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27 avril 2019 6 27 /04 /avril /2019 04:25

Laissons la plage aux romantiques…

Jean FAILLER : C’est la faute du vent…

Célèbre comédien, Armand Demaisieux est actuellement en vacances près du village bigouden de Tréguennec, célèbre pour sa plage prisée par les surfeurs, dans la baie d’Audierne. Il a acheté un penty où il aime venir se ressourcer, selon un mot à la mode. Et il se balade en cette fin de mois d’octobre dans la palud, ces terres marécageuses rases et déshéritée sur lesquelles peu de promeneurs osent se risquer, à cause du vent.

Pourtant ce jour-là, il croise une jeune femme qui vient de se tordre la cheville. Elle se présente, Florence de Saint-Marc, cavalière émérite puisqu’elle est vice-championne olympique d’équitation. Elle loge à l’hôtel et Artaban, son cheval, prend une cure de bains de mer afin de fortifier ses chevilles. Il ne loge pas à l’hôtel mais dans un haras proche qui offre aux touristes des promenades à dos de cheval.

Bref le comédien emmène sa cavalière chez lui et la soigne. Ils sympathisent puis se retrouvent avec plaisir. Armand a connu des déboires dans sa vie amoureuse et Florence également, ce qu’il fait qu’ils sont à égalité sur le plan sentimental. Un point commun qui semble les rapprocher un peu plus, mais n’anticipons pas les évènements.

En se promenant tout en devisant aimablement près de l’usine de broyage de galets qui servit à l’édification du mur de l’Atlantique, ils repèrent un corps qui semble dormir. Un sommeil éternel. Une jeune morte probablement victime d’un assassinat. N’écoutant que leur courage, ils préviennent immédiatement la gendarmerie de Pont-l’Abbé.

 

Mary Lester prend toujours des vacances à cette époque de la Toussaint, pour des raisons familiales qui lui sont personnelles. Aussi elle n’aime pas être dérangée au téléphone, surtout lorsqu’il s’agit d’un malotru qui est au bout du fil. Ce n’est pas elle qui a pris la communication mais son amie Amandine qui lui sert aussi de cuisinière. Quelle que soit la raison de cet appel, elle s’en moque mais Fabien, son commissaire divisionnaire, vient la relancer jusque chez elle. Il explique que l’appel téléphonique émanait de l’adjudant de gendarmerie Papin, de Pont-l’Abbé, au sujet du corps découvert sur la plage. Elle serait impliquée dans cette affaire car un message, écrit sur une feuille empruntée à un cahier d’écolier, message écrit apparemment par un gamin et sur lequel son nom figure.

Il n’en fallait pas plus pour que le gendarme porte ses soupçons sur le commandant Lester. Le mal embouché est sur les lieux de la découverte du corps et les premiers échanges oratoires sont assez tendus. L’adjudant de gendarmerie, imbu de ses prérogatives en tant que représentant de l’Etat, est rien moins qu’amène dans ses propos. Droit dans ses bottes tel un petit coq, il assène des propos acrimonieux à Mary Lester mais elle a vite fait de le rabrouer.

Il n’en faut pas plus pour que Mary Lester, accompagnée de son fidèle ami Jipi, alias le capitaine Fortin, s’immisce dans l’enquête, mettant tout en œuvre pour découvrir le coupable. Elle fait la connaissance de Demaisieux, Armand de son prénom (rien à voir avec la chanson de Pierre Vassiliu même s’il fut un ancien jockey) et de Florence, qui étaient sur les lieux également, transis de froid grâce aux bons offices du gendarme acariâtre et coléreux.

Un policier spécialiste de l’informatique est chargé par Mary d’essayer de découvrir l’identité de la jeune morte, tandis qu’elle-même et Fortin vont continuer de sillonner la région, se déplaçant à cheval en compagne de Florence, Fortin les couvrant en vélo. Et ils remarquent une vieille bâtisse qui semble abandonnée, pourtant du linge sèche dans une cour. Drôle de linge, des sortes de combinaisons noires. L’apport d’un drone piloté par la fille de Fortin va aider les enquêteurs à résoudre l’affaire.

 

Ce roman policier de facture classique n’hésite pas à utiliser des procédés modernes, mais le petit plus, c’est le ton humoristique employé. Les dialogues sont savoureux et l’art de la dialectique n’échappe pas à Mary Lester qui sait renvoyer dans les cordes l’adjudant de gendarmerie revêche.

Le major Papin régnait sur la gendarmerie de Pont-l’Abbé comme un despote de droit divin. Ces termes appartenant à des temps révolus n’étaient pas excessifs tant l’autorité du chef de corps planait sur les locaux même quand le chef n’était pas là.

Des dialogues savoureux et l’on aimerait pouvoir posséder le sens de la répartie dont dispose Mary Lester. Mais il est vrai que dans ce cas, il s’agit d’un roman et donc l’auteur a eu le temps de peaufiner ces causeries entre gendarme obtus et policière sachant garder son calme tout en assénant ses phrases comme des tirs meurtriers.

Tout de même, on souhaiterait parfois se montrer aussi vif dans les échanges oraux tout en restant flegmatique et précis. Se montrer incisif sans perdre son calme.

L’épilogue est comme une farce, un petit règlement de compte et l’explication concernant l’implication écrite de Mary Lester dans cette affaire peut sembler tirée par les cheveux. Mais après tout, pourquoi pas !

 

Treguennec Le bunker

Treguennec Le bunker

Bâtiments de l'usine de concassage

Bâtiments de l'usine de concassage

Jean FAILLER : C’est la faute du vent… Série Mary Lester 50. Editions du Palémon. Parution le 19 janvier 2019. 300 pages. 10,00€.

ISBN : 978-2372605489

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26 avril 2019 5 26 /04 /avril /2019 04:06

Dinard. Une ville touristique décrite sous un angle guère flatteur.

Yvonne BESSON : Double dames contre la mort.

Deux adolescents, en quête de frissons dans une ville noyée sous la pluie s’introduisent dans une villa inoccupée. L’horreur : la salle à manger est dévastée, pire le cadavre d’une femme nue gît sur le tapis.

Si les soupçons se portent au début de l’enquête sur les deux gamins fouineurs, les policiers abandonnent vite la piste. En l’absence de renseignements, ils diffusent la photo de la jeune morte.

Carole Riou, en poste à Marville, est interloquée non seulement par ce drame qui s’est déroulé dans sa ville natale, mais de plus parce que le visage du cadavre lui rappelle vaguement quelques chose. Tant pis pour Manu, son amoureux libraire, elle se déplace à Dinard et mène, parallèlement à la police officielle, ses propres investigations.

 

Lorsque le présent et le passé se rejoignent, se télescopent, s’emberlificotent dans des apparences trompeuses, cela donne la trame à un roman plein de rebondissements dont se joue à merveille Yvonne Besson qui avait, dès son premier roman Meurtre à l’antique chez le même éditeur, trouvé un ton juste.

Carole Riou gagne en épaisseur (c’est une image !) et surtout en humanisme. Elle plonge dans son passé pour comprendre ce qui ne pourrait être qu’un fait-divers hors saison.

Si bizarrement les coïncidences émergent, c’est parce qu’elles sont crédibles. Les personnages sont fouillés, l’intrigue est solide, le décor envoûtant.

Et Dinard n’est plus la petite ville touristique bon chic, bon genre. Mais ne croyez pas qu’il s’agit là d’une exception. Yvonne Besson est elle même originaire de ce coin de Bretagne, mais l’histoire aurait très bien pu se passer ailleurs, chez vous peut-être.

 

 

Réédition Pocket Policier. Parution 5 juillet 2007. 370 pages.

Réédition Pocket Policier. Parution 5 juillet 2007. 370 pages.

Yvonne BESSON : Double dames contre la mort. Editions de La Table Ronde. Parution 9 juin 2002. 326 pages.

ISBN : 978-2710324676

Réédition Pocket Policier. Parution 5 juillet 2007. 370 pages.

ISBN : 978-2266157094

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25 avril 2019 4 25 /04 /avril /2019 04:49

Quand Georges-Jean Arnaud revient sur ses années juvéniles…

Georges-Jean ARNAUD : Patates amères.

Après avoir évoqué son grand-père maternel, Planou, dans Les moulins à nuages, et sa grand-mère paternelle, Caroline, avec Les oranges de la mer, Georges-Jean revient sur sa tendre enfance, de cinq à dix ans, entre 1933 et 1938 à Courson là où la famille Arnaud, Elie le père, Jeanne la mère et Josette, la grande sœur aînée, habitait à l’époque.

Des anecdotes foisonnantes, des images, des senteurs, des impressions, tout ce qui constitue un album de souvenirs nimbés de nostalgie, celle de l’enfance perdue.

La première image qui vient à l’esprit, en cette année 1933, c’est l’arrivée du père, Elie, à bord d’une voiture. Une guimbarde arborant fièrement l’écusson Peugeot, mais selon le garagiste qui l’examine, il s’agit d’une falsification, d’un ajout non autorisé, cette voiturette ne dépassant pas les quarante kilomètres à l’heure n’étant jamais sortie des usines d’Audincourt, ou de Lille ou encore de Valentigney, les sites de production d’alors. Il n’était pas question de décentralisation hors des frontières.

Cette voiturette, qui possédait de petits vases sur les côtés intérieurs, avait peine à monter la côte de Roquefort lorsque les quatre membres de la famille étaient installés à l’intérieur pour se rendre à Leucate. Il ne restait plus à Jeanne qu’à descendre, prétextant l’envie de cueillir des fleurs avec les deux gamins, et laisser le père s’y reprendre à deux ou trois fois pour gravir cette montée.

Une voiturette qui était garée, seul le père le savait où. Et il s’en servait pour ses déplacements comme fonctionnaire des impôts indirects, surveillant les distilleries. Seulement, étant handicapé d’une jambe, cadeau de la Grande guerre, il était obligé de jouer avec les pédales avec ce membre raide en permanence.

La grand-mère Caroline bénéficia des premières visites en voiture, les parents de Jeanne étant provisoirement délaissés. Georges-Jean et sa sœur aimaient ces randonnées qui les emmenaient sur la plage de Leucate. Souvent ils partaient avec des provisions de bouche pour se sustenter en cours de route, mais lorsque le voyage s’effectuait en une seule étape, la grand-mère était fâchée de voir le panier plein, se plaignant qu’on puisse croire qu’il n’y avait pas assez à manger chez elle.

Chez Planou, le père de Jeanne, il en allait tout autrement. Honorine sa femme était restauratrice et la salle ne désemplissait pas de commis-voyageurs ou de touristes. Des plats roboratifs amoureusement préparés dès le matin, tandis que Planou préférait s’éloigner, laissant les femmes seules aux fourneaux. Planou vagabondait dans ses vignes, son côté poète et paysan.

A Leucate les autochtones se rendaient visite, s’introduisant chez les uns et les autres, sans chichi, sans s’annoncer, sans frapper. Tandis qu’à Villeneuve-les-Corbières, les habitants étaient nettement plus réservés, plus discrets, voire plus respectueux de l’intimité de leurs concitoyens. Deux mondes différents et pourtant si proches mais à l’opposé l’un de l’autre, et pas uniquement d’un point de vue géographique.

D’autres images remontent à la surface, amusantes lorsqu’on prend du recul, humiliantes lorsqu’on n’a que sept ans. Ainsi lorsqu’il est obligé de porter, à cause de vertèbres défaillantes, un corset rose avec jarretelles tenant des bas. Imaginez la risée que cela provoquait lorsqu’il était obligé de se déshabiller devant les autres élèves et les adultes.

Les senteurs, c’étaient surtout l’odeur du tomata acide qui s’écoutait à travers un voile, issu de tomates mûres, trop mûres, afin qu’elles puissent dégorger leur jus.

Et puis surtout, c’étaient les fâcheries à répétition entre ses parents. Fâcheries provoquées le plus souvent par de petits riens avec rétorsion de la part de l’un et de l’autre membre du couple. Le père omettait de donner l’argent qu’il gagnait, sauf la pension d’invalidité qu’il percevait et était commune au ménage. Aussi la mère ne préparait à manger que des clopinettes. Ou, alors qu’elle lui avait fait cadeau d’un ensemble en cuir de bureau, puis le punir, elle cachait les objets à la cave.

Parmi ces objets figurait un tampon-buvard, et cette réminiscence amène tout simplement à évoquer un autre aspect de la vie quotidienne des enfants. Ils s’amusaient grâce à un tampon-encreur à taper sur du papier, des enveloppes, timbrant à tour de bras, devenant le temps d’un jeu postier ou fonctionnaire. Car à l’époque, c’étaient des emplois fort prisés, avec l’assurance de l’emploi et d’un salaire régulier. Contrairement au sort des ouvriers plus mal lotis financièrement dans un travail parfois instable. Le rêve des parents pour leurs enfants. Depuis, ce point de vue a bien évolué, et pas forcément en bien, les fonctionnaires étant accusés de tous les maux, et mots, mais ceci relève d’un autre propos qui serait hors sujet.

Une succession d’anecdotes douces-amères, amusantes avec le recul, et qui nous entraînent de 1933 à 1938, avec quelques souvenirs qui font remonter ceux du lecteur à la surface. Ainsi pour qui a connu le chocolat Elesca, il ne manquera pas de terminer en disant c’est exquis, et la pub faisait fureur, grâce à Sacha Guitry qui, en 1911, avait inventé ce slogan K.K.O. L.S.K. est S.Ki, et qui s’était ensuite décliné en LSKCSki… Souvenir, souvenir…

Cette chronique n’est qu’un survol simple et rapide de l’ouvrage, il y aurait tant et tant à écrire, et puis, il ne me viendrait pas à l’idée de tout raconter, tout dévoiler, car il ne s’agit pas de mes mémoires mais celles de Georges-Jean Arnaud, et donc il importe de les préserver dans ce récit enrichissant. Car outre le récit et les souvenirs, c’est toute une époque qui est restituée, et l’on peut affirmer que c’était mieux avant, mais quand même, on ne peut négliger le changement bénéfique dans les conditions de vie. Bénéfique ? Qui sait, il semble que les gens s’amusaient mieux auparavant, se contentant de petits bonheurs simples et peu onéreux.

 

Si je devais effectuer un reproche, ce serait à propos de la couverture qui pour moi n’est guère engageante. Certes les parents se tournent plus ou moins le dos, montrant leur antagonisme, mais le dessin est figé, pas abouti. Mais après tout on ne m’a pas demandé mon avis.

Ce livre est le dernier de la trilogie consacrée par Georges-Jean Arnaud à sa famille et son enfance. Dommage, j’en aurais bien lu d’autres.

 

Georges-Jean ARNAUD : Patates amères. Editions Calmann-Lévy. Parution le 2 mai 1993. 348 pages. 25,00€.

ISBN : 978-2702122266

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22 avril 2019 1 22 /04 /avril /2019 04:52

Oh Marie, si tu savais…

Alfred ASSOLANT : Rose-d’Amour.

Avec un père charpentier et une mère lavandière, la petite Marie ne s’épanouit guère. Son père est mutique, ne s’exprimant que lorsqu’il a quelque chose à dire, et encore. Mais il n’est pas comme la mère qui avec ses mains en forme de battoirs n’est pas avare de torgnoles et de beignes. Marie n’est pas jolie, enfin pas vraiment, mais elle est avenante et gentille.

Ses sœurs se marient et quittent la maison paternelle, la mère décède après avoir bu un grand verre d’eau froide alors qu’elle était en sueur. Marie a dix ans. Elle trouve en Bernard, un gamin de trois ans plus âgé qu’elle, un compagnon de jeux aimable et intentionné. Un jour, s’amusant dans la forêt avec quelques gamins, garçons et filles, Marie se retrouve seule. Elle est attaquée par un loup alors qu’elle ne prétendait pas jouer au Petit Chaperon Rouge, et Bernard la sauve des griffes et des dents de l’animal.

Rose d’Amour et Bernard deviennent peu à peu amoureux l’un de l’autre. Ils sont souvent ensemble, mais cela reste platonique. Le père de Bernard et les parents du jeune homme pensent que cela se traduira par un mariage, cérémonie à laquelle ils n’opposent aucun véto, mais la guerre du Maroc réclame des moyens humains. Bernard pense échapper à la conscription malheureusement pour lui, le sort en décide autrement. Il a vingt ans et Rose d’Amour en a dix-sept, le bel âge pour convoler.

Les parents de Bernard ne roulent pas sur l’or même s’ils possèdent quelques biens. L’idée est de trouver un remplaçant à Bernard, contre une forte somme. Pour cela ils hypothèquent leur maison, seulement la mère Bernard, malade met le feu aux rideaux. Plus de maison, plus d’hypothèque, plus de remplaçant.

Bernard part pour l’armée pour sept ans, et Rose d’Amour se découvre enceinte. Ils avaient quelque peu précipité les noces, et elle se retrouve la risée, la honte de pratiquement tout le village. Même son père pourtant si calme et si accommodant lui fait la tête. Elle travaille dans une usine de couture et sa joliesse attire les yeux du contremaître. Elle refuse de se laisser aller, de devenir une femme soumise, et taloche le malotru devant ses collègues.

Les ans passent, elle ne reçoit pas de courrier de Bernard. Elle pense qu’il l’a oublié et entame des études du soir afin d’apprendre à lire et à écrire auprès d’un jeune adulte bénévole. Bientôt celui-ci tombe amoureux d’elle mais elle refuse de manquer à sa parole donnée à Bernard. Sept longues années durant lesquelles la petite Bernardine grandit gentiment. Jusqu’au jour où, au cours d’une algarade avec un voisin, un dénigreur et un malveillant qui ose appeler sa petite-fille la petite bâtarde, Bernard est tué à l’aide d’un compas. L’homme a beau jeu de rejeter la faute sur Bernard et la honte une fois de plus déteint sur Rose d’Amour.

 

Romans de terroir, réaliste et misérabiliste, comme c’était la mode à l’époque, Rose d’Amour serait une nouvelle ou un roman catalogué, de nos jours, comme une romance destinée à l’édification des jeunes filles vertueuses. Mais il y a un peu de Zola dans cette histoire sociale ou plutôt le contraire car si Assolant a fait paraître Rose d’Amour en 1862, La Terre de Zola date de 1887.

L’histoire se déroule dans un petit village, Saint-Sulpice, en Auvergne. Peut-être dans le Puy-de-Dôme, mais rien ne permet de l’affirmer.

Rose d’Amour est un roman écrit à la première personne et la narratrice, Rose d’Amour, s’adressant à une interlocutrice dont on ne sait rien, narre ses mésaventures et dénonce les ragots, les rumeurs, les fausses déclarations, les préjugés, les jalousies également ainsi que ceux qui veulent profiter du malheur des autres pour en tirer bénéfice. Un constat peu flatteur de la campagne d’alors mais qui n’a guère changé dans les mœurs même si celles-ci sont plus libres et plus tolérantes. Et ce problème n’est pas l’apanage de la campagne car on le retrouve également dans les villes et les banlieues. Le syndrome de la fille-mère est encore bien prégnant dans les esprits étroits, mesquins, bigots, et enfreint la morale de certaines religions intégristes.

Nous sommes loin des aventures débridées décrites dans Les Aventures (merveilleuses mais authentiques) du Capitaine Corcoran, un roman destiné à la jeunesse et prenant l’Inde pour décor, mais ces deux ouvrages possèdent en commun d’être des contes philosophiques. Si Rose d’Amour est l’histoire d’une fille-mère à cause d’événements imprévus et dans l’obligation de trouver un remplaçant si le tiré au sort ne veut pas partir à la guerre, contre rétribution onéreuse, Capitaine Corcoran dénonce le colonialisme anglais et par là-même toute forme de colonialisme.

Le côté social prédomine et le système de la conscription est un privilège accordé aux riches qui peuvent y échapper contre monnaie sonnante et trébuchante :

Ah ! dit le père Bernard, il est bien dur de travailler toute sa vie et d’amasser avec beaucoup de peine quatre ou cinq mille francs pour en faire cadeau au gouvernement ou n’importe à qui, quand on est vieux et quand on ne peut plus travailler.

 

La question de l’égalité des salaires est également soulevée, mise en avant comme un fait acquis qu’il faut dénoncer :

Car il faut vous dire, madame, que je travaillais dans un atelier avec trente ou quarante ouvrières. Chacune de nous avait son métier et gagnait à peu près soixante-quinze centimes. Pour une femme, et dans ce pays, c’est beaucoup ; car les femmes, comme vous savez, sont toujours fort mal payées, et on ne leur confie guère que des ouvrages qui demandent de la patience.

 

Pour vous procurer ce court roman en version numérique gratuite, une seule adresse :

Alfred ASSOLANT : Rose-d’Amour. Nouvelle. Version numérique. Editions Ebooks libres et gratuits. Environ 70 pages.

Première édition : L. Hachette & Cie. 1862. Contenait en outre Jean Rosier ainsi que Claude et Juliette.

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21 avril 2019 7 21 /04 /avril /2019 04:20

La Bible, un ouvrage à ne pas mettre entre toutes les mains !

Viviane JANOUIN-BENANTI : La serpe du maudit.

Pourquoi Pierre Rivière a-t-il en 1835, à l’âge de vingt ans, tué sa mère, sa sœur et son frère ? Quels sont les évènements qui ont précédé son acte, l’amenant à commettre trois meurtres dans un petit village du Calvados ?

Pierre est le premier enfant de Marie et de Basile, mais sa mère désirait avant tout une fille. Dès sa naissance, cet enfant non désiré subira les brimades maternelles tandis que le père courbera l’échine sous les récriminations de son épouse qui rêvait de devenir riche. Pourtant ce paysan travailleur ne cesse de combler comme il peut sa femme qui ne lui en sait pas gré.

Le mariage était arrangé, comme bien souvent à cette époque, pourtant Basile est follement amoureux de son épouse. Pierre survit, sa mère ne l’allaitant qu’au compte-gouttes, ne s’occupant guère de lui, le rejetant. Un deuxième enfant arrive au foyer, une fille qui accapare tout l’amour de sa mère. Pierre possède un faciès qui rebute quelque peu de même que ses réactions.

Il est intelligent puisqu’il apprend à lire très jeune, trouvant en la Bible une source de réconfort et d’invectives, apprenant par cœur des passages entiers. Pourtant à l’école, ce n’est qu’un cancre. Il aime sa mère même si celle-ci ne le lui rend pas et il accepte avec difficulté de partager un amour, qui n’est pas réciproque, avec ses autres frères et sœurs. Les relations se dégradent rapidement entre les deux époux et Marie met à la porte Basile et Pierre.

Seulement Basile doit travailler les champs de sa femme, régler les dettes qu’elle contracte chez les commerçants du village. Parfois il a droit de coucher avec son épouse malgré cette séparation de corps. D’autres enfants naissent et échoient à Basile. Pierre est imprégné de cette Bible qui ne le quitte quasiment jamais et il ressent une profonde injustice qui le conduira un jour de colère à perpétrer cet effroyable meurtre nourri de rancœurs, de brimades.

 

Viviane Janouin-Benanti nous livre le portrait d’un criminel intelligent doublé d’un schizophrène, maladie inconnue à l’époque, retraçant ce parcours avec minutie, dans l’esprit d’un roman tout en empruntant la réalité puisée à travers des journaux d’époque et des archives.

Héros solitaire d’une famille nombreuse, le destin de Pierre Rivière ne peut laisser indifférent. Mais l’auteur ne se contente pas de narrer cette histoire misérable dans laquelle la mère se montre particulièrement fieffée, odieuse, rouée envers son mari et une partie de sa progéniture.

Viviane Janouin-Benanti l’intègre dans le contexte historique de l’époque. Ce qui au début gâche un peu la vivacité du récit, mais permet également de mieux comprendre cette société dans laquelle ne peut s’intégrer un adolescent en mal de vivre et en mal d’amour.

Viviane JANOUIN-BENANTI : La serpe du maudit. Comprend un cahier photo de documents d’époque. 3E éditions. Parution le 1er mars 2017. 368 pages. 11,00€. Version numérique 4,99€.

ISBN : 979-1095826712

Première édition : Collection Crimes et Mystères aux éditions Cheminements. Parution mars 2003.

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20 avril 2019 6 20 /04 /avril /2019 04:00

C’est pour être sûr que le cadavre est bien mort ?

Eric FOUASSIER : Par deux fois tu mourras.

La période qui se situe entre la fin de règne de Clovis et des Mérovingiens et celle de Charles Martel puis de son fils Pépin le Bref auquel succédera ce sacré Charlemagne qui a inventé l’école et des Carolingiens, n’est que très peu abordée dans les manuels scolaires.

On retiendra surtout les images montrant ces Rois Fainéants avachis dans des chariots tirés par des bœufs, mais cet intervalle fut occulté d’abord par Eginhard, auteur de la première biographie officielle de Carolus Magnus dit aussi Charles 1er. Il en diffusa une image terne et un dénigrement qui furent repris par les historiens jusqu’à nos jours, et ce particulièrement dans l’enseignement.

Depuis quelques décennies, de nombreux historiens se sont penchés sur les textes, notamment de l’évêque Grégoire de Tours qui a rédigé l’Histoire des Francs. Mais l’avis de ces chercheurs divergent parfois selon les sources auxquelles ils se réfèrent. Eric Fouassier a écrit l’histoire de la reine Galswinthe, la jeune épouse de Chilpéric, de sa mort puis de l’enquête effectuée par le jeune Arsenius Pontius à la demande de la sœur de Galswinthe, Brunehilde la reine d’Austrasie et femme de Sigebert 1er.

 

Or donc ce récit débute en 569 par l’assassinat dans le palais de Rouen de Galswinthe, épouse depuis peu de Chilpéric en remplacement d’Audowhère, répudiée. Galswithe est une princesse Wisigoth et elle apportait dans son l’escarcelle de son époux richesse et noble alliance. Seulement Chilpéric ne se contentait pas d’une seule femme et il avait pour maîtresse Frédégonde, une maîtresse femme puis-je dire, et ce concubinage forcé ne lui plaisait guère et elle s’en plaignait.

Un inconnu s’est glissé dans la chambre où dormait Galswinthe et l’a étouffée en lui plaquant un oreiller sur le nez et la bouche et en l’étranglant. Seulement pour lui, cet assassin ne savait pas qu’il était surveillé et il meurt une dague enfoncée dans le torse. Et de deux. On ne rigolait pas à cette époque.

 

Quatre ans plus tard, en 573, les éléments sont déchainés. Pluie, vent, pluie toujours et encore, et la terre se délite entraînant avec elle des constructions de bois qui s’effondrent. Une porcherie est ainsi mise à mal. C’est alors que soldats, esclaves et autres habitants de la cité, assemblés pour constater les dégâts matériels, découvrent des ossements parmi la boue. Wintrude, esclave des Francs et ancienne princesse thuringienne, aperçoit alors niché parmi ces reliquats un collier constitué de griffes d’ours. Aucun doute, cette parure appartient à son frère Aarbald disparu mystérieusement depuis quatre ans.

Prise à partie par les soldats, elle se réfugie au couvent d’où elle envoie une missive à la reine Brunehilde, lui contant sa peur et surtout le fait qu’elle pense que son frère a été assassiné en représailles.

Aussitôt Brunehilde charge Arsenius Pontius, jeune lettré gallo-romain, d’aller enquêter sur la mort mystérieuse de sa sœur et de découvrir son assassin.

Arrivé à Rouen en compagnie de quelques hommes d’armes, Arsenius se présente auprès de l’évêque de Rouen, Prétextat, prétendant apporter un message de réconciliation entre les trois frères qui se sont partagé le royaume. Il est reçu tel un ambassadeur, ou presque car son statut de filleul de l’évêque Grégoire de Tours plaide en sa faveur.

Wintrude s’enfuit, et Arsenius se trouve embarqué dans une affaire qui s’avère plus compliquée qu’elle le paraissait au premier abord. En effet, en discutant incidemment avec le médecin du château, il apprend que non seulement le présumé assassin de Galswithe a été lui-même assassiné par un inconnu, mais que l’épouse de Chilpéric a, non seulement été poignardée, mais également étouffée. Or cet étouffement a bien provoqué le décès de la jeune femme, le poignard n’ayant frappé qu’un cadavre. Un leurre pour détourner les soupçons sur un homme de paille au lieu du véritable meurtrier.

Arsenius se rend compte que son séjour à Rouen indispose et il est victime d’une tentative de meurtre. Il apprend également qu’une guerre fratricide pourrait bien éclater entre les royaumes de Neustrie et d’Austrasie. Et Guntramm, frère des deux autres et roi de Burgondie, pourrait très bien entrer dans cette partie, un jeu de trônes ou Game of Thrones comme disent si bien nos amis Britanniques et ceux qui se piquent de culture, employant volontiers des locutions d’Outre-manche au lieu des mots français. Un snobisme ! Et une digression intempestive cde ma part.

 

Roman historique ou récit historique ? Les deux évidemment, car si une histoire et une intrigue sont proposées aux lecteurs, l’aspect documentaire prime.

Il est vrai que cette période de l’histoire de France est assez obscure, de par son côté oublié des manuels scolaires, et peut-être du manque d’informations car peu de scripteurs à l’époque rédigeaient les événements qui se déroulaient, par manque de supports. Les chercheurs de nos jours puisent dans des archives parfois contradictoires, selon les sentiments politiques qui animaient ces scripteurs, attachés qu’ils étaient à telle ou telle personnalité, rois et seigneurs.

Toutefois, Eric Fouassier a compulsé de nombreux ouvrages afin de nous restituer cette atmosphère, cette ambiance, ces décors, ces conflits, ces modes de vie, et en a tiré un ouvrage fort documenté. Et l’aspect documentaire prend, parfois à mon avis, une prépondérance qui nuit au développement de l’aspect romancé. Il s’agit un peu avec quelques siècles d’avance de reconstituer un épisode à la façon des Rois Maudits de Maurice Druon et ses collaborateurs dont José-André Lacour.

Mais je garde un trop bon souvenir de la trilogie Sans peur et sans reproche dont les figures principales en étaient le Chevalier Bayard et la jeune apothicaire Héloïse Sanglar dans Bayard et le crime d’Amboise, Le piège de verre et Le disparu de l’Hôtel-Dieu que Par deux fois tu mourras m’a intéressé mais moins captivé que la trilogie précitée.

Une préférence peut-être pour l’époque historique de Bayard, le début du XVIe siècle appelé bas Moyen-âge ou Moyen-âge tardif qui se situe du XIIe au XVIe siècle par opposition au premier Moyen-âge ou très haut Moyen-âge qui va du Ve au VIIIe siècle ou haut Moyen-âge qui est situé du Ve au XIIe siècle.

 

Il est vrai qu’en bien des domaines, et plus particulièrement en médecine, le dogmatisme devrait plus souvent céder le pas aux fruits de l’expérience.

 

Pour mémoire :

Eric FOUASSIER : Par deux fois tu mourras. Roman historico-policier. Editions Jean-Claude Lattès. Parution le 1er mars 2019. 498 pages. 20,50€.

ISBN : 978-2709663908

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9 avril 2019 2 09 /04 /avril /2019 04:30

Un roman solide, qui n’est pas construit de briques… et de broc !

Georges-Jean ARNAUD : Le Néant des pierres.

Imaginez une bicoque, à l’écart de la ville, non loin d’un super marché. Imaginez une maison dont le rez-de-chaussée sert de rendez-vous à des toxicomanes, à de jeunes voyous, à des adolescents qui découvrent le simulacre de la reproduction, simulacre tarifé ou non. Imaginez au premier étage une famille qui vivote avec un téléphone qui ne communique avec l’extérieur que dans un sens, celui de la réception, du minimum électrique, pas d’eau chaude sinon le compteur disjoncte. Imaginez cette famille composée d’une mère dont le cerveau est en berne vingt deux heures sur vingt quatre, un fils, Tony, qui assure l’essentiel grâce à de petits boulots et de rapines, une fille, Julie, un peu naïve, une peu simplette, un peu amoureuse de son frère aîné, déboussolée quoi. Et le père, Germain, qui traîne derrière lui des espérances de fortune, des cadavres, des regrets, des espérances qui tournent en eau de boudin. De l’argent, ils en ont eu, mais acquis par quel mystère, et dilapidé dans quelles conditions ?

Imaginez plus loin, une sorte de ferme perdue entre vignoble et garrigue, habitée par une vieille mais robuste femme, hommasse dans son comportement, frustre et madrée, fusil en bandoulière quelle que soit la saison, chassant malgré les interdits, amassant le pécule sans vergogne.

Le trait d’union entre Lucrèce, prénom de cette baroudeuse anachorète, et Germain (et sa famille) réside en une simple histoire de parentèle. Ce fut sa belle-mère, c’est toujours sa belle-mère, mais il la fuit, comme on fuit le diable, personnification du remords. Car un autre lien les attache, depuis dix-sept ans, l’enlèvement sur la plage de Leucate d’une gamine de cinq ans, la rançon encaissée, et la disparition de la fillette. Depuis, Germain et sa famille errent de ville en ville, dix sept ans de vagabondages et de déménagements, avec toujours au bout du compte Lucrèce qui réclame de l’argent, encore de l’argent, une rente qu’il fournit jusqu’à épuisement. Epuisement financier mais également moral.

Imaginez cette famille traquée, au bout du rouleau, vivant d’expédients, dans une atmosphère lourde, compressée, étouffante, oppressante, angoissante, obsédante, vivant au jour le jour, avec comme phare une génitrice confondant les prénoms d’une fille qu’elle tarabuste et de sa mémoire surgissant par à-coups celui d’une gamine source de richesse dix sept ans auparavant.

Imaginez cette Lucrèce sangsue accueillant un Germain trop confiant dans son rôle d’acteur de seconde zone animé de componction, secouant une faiblesse collée à sa peau comme une carcasse de crocodile dont les larmes affaibliraient, amolliraient une marâtre haïe.

Imaginez cette ambiance suffocante, traumatisante, avec en silhouette obsédante, une jeune femme qui dix sept ans après un événement oublié de tous, sauf les parties concernées, c’est à dire les familles ravisseuses et les familles spoliées, se met à la recherche de l’ombre d’une sœur vomie, encombrante, adulée par une mère méprisante qui reportait l’affection qu’elle aurait dû vouer à son aînée sur une cadette qui ne la méritait pas. Point de vue tout à fait personnel qui ronge la mémoire de la rescapée d’une famille qui a vécue durant des années dans la mémoire d’une disparue quasiment sanctifiée.

Imaginez un univers confiné entre trois points d’ancrage qui peu à peu se rejoignent inexorablement, attirés par l’âme, la présence indéfectible d’une absente minant les esprits.

Imaginez, non n’imaginez plus mais laissez-vous porter dans ce nouvel opus du géant de la littérature populaire, qui se dresse tel un roc, un menhir à six faces, du haut de cinquante ans de carrière, et qui ne s’érode pas. Trois larges pans représentant l’espionnage, le policer, la science-fiction, et trois autres plus réduits symbolisant l’angoisse, l’érotisme, l’historique.

 

Dans sa postface, Serge Perraud annonce que ce titre est le 401ème roman écrit par cet auteur prolifique, le deuxième publié aux éditions du Masque. Pour la bonne bouche comme disent les gastronomes en culottes longues qui se délectent de lectures saines, j’ai choisi une citation extraite de ce nouveau roman, qui j’en conviens, placée hors contexte peut paraître anodine mais prend toute sa signification à la lecture du texte.

Tu ne sais pas ce qu’est une jeune fille, tu as toujours été vieille.

Georges Jean Arnaud signe ce nouveau roman qui le confirme comme auteur hors normes. Il s’inscrit comme l’auteur majeur, pour ne pas dire plus, du dernier demi siècle passé et il entame le XXIème siècle en fanfare. Certains diront qu’il y a eu aussi Simenon, mais je leur ferai remarquer humblement que ce fut un Belge même s’il vécu longtemps en France et que sa production, sauf peut-être les romans dits noirs et qu’il considérait comme littéraires, sont datés, tandis que ceux d’Arnaud, Georges Jean de ses prénoms, restent de petits chefs d’œuvre.

Georges-Jean ARNAUD : Le Néant des pierres. Grand Format. Editions du Masque. Parution 10 octobre 2001. 310 pages.

ISBN : 978-2702479902

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5 avril 2019 5 05 /04 /avril /2019 07:03

Tu veux qu'j'te chante la mer
Le long, le long, long des golfes
Pas très clairs

Alain BERNIER et Roger MARIDAT : Pièges dans le Golfe.

Anna Verdon ne supporte plus la vie étriquée qu’elle mène entre ses parents, l’un alcoolique et chômeur patenté, l’autre se plaignant sans cesse et se reposant sur sa fille en toutes occasions.

Seul trouve grâce à ses yeux son jeune frère, Jean-Charles, un mou qui a besoin du soutien permanent de sa sœur, laquelle va même jusqu’à payer ses études. Ambitieuse, Anna aspire au confort matériel, à une situation professionnelle élevée, à la reconnaissance de ses capacités professionnelles.

Elle décide donc de quitter le foyer familial entraînant avec elle Jean-Charles. L’opportunité de se faire une place au soleil lui est offerte par une de ses anciennes camarades qui se marie.

Laurence travaille chez Gallouédec, le parfumeur bien connu, mais elle envisage de quitter son emploi, aussi Anna pense pouvoir, grâce à ses compétences se faire embaucher. Elle imagine un stratagème qui devrait lui apporter tout rôti le patron susceptible de reconnaître ses capacités. Elle feint une noyade alors que Gallouédec (quarante ans de plus aux artères) se baigne dans l’océan, et l’accroche dans ses filets.

Seulement au lieu de trôner derrière un bureau, la voilà lascive (pas trop quand même) dans un lit. Avec un mariage à l’horizon. Elle qui se croyait devenir directrice, pourquoi pas P.D.G., de l’entreprise, ne règne que sur la maison.

Piètre avenir qu’elle résoudra en poussant son mari un peu plus tôt que prévu dans le vide. Youpi se dit-elle, enfin je règne et je procure à mon petit frère une place digne de lui. Sauf que c’est un incapable et que les ennuis financiers se pointent à l’horizon.

 

Roman policier que l’on pourrait cataloguer rétro, Pièges dans le Golfe (je n’aime pas trop le titre qui induit en erreur même si l’histoire se déroule dans les environs du Golfe du Morbihan) ravira les amateurs de suspense, même si l’histoire, et donc l’épilogue, semble issu d’un moule maintes fois utilisé.

Bernier et Maridat, qui produisirent d’excellents romans au Fleuve Noir sous le pseudonyme d’Eric Verteuil, n’en sont pas à leur coup d’essai et sous couvert de gentillette romance visitent d’un œil acéré quelques travers de la France profonde (ce qui ne veut pas dire que la capitale est exempte de tout vice, mais les relations entre personnages se révèlent parfois différentes de la province).

Anna s’érige en femme ambitieuse, désireuse d’assumer une volonté de réussite en utilisant en priorité son intelligence, sa culture, ses qualités intrinsèques, et mettant au rencart ses fesses et ses sentiments sauf si les premiers ingrédients se révèlent inopérant. Et encore !

Mais il faut prévoir le retour de bâton et l’épilogue ne manque ni de charme, ni de morale. Selon le point de vue où l’on se place.

 

Alain BERNIER et Roger MARIDAT : Pièges dans le Golfe. Liv Poche Suspense n°57. Liv’Edition. Parution 9 mars 2004. 244 pages.

ISBN : 978-2844970572

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4 avril 2019 4 04 /04 /avril /2019 06:29

Malgré son titre, un roman toujours d’actualité.

Yvonne BESSON : Meurtres à l’antique.

Dans l’hôpital de Marville, petit port de la côte normande, un double crime est perpétré. Lorsque l’on connaît les problèmes rencontrés par les petites entités hospitalières en cette fin de siècle (et depuis, cela n’a pas changé !), on se demande si l’auteur n’a pas voulu jouer dans la politique, mais bon passons, ce n’est pas notre propos.

Donc un double crime est accompli et pour l’inspecteur fraîchement débarquée Carole Riou, voilà enfin du pain sur la planche afin de démontrer ses possibilités. Mais nous ne sommes pas en banlieue, qui comme chacun le sait grâce aux interventions médiatiques sont les réservoirs de la délinquance, mais en province. Cette province si belle, si tranquille, si reposante, si… bref, le genre d’endroit qui ne fait pas parler de lui sauf lorsqu’un crime y est commis.

Et encore, faut-il que le sensationnel soit au rendez-vous. Alors que le mythe d’Œdipe vienne se fourrer là-dedans, et que des notables soient impliqués, qu’ils s’appellent Malot en plus (comme Hector) que des secrets de famille remontent à la surface comme des bulles dans un marécage, voilà qui ne peut qu’attiser la soif d’enquête du journaliste local. Oui mais ne s’appelle pas Rouletabille qui veut. Ah ce grenouillage dans le monde feutré de la ruralité propre sur elle !

 

Pour un premier roman, c’est une totale réussite et l’on pourrait croire que cet ouvrage est issu de la plume d’un auteur confirmé.

Yvonne Besson, enseignante à Dieppe, reflet déformé de Marville, a su tirer partie des lectures de nos belles étrangères (Martha Grimes, Elizabeth Georges, Frances Fyfield…) afin d’implanter un décor dans la province française si chère à Flaubert et à Maurice Leblanc.

Une réussite à ne pas négliger malgré un titre un peu commun, pour ne pas dire banal.

 

Réédition Folio Policier N°218. Parution juillet 2001. 416 pages. 9,00€.

Réédition Folio Policier N°218. Parution juillet 2001. 416 pages. 9,00€.

Yvonne BESSON : Meurtres à l’antique. Editions de la Table Ronde. Parution le 10 novembre 1998. 380 pages. 16,30€.

ISBN : 9782710308836

Réédition Folio Policier N°218. Parution juillet 2001. 416 pages. 9,00€.

ISBN : 978-2070412860

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3 avril 2019 3 03 /04 /avril /2019 07:11

Il ne participera pas à une course hippique avec pari mutuel urbain !

BOILEAU-NARCEJAC : Sans Atout et le cheval fantôme.

Un jour un professeur en conclusion d’un développement sur l’ordre avait énoncé : L’ordre, c’est, dans la vie, le meilleur atout !

Il n’en fallait pas plus pour que François Robion, un adolescent de quinze ans, soit ainsi surnommé. Il est désordonné, ne se souvenant jamais où il a pu ranger ses affaires. Mais selon lui, ce sont ses affaires qui déménagent sans le prévenir ! Heureusement que son père avocat ne possède pas les mêmes prédispositions à tout égarer !

Il prépare ses bagages, sous l’œil vigilent de sa mère, afin de partir en vacances de Pâques, seul, au château de Kermoal, près de Portsall dans le Finistère. Une grande première, d’autant qu’il va rejoindre le château familial en train.

Un château médiéval qui commence à tomber en ruines, avec de nombreuses pièces vides, les meubles et les objets précieux n’ayant pas résisté à la convoitise de l’Occupant lors de la dernière guerre. Seul un vieux couple garde l’édifice, les Jaouen, en compagnie de leur fils adoptif, un petit-neveu nommé Jean-Marc, âgé de trois ans de plus que François.

Jean-Marc, alors qu’il emmène François jusqu’au château à bord de sa vieille 2CV achetée un mois auparavant, confirme que l’édifice est à vendre. Les acheteurs ne se pressent pas car de très nombreuses rénovations sont à prévoir. Mais un promoteur qui désire tout raser afin de vendre en parcelles est sur les rangs. Et Jean-Marc, qui a toujours vécu dans ce château est triste.

Le soir même, Jean-Marc invite François à se rendre dans une pièce de la tour nord, l’opposé où les Jaouen dorment. Il entrouvre la fenêtre et François médusé peut entendre le pas d’un cheval s’avançant tranquillement, le bruit de l’harnachement, un claquement de langue. Mais aucune silhouette, aucune ombre de l’animal, rien ne prouvant sa présence sauf les bruits des déplacements. Ah si, juste l’empreinte d’un sabot.

Le lendemain soir, le même manège continue et les soirs suivants les époux Jaouen sont également invités à écouter, à défaut de voir, ce phénomène. François et Jean-Marc descendent dans le parc et retrouvent un homme couché à terre, probablement assommé. Il possède une statuette représentant un cheval cabré en or. Ils recueillent l’individu mais le lendemain matin celui-ci a disparu.

Un nouveau visiteur se déplaçant ave chauffeur en Bentley se présente afin de visiter le château. Il est Hollandais et entrepreneur en maçonnerie. Il prend des photos et imagine déjà la façon dont il pourrait restaurer l’édifice. De plus il est intéressé par une petite chapelle proche, la chapelle du Pardon, qui possède un passé historique.

Mais François, alias Sans Atout, sent une entourloupe là-dessous, et il va enquêter seul, au péril de sa vie, enfreignant les consignes de sécurité qui veut qu’on ne se déplace pas ainsi en territoire inconnu sans avoir assuré ses arrières.

 

Un roman destiné aux enfants mais dont l’écriture n’est pas mièvre, et dont le traitement ressemble un peu aux romans adultes que le duo Boileau-Narcejac a écrit durant des décennies, dont D’entre les morts, adapté au cinéma sous le titre Sueur froide par Alfred Hitchcock en 1958 et qui sera réédité sous ce nouveau titre à nombreuses reprises.

La construction de cette intrigue propose d’ailleurs plusieurs lectures, le phénomène cheval qui emmène le lecteur dans une ambiance quelque peu fantastique, la résolution de ce phénomène, et ce qui en dépend, comme une énigme classique, mais également une entrée digne d’un roman d’aventures avec la statuette en or puis la découverte d’un trésor, le tout ponctué d’une réminiscence de la Seconde Guerre Mondiale.

Tout est là pour intriguer et inciter le lecteur à continuer sa lecture jusqu’à plus d’heure, et tant pis pour l’adolescent qui veut à tout prix connaître l’épilogue et oublie de se réveiller le lendemain matin pour aller à l’école.

Car quoi de mieux que lire la nuit, alors qu’aucun bruit ne vient le perturber et le distraire, ressentant d’autant plus l’atmosphère qui imprègne cette histoire.

Le jeune Sans Atout, malgré son surnom, n’est pas un adolescent étourdi. Il réfléchit et sait se débrouiller dans les moments critiques, un peu à la manière de Mac Gyver, avec les moyens du bord. Et surtout il est curieux, ce qui ne veut pas dire qu’il est indiscret. Quoique dans certains moments, ce défaut peut se révéler une qualité.

Mais, ce que n’écrirait sûrement pas de nos jours l’auteur bicéphale, c’est que François, quinze ans, dans le train qui le conduit en Bretagne, fume une cigarette, et que le père Jaouen, sert à table du cidre et même un petit verre d’eau-de-vie. Pour se remettre de ses émotions. Mais ça c’était avant…

 

Comme disent les Anglais, c’est quand il faut aller vite qu’il ne faut pas se presser.

BOILEAU-NARCEJAC : Sans Atout et le cheval fantôme. Collection Folio Junior N°476. Editions Gallimard. Parution le 7 juin 2007. 176 pages. 6,60€.

ISBN : 978-2070577088

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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