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22 octobre 2013 2 22 /10 /octobre /2013 12:58

Une librairie qui meurt, ce n'est pas une page qui se tourne, c'est un livre qui se ferme, à jamais.

 

loevenbruck.jpg


Depuis le temps qu'elle le pressentait, qu'elle le redoutait, Lola est au pied du mur. Son patron, un vieil anarchiste bolivien, propriétaire-gérant de la Librairie Le Passe-muraille située près de la Bastille, a décidé de fermer boutique. Personne ne voulait reprendre l'échoppe et il s'est vu contraint de la céder à une chaine de téléphonie mobile.

Lola est mère d'un petit Maxime, quatorze mois, et vit avec Thomas, cameraman qui donc émarge comme intermittent du spectacle et dont les revenus sont aléatoires. Quatre ans auparavant elle sortait avec Ari Mackenzie, un policier de la DCRI. Elle voulait un enfant, lui n'en voulait, comme chantait Nougaro. Mais elle se rend compte que Thomas la trompe et dépitée, déçue, elle quitte le domicile emportant quelques affaires et son fils Maxime. Elle téléphone à un ami, Krysztov, garde du corps et ami de son ancien compagnon Ari, le priant de les héberger elle et son fils.

Mais que fait Ari pendant ce temps ? Il vit de ses rentes qui fondent plus rapidement que neige au soleil (cliché). Et l'entrepreneur à qui il avait demandé de restaurer une vieille maison, sise dans l'Héraut, qu'un incendie a ravagé l'année précédente, vient de le lâcher pour des problèmes de finances. Il déguste régulièrement quelques whiskies au Sancerre (le nombre ne nous importe peu, c'est lui qui paie) et c'est là qu'un ancien camarade, policier de son état, fait irruption. Radenac, brigadier-chef au poste de police du Palais-Royal, connaissant le penchant qu'Ari entretient pour l'ésotérisme et l'alchimie lui demande des renseignement sur Fulcanelli.

fulcanelli4.jpgAri Mackenzie est à l'aise pour lui répondre car il s'est fortement intéressé à ce personnage mystérieux lorsque, adolescent, un jardinier dans un square près du Sacré-Cœur le voyant lire un ouvrage de Gérard de Sède, lui a prêté Le Mystère des cathédrales de Fulcanelli. Or règne sous ce pseudo un mystère qui n'a jamais été élucidé. L'alchimiste aurait signé deux livres en 1926 et 1930, un troisième intitulé Finis Gloriae Mundi étant prévu pour paraître mais qui le fut jamais. La préface était signée Eugène Canseliet et les dessins de Julien Champagne.

Radenac désire qu'Ari l'accompagne chez Gabriella Mazzoleni, dont le père, célèbre galeriste, vient de décéder. L'homme possédait une bibliothèque composée d'ouvrages précieux, sur l'alchimie et l'ésotérisme, datant pour certains de plusieurs siècles. L'appartement est protégé par une porte blindée, pour autant un carnet de Fulcanelli, un exemplaire unique, de seize pages dont seules trois ont été écrites, a disparu. Sceptique au début, Ari va bientôt fortement s'intéresser à cette disparition, lorsqu'en lisant dans un journal le décès de Jacques Caillol, poignardé alors qu'il visitait de nuit, étant entré par effraction, l'église de la Santa Caridad à Séville. Un meurtre qui relance l'intérêt d'Ari car ce meurtre a été perpétré devant un tableau de Juan de Valdès Leal dont le titre est Finis Gloriae Mundi. Ce ne peut être une coïncidence. Gabriella propose à Ari de le rétribuer grassement pour enquêter, ce que le policier accepte.

Aussi il se rend à Séville afin de glaner des renseignements fulcanelli3.jpgqui peuvent s'avérer précieux et prendre des photos du tableau et de l'endroit où il est apposé. Radenac, resté à Paris, a un doute sur la mort supposée naturelle de Mazzoleni, et effectivement le galeriste n'est pas décédé d'une crise cardiaque mais bien empoisonné. Chacun de leur côté ou ensemble Radenac et Ari vont donc procéder à des recherches, d'autant qu'un nouveau meurtre est découvert. Le nom de Caillol titille l'esprit d'Ari qui demande à une de ses relations d'effectuer des informations dans les fichiers de la police. Caillol faisait partie d'une association, la Fraternité d'Héliopolis, dont les membres sont connus sous des pseudonymes comme Archo (Caillol), Sophronos, Orthon, Epistemon. Si le véritable patronyme de certains d'entre eux est connu, il n'en est pas de même pour tous. Et ces Frères Chevaliers d'Héliopolis ont une corrélation avec Fulcanelli. Si Ari possède encore des amis susceptibles de pouvoir l'aider Radenac aussi et il s'en servira, pas conscient que cela pourra leur être préjudiciable.

Un homme qui se déplace en moto de marque italienne s'attache à suivre Ari dans ses déplacements, ce qui nous offre quelques belles pages de poursuite et l'intrusion d'un collègue de Radenac, à l'apparence de motard, tatoué, cheveux longs et au parler argotique.

 

fulcanelli1Construisant son énigme autour de protagonistes ayant réellement existés, Henri Lœvenbruck traite bien sûr de l'alchimie, de l'ésotérisme et de l'hermétisme mais d'une façon détournée, sans s'appesantir dessus. Il passionne le lecteur en proposant deux enquêtes en une. D'abord l'enquête criminelle que l'auteur dénomme enquête Scoubidou et que moi j'appelle Marabout de ficelle : un individu A est tué par un personnage B qui lui-même est assassiné par C et ainsi de suite. Mais cette intrigue est sujette à dénouer le mystère qui plane sur le personnage de Fulcanelli, en apportant sa solution, en l'étayant, en insérant dans son histoire épisodes réels et fictifs, en les liant d'une manière harmonieuse grâce aux différents protagonistes qui évoluent d'une façon naturelle. Il entremêle les différentes histoires, Lola et ses amours et déceptions, la double recherche de Radenac et de MacKenzie sur les crimes de sang qui sont perpétrés, et la recherche des mystères qui entourent Fulcanelli et les liens entre les événements qui se déroulent. Les protagonistes fictifs sont en relation plus ou moins étroites à travers le temps avec des personnages ayant réellement existés, Camille Flammarion, Anatole France, Victor Hugo, ou la famille de Ferdinand de Lesseps.

Mystère et suspense sont au rendez-vous. Mais mystère surtout avec ses ingrédients naturels : carnet secret et messages à décrypter. Une ambiance digne des anciens romans de mystère qui offraient aux lecteurs des moments de lecture de pur plaisir. Un peu une atmosphère à la Blake et Mortimer.

Mais le véritable héros de cet ouvrage, toujours présent mais qui ne s'exprime pas, c'est le Livre. Au début avec cette librairie qui s'étiole, mais aussi dans les différentes bibliothèques somptueuses, celle d'Ari Mackenzie, celle de Mazzoleni dont les ouvrages, des exemplaires uniques, des incunables, doivent être donnés selon le testament rédigé par le galeriste, aux Archives Nationales, mais également au travers d'œuvres évoquées au cours du récit comme Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, La Rôtisserie de la Reine Pédauque d'Anatole France, Du côté de chez Swann de Marcel Proust sans oublier les vedettes que sont les livres ésotériques publiés de Fulcanelli, Le Mystère des Cathédrales et l'interprétation ésotérique des symboles hermétiques du Grand-Œuvre et Les Demeures philosophales et le symbolisme hermétique dans ses rapports avec l'art sacré et l'ésotérisme du Grand-Œuvre et celui qui ne l'a jamais été et fait l'objet de toutes les supputations : Finis Gloriae Mundi.

Bien sûr ceci n'est qu'une fiction mais ce panachage entre faits réels et historiques et l'imagination de l'auteur offre une histoire savoureuse qui n'aborde en aucun cas le fantastique ou le surnaturel, et nous change agréablement des romans noirs actuels.

Chacun de nous possède ses passions, que l'on cultive avec plus ou moins d'ardeur, mais sans pour autant vouloir se montrer pédant. C'est le cas d'Henri Lœvenbruck qui d'ailleurs précise en fin de volume ses références bibliographiques et dresse une chronologie historique de cette affaire qui intéresse de nombreux chercheurs.

 A lire également d'Henri Loevenbruck : L'Apothicaire.
Henri LŒVENBRUCK : Le mystère Fulcanelli. Editions Flammarion. Parution le 5 octobre 2013. 416 pages. 21,00€.

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commentaires

F
oh que je suis tentée très fort ... mais j'ai tant de livres en attente que je vais prétexter d'attendre le poche pour le lire.
Répondre
O
<br /> <br /> Je pense en effet qu'il ressortire en poche car c'est un très bon livre qui devrait avoir du succès<br /> <br /> <br /> Bonne journée<br /> <br /> <br /> <br />
L
Le rasoir d'Ockham m'avait un tantinet déçu, "L'apothicaire" est à venir et si ce dernier me plait, j'envisagerais "Le mystère Fulcanelli"<br /> Amitiés<br /> Le Papou
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O
<br /> <br /> Moi aussi Papou, mais là c'est autre chose et nettement plus passionnant.<br /> <br /> <br /> Bonne journée<br /> <br /> <br /> <br />
Z
Tout à fait Thierry
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O
<br /> <br /> Référence footballistique ! C'est vrai Jean-mimi<br /> <br /> <br /> <br />
Z
Oui, mais le mystère n'est pas à la bibliothèque CQFD
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O
<br /> <br /> Si je comprends bien, Zazy, c'est un conte.... d'apothicaire<br /> <br /> <br /> <br />
P
C'est très tentant..donc, j’hésite entre te faire une bise ou te maudire...Depuis que j'ai emménagé , j'ai du mal à faire des chroniques, il y a toujours quelque chose à faire...Mais lire, ça, je<br /> continue!! et ma CB se plaint terriblement.
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O
<br /> <br /> Fais-moi la bise d'abord, ce sera plus constructif... Et continue de lire, cela entretient les neurones à défaut de la CB<br /> <br /> <br /> <br />
Z
L'apothicaire étant à la bibliothèque, je l'ai commandé
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O
<br /> <br /> Bonjour Zazy<br /> <br /> <br /> L'Apothicaire est un roman historique dont toute l'intrigue se déroule au Môyen âge tandis que celui-ci se déroule de nos jours avec une référence historique et littéraire proche. Donc deux<br /> ambiances, deux atmosphères différentes. Et lo'n ne peut comparer ces deux ouvrages, par exemple ne pas aimer le premier et être emaballé par le second ou le contraire, ou lesdeux...<br /> <br /> <br /> Amitiés<br /> <br /> <br /> <br />

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