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9 juin 2014 1 09 /06 /juin /2014 16:13

Êtes-vous un Lendore qui s'ignore ?

 

geneve.jpg


Il existe une frange de la population qui peut se recruter dans toutes les couches de la société, sans distinction de race, de religion, de physique. Il s'agit des Lendores, dont le nom proviendrait, mais ceci n'est nullement avéré, de cette réflexion : un rien l'endort !

Dans la rue vous reconnaissez le Lendore à cette particularité d'avancer lentement, sans précipitation, alors qu'autour de lui les affamés de la vitesse pestent contre sa lenteur, le dépassant sans respecter la ligne blanche, le bousculant, l'invectivant parfois.

Benoît, qui porte bien son prénom, est un jeune homme de vingt ans, calme, serein, tranquille, pondéré, qui prend la vie comme elle vient sans vouloir à tout prix accélérer le cours des choses. Et sans la connotation péjorative qui parfois entache ce prénom. Il est trop jeune pour connaître cette chanson des Charlots, ce qui ne l'empêche pas d'en appliquer les paroles :

Il y a tant de gens qui se dépêchent

Pour n'importe quoi n'importe comment

Moi je chante en attendant qu'ça sèche

Et je m'en trouve bien content.

 

Ce n'est qu'à l'âge de quatorze ans que Benoît a appris qu'il était un enfant adopté, originaire de Roumanie et que ces parents sont allés cherché alors qu'il avait un an. Mais pour Benoît, ce sont ses parents et il vit très bien comme ça. Benoît était un élève distrait dont les points forts résidaient dans la calligraphie et la rédaction. Après avoir obtenu son brevet, et sur l'avis de la conseillère d'orientation qui estimait qu'il avait assez fréquenté l'école, il est entré comme employé magasinier dans la quincaillerie de monsieur Fraysse. Monsieur Fraysse est d'un tempérament tranquille, placide, et ces deux points communs ont favorisé le rapprochement entre le patron et l'employé. Benoist tient également la comptabilité et durant ses moments libres, il se repose ou lit. Il voyage dans sa tête aussi, et vit des aventures mirifiques teintées de danger dont il se sort toujours à son avantage.

Monsieur, et madame, Fraysse ont une fille qui vient d'entrer en seconde, Pauline, dix-sept ans et qui a patiné deux ans en troisième. Pauline est délurée, et son professeur principal se plaint de ses absences répétées durant certains cours. Selon la rumeur, elle se serait vantée de vouloir déniaiser un de ses condisciples, qui a deux ans de moins qu'elle. Benoît est donc chargé par son patron de surveiller les déplacements de Pauline les après-midi où elle prend un autre chemin que le lycée. Se dissimulant sous les traits d'un jeune homme ordinaire, ce qui ne lui demande aucun effort, il suit donc Pauline, accompagnée d'un jeune homme retrouvé dans le hall de la Gare du Nord, et c'est ainsi qu'il se trouve devant une porte cochère sur laquelle est apposée une plaque : Studio d'art.

Monsieur Félix Belon, un ami du patron, inspecteur de police en retraite qui n'a pu gravir les échelons à cause de sa propension à tirer au clair les affaires dont il était chargé dans la lenteur, a observé le manège de Benoît. De fil en aiguille l'ex-inspecteur confie à Benoît qu'il est l'un des fondateurs du MPL, Mouvement pour la promotion de la Lenteur. Et Benoît va devenir un adhérent de cette association qu'il découvre. Belon va l'aider dans sa filature, prendre sur le fait Pauline qui pour disposer d'un peu plus d'argent de poche posait nue pour un photographe, puis c'est bientôt les vacances. Benoît doit, à la demande de monsieur Fraysse, accompagner Pauline et son amie Alice dans le sud de la France puis en Espagne. Il a bien du mal à canaliser les pulsions de sorties nocturnes de Pauline, et à Bilbao il va faire la connaissance dans un restaurant du marquis Heitor de Carjaval Benito Sousa.

Le marquis est un vieil homme charmant dont la passion réside dans la collection de cartes anciennes : marines, géographiques, planisphères, mappemondes, portulans... L'objet dont il est le plus fier est un immense globe-terrestre de trois mètres de diamètre, qui trône dans une pièce retirée et qui recèle en son sein un petit boudoir avec banquette. Un salon de musique, de lecture, de méditation, propice à voyager sans bouger.

Benoît rentre à Paris accompagné d'Alice, dont il a fait plus ample connaissance, et de Pauline qui s'est assagie. Quant à monsieur Belon il brigue la place de président du MLP mais à la surprise générale c'est Benoît qui est désigné alors qu'il n'était pas candidat.

 

Ce roman s'articule comme un conte philosophique, ode à la lenteur, mais surtout à l'incitation de profiter du moment présent, de ne pas précipiter les événements, de jouir du spectacle de la rue, de la campagne, de voyager dans sa tête et de connaitre de magnifiques aventures en chambre. Ce n'est pas pour autant que le narrateur, Benoît, reste immobile, il va connaître de nombreuses pérégrinations en songe ou dans la vie réelle, et certaines seront semées de danger. Ce n'est pas pour autant que ce roman traîne en langueur et en longueur, au contraire. On le lit avec la soif de connaître la suite, avec un sentiment de frustration arrivé à la dernière page. Celui que ce soit si rapide, et on en aurait bien lu une centaine de plus.

 

De Max Genève, à lire également : Vertiges, Noir Goncourt et La cathédrale disparue ainsi qu'un entretien avec l'auteur.

 

Max GENEVE : Le jeune homme qui voulait ralentir la vie. Editions Serge Safran. parution le 2 mai 2014. 224 pages. 14,50€.

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commentaires

A
Un ode à la lenteur ? Voilà ce qu"il me faut en ce moment.
Répondre
O
<br /> <br /> Besoin de décompresser Alex ?<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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