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1 octobre 2019 2 01 /10 /octobre /2019 04:01

Sous l’intrigue se cache un humanisme qui n’est pas de façade…

Sandra SCOPPETTONE : De peur et de larmes.

Etre shérif n’est pas une sinécure mais lorsque c’est une femme qui en assume la charge, cela lui pèse sur les épaules.

Pourtant ce ne sont pas les difficultés qu’elle pourrait rencontrer auprès de ses administrés, le travail de policier surchargé de travail, qui la démotive. Au contraire. Elle craint de s’enliser dans une routine, ce qui n’est pas son tempérament.

C’est pourquoi Lucia a décidé de ne pas renouveler son mandat, pourtant il lui faut assurer jusqu’au bout ce qu’elle considère comme un sacerdoce. Un événement bouleverse cette routine dans laquelle elle s’englue.

Julie Boyer, une gamine du coin, disparaît. Une fugue ? Une hypothèse vite démentie par la découverte du cadavre, atrocement mutilé, de l’adolescente. Et ce n’est que la première représentation d’une macabre série.

Ce fait divers remue les trippes de la shérif. Elle même a perdu quelques années auparavant sa fille, noyée dans un puits.

Entre Lucia et son adjoint, le Lieutenant Jack Fincham, se tissent des liens sentimentaux qu’ils n’osent s’avouer. Le travail avant tout. Le travail et l’apparition impromptue d’un personnage dont Lucia se serait bien passée.

Mike Mc Quigg, enquêteur du FBI, est affecté sur cette affaire. Ce n’est pas tant son appartenance à cette police fédérale qui enquiquine Lucia que leurs relations précédentes. Mc Quigg n’est autre que l’ancien mari de Lucia.

 

L’épilogue convenu et la découverte du meurtrier s’imposent peu à peu au lecteur qui ne s’en laisse pas conter.

Pourtant Sandra Scoppettone parvient à rendre cette histoire non seulement crédible mais qui plus est émouvante. Peut-être à cause de l’enfant omniprésent, des relations adultes-adolescents, maris et femmes, couples en devenir.

Sous l’intrigue se cache un humanisme qui n’est pas de façade. Peut-être le meilleur roman de Sandra Scoppettone jusqu’à ce jour parce qu’il se démarque de sa production habituelle et de son personnage récurrent de Lauren Laurano.

 

Réédition Pocket 4 avril 2005.

Réédition Pocket 4 avril 2005.

Sandra SCOPPETTONE : De peur et de larmes. Collection les Noirs, Moyen Format. Editions Fleuve Noir. Parution 12 juin 2003. 296 pages.

Réédition Pocket 4 avril 2005.

ISBN : 978-2265075092

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28 septembre 2019 6 28 /09 /septembre /2019 03:59

Et les feuilles mortes se ramassent à la pelle, comme les cadavres…

Alexis AUBENQUE : Un automne à River Falls

A trente cinq ans, le déjà célèbre et brillant avocat Robert Gordon, philanthrope à ses heures, était promis à un bel avenir. Etait, car Samantha, sa jeune maîtresse, le découvre électrocuté dans sa salle de bain. Quelle idée aussi de se baigner seul dans une baignoire immense, un sèche-cheveux non loin.

Pour Mike Logan, le shérif de River Falls, la semaine commence mal, et il sent que les ennuis vont s’accumuler sur sa tête. Il se rend en compagnie de Portnoy, un de ses sergents, immédiatement dans les beaux quartiers de la ville où est située la demeure de feu l’avocat. Samantha ne peut guère lui fournir de précisions. Elle dormait et n’a rien entendu.

Il prévient aussitôt l’équipe du FBI de Seattle, dont il a fait partie quelques temps auparavant. Blake, le légiste, et ses deux comparses, Moore et Freeman, sitôt arrivés se mettent à relever des indices éventuels. Le corps embarqué à la morgue parle. Enfin, je veux dire que Blake se rend compte que l’homme a été chloroformé dans son sommeil, de même que Samantha d’ailleurs, ce qui explique son réveil tardif et profond.

Mais près du corps de Gordon, repose à la morgue celui d’un clochard, qui apparemment a subi des sévices. Il a été retrouvé sur les berges de la rivière, mais il n’est pas mort noyé. De nombreuses traces de coups sont relevées ainsi que des lésions internes, comme si son agresseur s’était acharné dessus. Un appel téléphonique anonyme précise que le cadavre a été balancé du haut du pont.

Le fondé de pouvoir de Gordon, notaire, se présente chez celui-ci et sans demander l’autorisation des policiers, ouvre le coffre-fort de l’avocat, y prélève un dossier bleu, laissant à l’intérieur une grosse somme d’argent, et prétend partir comme il est venu. Une façon de procédé qui ne plait guère à Mike Logan, qui arrête le nommé Hilton, et le défère en geôle. Au grand dam du maire qui n’apprécie pas les initiatives de Logan, mais il se pourrait que ce dossier recèle des pièces compromettantes, car aussi bien Hilton que Gordon investissaient beaucoup dans l’immobilier.

Un avocat influent parvient à faire libérer Gordon seulement le dossier bleu a disparu. Ce qui ne semble pas affecter Hilton. Si Gordon ne sait pas comment ce dossier s’est envolé dans la nature, le lecteur lui est au courant. En effet, Spike, un ancien policier mis sur la touche, exerce un chantage sur un vieil agent qui subtilise les documents et les lui remet. Jessica Hurley a bien reconnu dans la rue l’ex-policier véreux en compagnie d’un vieil homme mais ce n’est qu’après qu’elle relie cet épisode. Le vieux policier se suicide lorsque Logan et ses hommes investissent son appartement.

Leslie Callwin, la journaliste qui est partie à Seattle et tente de se faire une place au soleil, enquête, et comme elle est amie avec Jessica Hurley, elle parvient à lui soutirer des informations. Jessica obtient l’enquête sur le meurtre du clochard et en compagnie du lieutenant Blanchett, Tania de son prénom, se rend sur les lieux du drame. Elles repèrent un individu qui les surveille, mais il sera un peu plus tard arraisonné. Et il faudra beaucoup de patience et de psychologie pour qu’il narre ce qu’il a vu.

Jessica, qui est en congé sabbatique, ressent le besoin de reprendre ses fonctions de profileuse au sein du FBI de Seattle, la présence de ses collègues influant pour beaucoup dans son envie et sa décision. Ce qui n’a l’heur de plaire à Mike Logan, mais après tout ils vivent ensemble mais ne sont pas mariés.

Pendant ce temps, nous suivons les aventures et mésaventures de Kyle et Stuart, deux faux jumeaux qui viennent d’entrer à l’Université de River Falls. Le problème de Stuart est qu’il est en surcharge pondérale, et il se désole de ne pas attirer les filles. Enfin, il se fait une raison en lisant des Comics. Kyle est d’une toute autre constitution physique, et sa réputation d’excellent receveur au football à Seattle l’a précédé. Kyle et Stuart intègrent les Fraternités Alpha et Delta, à leur plus grand plaisir après avoir subi un bizutage en règle dégradant. Stuart a la chance d’être remarqué par Judith, la plus belle fille de l’université, alors que des condisciples chatouillent son orgueil et sa corpulence. Tandis que la belle Cheryl s’entiche de Kyle.

 

Mais que viennent faire ces adolescents dans cette histoire, et pourquoi Judith se dresse devant les étudiants pour sauver la mise à Stuart ? Quel point de jonction réunit ces deux affaires, le meurtre de Gordon, bientôt suivit d’un autre assassinat, et de celui du clochard et la découverte d’un jeune homme qui a des difficultés d’élocution. C’est ce que nous saurons en lisant la suite de ce roman qui reprend bon nombre de personnages du précédent épisode : 7 jours à River Falls.

Ce roman est agencé un peu comme un feuilleton télévisé, de Dallas à Plus belle la vie en passant par Santa Barbara. Des personnages apparaissent, dont on ne connait pas la signification première de leur intervention, disparaissent, pour revenir plus tard. Un fil conducteur qui laisse à penser qu’il y a deux ou trois romans en un.

Mais plus que les séries télévisées, ce roman est la continuation des feuilletons des XIXe et XXe siècles dont les principaux représentants littéraires se nomment Eugène Sue, Ponson du Terrail, Charles Mérouvel, Pierre Decourcelle ou encore Marcel Priolet. Des auteurs parfois méprisés par des critiques, qui eux-mêmes étaient des littérateurs probablement jaloux, car ils connurent non seulement le succès mais enchantèrent des millions de lecteurs par la force de leurs écrits. Des romans qui ne se contentaient pas d’une simple intrigue mais jetaient un regard parfois acerbe sur la société bourgeoise qui se comportait en délinquants, bafouant sans vergogne les petites gens du peuple.

Alexis Aubenque possède l’art de promener le lecteur à sa guise, empruntant des chemins détournés, le conduisant par la main, ou les yeux en une sorte de rallye avec bon nombre de fausses pistes, d’éléments placés comme des embûches, des digressions qui semblent incongrues mais qui pourtant possèdent leur charme et leur intérêt.

Des beaux quartiers de River Falls jusque dans les endroits glauques et les bars mal famés de la cité, en passant par la forêt et les anciennes scieries et les pavillons de l’université, on passe par tous les étages de la société, côtoyant les bourgeois et leur progéniture souvent détestable, et les rejetés de la société vivant de rapines et de braconnages mais pour qui le mot entraide possède un sens humaniste.

 

Ce livre a reçu le Prix POLAR 2009 lors du 14e Salon POLAR & CO de Cognac (16/10/2009)

Première édition : Calmann-Lévy. Parution le 3 juin 2009. 462 pages.

Première édition : Calmann-Lévy. Parution le 3 juin 2009. 462 pages.

On ne juge jamais un livre à sa couverture.

La police existait avant tout pour aider les faibles, croyait-il.

Il n’avait rien à proprement parler contre les puissants de ce monde, cependant il ne pouvait s’empêcher de penser que l’on n’arrivait jamais au sommet sans avoir magouillé à un moment ou à un autre.

Alexis AUBENQUE : Un automne à River Falls (Saison 1. Tome 2). Collection Thriller. Editions Bragelonne. Parution 12 juin 2019. 528 pages. 7,90€.

ISBN : 979-1028107703

Première édition : Calmann-Lévy. Parution le 3 juin 2009. 462 pages.

Réédition : France Loisirs. Juillet 2010. 560 pages.

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25 septembre 2019 3 25 /09 /septembre /2019 04:37

Elle est à cheval sur les principes…

Georges BAYARD : Cécile prend le mors aux dents.

En stage d’équitation chez le maître de manège Max Lonzac, Cécile et ses amies Juliette dite Juju et Laure, ainsi qu’avec sa grand-mère Herminie, se familiarisent avec les équidés durant les vacances. Des chevaux dociles leurs sont réservés, mais Lonzac en possède d’autres qui participent à des concours de sauts.

Les séances, ou reprises, se font le matin et l’après-midi, dans une bonne ambiance. Seule Laure ne participe pas, préférant s’occuper du standard. Elle est gourmande, manchonnant sans cesse des bonbons, ce qui lui occasionne une surcharge pondérale préjudiciable.

Si Cécile a été amenée à effectuer ce stage, c’est grâce à Herminie qui, ancienne enseignante, avait gardé d’excellentes relations avec bon nombre de ses élèves, dont Geneviève la sœur de Max Lonzac.

Lors d’une reprise, au cours de laquelle participent d’autres élèves, dont monsieur Daronval, un notable de la ville voisine, Cécile est quelque peu intriguée par deux spectateurs qui se tiennent dans les tribunes en compagnies de mères de stagiaires. Un jeune garçon aux cheveux longs et bruns, qui auparavant portait une casquette en sortant de la sellerie. Et surtout Jef Sicar, le conseiller technique d’un autre manège, le club hippique Centaurus situé à l’autre extrémité de la ville. Suite à un accident, Jef Sicar ne peut plus monter à cheval, ce qui ne l’empêche nullement de prodiguer ses conseils.

Cette reprise est assez particulière car un incident rare se produit. Herminie est éjectée de son cheval. La selle avait été mal sanglée selon les premières estimations. Mais Cécile, en examinant la courroie, s’aperçoit qu’il s’agit d’un sabotage. Herminie s’en sort avec une clavicule en vrac, et son stage se termine bêtement. Et par un fait exprès, ou n’est-ce qu’une coïncidence, un agent immobilier signale à Lonzac qu’un acheteur potentiel est prêt à acquérir L’étrier d’argent, son manège dont il n’est possesseur que depuis trois mois. Il est vrai que l’emplacement du manège est intéressant pour un promoteur, mais quand même il ne faut pas abuser de la situation. Et le journaliste localier s’enquiert de cet accident malheureux, ce qui met encore plus en colère Lonzac.

Mais les incidents provoqués sciemment se répètent. Un inconnu se réclamant des Compagnons de l’Avenir, un groupuscule inconnu, lui ordonne de « renvoyer ses bougnoules dans leur pays ». Insistant sur le fait qu’il y a assez de chômeurs en France pour ne pas employer des étrangers, des Algériens qui plus est.

En effet, Lonzac possède à son service un couple d’Algériens et leur fils de quinze ans. Auparavant ils travaillaient pour son concurrent, mais étaient payés au compte-gouttes. Tandis que Lonzac les rétribuent selon les tarifs en vigueur, et leur a promis de régulariser leur situation en effectuant une demande de papiers.

Les événements s’enchaînent et Cécile se réveille une nuit, incommodée par la fumée. Elle et ses amies dorment au dessus d’une grange, et celle-ci est en feu. Elles parviennent à s’extirper des flammes sans dommage mais pendant ce temps Gerda, le cheval de Lonzac avec lequel il devait participer à un concours d’équitation dans le but de se qualifier pour les Jeux Olympiques, a disparu. Les gendarmes sont prévenus mais Cécile et ses amies enquêtent de leur côté, bientôt aidées par un jeune cyclomotoriste qu’elles ont sorti d’un buisson épineux dans lequel il s’était empêtré à cause d’une chute malencontreuse.

 

Ce ne pourrait être qu’un aimable roman pour adolescents, avec le thème porteur du cheval et du monde de l’équitation. Mais le passage sur l’intimidation effectuée par un inconnu à l’encontre de trois pauvres réfugiés algériens, dont le travail donne toute satisfaction à l’écuyer, n’est pas innocent. Et cette déclaration est répétée deux ou trois fois, mais ne se décline que sur quelques paragraphes. Priorité à l’intrigue, mais le message est énoncé clairement.

Pour autant Lonzac ne croit guère à cette menace. Il sent que derrière cet effet d’annonce, c’est son manège qui est en jeu, et surtout le rachat par une tierce personne. Il gêne.

Ce roman date, déjà, de 1984. L’on se rend compte de l’engagement social de l’auteur, mais dans le même temps, que depuis, non seulement rien n’a changé, mais que cela a empiré.

Un message destiné aux jeunes, et peut-être aux adultes qui suivaient depuis des années l’autre série de Georges Bayard, Michel, mais comme souvent, ce ne fut qu’un coup d’épée dans l’eau. Pourtant, et peut-être peu le savent, Georges Bayard fut enseignant et je suppose que dans ses classes, la morale n’était pas aux abonnés absents et qu’il luttait contre le racisme et la ségrégation raciale.

Georges BAYARD : Cécile prend le mors aux dents. Bibliothèque Verte. Editions Hachette. Parution octobre 1984. 160 pages.

ISBN : 9782010102523

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24 septembre 2019 2 24 /09 /septembre /2019 04:10

D’accord, mais par qui ?

René ERBE : Le crime est signé.

Depuis leur création, les Galeries Rivoli n’ont pas changé leur politique commerciale. Seulement, au risque de déplaire à leur clientèle, âgée le plus souvent, le conseil d’administration se résout à accepter et mettre en œuvre les propositions Raoul Déchaux, le conseil en publicité.

Chassagny, l’administrateur délégué depuis 1888, soit plus de trente ans d’exercice, se soumet, non sans rechigner, à remplacer le gaz par l’électricité, à installer des ascenseurs, des machines à calculer. A adopter le modernisme dont se sont déjà inspirés ses concurrents. Car la courbe des ventes dégringole dangereusement, et si un sursaut n’est pas envisagé, c’est la fin des Galeries Rivoli.

Dessinateur en publicité, Alain Ménard est reçu par Charmont, le chef de la publicité des Galeries Rivoli, un ami intime. Ils discutent de l’innovation sensationnelle qui devrait redonner du lustre à ce grand magasin. Une collection d’été, quatre-vingts modèles présentés par les plus élégants mannequins de Paris, dans une ambiance musicale sous le patronage d’un orchestre de jazz dirigé par Fred Sparton, est organisée. Une salle de spectacle a été édifiée à l’intérieur du hall central, avec un immense écran blanc dressé pour la projection des décors, une passerelle suspendue permettant aux mannequins de défiler en sortant des pièces aménagées. Le début de la représentation est imminent.

Un premier incident se produit lorsque les clichés qui devaient être projetés sont retrouvés brisés. Soudain, l’assistant de Charmont leur apprend qu’un meurtre perpétré dans la cabine des mannequins vient d’être découvert. C’était la pause, et seule Raymonde Rouleau ne s’était pas jointe à ses collègues pour se rafraîchir durant l’entracte. Ils croisent Michel de Lapelle, le directeur général, tandis que Mareuil, le chef de la police privée du magasin, les rejoint. Raymonde est affalée sur sa table de maquillage, qui sert aussi de table de démaquillage, un poignard dans le dos. Dans la pièce attenante, la chef habilleuse qui reprise une robe légèrement déchirée, et la femme de ménage, chargée de nettoyer entre les deux représentations, n’ont rien vu. Elles ont juste entendu un petit cri, puis un bruit sourd et une sorte de roulement. C’est la technicienne de surface, qui n’était pas ainsi dénommée à l’époque, qui a découvert le corps.

Alain Ménard est intrigué, et se sent pousser une vocation de détective. D’ailleurs il a l’intention d’ouvrir une agence, mais pour cela il lui faut trouver assez d’argent pour réaliser son entreprise. Quelques soupçons se portent sur Lapelle, qu’il a croisé, mais également sur Fred Sparton, le chef d’orchestre, qui avait rendu visite à Raymonde peu avant. Ils étaient fiancés mais ils ne s’aimaient pas. Pas assez pour se marier, du moins c’est se qui ressort de l’entretien qu’Alain Ménard et son ami Charmont ont avec lui, en compagnie du commissaire de police arrivé sur les entrefaites. Un nouveau personnage s’immisce dans l’enquête, Louvel, l’un des plus anciens clients des Galeries Rivoli, qui durant des années fut détective privé d’une banque importe en Extrême-Orient, et qui parfois aide Mareuil de ses judicieux conseils. Il s’est reconverti comme romancier de littérature policière.

 

Une enquête classique, avec de petits indices placés ça et là, surtout à l’attention de Ménard qui découvre une petite boule de poussière, un mouton, alors que le ménage venait d’être fait.

Mais ce qui ressort principalement de ce roman, ce sont les antagonismes entre anciens et modernes dans la conception de la vente et de l’agencement des magasins.

Pour ne pas avoir voulu évoluer, le responsable des Galeries Rivoli (une enseigne qui ne manquera pas de raviver des souvenirs) se trouve confronté au dilemme d’une régression des ventes. Et lorsqu’il envisage des transformations, c’est le conseil d’administration et les anciens clients qui poussent les hauts cris.

Même si l’on ne peut admettre le modernisme à tout prix, il faut bien avouer que des transformations sont parfois nécessaires, ne serait-ce que pour appâter le chaland.

 

Les habitudes font partie des choses que les gens défendent avec le plus d’âpreté et d’est légitime, répondit en souriant monsieur Louvel. A partir d’un certain âge, on ne conçoit même plus la possibilité d’en changer. Ce qui explique l’obstination farouche que mettent certains vieillards à ne rien modifier aux détails souvent les plus futiles de leur existence.

 

La technique du roman policier demeure toujours identique à elle-même : recommencer l’histoire à l’envers en essayant de camoufler l’assassin.

René ERBE : Le crime est signé. Collection du Dragon vert. Editions Littéraires et Artistiques. Parution 1945. 48 Pages.

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23 septembre 2019 1 23 /09 /septembre /2019 04:45

Une plongée dans le Londres de Jack l’Eventreur…

René REOUVEN : Les grandes profondeurs.

En cette fin d’année 1918, les Londoniens sont en liesse. Ils fêtent la défaite de l’Allemagne, brûlant l’effigie de l’Empereur Guillaume II. Les rues sont encombrées et le véhicule qui transporte Sir William Crooke, un célèbre et vieux savant physicien, a du mal à se frayer un passage jusqu’à un quartier déshérité de la capitale.

Il entre dans une bâtisse où un peu plus de trente ans auparavant il avait installé une sorte de laboratoire et récupère au premier étage, cachés sous le plancher, des carnets intimes.

Ce sont ces carnets qui nous sont proposés à la lecture et qui débutent le 2 septembre 1885 pour se terminer le 4 décembre 1888.

William Crooke, qui à l’époque n’avait pas encore été anobli, est persuadé qu’un quatrième état existe, l’état radiant, différent et complémentaire des états solide, liquide et gazeux. De plus il se pique d’occultisme et de spiritisme, une étude fort à la mode.

Pour cela il a aménagé dans un entrepôt du quartier de New Nicholl, un quartier dans lequel devaient être construits des logements sociaux mais qui est rapidement tombé dans l’abandon car les pauvres auxquels étaient destinés les bâtiments ne pouvaient se permettre de payer de tels loyers.

Il est déjà reconnu par ses pairs comme un excellent physicien, et est président de bon nombre d’associations et de sociétés scientifiques. Il possède à son actif de nombreuses inventions et découvertes mais il existe une fracture dans sa vie familiale. Son frère Crooky, le benjamin de la fratrie est décédé d’un accident de bateau. Et les liens avec son autre frère Walter se sont resserrés.

Or donc il installe des appareils complexes, dont un convecteur, un tube à vide et autres instruments dont il pense qu’ils vont lui permettre de capturer l’âme ou la présence de l’ectoplasme de Crooky.

Dans le même temps, il fréquente ou fait la connaissance des représentants majeurs de la littérature et de leurs œuvres, Henry James, Robert-Louis Stevenson, Oscar Wilde ou encore Guy de Maupassant. Le Horla de Maupassant et L’étrange cas du docteur Jekyll et de M. Hyde de Stevenson seront ses lectures. Sa femme Nelly le soutient dans son entreprise, même si elle reste à la maison et ne participe pas à ses recherches hors de la résidence familiale.

Il s’investit de plus en plus dans ses démarches et ses recherches et un jour une image fixée sur son convecteur l’interpelle, tandis que le tube à vide contient une légère lueur verte. Crooky lui apparait comme sur un écran, et il le voit enjamber la rambarde d’un navire. Son frère ne serait donc pas décédé accidentellement mais se serait suicidé.

Walter lui précise qu’en effet Crooky était malade, atteint de la vérole contractée par la fréquentation de prostituées, mais il ne connaissait pas les finalités de ce drame.

Entre temps dans Londres débute une période de terreur. Des prostituées sont attaquées et tuées par un garçon-boucher malade mentalement. Il est arrêté mais ceci n’est que le prélude à d’autres assassinats envers ces pourvoyeuses de plaisir et de maladies.

 

Le lecteur se doute à un certain moment, je ne précise pas quand volontairement, de l’identité du coupable, du meurtrier des prostituées. Mais ce n’est pas le plus important de cette histoire, même si elle fait partie intégrante de l’intrigue.

Ce sont les préparatifs puis la mise en œuvre de la part de Crooke de l’installation des appareils destinés à capter il ne sait pas trop quoi au départ. Ce sont grâce à des réminiscences et des parcelles de vérité, de la part de Walter notamment, mais également des différents échanges verbaux avec Oscar Wilde et Henry James, que les fuligineuses apparitions vont se concrétiser.

René Reouven est plus précisément passionné par la littérature et l’histoire du XIXe siècle ayant pour décor l’Angleterre sous le règne de la Reine Victoria, et il nous restitue avec précision cette période. La présence de nombreux littérateurs de l’époque offre cette part de véracité qui imprègne la plupart de ses romans consacrés à ce thème si souvent exploité mais qui recèle toujours une part d’ombre.

L’auteur aborde également l’un des thèmes récurrents en littérature, populaire ou autre, celui de l’affrontement, pour ne pas dire plus, entre rationalistes et occultistes. L’aspect scientifique des uns pour servir l’aspect spirite des autres.

Et c’est cette dualité qui mène l’intrigue, tout en puisant dans l’univers littéraire de l’époque, et la confrontation du Bien et du Mal personnifié par le roman de Stevenson, L’étrange cas du Docteur Jekyll et de M. Hyde.

 

Réédition : Présence du fantastique N° 38. Editions Denoël. Parution janvier 1995.

Réédition : Présence du fantastique N° 38. Editions Denoël. Parution janvier 1995.

Dans le volume Crimes apocryphes 2. Collection Lune d’Encre N°71. Editions Denoël. Octobre 2005.

Dans le volume Crimes apocryphes 2. Collection Lune d’Encre N°71. Editions Denoël. Octobre 2005.

René REOUVEN : Les grandes profondeurs. Collection Présences. Editions Denoël. Parution août 1991. 240 pages.

ISBN : 2-207-23893-8

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22 septembre 2019 7 22 /09 /septembre /2019 03:38

Dans les couloirs de la politique, il s’en passe de drôles de choses…

Fabrice LEUWEN : Meurtre en Balladurie.

Au cours d'une réception organisée en faveur de Jean Claude Barreau à l'occasion de la parution de son nouveau livre, le Ministre de l'Intérieur Charles Pasqua est pris d'un malaise après avoir ingurgité un verre de whisky. Il est transporté d'urgence au Val de grâce mais les médecins ne peuvent que constater son décès. Un bulletin laconique et officiel annonce un arrêt cardiaque.

Dans les sphères gouvernementales on pare au plus pressé. Le Premier Ministre Edouard Balladur nomme Nicolas Sarkozy en remplacement du Corse et Patrick Devedjian hérite du Budget. Un Groupe Armé des Musulmans de France revendique aussitôt le meurtre de Pasqua tandis qu'Action Directe informe qu'il est à l'origine de ce décès. L'autopsie révèle que Charles Pasqua a été victime d'une dose mortelle de poison.

Les deux premiers communiqués sont pris au sérieux mais les soupçons se portent également sur le Front National de Libération Corse. Une quatrième piste se dessine lorsque Jacques Chirac révèle que Pasqua lui avait écrit une lettre l'assurant de son soutien lors des prochaines élections présidentielles. Un règlement de compte politique est alors envisagé. Les Socialistes sentant la majorité s'entre-déchirer se réunissent, et élaborent une tactique devant leur permettre de gagner la bataille.

 

Dans ce roman purement fictionnesque, à l'épilogue un peu tiré par les cheveux quoique la fin reste ouverte à cause des allusions prononcées par les différents protagonistes, l'auteur, ou plutôt les auteurs qui se cachent sous le pseudonyme stendhalien de Fabrice Leuwen, nous plonge dans l'univers secret des rouages de la machine gouvernementale.

Crocs en jambe et sourires font bon ménage. Si Pasqua fait figure de personnage privilégié de par son décès prématuré et de l'encensement qui s'ensuit, personne, aussi bien journalistes que personnel politique, n'échappe aux coups de griffes de l'auteur.

Seul reproche que je formulerai, le manque d'humour dans un ouvrage qui, à moins que je me trompe, n'a été écrit que pour divertir le lecteur.

 

Fabrice LEUWEN : Meurtre en Balladurie. Collection Les lieux du crime. Editions Calmann-Lévy. Parution 8 janvier 1995. 216 pages.

ISBN : 9782702124000

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20 septembre 2019 5 20 /09 /septembre /2019 03:57

Il parait étrange que la naissance et la mort soient les seuls moments d'une existence dont on ne peut à priori garder aucun souvenir.

Pascal DESSAINT : Une pieuvre dans la tête.

Et entre ces deux extrêmes l'homme vit, aime, souffre, combat pour un idéal, rumine une vengeance, procrée, tremble ou simplement traverse les ans comme il franchirait les rails sans regarder devant ou derrière lui.

Le train de la vie le happe au détour, ne lui laisse aucune possibilité de recommencer, aucune échappatoire.

Toulouse est la proie d'un sinistre individu qui tue, dépèce, éventre, éparpille les membres de ses victimes aux quatre coins cardinaux, se réservant le cœur, comme le toréador se réserve les oreilles et la queue de l'animal qu'il vient de passer au fil de l'épée.

Le commissaire Viorel Desbarrats et l'inspecteur Hugues Méliorat se dépêtrent au milieu de cette enquête, chacun perdu dans ses propres problèmes familiaux. Viorel sent son couple se déliter sans qu'il sache vraiment pourquoi. Il aurait aimé ne pas avoir de descendance pourtant Sabine, son épouse, a enfanté d'un garçon. Le commissaire n'est pas poète, même plus amoureux et il envisage avec une nostalgie sereine de tromper sa femme. Méliorat possède sa croix en la personne d'un frère à peine sorti de l'adolescence, au passé déjà lourd et qui croit entretenir dans sa tête une pieuvre aux tentacules carnivores.

 

L'enquête n'aurait pu être qu'un prétexte à mettre en scène des personnages - des victimes de la vie ? - tout droit sortis d'un cerveau torturé.

Mais la trame en prenant ses racines dans la mythologie se révèle tout aussi alambiquée que ces héros au quotidien que Pascal Dessaint met en scène avec un plaisir pervers.

Pascal Dessaint allie modernité et classicisme dans une histoire qui implique le lecteur, lequel se retrouvera peut-être dans l'un des personnages.

Un livre qui comble une attente, oscillant entre philosophie et aventure. Le roman que tout auteur débutant voudrait écrire car il sort des sentiers battus. Pourtant il possède une touche particulière, celle de l'écrivain qui jette sur le papier, comme le peintre projette sur sa toile, ses affres de la vie, sa créativité, ses doutes et peut-être une part d'autobiographie.

Sous le Noir se cache l'humour, et si l'on peut regretter que l'inspecteur Méliorat n'ait pas un prénom commençant par A, on peut penser que l'épilogue du commissaire Desbarrats n'est qu'un bon... de sortie.

 

Première édition : Editions de l’Incertain. 1994.

Première édition : Editions de l’Incertain. 1994.

Pascal DESSAINT : Une pieuvre dans la tête. Collection Rivages noir N°363. Editions Rivages. Réimpression. Parution 18 septembre 2019. 240pages. 8,20€.

ISBN : 978-2743648558

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18 septembre 2019 3 18 /09 /septembre /2019 04:02

Le roman aussi m’allait, bien…

Jean NORMAND : Le couteau malais.

Un homme à la mer, aurait pu s’exclamer le marinier, s’il ne s’était pas trouvé près du Pont de Charenton. En effet, le brave homme qui vit sur la Seine depuis des années vient d’apercevoir un cadavre flottant entre deux eaux.

Il repêche le noyé qui après auscultation du médecin légiste s’avère avoir été tué d’un coup de couteau en plein cœur. Et pas n’importe quel couteau car il reste un débris de la lame dans la plaie, un petit morceau de bois. Nul doute qu’il s’agit là d’un reliquat d’un couteau malais fabriqué dans une essence très dure.

Comme le cadavre ne possède pas ses papiers sur lui (ce qui est une infraction en regard de la loi), la photo du défunt est publiée dans les journaux sur les judicieux conseils de l’inspecteur Mouret. Un cafetier de Chambry, en Seine et Marne, reconnait en l’homme un certain Maurice Froger, tandis que quelques heures plus tard c’est un bijoutier parisien, Rosendal, Hollandais de naissance, qui affirme que le noyé était un courtier en pierres précieuses du nom de Von Zollen, demeurant à Auteuil.

Après vérifications, les deux hommes ne font qu’un. L’inspecteur Mouret se rend aux bureaux de Von Zollen où il est accueilli par le caissier, un homme déjà assez âgé nommé Fageot. Le coffre contient un lot de perles acheté récemment par Van Zollen. Le policier découvre également des cartes-lettres adressées à Maurice Froger, à Chambry, et signées Soriana. Bizarre car cette Soriana est le nom d’une femme qui devait rencontrer le bijoutier à Chambry, d’après le cafetier. Et un expert affirme que les perles sont fausses !

 

Alors l'inspecteur Mouret décide de prendre le taureau par les cornes et de suivre Fageot à la sortie du bureau. L’homme remet discrètement un papier à une marchande de journaux, dont le visage à moitié caché par un voile noir usagé est le reflet de la boisson et de la misère. Changement de programme pour Mouret qui suit cette vieille femme lorsqu’elle emprunte le métro, puis s’engage dans des rues mal éclairées de la Porte de la Chapelle et entre dans un troquet. Mouret est obligé de s’attabler devant un pichet de piquette, attendant que cette marchande de journaux reprenne son parcours ou rencontre quelqu’un. A un certain moment, le gargotier indique en morse, tapant sur le comptoir avec des pièces de monnaie, qu’il n’y a aucun danger. Aussitôt la vieille femme sort mais dépité Mouret ne peut que constater son échec. Une voiture passe, la femme s’engouffre dedans et au revoir la compagnie.

Un peu plus tard, Mouret reçoit un message d’Amsterdam lui signifiant qu’un receleur de pierres précieuses doit arriver en France. Un nommé Daken, bien connu des services de police mais qui n’a jamais pu être confondu pour ses forfaits.

 

Si l’inspecteur Mouret est un policier, il se conduit tel un détective privé, n’hésitant pas à se grimer et à se déguiser afin de passer inaperçu auprès de ceux qu’il file.

Sur une trame un peu convenue, le vol de pierres précieuses, Jean Normand offre toutefois un épilogue intéressant dont l’origine remonte aux Îles de la Sonde.

Une intrigue simple, comme ne pouvaient qu’en écrire les romanciers de l’époque dans ces petits fascicules de 32 pages, mais assez riche en épisodes mouvementés et possédant un fond d’exotisme.

Jean Normand, de son véritable patronyme Raoul Antoni Lematte, est né à Cherbourg le 9 février 1885 et décédé à Corbeil le 28 juillet 1956. Il a écrit de nombreux romans relevant de la littérature populaire, romans d’aventures maritimes et exotiques le plus souvent pour les éditions Ferenczi. Il a également signé sous les pseudonymes de Fernand Petit et Francis Lienart.

Jean NORMAND : Le couteau malais.

Jean NORMAND : Le couteau malais. Editions CPE Police. Sans date. 32 pages.

Autre édition : Le couteau malais signé Fernand Petit. Collection Police Express N°6. Editions A.B.C. 1941.

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12 septembre 2019 4 12 /09 /septembre /2019 04:42

Trois fois porte-bonheur ou trois fois porte-malheur ?

Rodolphe BRINGER : Les trois 13.

Dans le car qui effectue la navette entre Taulignan et la petite gare de Chamaret, un seul voyageur qui semble dormir. Crin-crin, le chauffeur décide de le réveiller mais peine perdue. L’homme ne sortira pas de son sommeil, puisqu’il est mort, atteint d’une balle d’arme à feu qui s’est glissée jusque dans sa carotide.

Aussitôt Crin-Crin interpelle les trois hommes présents. Le chef de gare, Régis, son homme d’équipe, et le docteur Bégloud-Font, qui n’exerce pas sa profession étant assez riche pour vivre de ses rentes dans un château non loin. Il était venu afin de récupérer un paquet. Ils procèdent aux premières vérifications en attendant l’arrivée des gendarmes de Grignan. Mais le train de Nyons arrive en gare et les employés de la ligne ferroviaire doivent vaquer à leurs occupations premières.

Si l’individu qui git sur la banquette possède bien quelques babioles dans ses poches, dont un couteau d’origine indienne servant à prélever les scalps, ses papiers d’identité sont manquants.

Le parquet est immédiatement prévenu et les résultats de leur confrontation abondent dans le sens des gendarmes. Quelqu’un aurait tiré de l’extérieur, probablement lorsque le car avait emprunté une longue ligne droite dans les bois, parmi les truffières. Une fenêtre ouverte derrière l’homme, et le bruit de ferraille du car, empêchant le chauffeur de distinguer quoi que ce soit.

Alors que le Parquet déblatère, le juge, le substitut du procureur et son greffier, en compagnie du brigadier, un gendarme fait irruption annonçant le décès de monsieur Jéphe. C’est sa femme de ménage qui l’a découvert, étalé dans le couloir, un couteau planté dans le cœur. Ce monsieur Jéphe, installé dans la commune depuis quelques années, n’était guère causant mais toujours aimable avec les habitants.

Or selon l’hôtelier, l’inconnu du car s’était installé la veille dans une chambre de l’hôtel de Sévigné, avait rencontré monsieur Jéphe, puis était reparti. Il se nommerait, d’après le registre, Tom Wiking, et serait Américain. Voici un point d’éclairci. Mais il reste encore bien des zones d’ombre. Alors il est fait appel au commissaire Rosic, de la Police Judiciaire de Lyon.

Un début de piste se précise lorsque le commissaire Rosic, arrivé sur les entrefaites, est informé par le postier que le soir du drame du car, juste après la levée du courrier, monsieur Jéphe avait posté une lettre à un certain Lagodille à Paris.

Monsieur Jéphe avait une nièce mariée à un romancier célèbre œuvrant dans la littérature policière, Jean Méjean. Le couple est prévenu et comme de toute façon, Jean Méjean et sa femme devaient passer leurs vacances sur place, ils ne sont pas longtemps à arriver à Grignan. Or Jean Méjean décide d’enquêter sur l’assassinat de son oncle et tant qu’à faire sur celui de l’Américain.

Mais bientôt, au bout de quelques jours quand même, ne précipitons pas les événements, un nouvel assassinat est perpétré. Une légitime défense selon monsieur Bégloud-Font, car un individu qui tentait de s’introduire chez lui a été abattu par son valet, Melchior. L’indélicat personnage aurait tiré deux coups de feu envers Melchior qui a riposté, faisant mouche du premier coup. Pauvre Melchior, mutilé de guerre qui ne peut parler, la langue coupée par une balle qui n’était pas perdue lors de la Grande Guerre.

 

Qui du policier ou de l’écrivain parviendra à résoudre cette énigme ? S’engage entre les deux hommes une partie d’échecs, l’un possédant son expérience de policier, l’autre celui de romancier de littérature policière.

Je suppose M. Méjean, que vous venez m’apporter le concours de vos lumières, car nous travaillons, en somme dans la même partie, et nous sommes des façons de confrères.

Pourtant le romancier se défend de s’immiscer dans l’enquête, au départ, car par la suite il établira des déductions qui ne sont pas conformes avec celles du policier.

Non, certes, dans mes nombreux romans, j’ai mis en scène une ( !) assez grand nombre de policiers, tous évidemment géniaux. Mais si mes lecteurs s’y trompent, empêchés de réfléchir par l’entraînement d’un récit plus ou moins passionnant, moi, je ne puis me faire d’illusions, et je sais combien, en somme, ma tâche est facile et combien il m’est aisé de faire croire aux rarissimes qualités de mes détectives. Car, lorsque j’écris un roman, le crime dont il s’agit de dégager l’inconnu m’est connu dans les moindres détails, puisque c’est moi qui l’ai inventé, et dès lors, mon policier a toutes les facilités d’en déduire les phases, et tout mon talent consiste à l’empêcher de résoudre trop rapidement l’énigme posée.

Une profession de foi lucide, de la part du romancier qui ne peut être que l’auteur. Pourtant, un peu plus tard, il déclare à sa femme :

J’ai tellement débrouillé, en ma vie, des énigmes embrouillées dont j’avais, d’ailleurs, moi-même mélangé les fils, que je serais curieux de savoir si je serais à même d’élucider un problème dont je n’aurais pas moi-même posé les données !

 

Au cours de l’intrigue, Rodolphe Bringer revient plus ou moins longuement sur les antécédents de Jean Méjean, afin de mieux installer son personnage de romancier, et, vers la fin, le lecteur est tout aussi bien dans un roman policier que dans un roman d’aventures, car il faut se plonger dans le passé des différents protagonistes afin de connaître leurs motivations et expliquer le pourquoi du titre, qui au premier abord est assez énigmatique mais trouve son explication en fin de récit, une explication un peu tirée par les cheveux mais qui n’entache en rien la qualité de l’intrigue.

L’écriture est agréable, plaisante, et les dialogues sont souvent écrits comme s’il s’agissait de répliques de cinéma.

 

Roman posthume, à moins qu’il s’agisse d’une réédition non signalée, Les trois 13 s’inscrit à une époque de l’entre-deux guerre. Et le docteur de Grignan, s’appelle soit Barbier, soit Bernier, soit Cervier. Ce qui suppose une non-relecture de la part de Rodolphe Bringer.

 

Rodolphe BRINGER : Les trois 13. Roman policier. Editions Laclau. Parution 4e trimestre 1946. 158 pages.

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11 septembre 2019 3 11 /09 /septembre /2019 04:26

A deux, c’est mieux !

Francis DIDELOT : Le Club des Bis.

Être au mauvais endroit au mauvais moment, cela peut entraîner des désagréments, voire plus.

C’est ce que peuvent constater Jean-Marc et Jean-Pierre, surnommés Marco et Pétrus, les jumeaux de quatorze ans, qui passent leurs vacances sur l’île d’Oléron dans la villa familiale La Flibuste. Leur mère malade est restée à Paris pour se soigner, et leur père, architecte, est en voyage en Belgique.

Ce jour là, alors qu’ils se promènent à Saint-Trojan, ils aperçoivent une camionnette boueuse, arrêtée, moteur au ralenti. Soudain deux hommes les bras chargés de sacs déboulent d’une banque et s’engouffrent dans le véhicule, au volant duquel un individu les attend. Les jumeaux sont les témoins d’un hold-up et Jean-Pierre tente de se saisir de l’un des cambrioleurs. Mais un quatrième survient, armé d’une arme à feu, et Jean-Pierre est bousculé, happé, enlevé, engouffré dans la camionnette. Jean-Marc ne peut rien faire sauf demander à Jack, leur chien boxer de les suivre. Peine perdue.

Les témoins sont naturellement divergents dans leurs déclarations effectuées au policier arrivé sur place. Jean-Marc est fort marri et confie à leurs amies suédoises, Helga et Brigitta les jumelles de dix-sept ans, passant elles aussi leurs vacances sur l’île, ce qu’il vient de leur arriver. De même il raconte ce fait-divers à leurs autres amis, qui constituent la bande des Bis. Les Martinot, Maurice et André, dix-sept ans, et les Chasseneuil, Philippe et Gérard, douze ans, sont de caractère différent ainsi que d’aspect physique. Ce dernier point nous importe peu mais ce sont leurs réactions qui nous intéressent.

Jean-Marc ne veut pas prévenir la police de l’enlèvement de son frère Jean-Pierre, afin que ceci ne soit pas diffusé dans les journaux, ce qui pourrait être nuisible à la santé de leur mère. Il préfère rechercher l’endroit où est séquestré son frère Pétrus et le délivrer. Les Chasseneuil, de fougueux gamins, sont prêts à se jeter à l’aventure, tandis que les Martinot, plus réservés, plus réservés, peut-être plus réfléchis à cause de leur âge, préfèreraient que les policiers soient informés et participent aux recherches.

Un compromis est trouvé et Jean-Marc est persuadé que Pétrus parviendra à leur envoyer un message indiquant son lieu de détention. Et Jack, le boxer, n’est-il pas là lui aussi pour participer à cette chasse aux indices, à délivrer l’un de ses deux maîtres ?

 

Pendant ce temps, Jean-Pierre est enfermé et ligoté. Si ses membres sont liés, ses oreilles et ses yeux ne sont pas bouchés et il enregistre les conversations entre les ravisseurs. Il les baptise le Chef, Gros-Bébé, Quenelle et Hareng-saur, en référence à leur statut ou apparence physique. Il va jusqu’à leur conseiller de demander une rançon, son père étant très riche argue-t-il, car il cogite sa petite idée.

La bande des Bis parvient à localiser l’endroit où est retenu Pétrus, un moulin désaffecté, mais à cause d’un contretemps, si Jean-Pierre parvient à s’échapper, c’est Jean-Marc qui devient à son tour prisonnier. Entre temps Pétrus a réussi à fournir quelques éléments à son frère et les bandits ne font pas la différence entre les deux garçons qui ont échangés, malgré eux, leur rôle.

 

Francis Didelot, un romancier aguerri et reconnu dans l’écriture d’énigme pour adultes, avec des ouvrages mettant en scène entre autres le commissaire Bignon, n’a écrit que peu de romans pour les juvéniles, et sur le tard.

Et l’on sent bien que cette intrigue est fouillée, travaillée, avec de nombreux rebondissements, et il en faudrait peu pour que ceci soit adressé à des adultes. Comme il s’agit d’un roman destiné à de jeunes adolescents, point de violence, de cadavres inutiles, mais une véritable intrigue toute en suspense. Que ce soit dans le moulin, puis plus tard à bord d’un voilier, les actions sont complexes et nombreuses. Naturellement l’auteur joue sur la gémellité afin de perturber les cambrioleurs mais pas que.

Sur la psychologie des personnages également, Jean-Pierre puis Jean-Marc s’ingéniant à monter les uns contre les autres les voleurs afin de les déstabiliser. Le rôle de la police est réduit à la portion congrue, et encore, sauf dans l’épilogue presque prépondérant. Presque car tout le travail de sape et l’ingéniosité des jumeaux, quels qu’ils soient, est déterminant malgré les réticences primaires des jumeaux Martinot qui au fur et à mesure que l’histoire avance prennent de l’ampleur.

Ce sont les réactions des différents protagonistes qui donnent du corps à cette histoire qui ne connaitra pas de suite, comme les séries habituelles de cette collection, le Club des Cinq, le Clan des Sept, les Six compagnons, Michel, Alice et tous les autres qui vivent des aventures mémorables et ne vieillissent pas, ou peu.

 

Francis DIDELOT : Le Club des Bis. Collection Bibliothèque Verte N°258. Editions Hachette. Parution Septembre 1964. 252 pages.

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