparlera. Merci à vous. A bientôt - François
O
Une voix nouvelle chez Palémon fort intéressante

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