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28 juillet 2018 6 28 /07 /juillet /2018 08:26

Ce n’est pas parce qu’il s’appelle Lino qu’il faut le prendre pour une carpette !

Philippe HAURET : Je suis un guépard.

Lino n’est juste qu’un petit employé de bureau parmi tant d’autres dans une grosse boite située dans une tour de la Défense. A ne pas confondre avec le ministère des Armées.

Donc Lino travaille le jour, comme tout le monde excepté ceux qui sont au chômage et ceux qui bossent de nuit, et le soir venu, dans son minuscule appartement situé au sixième étage d’un immeuble du quatorzième arrondissement de Paris, il s’essaie à l’écriture. Des nouvelles car il n’est pas encore prêt pour rédiger un roman. Mais il s’astreint à noircir des pages blanches via son clavier sur son ordinateur.

Un soir, il distingue dans le couloir qui dessert son étage comme un tas de chiffons. Après vérification, il s’agit d’une jeune femme qui s’est réfugiée afin d’échapper aux maraudes et aux interpellations policières musclées. Si, si, cela existe !

Jessica, c’est le nom de cette paumée genre chien sans collier, arpente les rues, quémandant une, voire plusieurs piécettes, améliorant l’ordinaire par de petits larcins éventuellement. Lino propose de l’héberger, en tout bien tout honneur, ce qu’elle accepte mais bientôt leur relation évolue et ils sont amenés à partager le même canapé. Un voyage est même envisagé et pour cela Lino se montre quelque peu indélicat envers son employeur puisqu’il puise de l’argent dans le coffre-fort. Ce qui est préjudiciable à l’une de ses collègues. Un dommage collatéral, inévitable.

De retour à Paris, Jessica tombe, sans se faire mal et par inadvertance, sur un portefeuille. Elle prélève l’argent qu’il contenait puis rend l’objet à son propriétaire, patron d’une petite chaîne de magasins de confection. Pour la remercier, Melvin, le riche entrepreneur, lui confie une place de vendeuse dans l’une de ses boutiques.

Melvin est marié à Charlène, une femme somptueuse, et le couple se lie d’amitié avec Lino et Jessica. Seulement, car dans toute histoire qui pourrait sembler idyllique subsiste un seulement, leurs relations évoluent, et pas forcément dans le bons sens.

 

Outre ce quatuor de personnages, que l’on pourrait qualifier comme les Riches et les Pauvres, seuls quelques personnages secondaires évoluent dans ce suspense prenant. Secondaires, certes, mais pas inintéressants car ils ne se contentent pas de faire de la figuration dite intelligente.

Et incidemment, on se trouve plongé dans une conversation entre Jessica et Lino, juste avant les élections présidentielles. Si Jessica se laisse abuser par les apparences :

Ce mec transpire la vérité, son regard ne trompe pas, il est habité par ce qu’il dit.

Lino, lui, est plus réservé, pour ne pas dire lucide :

Sans vouloir casser l’ambiance, je pense que rien ne changera vraiment. Tes dix pour cent de chômeurs, tes cinq millions de précaires, tu les auras encore dans trente ans, et que ce soit un gouvernement de droite ou de gauche, les deux ne cherchent qu’à maintenir un taux de misère acceptable, sachant que les problèmes à résoudre demanderaient trop de sacrifices à ceux qui occupent les bonnes places.

Un suspense habilement mené, et qui nous ramène quelques décennies en arrière, années soixante, soixante-dix, avec une intrigue qui exclue violence et érotisme. On peut penser à des auteurs comme Jean-Pierre Ferrière mais également à deux romancières qui excellaient dans ce domaine, Catherine Arley et Madeleine Coudray, laquelle avait écrit quelques ouvrages fort sympathiques mais est aujourd’hui injustement oubliée et qui fut couronnée par le Grand Prix de Littérature Policière 1978 avec Dénouement avant l’aube.

Une étude de caractère et un système social malicieusement et efficacement développés, analysés, mettant en présence deux mondes différents qui par le jeu du hasard, sont amenés à se rencontrer, à s’apprécier. Plus ou moins. Peut-être même moins que plus.

Philippe HAURET : Je suis un guépard. Collection Jigal Polar. Editions Jigal. Parution le 15 mai 2018. 216 pages. 18,00€.

ISBN : 978-2377220373

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
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