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5 décembre 2017 2 05 /12 /décembre /2017 09:05

Ohé, ohé, capitaine abandonné

Ohé, ohé, mets des ailes à ton voilier…

Maurice TILLIEUX : Le navire qui tue ses capitaines.

Il suffit d’un articulet paru dans un journal et retrouvé quelques années plus tard pour fournir la genèse d’un roman.

Maurice Tillieux, le créateur de Félix, dont je n’ai jamais lu une seule aventure, honte à moi, mais qui se souviens avec nostalgie de Gil Jourdan et d’autres histoires dont quelques épisodes de Tif et Tondu, s’en explique dans son avant-propos.

Adapté donc d’une histoire vraie, Le navire qui tue ses capitaines est le premier roman policier qu’il publie en 1943, et ce sera le seul quoiqu’un autre titre fût annoncé pour paraître.

 

Doubler le cap de Bonne-Espérance est toujours un moment délicat, tous les marins vous le diront, même les plus expérimentés comme le premier officier du Taï-Wan, John Hapgate. La mer est démontée, le vent souffle en rafales, puis, peu à peu la tempête s’assagit en gros temps. Pour obtenir une confirmation, le largage de la misaine, Hapgate décide d’aller demander son avis au capitaine Miller.

Il a beau frapper à la porte de la cabine personne ne lui répond. Alors il défonce la porte, fermée de l’intérieur par un verrou, et entre muni d’une lampe-tempête. Personne à l’intérieur de la pièce dont le hublot est fermé. Sur la table il découvre un morceau de papier fixé par le couteau du capitaine, papier sur lequel il lit : Cette nuit du 28 juin, par X de longitude est et X de latitude sud, le capitaine Miller a disparu.

Quelques semaines plus tard, en Angleterre, lors d’une réunion pour le premier anniversaire de mariage de Dany Lorton et sa jeune, charmante et belle épouse Stella, en compagnie de quelques invités, Joë Burton apprend de son hôte la mésaventure subie par le Taï-Wan qui est bien arrivé depuis huit jours à Liverpool. C’était le premier voyage du voilier sous le pavillon d’armement de Lorton. Burton est un grand voyageur et s’il ne devait pas partir pour le Brésil, il se serait bien rendu sur le Taï-Wan.

Un an environ après, un nouveau voyage avec passage du cap de Bon-Espérance, et un nouveau capitaine à bord, est programmé. Mais tout comme le capitaine Miller, le capitaine Watson est victime du même incident. Mais dans les deux cas, les corps ne sont pas retrouvés, même si la thèse du suicide est avancée.

Sur la côte, face à l’île d’Anglesey, un premier cadavre puis un second sont retrouvés à quelques mois d’écart. Tandis qu’un passager clandestin est découvert à bord du Taï-Wan.

Lorton, l’armateur, décide de faire appel à l’un de ses anciens condisciples qui est devenu inspecteur à Scotland Yard.

 

Dans ce roman policier de facture classique à l’aspect maritime bien prononcé, tout est noyé dans de faux-semblants et un rapprochement stylistique avec Agatha Christie n’est pas dénué de sens. Dans la perversité de l’intrigue, même si celle-ci semble parfois s’éparpiller un peu. Le côté meurtre en chambre close dérive sur d’autres formes de recherches, les personnages abordés n’étant pas tous ceux que l’on pourrait croire.

L’auteur noie le poisson habilement, mais peu à peu le lecteur, grâce à l’arrivée dans l’intrigue d’un policier qui connait les principaux protagonistes et ne se laisse pas prendre dans les filets des apparences. Il est vrai qu’il possède une solide expérience et une photo qui lui fournit quelques indices. Et les policiers locaux n’ont pas forcément mis bout à bout toutes les imbrications des cadavres retrouvés sur la grève et fait le rapport avec les capitaines disparus.

Mais l’intrigue vire de bord et l’on se retrouve à terre, au milieu d’un banc de malfrats, et la partie de pêche prend une tournure machiavélique mais pas forcément miraculeuse. Les requins ne sont pas loin.

 

Seul roman policier et premier écrit publié de Maurice Tillieux, Le navire qui tue ses capitaines joue sur l’énigme, l’angoisse, et l’humour. Un humour sobre, parfois décalé, surtout dans les petites réflexions, les présentations, les dialogues, sans forcer le trait. Un peu comme un dérivatif, comme une pause dans un contexte semi-tragique. Comme un préambule à ses scénarii et textes de bandes dessinées qui suivront.

 

La réédition de ce roman est accompagnée de quinze magnifiques illustrations pleine page signées René Follet, ainsi que deux dossiers sur Maurice Tillieux et les collections policières belges publiées durant la Seconde guerre mondiale.

Le premier dossier, présenté par Daniel Depessemier, s’intitule Maurice Tillieux et l’Aventure, est axé sur la jeunesse, l’époque de l’écriture de ce roman et le rapport de l’auteur avec les romans policiers, le tout enrichi de très nombreux illustrations et reproductions de couvertures. Le second dossier, sous la plume d’Etienne Borgers, spécialiste de la littérature policière belge mais pas que puisqu’il est également scénariste (il a travaillé avec Walthéry), s’intéresse à la collection Le Sphinx dans laquelle fut édité Le navire qui tue ses capitaines mais qui comporta de nombreux auteurs de renom dont Paul Kinnet et Pierre Véry. Cette collection était dirigée par Eugène Maréchal qui par la suite fournit un grand nombre d’auteurs pour les toutes jeunes éditions Fleuve Noir. Mais ceci est une autre histoire.

 

Maurice TILLIEUX : Le navire qui tue ses capitaines. Illustrations de René Follet. Editions de l’Elan. Parution le 5 novembre 2017. 112 pages Grand Format façon BD. 29,00€.

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commentaires

A
Un titre intriguant et une présentation originale. Je note.
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O
Une lecture sympathique qui m'a rappelé mon jeune temps. Que tu n'as pas connu...

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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