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12 novembre 2020 4 12 /11 /novembre /2020 05:24

Malgré cette mise en garde, je l’ai lu !

François des AULNOYES : Interdit aux moins de 16 ans.

Et combien fut grande ma déception en découvrant ce texte qui a terriblement vieilli. L’intrigue est banale, tirée par les cheveux, et comporte de nombreux passages qui aujourd’hui ne seraient plus acceptés, à juste titre, dans un roman.

Le narrateur, fauché, déambule sur les Champs-Elysées quand soudain la fortune lui fait de l’œil. Par terre gît une liasse de billets qui ne demandent qu’à être ramassés. Il en est tout ragaillardi. Soudain il est tiré de ses rêveries par une main qui se pose sur son épaule.

La main appartient à une jolie femme qui se prénomme Béatrice, au fait j’ai oublié de vous signaler qu’il se prénomme Francis, et c’est délibérément qu’elle a perdu ses coupures. Elle est, argue-t-elle, suivie par un homme en costume gris. Elle est mariée, mais accepte volontiers d’aller au café avec Francis, puis afin de mieux faire connaissance de le suivre plus tard dans une chambre d’hôtel.

On comprend l’étonnement de Francis lorsqu’il se rend compte que cette femme mariée est… vierge. Béatrice explique que son mari ne l’honore pas parce qu’il est homosexuel.

Et voici Francis, aidé de son ami Jimmy, lancé dans une aventure où les coups bas ne manquent pas. Il va côtoyer des endroits peu recommandables et mettre sa vie en jeu pour l’amour de Béatrice.

Que l’histoire soit datée, ce n’est pas cela qui m’a gêné, mais certaines digressions ou propos. Ainsi les Arabes sont appelés Biques ou Bicots, selon la terminologie en vigueur à l’époque, 1954, un relent de racisme évident accentué par les prémices de la guerre d’Algérie.

Autre phénomène qui perdure, malgré les avancées sociologiques, c’est la façon de se moquer, de dénigrer, de vilipender, ceux qui s’adonnent à l’homosexualité. Si aujourd’hui on les traite de Gays, hier c‘était pédés, pédales et autres gentillesses que de nos joues on ne déclame qu’entre homophobes obtus.

Il ne s’agit pas d’une véritable diatribe, mais d’une accumulation de mépris. Ce qui était considéré comme normal à cette époque où l’homme devait se montrer viril, voire macho, n’est plus acceptable, et accepté, de nos jours.

Pourtant, il existe dans ce fatras, quelques lueurs d’humour.

Pourquoi mets-tu un soutien-gorge ?

Pour le plaisir de l’enlever.

 

Ah… On ne saura jamais quel mal peut faire la presse…

 

Un clin d’œil puisque François des Aulnoyes, 1906-1974, se nommait en réalité François Mazeline et était journaliste et critique cinématographique. Il possède à son actif quelques romans policiers et d’espionnage et a également écrit sous le pseudonyme de Jacques Préjean.

François des AULNOYES : Interdit aux moins de 16 ans. Collection Spécial Police N°49. Editions Fleuve Noir. Parution 1er trimestre 1954. 224 pages.

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11 novembre 2020 3 11 /11 /novembre /2020 04:29

A la recherche du tant perdu…

Gilles VIDAL : Loin du réconfort.

Franck, le narrateur a tant perdu dans sa vie.

Perdu du temps, des occasions, des illusions, une mère, un père, une arrière-grand-mère, des amantes…

Ivina, sa dernière en date, une belle blonde prometteuse d’avenir puisqu’elle porte leur fils, Ivina n’est plus. Il la découvre chez eux, attachée à une chaise, le ventre ouvert, et je vous laisse deviner la suite. Ivina, rappelle-toi…

Il se résout à appeler la police et malgré leurs dires, ils savent qu’il n’est pas coupable, il est appréhendé. Dans le bureau des pleurs ou des aveux il est confronté à un homme qui, sans être aimable mais pas persécuteur non plus, l’interroge et à la sortie lui remet un papier blanc sur lequel, il le compulsera plus tard, est inscrit un nom et une adresse.

Pour l’heure, Franck a d’autres occupations. Le voyage au cimetière, au jardin des souvenirs. Il rencontre le père d’Ivina, un Biélorusse du nom de Sergueï, arrivé en France dans des conditions mal définies.

Puis c’est le départ, un long voyage à bord de son véhicule assez vieillot, écoutant ses morceaux préférés qui vont de la musique classique aux groupes des années 1960, tout en prenant des notes dans un petit carnet. Car Franck est écrivain, mettant sa plume au service d’entreprises ou autres. Avec l’espoir de rédiger son roman.

Il se rend dans un petit village puis se dirige vers la mer, calmée mais pas lui, accumulant en cours de route des rencontres pas toujours heureuses.

 

Le lecteur à la lecture de ce texte empreint de poésie et de nostalgie, se croit sur un matelas pneumatique, dirigeant ses regards vers les nuages qui s’échelonnent dans le ciel à la queue-leu-leu, se déchirant parfois ou se rattrapant.

Comme autant de souvenirs, d’épisodes familiaux ou personnels vécus par le narrateur. Des digressions, certes, mais qui en apprennent plus sur celui qui se confie, que ne pourraient le faire des analyses oiseuses édictées par des professionnels de la psychologie.

Dans Géronima Hopkins attend le Père Noël, Gudule écrit :

Dans un texte à la première personne, l’auteur, lui aussi, s’implique différemment. Il ne raconte pas, il se raconte. Vraie ou fausse, l’histoire n’est plus une histoire, mais son histoire. Le livre devient aveu, confession. Véritable confession. Aveu authentique. Ainsi truque-t-on sa propre mémoire.

Et Gilles Vidal narre avec tant de conviction cette histoire, que le lecteur a du mal à distinguer quelle part prendre entre le fictif et le réel, entre le vécu et l’imaginé, et il se trouve balloté comme un yoyo, descendant jusqu’aux tréfonds des souvenirs et remontant jusqu’aux épisodes présents, frénétiquement ou nonchalamment.

 

Nous traversons nos existences en nous accrochant comme des sangsues à nos biens matériels, mais en réalité nous ne possédons rien, pas plus qu’un seau l’eau qu’il contient.

Il est une contrée qui s’appelle l’enfance.

Gilles VIDAL : Loin du réconfort. Editions Zinédi. Parution le 29 octobre 2020. 168 pages. 16,90€.

ISBN : 978-2848592152

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9 novembre 2020 1 09 /11 /novembre /2020 05:44

Mais pas sans cervelle ?

Gilles SCHLESSER : Mort d’un académicien sans tête.

Prénommé Oxymor, par un père farceur dont le patronyme est Baulay, on ne peut qu’aimer les mots, voire les maux. Oxy est journaliste indépendant travaillant pour plusieurs journaux et magazines, et sous l’impulsion de deux amis, Paul Mistraki qui dirige les éditions Visconti, et Lazare, qui n’est pas un saint, il décide de rédiger des articles consacrés à des membres de l’Académie Française et un ouvrage alphabétique.

Son ami Mistraki lui a fait visionner une émission télévisée, la Grande Librairie pour ne pas la nommer, au cours de laquelle Jean Mareuil, le poulain et la tête de gondole des éditions Visconti, et l’académicien Edmond de Rohan-Soubise, auteur de nombreux ouvrages de références, surtout apologiques de sa propre personne, se sont écharpés.

C’est ainsi qu’il se rend rue Bellini, le bureau de Rohan-Soubise, afin d’obtenir un entretien avec le maître. Maître et demi lorsqu’il le retrouve, adossé tenant entre ses petits bras sa tête encadrée. Il a été décapité à l’aide d’un coutelas malais de collection et la toile signée Soutine dont le cadre servait de support éparpillée en plusieurs lambeaux représentant la femme à l’écharpe blanche.

Le commandant Cathala, chargé de l’enquête en compagnie de ses adjoints qui jouent dans la catégorie deux poids deux mesures, et Oxy se connaissent bien. Cinq ans auparavant ils ont été mêlés à la résolution d’un crime, puis ils ont fraternisé, puis le temps a passé et comme à chaque fois dans ce genre de conditions, ils se sont perdus de vue.

Si Oxy est rapidement écarté des possibles coupables (le mot est adéquat dans ce cas), les prétendants à l’embastillement foisonnent. En premier lieu, Jean Mareuil, qui avait également rendez-vous avec Rohan-Soubise, désirant s’attirer ses bonnes grâces pour son élection à l’académie. Lazare, ami d’Oxy et écrivain fantôme de l’académicien décapité, mais pour lui cela signifierait un manque de rentrée d’argent. Et il ne faut pas oublier les gitons que Rohan-Soubise payait pour satisfaire sa libido. Car, quoique marié à une ravissante femme plus jeune que lui, il recherchait d’autres plaisirs.

 

C’est ainsi qu’Oxy se retrouve plongé malgré lui, quoiqu’il l’ait cherché, dans une recherche familiale. Car en effectuant ses recherches, indépendamment de Cathala, Oxy découvre des liens que sa grand-mère, fille-mère, a entretenus avec les Surréalistes d’André Breton. Notamment avec Robert Desnos.

Débute alors un retour en arrière, pour Oxy, tandis que Cathala, plus pragmatique se contente de se pencher sur une piste islamique, puis sur des proches de Rohan-Soubise. Notamment Jean Mareuil qui était l’amant de la femme de l’académicien.

Un roman qui oscille entre des pistes contradictoires, et qui s’avère jubilatoire dans sa description des personnages, dans l’ambiance qui règne, et les nombreuses balades et découvertes que l’auteur nous propose à travers d’anecdotes souvent amusantes, érudites et littéraires.

 

A partir d’une certaine somme, l’argent n’a pas d’odeur.

Gilles SCHLESSER : Mort d’un académicien sans tête. Editions City. Parution 23 août 2017. 272 pages.

ISBN : 978-2824610290

Réédition City Poche 6 mars 2019. 7,90€.

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8 novembre 2020 7 08 /11 /novembre /2020 05:28

Hommage à Ricardo Montserrat, décédé le 18 octobre 2020, à Conceptiỏn au Chili.

Ricardo MONTSERRAT : No Name.

Un livre qui, tels les galets ricochant sur la mer des souvenirs, emmène la narratrice en sauts de puce à la recherche de son passé. Vi, diminutif de Victor - drôle de prénom pour une femme mais comme le père désirait un garçon… ! – est une “ internective ” chilienne qui met ses dons de détective et sa passion pour l’informatique au service du nouveau gouvernement chilien.

Elle profite d’un séjour en France pour retrouver son géniteur exilé en Bretagne depuis la prise de pouvoir de Pinochet. Seulement l’ancien ministre de Salvador Allende, généalogiste renommé, n’aura pas le plaisir de revoir sa fille qui n’a que de vagues souvenirs de ce père expatrié.

Il est mort, assassiné, ses meurtriers recherchant vraisemblablement des papiers. Meurtre peu ordinaire qui en entraîne d’autres, camouflés en accidents. Bizarrement les autres trucidés ont un point commun, qui ne l’est guère : Ils s’appellent tous Pinochet, Bretons, fils de Bretons.

Quel rapport avec ce père prématurément décédé que Vi se faisait une joie de retrouver, pour ne pas dire découvrir, avec Pinochet le dictateur déchu et ces morts homonymes.

Moha, le généalogiste défunt, était-il à la recherche d’une parentèle et dans quel but ?

Vi sera aidée dans cette enquête qui se présente et s’impose à elle par un flic, qui ressemble à Alain Delon, et un forain propriétaire d’un manège pour enfants qui se nomme Merlin. Mais à force de vouloir rattraper ses souvenirs, il arrive que ceux-ci vous dépassent, surtout lorsqu’ils s’intègrent dans la mémoire d’un peuple meurtri.

 

Un roman que l’on pourrait prendre comme un jeu mais qui laisse des traces, des bleus à l’âme et une réflexion d’autant moins innocente que ce roman a été écrit avant les évènements et démêlés judiciaires récents de l’ancien dictateur.

Ricardo Montserrat est né le 12 avril 1954 à Saint Brieuc de parents antifascistes catalans émigrés en France. Sous les années Pinochet il part au Chili pour lutter contre ce qu’il appelle la cultura de la muerte. Rentré en France en 1991, il anime de nombreux ateliers d’écriture auprès des exclus de la dictature économique, rmistes, chômeurs, ouvriers privés d’emploi et licenciés, et de nombreux ouvrages écrits en commun seront édités : zone mortuaire publié à la Série Noire, Pomme d’amour chez Ramsay, et d’autres. Ce qui ne l’empêche pas de produire des romans personnels, des pièces de théâtre, des traductions pour le théâtre, la musique et la danse, des pièces radiophoniques, des essais.

No name prend pour décor les lieux où il a vécu, la Bretagne et le Chili, et tout naturellement les épisodes politiques qui l'ont marqué.

 

Ricardo MONTSERRAT : No Name. Editions Mercure de France. Parution 24 février 1998. 144 pages.

ISBN : 9782715220980

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7 novembre 2020 6 07 /11 /novembre /2020 04:52

En France, les maisons closes sont fermées !

James MELVILLE : Le neuvième Netsuke

A Kobé, comme dans bien d’autres villes nippones, existent des hôtels d’amour permettant aux couples illégitimes, et aux prostituées, d’assouvir leur passion ou d’exercer leur petit métier en toute impunité.

Et c’est dans l’une des chambres sophistiquées du Fantasia Hôtel (lits tournants, TV Couleur, vidéo…) qu’a été découvert le cadavre d’une jeune femme dont le principal revenu résidait dans le commerce de ses charmes.

Le commissaire Otani, désirant compléter l’enquête de son adjoint Kimura et peut-être découvrir de nouveaux indices, y loue une chambre pour deux heures en compagnie de sa femme. Un prétexte qui devient récréation, mais n’entrons pas dans les détails et respectons leur vie privée.

Donc Otani fouille cette chambre à l’ambiance érotique et sa femme trouve, cousu dans l’ourlet des rideaux qui masquent le lit, les entourant tel un baldaquin, un netsuke, petite figurine d’ivoire haute de cinq centimètres, fort délicatement ciselée, et en vogue au XVIIIe siècle. Le personnage féminin représenté par cette statuette ne correspond pas aux canons de la beauté définis par les artistes et la mode de l’Empire du Soleil Levant.

Otani s’adresse au conservateur du musée de Kyoto afin d’obtenir de plus amples renseignements sur ce qui s’avère être une pièce de collection. Le musée détient sept netsukes et celui en possession d’Otani complète ou presque la collection représentant les neuf muses de la Grèce antique. Jugeant cette figurine comme une pièce à conviction, Otani refuse de se dessaisir de ce que les responsable du musée qualifie de trésor national, à la valeur inestimable.

Le comportement de Ninja Noguchi, un de ses collègues, plonge le commissaire dans la plus profonde perplexité, d’autant qu’il est convoqué par les hautes autorités policières de la capitale.

Cette figurine, et le meurtre qui y est lié, fait remonter à la surface la période trouble de la guerre américano-japonaise, prenant ses racines dans les Philippines, et de hauts personnages affiliés à la Diète, assemblée politique nippone, semblent compromis.

 

Plus qu’un roman policier, alerte mais à la trame fragile, ce livre permet de plonger dans un univers oriental, mystérieux, courtois, loin des clichés dus à certains auteurs qui ne trouvaient en l’exotisme que l’alibi du péril jaune.

Vu par un Anglais connaissant fort bien les us et coutumes de ce pays, nous progressons sur les traces du commissaire Otani dans un pays partagé entre le désir de se moderniser, de s’ouvrir à l’Occident, et celui de garder intact et de protéger ses traditions, divisé entre son passé et son avenir.

Un roman plein de fraîcheur, de suavité, mais qui ne tombe pas dans le piège de l’onctuosité outrancière, et des yakusas, ce qui nous change de la noirceur de certains romans américains et de leurs gangsters arrogants.

James Melville a écrit une dizaine de romans policiers mettant en scène le commissaire Otani dont Mortelle cérémonie ou Le samouraï récalcitrant.

James MELVILLE : Le neuvième Netsuke (The ninth Netsuke – 1982. Traduction de Gilles Berton). Editions Philippe Picquier. Parution octobre 1991. 192 page.

ISBN : 9782877300957

Réédition : Collection Grands Détectives N°2369. Editions 10/18.

Parution avril 1993.

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5 novembre 2020 4 05 /11 /novembre /2020 04:52

Le Père Noël sera-t-il confiné ?

GUDULE : Géronima Hopkins attend le père Noël.

A soixante-trois ans, Henriette Lemartyr, plus connue sous le pseudonyme de Géronima Hopkins, est une romancière en vue, et ses ouvrages, des bluettes à l’eau de rose, s’arrachent comme des bouquets de fleurs, ou des petits pains, selon l’appétit des lectrices.

Au moment où nous la découvrons, elle est dans un lit, couchée avec le Père Noël. Un fantasme qui remonte à son enfance. Le Père Noël n’est plus en état de marche, dégoulinant de sang partout. Mais au moins, il a auparavant satisfait Géronima, sa libido et ses désirs. Elle aussi a été éclaboussée, un dommage collatéral qui ne prête guère à conséquence.

Alors elle se remémore, entre deux corrections de ses romans en cours, des améliorations concernant surtout Futur Père qu’elle signera peut-être pour une fois de son véritable patronyme, car dans le fond et la forme il est totalement différent de sa production habituelle.

Géronima a toujours cru au Père Noël et à l’aube de ses douze ans, le 24 décembre 1949, elle avait décidé de le surprendre en s’installant dans le salon familial, devant la cheminée. Et effectivement, tout à coup, descendant du conduit, le Père Noël est devant elle. Comment il se fait qu’elle se blottisse dans ses bras, et qu’il commence à lui retrousser sa chemise de nuit, l’appelant fillette, comme son père ?

Les Noëls suivants, elle n’aura pas le plaisir de le surprendre, mais cet épisode restera marqué à jamais dans sa mémoire. Et depuis cinquante ans, elle attend toujours le Père Noël, n’ayant jamais connu d’autres caresses.

Elle est installée près de Plonovez, tout au bout de la Bretagne, dans une demeure rustique, n’ayant à son service qu’une vieille femme qui ne vient qu’une fois par semaine. Elle reçoit la lettre d’une admiratrice qui signe Baby Golgotha. Comme la jeune femme réside dans la région, elle lui donne rendez-vous Aux bons amis, un bar de la petite commune. Elle est tout étonnée de découvrir une jeune fille au crâne rasé, la bouille maladive, affublée d’un gros coquard. Un accident de drap explique Bab, mais il ne faut pas en vouloir à Nono, son compagnon qui la fait grimper aux rideaux si bien qu’elle pardonne tout.

Et, intriguée, Géronima va découvrir le fameux amateur de coups et de douleurs (des coups et des douleurs, on ne discute !), une espèce de brute qui va même lui faire la cour. Elle n’apprécie pas ses manières de rustre, mais pour autant elle ressent dans son corps des fourmillements, à l’instar de ceux qu’elle a ressenti ce fameux soir de Noël alors que la main du Père Noël ( ?) la pelotait et tentait de s’insinuer en elle.

 

Ce qui pourrait être un conte de Noël, Géronima Hopkins attend le Père Noël est bien entendu un court roman destiné aux adultes, alimentant une certaine nostalgie. Celle de l’attente du distributeur de cadeaux, car à cette époque, la découverte des jouets, quand il y en avait, des friandises, et du sapin illuminé, s’effectuait le matin de Noël. La veille, pour certaines familles, c’était messe de minuit obligatoire, ou mini-réveillon, et au lit.

Gudule, alias Anne Duguël, ne se contente pas de délivrer un roman qui touchera peut-être certains lecteurs, ou plutôt lectrices, mais elle va plus loin, en expliquant l’origine de bien des romans. Une origine puisée auprès de proches, de voisins, de personnes rencontrées par hasard, et qui servent de support pour ses descriptions.

Et d’ailleurs certaines de ses rencontres, fortuites ou pas, sont sollicitées. Ainsi Baby Golgotha, dit Bab, écrit : Mon plus grand rêve serait d’être un jour l’héroïne d’un de vos romans, mais je sais que c’est impossible.

Et Géronima, qui s’exprime à la première personne, étant la narratrice, déclare :

Je dois à ce Je une bonne partie de mon succès, j’en ai la conviction. Mais ce n’est pas son seul intérêt.

Dans un texte à la première personne, l’auteur, lui aussi, s’implique différemment. Il ne raconte pas, il se raconte. Vraie ou fausse, l’histoire n’est plus une histoire, mais son histoire. Le livre devient aveu, confession. Véritable confession. Aveu authentique. Ainsi truque-t-on sa propre mémoire.

GUDULE : Géronima Hopkins attend le père Noël. Editions Albin Michel. Parution novembre 2001. 192 pages.

ISBN : 978-2226127396

Réédition Collection Piment. France Loisirs. Parution août 2002. 148 pages.

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1 novembre 2020 7 01 /11 /novembre /2020 08:39

Un roman, deux couvertures.

Serge LAFOREST : L’ange infernal.
Serge LAFOREST : L’ange infernal.

Les rééditions sont souvent les bienvenues quelques décennies après la première parution d’un ouvrage.

Seulement, il ne faut pas pour autant berner le lecteur.

Pour preuve cet Ange infernal de Serge Laforest qui, édité au cours du deuxième trimestre 1955 sous le numéro 74 de la collection Spécial Police du Fleuve Noir, bénéficia d’une réimpression-réédition dans la même collection sous le numéro 1149 au cours du quatrième trimestre 1974 avec une nouvelle couverture signée Gourdon, lequel Gourdon était à l’origine de celle de la première édition.

Traitée légèrement différemment, cette couverture comporte néanmoins deux éléments essentiels : la jeune femme et les ampoules.

A priori, pas de quoi fouetter un chat, penserez-vous.

Seulement, là où le bât blesse, réside dans le fait que la réédition de 1974 ne précise en aucun cas qu’il s’agit d’un roman précédemment publié. Pas de date de copyright, pas de mention de réédition. Le lecteur qui à l’époque achetait les ouvrages du Fleuve Noir un peu au hasard, sans tenir de fiches, de recensement de collection, y a vu peut-être du feu. Il faut avouer que la production était abondante.

Par la suite le Fleuve Noir réédita au début des années 1980, d’autres romans de la collection Spécial Police dans une nouvelle présentation, mais en précisant bien cette fois la provenance de l’ouvrage.

La pratique de rééditer un livre, parfois en changeant le titre, sans préciser la provenance ou le copyright, n’est pas nouvelle. Cela dure depuis des décennies, et il n’y a pas de raison que cela change. Pour les éditeurs naturellement. Mais pour les lecteurs avertis, cela ressemble à une tromperie mesquine.

Serge LAFOREST : L’ange infernal. Collection Spécial Police N°74 et 1149. Editions Fleuve Noir.

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31 octobre 2020 6 31 /10 /octobre /2020 04:45

Il faut savoir lire une carte aux trésors…

René POUPON : L’assassinat de M. Magre.

Le cadavre qui gît dans le hall, devant la porte d’entrée d’un petit immeuble, n’intéresse guère l’inspecteur Lebreton. Il s’agit d’un dommage collatéral, car un autre corps l’attend au premier étage, celui de monsieur Magre, un diamantaire.

Un petit homme replet, M. Paillot, courtier en pierres précieuses, ami et client de Magre, a découvert le cadavre. L’inspecteur effectue les premières constatations et ramasse un petit étui de cuivre blond, une douille. Le coffre-fort n’a pas été fracturé, et un trousseau de petites clés pend encore à la serrure. L’intérieur est examiné et le courtier sort d’une pochette quelques pierres finement taillées. Tout y est, rien n’a été dérobé.

Survient alors Raoul, le fils du diamantaire, qui possède un alibi en béton, armé naturellement, puisqu’il était en bonne compagnie à Montmartre dans un bar et un cabaret. Pour preuve, il possède encore les tickets de réservation. Raoul est un noctambule qui dépense son argent, et celui de son père, en fêtes et beuveries.

Il précise immédiatement la provenance de la douille ramassée par l’inspecteur, un 7,63 tiré par un pistolet Mauser légalement introuvable en France. Devant l’étonnement de l’inspecteur, il explique que non seulement il est adepte de la Saint-Hubert, qu’il est champion de tir et qu’à la guerre il n’a jamais loupé sa cible.

Raoul est écarté provisoirement de la liste des suspects, il faut donc aller voir ailleurs. Puis le jeune homme se rend chez Paillot, rencontrer Lily, la fille du courtier. Ils se connaissent bien, étant presque fiancés. Mais Lily se plaint que le jeune homme la délaisse. Pour l’heure il a d’autres chats à fouetter, car il veut lui aussi enquêter sur ce meurtre.

Il sait que son père avait engagé des tractations pour acquérir un terrain en Afrique qui recèle un gisement important de gemmes précieuses. Mais d’autres personnes, des diamantaires étrangers, sont eux aussi intéressés. La carte de l’emplacement de ce terrain a été dérobée. Mais une carte factice, ne comportant aucun nom, un calque.

C’est grâce à un planisphère collé sur un mur de l’appartement que sera dévoilé l’endroit du gisement. Une carte aux trésors, en quelque sorte.

 

Agréable à lire, ce court roman est simple dans sa conception, et l’intrigue est rondement menée. Toutefois, l’épilogue réserve quelques surprises, qu’il m’est difficile de préciser, sinon tout le charme du roman serait évaporé. Disons que l’histoire ne se termine pas dans la joie et la bonne humeur.

René Poupon fut l’un des plus importants prosateurs des éditions Ferenczi, livrant de nombreux fascicules et petits romans sous divers pseudonymes : Pierre Chatel, R. Pol Dry, René Paul Noêl, René Paul Poupon, R. René Poupon, Léopold Remon, Louis Remon, Eric Ruthless.

Voir ci-dessous un portrait de l’auteur.

René POUPON : L’assassinat de M. Magre. Collection Mon Roman Policier illustré N°80. Editions J. Ferenczi et fils. Parution 3e trimestre 1948. 32 pages.

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28 octobre 2020 3 28 /10 /octobre /2020 04:30

La taupe est myope, c’est bien connu, mais elle a l’ouïe fine…

Marie WILHELM : Brive la galère.

Apparemment, Kadir se livrait à un travail tranquille. Balancer à la flotte un cadavre. Seulement, une joggeuse qui se reposait des efforts fournis en s’appuyant sur le parapet du pont qui enjambe la Vienne l’a aperçu.

Un témoin placé au mauvais moment et au mauvais endroit, cela ne manque pas, et souvent cela ne prête guère à conséquence, sauf que dans ce cas précis, Juliette, l’adepte de la course à pied, est un témoin gênant que Kadir se promet d’éliminer. Alors il commence à la poursuivre et elle se réfugie au commissariat de Limoges afin d’établir sa déposition. Elle a vu ce qu’il ne fallait pas voir, et il lui faut moucharder.

Seulement le policier siégeant à la réception a pour principe d’enregistrer les dépositions dans l’ordre, et elle est obligée de faire la queue (c’est une image) comme tout le monde. Elle en a marre, elle veut passer la première, commence à expliquer au policier ce qui l’amène, en vain. Elle doit attendre sont tour. Alors, elle s’énerve et part. Tant pis pour le cadavre.

Seulement, Kadir n’a qu’une obsession, la retrouver afin de lui régler son compte. Alors il prévient son commanditaire qui lui intime de réussir cette mission, sinon, il sera lui-même un cadavre dans peu de temps. Son interlocuteur, déjà informé, le lecteur ne sait qui il est mais il connait au moins celui qui l’a renseigné.

Savigny vient d’être nommé commissaire-divisionnaire, et muté à Limoges sur les terres de sa femme Béatrice récemment décédé. Il est veuf avec deux enfants, vient d’emménager dans un appartement en compagnie de Nicole, celle qui lui a servi de secrétaire et est maintenant en retraite. Elle s’occupe uniquement des enfants, n’allez pas chercher autre chose. Alors qu’il pensait que le Limousin était une région calme, Savigny se retrouve avec un cadavre sur les bras, cadavre qui a été découvert coincé contre une pile d’un pont. La cause de ce décès est à déterminer mais il est rapidement démontré qu’il s’agit d’un cas de surdose.

Juliette confie à son amie Jeanne, étudiante à l’université comme elle, et à son ami Eric, ses démêlés. Mais Kadir n’est pas loin de même qu’une religieuse Irlandaise, Sœur Berthaid, qui entend la conversation des deux femmes. Jeanne propose à Juliette de se rendre à Brive chez sa sœur Lara qui pourra l’héberger, et de faire sa déposition au commissariat corrézien. Ce que Juliette accepte volontiers.

Sœur Berthaid, une forte femme énergique, un peu curieuse et altruiste, va se mêler de ce qui ne la regarde pas, pour le plus grand bien des principaux protagonistes et de Savigny qui trouve en elle une aide inopinée. Une héroïne dans une vilaine affaire de cocaïne !

L’enquête se déroule entre Limoges et Brive, et inversement, et de nouveaux protagonistes, des bons, des moins bons et des franchement mauvais, s’infiltrent dans cette histoire régionale aux prolongements inattendus.

 

Le lecteur s’attache aux pas de Juliette et de ses alliés de circonstance, ainsi qu’à ceux de Savigny et ses fidèles adjoints, Berkane et Constantin, qui bientôt font cause commune. Si Juliette en est ligne de mire des tueurs lancés à sa poursuite, elle n’est pas la seule dans le viseur des tueurs. Et le corps de Savigny s’en rappelle encore. Le commissaire se demande bien comment il se fait que les tueurs, et plus précisément leur chef, soit au courant de ses recherches, de ses avancées, et qu’il anticipe les événements.

Entre comédie policière et roman noir, l’intrigue oscille selon les circonstances et les divers personnages présents. Savigny se moque parfois des procédures, ce qui lui attire des reproches plus ou moins masqués (c’est de circonstance) de la part de Berkane notamment, et son veuvage lui pèse. Ce qui ne l’empêche pas d’apprécier la joliesse et le charme de certaines femmes.

Quant à Sœur Berthaid, c’est un cas pas raté. Après avoir été championne de karaté en Irlande, elle est entrée dans les ordres, et si elle se trouve en France, dans une communauté religieuse, c’est théoriquement pour prendre un peu de vacances. C’est une femme active, genre tornade, et elle me fait un peu penser à Imogène McCarthery, l’héroïne de Charles Exbrayat.

Un roman plaisant à lire, humoristique à certains moments, et aux scènes d’action tourbillonnantes et frappantes, qui cache avec subtilité le principal coupable. Sauf pour le lecteur perspicace qui saura mettre un nom, sans apporter de preuves concrètes à ses déductions. Et l’auteur nous épargne les scènes de drogues et de quelle manière ceux qui en sont la proie se les injectent. Ce genre de description est superfétatoire et n’apporte rien de plus aux récits, sauf à faire du remplissage.

Marie WILHELM : Brive la galère. Collection Du Noir au Sud N°101. Editions Cairn. Parution le 8 octobre 2020. 246 pages. 10,0€.

ISBN : 978-2350685670

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20 octobre 2020 2 20 /10 /octobre /2020 03:24

Les fonctionnaires sont comme les livres d'une bibliothèque: ce sont les plus haut placés qui servent le moins.

Georges Clémenceau.

Léo GESTELYS : Nuit d’épouvante.

Tu peux aller te rhabiller déclare René Fortier à sa jeune modèle qui peut également quitter la pose. Fortier est un jeune sculpteur installé dans une petite impasse du 14e arrondissement parisien, une cité dédiée aux artistes.

Liette, diminutif de Juliette, est secrètement amoureuse du sculpteur qui lui ne pense qu’à Gemma Ricardo, danseuse étoile. Il envisage même de l’emmener en voyage, son oncle de province lui ayant envoyé la coquette somme de dix mille francs accompagnée d’une mercuriale. Il s’est empressé d’empocher l’argent, mais n’a pas lu la missive.

Puis il se rend dans un restaurant fréquenté par quelques amis et confrères, et vers minuit rentre chez lui, insouciant. A l’entrée de la ruelle, il aperçoit une forme ramassée sur un banc. Il l’interpelle, lui pose la main sur l’épaule. L’individu chavire. Il est mort, probablement de froid. Alors René Fortier se dirige immédiatement vers une borne d’urgence et contacte la police du quartier.

Son devoir accompli, il rentre chez lui, et est fort étonné que la lumière dans sa chambre soit allumée. C’est pour découvrir Liette allongée dans son lit et endormie. Pour l’éternité. Il se prend les pieds dans un vêtement et se rend compte qu’il s’agit du manteau de Liette. Le col d’hermine est taché de sang. Alors il demande à son ami Axel, un peintre norvégien qui vit dans un pavillon voisin, de prévenir la police.

Bientôt le commissaire spécial, les hommes de l’identité judiciaire, le procureur de la république, le juge d’instruction, sont sur place et pour tous, il est indéniable que Fortier est le coupable tout désigné. D’autant que le cadavre sur le banc n’est autre que l’oncle du sculpteur qui avait annoncé son arrivée dans la capitale. Leur conviction est faite. Sauf pour le jeune inspecteur Larsac qui sent que l’affaire n’est pas si simple, à cause d’un simple bout de papier traînant sous un rideau, papier que personne n’avait remarqué, sauf lui.

 

Il suffit de peu de chose pour accuser sans preuve, juste sur de simples présomptions et des déductions hâtives. Seul, ce simple représentant des forces de l’ordre émargeant dans le bas de l’échelle de la fonction publique et policière s’obstine, pensant à raison que Fortier, coupable désigné, est la victime d’une embrouille. Ce qui justifie la citation placée en exergue de ma chronique.

Une intrigue simple, comme il y en avait beaucoup dans ces petits fascicules de 32 pages, l’auteur ne pouvant extrapoler à l’infini. Et souvent, ces histoires ne se terminent pas dans la joie et la bonne humeur. Le protagoniste principal ressentant un goût amer pour s’être montré négligent et imprévoyant.

Léo GESTELYS : Nuit d’épouvante. Collection Mon Roman Policier N°17. Editions J. Ferenczi et Fils. Parution 1er trimestre 1946. 32 pages.

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