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6 août 2020 4 06 /08 /août /2020 04:06

Un cavalier, qui surgit hors de la nuit
Court vers l'aventure au galop…

Michael GIBSON : L’auberge du loup blanc

Ce n’est pas une nuit à sortir à cheval, et pourtant, dans la lande qui garnit la route de la corniche, un homme file au galop, au risque de se précipiter du haut de la falaise dans l’océan qui mugit en bas.

Dans ce coin de la Cornouaille anglaise, est niché le petit village de Tregavenney, entre Helston et Penzance, habité principalement par des pêcheurs. Lesquels, le soir se rendent à l’auberge du Loup Blanc, tenue par John Mitchell, le propriétaire, sa femme et ses deux garçons, David et Paul. L’établissement est situé à environ cinq cents mètres de la plus proche maison, un lieu idéal pour qui veut être à l’abri des curieux.

Les deux garçons, âgés respectivement de seize et quatorze ans, se tiennent avec leurs parents près du feu, attendant l’heure proche d’aller se coucher. Soudain, le marteau de la porte retentit. Mitchell sort de la pièce et ils l’entendent parler mais il revient peu après disant qu’il s’agissait d’un voyageur égaré.

David et Paul, qui dorment à l’étage se posent de nombreuses questions, sans pouvoir y apporter le moindre début de réponse. Toutefois ils entendent leur père parler avec quelqu’un puis peu après un individu encapuchonné s’enfuit de l’auberge. Le lendemain matin, ils sont réveillés par des bruits dans la cour. Il s’agit d’un petit groupe de gendarmes avec à leur tête le sergent Bassett.

Il est à la recherche d’un criminel qui vient de s’évader et les deux frères sont fort étonnés d’apprendre que l’homme recherché n’est autre que Kit, leur oncle, le jeune frère de leur père. Il avait été accusé de vol par un seigneur des environs qui lui-même avait hérité des biens et du domaine de son frère, décédé dans des conditions litigieuses.

David et Paul sont persuadés, à raison, que l’inconnu de la veille n’est autre que Kit qui désirait trouver refuge à l’auberge ou tout au moins un endroit où se cacher. Ils entament donc leur enquête en fouillant dans les environs du village, se rendant dans la grotte d’un ermite avec lequel ils ont lié amitié.

La nuit un mystérieux cavalier parcourt la campagne, traînant derrière lui une boule de feu, ce qui ravive la légende qui règne depuis deux cents ans sur la contrée.

Un voyageur s’installe à l’auberge du Loup blanc, un personnage mystérieux nommé Lightfoot, d’une stature imposante le faisant ressembler à un tonneau sur pattes ce qui ne l’empêche pas de démontrer une agilité incroyable et une débauche d’énergie inconcevable aux yeux de des deux gamins. Il est trop souvent sur leur chemin, les obligeant à se méfier. N’est-il point à la recherche de Kit ?

 

David et Paul vont tout faire pour aider Kit afin d’échapper aux recherches de la maréchaussée, mais ils vont devoir affronter moult dangers. Et quand David semble jeter l’éponge, c’est Paul, son jeune frère qui prend la relève, l’invectivant et l’encourageant.

Et surtout ils se mettent en tête l’idée de démontrer que leur oncle est innocent de ce qui lui est reproché. Alors il faut découvrir le véritable coupable et résoudre l’énigme du décès soi-disant accidentel du seigneur du château d’Akin-Tor, sir Brandon Chase. Son frère Barney devenant l’héritier, mais dont le caractère est totalement opposé à celui de son aîné.

 

Ce roman d’aventures historiques, l’histoire se déroule dans les années 1830 en Cornouaille, est l’exemple même du livre pour enfant qui procure découverte et plaisir de lecture.

Il fait partie de ces ouvrages qui enflamment l’imagination, et l’on pourrait le mettre aux côtés des romans de Stevenson, de Walter Scott, et autres auteurs dont certains romans furent adaptés pour les adolescents.

Un personnage mystérieux qui s’installe dans l’auberge, des apparitions nocturnes qui confinent au fantastique, un ermite dont le rôle est mal défini au départ, des grottes qui renferment des secrets, tout concourt à entretenir le suspense. Et pour les plus jeunes, une aura d’angoisse provoquant le petit frisson qui oblige le lecteur à continuer sa lecture au lieu de l’abandonner pour quelques heures.

Michael GIBSON : L’auberge du loup blanc (traduction de Thérèse Lannes). Illustrations d’Henri Dimpre. Collection Rouge et Or Souveraine N°124. Editions G.P. Parution janvier 1958. 192 pages.

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21 juillet 2020 2 21 /07 /juillet /2020 03:53

L'amour, l'amour, l'amour
Dont on parle toujours
À l'amour, c'est un printemps craintif
Une lumière attendrie, ou souvent une ruine…

Mouloudji.

Alexandre DUMAS : Une aventure d’amour.

Si ses romans historiques et de cape et d’épée ont fait sa renommée, Alexandre Dumas se mettait volontiers en scène dans des courts et charmants romans ou contes et nouvelles.

Une aventure d’amour ne déroge pas à la règle et ce texte aurait pu être incorporé dans les Mémoires de Dumas ou dans les nombreuses Causeries qu’il affectionnait.

Un matin de l’automne 1856, Théodore, le valet de Dumas, introduit dans le salon où se tient le romancier et homme de théâtre une jeune visiteuse, Lilla Bulyowski. Elle se recommande d’un ami commun, Saphir, et n’a que vingt-trois ans. Elle est artiste dramatique et parle couramment quatre langues, l’anglais, l’allemand et le français, outre sa langue natale le hongrois. Tout de suite elle prévient Dumas qu’elle a un mari qu’elle aime et un fils qu’elle adore.

Elle désire découvrir Paris et Dumas lui sert volontiers de chaperon, l’emmenant au théâtre, lui présentant ses amis et dînant avec elle deux ou trois fois par semaine. Se noue une amitié amoureuse et lorsque Lilla annonce qu’elle doit partir pour Bruxelles, Dumas qui connait fort bien cette ville pour y avoir séjourné, lui propose de l’accompagner.

Ils partiront ensuite pour Spa, et Lilla se sent souffrante. Dumas qui se prétend doué de magnétisme, la soulage efficacement par l’apposition de ses mains, en tout bien tout honneur. Puis ils vont descendre le Rhin, de Coblence jusqu’à Mayence, et sur le navire ils font la connaissance d’une Viennoise avec laquelle ils sympathisent.

Dumas leur raconte alors une aventure amoureuse qui lui est arrivée alors qu’il était en Italie, en 1836, avec Maria D. qui est accompagnée de Ferdinand, fou amoureux d’elle. Ne pouvant en faire sa maîtresse, Ferdinand a demandé à Maria de l’épouser. Mais sur le spéronare qui les conduit de Naples jusqu’en Sicile, Dumas va faire connaissance intimement sous la tente située sur le pont avec Maria lors d’une bourrasque, alors que Ferdinand atteint du mal de mer se tient à l’autre bout de l’embarcation. Fin d’un épisode et Dumas ne reverra jamais Maria, pas plus que Lilla qu’il présente à Mme Schroeder, grande artiste allemande qui l'accueillera comme élève.

 

C’est ainsi que se termine cette histoire d’amour platonique avec Lilla mais dont Dumas garde un souvenir ému. Deux femmes qu’il ne reverra jamais mais au moins il n’y a aucun regret, les deux histoires se terminant brutalement mais sans heurt. Maria pourrait être la cantatrice Caroline Ungher lors de son voyage en Sicile.

 

Ce court roman, qui conte deux épisodes de la vie amoureuse de Dumas ne manque pas d’humour et le romancier s’attarde volontiers sur la description des paysages rhénans ou des prestations musicales dont Maria gratifie les marins et les deux voyageurs lors de la traversée, car avant la bourrasque c’état calme plat et le navire était encalminé.

A noter également que Dumas se complait aussi à évoquer la nourriture et la boisson lors de ses différentes étapes de Bruxelles à Mayence. Et il ne manque pas de citer son ami Gérard de Nerval.

Quant au valet Théodore, il est qualifié de sot, d’idiot. Mais un défaut que Dumas préfère à ceux de deux autres valets qui eux étaient fripons.

Au reste, l’idiotisme a un grand avantage sur la friponnerie : on voit toujours assez tôt que l’on a un domestique idiot ; on s’aperçoit toujours trop tard que l’on a un domestique fripon.

 

Vous pouvez télécharger ce texte, gratuitement et en toute légalité, en vous rendant sur le site de la Bibliothèque électronique du Québec :

Alexandre DUMAS : Une aventure d’amour. Première édition 1860. Réédition Editions d’Art Athos. Parution 1947. 128 pages.

Réédition numérique : La Bibliothèque électronique du Québec. Collection A tous les vents.

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16 juillet 2020 4 16 /07 /juillet /2020 03:05

Roman historique à consonance politique ?

Barbara CARTLAND : Contrebandier de l’amour

Considérée comme la grande prêtresse des romans d’amour, Barbara Cartland, victime de son succès auprès de pseudo-intellectuels probablement jaloux, ne possède pas à son actif que des romances, des livres à l’eau de rose pour Fleurs bleues. En effet sous des dehors très politiquement corrects, mettant en scène des jeunes filles issues de la très haute bourgeoisie et de l’aristocratie, souvent victorienne, ses romans sont nettement plus riches historiquement que présumés et moins sirupeux qu’il y paraît.

Dans Contrebandier de l’amour, l’action se déroule en 1809, alors que règne sur l’Europe Napoléon 1er, encensé par la plupart des Français qui voient en lui un conquérant. Mais pour les Britanniques, il n’est que Bonaparte, un dictateur étendant son emprise sur une grande partie de l’Europe. Ce qui amène à se poser la question sur bien des dictateurs, des hommes politiques influents, vénérés dans leur pays et haïs dans les royaumes ou républiques bordant leurs frontières. Et pour beaucoup le personnage honoré n’est qu’un vil usurpateur, selon du côté de la frontière où l’on se place.

Barbara Cartland ne va pas si loin dans son analyse de la situation politique à l’époque de George III, souverain britannique dont la démence était reconnue et qui fut supplée par son fils Georges IV, qui devint Prince-régent à partir de 1811. Il est donc normal, voire logique, que Barbara Cartland mette l’accent sur la royauté britannique au détriment de l’Impérialisme napoléonien.

 

Nouveau duc de Westcrate, grâce à un héritage inespéré et inattendu, Trydon Raven fuit son château un soir alors qu’il envisageait de se coucher. Une femme est déjà dans son lit, et il sait pertinemment que s’il avait le malheur de succomber, c’en est fait de son célibat et de sa liberté. Dans les coulisses, on veut à tout prix caser une fille afin de lorgner sur sa nouvelle richesse.

Raven ne l’entend pas de cette oreille, ni des deux d’ailleurs, et le voilà chevauchant son fier destrier dans la campagne du Sussex. Le brouillard règne et Raven se perd, se retrouvant près de la mer. Entendant des voix, il se rapproche et il est pris pour un autre par une douzaine de pêcheurs. Ne voulant pas de se dévoiler, il se retrouve à décharger des barils et autres objets de contrebande dans une grotte, sous la houlette d’une jeune femme énergique.

Raven n’est pas trop habitué aux travaux manuels, et inévitablement, il se blesse à une main. Cette femme chef de bande l’emmène dans une riche demeure, et le cache dans une petite pièce meublée avec goût. Il est soigné par une vieille dame qui maugrée, n’appréciant visiblement pas cette intrusion. Mais peu à peu, Nounou se déride et Georgia, la contrebandière, se dévoile un peu. Elle lui confie qu’elle est mariée, son époux étant en mer et dont elle n’a pas de nouvelles depuis leur mariage, mais elle se fait surtout du souci pour son frère Charles. Raven est intrigué par Georgia et son rôle de contrebandière.

Des invités arrivent à l’instigation de sa belle-mère, qui est devenue veuve, et aussitôt Georgia entraîne Raven dans une petite pièce, dite la pièce du prêtre, sous les combles. Il ne doit pas se faire voir, mais il est curieux. Il entend des voix, la marâtre de Georgia qui lui intime de passer une fois de plus la Manche et d’aller chercher un Français sur le Continent. Georgia est obligée de se conformer aux ordres. Une claque est assénée fortement en guise de conclusion. En descendant l’escalier, il aperçoit une petite trappe, et celle-ci poussée, il distingue une dizaine de personnages, des bambocheurs de la haute société et quelques femmes amenées là pour leur plaisir.

Il reconnait en la maîtresse de maison Caroline Standish, une de ses anciennes maîtresses justement, une femme à hommes et surtout une croqueuse de diamants, devenue Lady Grazebrook. Elle l’a mis sur la paille en exigeant des cadeaux couteux, mais depuis il est vacciné. Heureusement pour lui que cet héritage imprévu l’ait remis à flot. Il reconnait également un certain Ravenscroft, bien connu pour ses excès de débauche. Et il se demande, qui peut être cet homme en gris debout dans un coin de la pièce. Un personnage qui l’intrigue.

Georgia lui demande d’effectuer une nouvelle traversée du Channel, afin d’aller récupérer un homme et l’amener en Angleterre. Raven comprend qu’il s’agit d’un espion de l’Empereur qu’il doit convoyer. Il est bien décidé d’en comprendre les finalités et il accepte d’aider Georgia, toujours en dissimulant son identité. En réalité, il n’avoue pas qu’il est le duc de Westcrate, reprenant pour tous son ancien nom de Trydon Raven.

L’opération se déroule sans trop de dégâts, malgré les douaniers et les garde-côtes. Raven emmène Georgia à Londres afin de démêler cette affaire avec l’aide de son ami Pereguine Carrington, auquel il passe la consigne de se taire sur son statut de duc.

 

De nombreuses aventures attendent donc Trydon Raven, duc de Westcrate, devenu un peu le chaperon de Georgia, aussi bien au domaine des Quatre-vents, qu’à Londres et même en France sous les remparts de Calais.

Georgia est une jeune femme forte, énergique, et en même temps une femme fragile, obligée de se conduire en contrebandière pour aider son frère. Elle est dominée par sa belle-mère, une marâtre selon la dénomination de l’époque et qui n’avait pas le sens péjoratif d’aujourd’hui, qui exerce à son encontre, et surtout à celui de son frère, un chantage.

Naturellement, une histoire d’amour se greffe sur cette intrigue romanesque, mi-roman d’aventures, mi-roman historique.

Le Prince de Galles, qui ne régnera que peu de temps après, son père étant reconnu comme fou, étant la cible privilégiée de cet espion qui doit le tuer, sur les ordres de Bonaparte car il n’est jamais question de le nommer Napoléon. Le point de vue des Français et des Européens dans leur ensemble divergeant profondément. Considéré comme un héros national dans notre pays, encore par bon nombre d’historiens, il n’est qu’un dictateur aux yeux des étrangers.

 

Bon Dieu ! s’exclama le duc (s’adressant à Georgia), pour qui donc croyez-vous lutter maintenant ? Vous vous battez pour votre frère et le pays qu’il sert. Vous vous battez pour tous les hommes, les femmes et les enfants de cette île. Ne comprenez-vous pas ce que signifierait pour nous d’être vaincus par Bonaparte ? N’avez-vous donc aucune idée des souffrances, des privations, de la faim qui sont le lot des pays d’Europe actuellement sous la coupe du dictateur ? J’ai vu les paysans chassés de chez eux par l’ennemi, entassés au bord des routes, affamés, assoiffés, ne possédant plus que ce qu’ils portent sur le dos.

 

Evidemment, ce point de vue britannique est dur à encaisser, à propos de celui qui est pour certains une idole. Tout au moins un grand homme. Il faut savoir relativiser, et admettre qu’il a commis des exactions, possédant à son actif des millions de morts.

Alors, évidemment, ce genre de déclaration ne passe pas auprès de tout le monde, certains pouvant se sentir bafoués dans leur orgueil national.

Barbara CARTLAND : Contrebandier de l’amour (Love is contraband). Traduction d’Arlette Rosenblum. Editions J’Ai Lu N°783. Parution le 4 novembre 1977. 256 pages.

ISBN : 2277117838

Première édition : Editions de Trévise. 1970.

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15 juillet 2020 3 15 /07 /juillet /2020 04:19

L’Histoire n’est constituée que de drames !

Valérie DAYRE : L’éventreur de Berlin.

Depuis le 24 septembre 1924, Harry Whitecliffe, jeune auteur dramatique anglais dont la pièce de théâtre est jouée avec succès dans quatre-vingts salles allemandes et autrichiennes, a disparu sans un mot d’explication de la ville de Dresde où il s’était établi.

Sa fiancée Wally von Hammerstein est désemparée et Werner, son ami ex-amoureux de la jeune femme, n’en est pas moins troublé. Pour faire plaisir à Wally, Werner enquête dans la bonne ville de Dresde mais Harry s’est bel et bien volatilisé.

Werner impute cette disparition sur un coup de tête, une foucade du jeune dramaturge aux réactions parfois imprévisibles.

Pendant ce temps, à Berlin, un jeune homme du nom de Lovach Blume, d’origine australienne, est interrogé sur l’assassinat d’un prostituée. Le brigadier Wedekind et l’inspecteur Laher l’ont interpellé pratiquement en flagrant délit alors qu’ils enquêtaient sur un trafiquant de cocaïne.

Véritablement un coup heureux du hasard qui leur permet d’appréhender celui qui depuis des mois défraye la chronique sous le nom d’Eventreur de Berlin et possède à son actif une trentaine de meurtres de prostitués, masculins et féminins.

 

Valérie Dayre relate avec sobriété et efficacité ce fait divers allemand alors que la République de Weimar chancelle sur ses bases et que se profile à l’horizon le spectre de Hitler.

Dès les premières pages, le lecteur se doute de l’issue de ce livre, mais ce qui importe le plus aux yeux de Valérie Dayre, enfin c’est ce que j’ai ressenti, ce sont les relations tissées entre ce trio de jeunes gens qui relèvent plus du drame antique que du vaudeville faubourien.

Un récit simple et émouvant, surtout si l’on se met dans la peau de Werner, due à une romancière qui s’est distinguée par ses traductions et ses romans pour enfants.

 

Quant à la collection, elle n’aura duré que le temps de dix publications.

Valérie DAYRE : L’éventreur de Berlin. Collection Les Drames de l’histoire N°5. Editions Fleuve Noir. Parution mars 1992. 184 pages.

ISBN : 9782265046856

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23 juin 2020 2 23 /06 /juin /2020 06:29

Les vignes de la République ne sont pas les vignes du Seigneur !

Catherine GUIGON : Les mystères du Sacré-Cœur. Première partie : Les vignes de la République.

En cet automne 1872, la capitale se relève doucement des affrontements sanglants entre Communards et Versaillais. Pourtant un petit coin respire la tranquillité. Sur les hauteurs de la Butte Montmartre, le café Au Franc Buveur, qui vient tout juste d’être inauguré, accueille un grand nombre de dégustateurs du vin local, produit par son jeune propriétaire Théo Archibault.

Il peut être fier de lui, Théo Archibault, dont le passé fut mouvementé, qui a appris à soigner les vignes en Anjou. Sa récolte est appréciée des consommateurs, lesquels savourent un breuvage qui se différencie des vins aigrelets auxquels ils sont habitués.

A vingt-quatre ans, Théo aurait tout pour être heureux, ou presque, après avoir vécu une enfance difficile. Non pas que ses parents fussent des persécuteurs, le père étant mort à sa naissance durant la révolution de 1848, puis sa mère aimante quelques années plus tard. Et il a été élevé en partie dans un couvent, appelant une religieuse Marraine, et a connu quelques déboires. Mais dernièrement il a hérité de façon mystérieuse de ce lopin de terre accroché à la Butte. Et il y a son ami Armand, typographe et bricoleur. D’autres amis aussi dont le conseiller municipal, le docteur Clémenceau, toujours prêt à aider ses concitoyens, ne comptant pas ses heures. Enfin, il y a la belle et jeune Julie, avenante et souriante, déambulant avec grâce dans les travées pour servir les clients, mais secrète sur son passé.

A un certain moment, Julie regarde au dehors et s’évanouit pour une cause indéfinissable. Puis c’est au tour de Théo d’être la victime d’un accident de la circulation. Un cocher menant à vive vitesse un attelage et lui assénant des coups de fouets, cela marque les corps et les esprits. D’autant que ce cocher possède un faciès repoussant. Le bon docteur Clémenceau répare les dégâts corporels. Ce n’est que le début des avatars subit par Théo, tandis que Julie déserte le café.

 

Pendant ce temps, dans les beaux quartiers de la capitale, le baron Edouard de Gravigny est chargé de récolter des fonds pour l’édification d’une basilique sur la Butte, à l’initiative du Vœu National. Les Catholiques sont majoritaires dans les instances gouvernementales et œuvrent sans vergogne pour contrecarrer les Républicains.

Et ce qui couvait sous la cendre s’affirme au grand jour. Les terrains sur lesquels poussent les vignes de Montmartre seront préemptés afin que les bâtisseurs puissent ériger cette monstruosité, pour certains, ce monument religieux destiné à rétablir l’ordre moral, pour d’autres.

Le premier spolié sera Théo qui va accumuler les déboires. A la recherche d’un manuscrit, il est accusé de meurtre, et ne devra la vie sauve que grâce à Clémenceau qui apporte un témoignage irréfutable sur son innocence. Mais il n’échappera pas à la déportation dans une île de l’archipel de Nouvelle-Calédonie. Il y fera la connaissance de Louise Michel déportée pour avoir participé activement à la Commune en 1871. De retour en France, il deviendra, à l’instigation de son ami Armand, journaliste au Grand Rapporteur.

Quant à Julie, nous suivons en parallèle ses pérégrinations, portant en elle un lourd secret qui l’handicape, devenant une couturière de talent.

 

Ce roman est le parfait exemple du catalogue des thèmes qui servaient de supports aux nombreux et foisonnants ouvrages publié durant le XIXe siècle, sous la plume de Paul Féval, Eugène Sue, Alexandre Dumas, Xavier de Montépin ou encore Alexis Ponson du Terrail.

On y retrouve assassinats, enlèvements, prévarication, séjours au bagne, vengeance et haine, sans oublier l’amour, l’un des vecteurs de ce genre de récits. Et les personnages qui gravitent dans cette histoire, dont on peut se demander quelle est la part du réel et quelle est la part de la fiction, ont pour nom, outre Clémenceau anticlérical convaincu qui tournera mal par la suite, devenant selon sa propre définition le Premier flic de France, n’hésitant pas à employer la soldatesque avec force tirs nourris contre les vignerons et les ouvriers grévistes des carrière de plâtre, outre Louise Michel, cette forte femme, au sens moral, le docteur Sigmund Freud qui fait son apprentissage de psychanalyste, de Paul Féval qui vient de se convertir, détruisant dans un autodafé ses propres ouvrages, et sa femme la mystique madame Féval, ou encore le jeune Valentin le Désossé. Sans oublier quelques figures marquantes de la politique de cette époque mouvementée : le général Boulanger, Jules Ferry, et bien d’autres.

Un roman qui s’échelonne entre 1872 et 1889, lors de l’Exposition Universelle avec l’érection de la Tour Eiffel. Quant au passé des principaux protagonistes, Théo et Julie en tête, il est dévoilé au fur et à mesure qu’avance l’intrigue, avec de nombreux retours en arrière.

Tout autant roman policier, que roman d’aventures, roman historique que roman d’amour, Les vignes de la République, premier volet des Mystères du Sacré-Cœur, vous fera passer un bon moment de détente. Mais à la fin un retournement de situation incite à lire la suite intitulée Le secret de la Savoyarde.

Catherine GUIGON : Les mystères du Sacré-Cœur. Première partie : Les vignes de la République. Editions du Seuil. Parution 27 février 1998. 336 pages.

ISBN : 978-2020334877

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10 juin 2020 3 10 /06 /juin /2020 03:40

Viens voir les comédiens
Voir les musiciens,
Voir les magiciens
Qui arrivent…

Paul-Jacques BONZON : Le jongleur à l’étoile.

Epuisé par une journée de dur labeur, le jeune Jehan des Huttes s’endort. Il a d’abord aidé son père, Eloi des Huttes, à labourer le champ puis, en fin de journée, il est allé ramasser des branches mortes. Le fagot est lourd, il se plante une épine dans le pied, il fait nuit, il se perd et il s’assied attendant le couvre-feu de la cloche de Montmaur afin de se guider au son.

Et c’est ainsi, que se réveillant, il aperçoit une petite lumière briller dans le bois. S’approchant du chaleil, une petite lampe à huile, il entend une musique douce et distingue une forme bizarre. Il n’est pas trop rassuré, pensant qu’il s’agit d’une bête, peut être dangereuse. La lune monte dans le ciel et il peut retrouver son chemin. Il est accueilli fraîchement par son père, mécontent du retard. Dans la nuit tout en rêvant il se met à chantonner et sa sœur Gisquette lui affirme que c’était un très joli air. Alors il lui raconte tout mais défense d’en parler aux parents, des fois que le père prenne sa fourche pour tuer la bête.

Deux soirs plus tard, Jehan peut enfin retourner dans la forêt et entend à nouveau la douce musique. Il s’agit d’un nain contrefait, au visage laid, qui l’apostrophe. Jehan est conquis par cet homme qui vit seul et lui offre son bois d’olivier, un pipeau. Jehan découvre sa vocation, il deviendra jongleur, musicien, et parcourra la Provence, son terroir. Mais les premières notes sortant de sa flûte ne sont guère harmonieuses. Pourtant bientôt il maîtrisera son instrument pour la plus grande joie de ceux auxquels il offre ses ballades.

Jehan connaîtra de nombreuses aventures, heureuses ou malheureuses, notamment auprès du seigneur Bruno de Gumiane, mais les rencontres avec des personnages amicaux sont plus constructives. Ainsi Grégoire, le nain, qui lui offre par le truchement du don de la flûte une possibilité de voir du monde et de s’affirmer, de Fleuric, le gamin qui lui donne trois souris blanches domestiquées capables de réaliser des tours provoquant l’amusement des badauds, et d’autres contacts dont ce musicien atteint de la lèpre et obligé de se cacher, qui lui offre une vielle qu’il apprivoisera. Des rencontres toutes plus enrichissantes moralement et professionnellement les unes que les autres et qui vont décider de son avenir.

Jehan permettra même à des familles qui s’étaient perdues de vue, de se retrouver à la plus grande satisfaction de tous, mais au détriment d’autres personnages dont les actions néfastes et navrants ne plaident guère en leur faveur.

 

Loin des séries des Six Compagnons ou de la Famille H.L.M., ce roman se démarque d’abord parce qu’il est unique dans la production de Paul-Jacques Bonzon, mais également parce qu’il entraîne le lecteur dans une épopée médiévale, là-bas vers le grand Rhône, cette région où il avait déménagé à la suite de son mariage avec une Drômoise.

L’histoire de ce petit jongleur musicien aurait pu être écrite par Hector Malot, par exemple, car souvent les enfants qu'il met en scène sont confrontés à la misère, au handicap, à l'abandon.

La misère, est bien celle d’Eloi des Huttes et de sa famille, des manants comme l’on disait à l’époque médiévale, de pauvres paysans aujourd’hui travaillant une terre ingrate, mais le handicap et l’abandon sont représentés par Grégoire, nain, bossu, laid, et dont l’origine de la naissance est floue, très floue ou ce lépreux obligé de se cacher.

Il existe dans ce roman historique une part de suspense, d’aventures riches moralement, ou déprimantes, selon les cas, mais l’auteur ne force jamais le trait. L’histoire de Jehan des Huttes est remarquable par sa simplicité et en même temps par sa force évocatrice. Et l’on sait tous que de nombreux musiciens furent ou sont incapables de lire une partition et ne jouent qu’à l’oreille.

Paul-Jacques BONZON : Le jongleur à l’étoile. Bibliothèque Rose. Editions Hachette. Parution 20 avril 1976. 192 pages.

Première parution 1948.

ISBN : 2010010493

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1 juin 2020 1 01 /06 /juin /2020 04:22

Il était un p’tit homme

Qui s’appelait Guilleri

Carabi…

Claude IZNER : Le petit homme de l’Opéra.

Haut comme trois bottes empilées l’une sur l’autre, Melchior Chalumeau n’apprécie pas du tout se faire interpeller sous le sobriquet de Guilleri par les nombreux employés de l’Opéra Garnier, où il exerce, entre autres, la fonction d’avertisseur.

Malgré le mépris affiché, il leur rend de petits services, rémunérés bien entendu, et s’amuse à reluquer les petits rats (au fait, doit-on pour respecter l’écriture inclusive, écrire Les petites rattes de l’Opéra ?) dans leurs évolutions et dans les coulisses.

En cette fin mars 1897, une joyeuse petite troupe de fêtards composée d’Olga Vologda, la danseuse étoile, de quelques musiciens et habitués du foyer de la Danse, célèbrent le mariage de Maria Bugne avec Agénor Féralès. N’ayant pas été invité, mais étant toutefois présent, Melchior refuse la proposition d’Olga de se joindre à eux, préférant flâner dans les environs et ressasser un épisode ancien de sa vie tumultueuse.

Quelques membres de cette petite assemblée décident de faire du canotage sur un lac mais ils se dandinent dans l’embarcation et Tony Arcouet, le clarinettiste, tombe à l’eau. Elle est peu profonde et pourtant il se noie. Il sera suivi dans la tombe par d’autres participants à cette cérémonie les semaines suivantes, mais dans des conditions différentes. Olga, la danseuse étoile, est atteinte d’indisposition lors d’une représentation sur la scène de l’Opéra. Nul ne sait ce qui lui est arrivé, mais Melchior traîne dans les coulisses. D’ailleurs il est toujours non loin lors des incidents ou accidents qui déciment les compagnons d’Olga.

Victor Legris, qui délaisse la librairie Elzévir à cause sa passion pour la photographie, et Joseph Pignot qui est toujours débordé par les clients qui recherchent des incunables, sont sollicités par Eudoxie Maximova, une ancienne, disons connaissance de Kenji, le propriétaire associé, beau-père de l’un et père adoptif de l’autre, d’enquêter sur ces morts suspectes.

Tous les subterfuges leurs sont bons pour délaisser l’échoppe, voire leurs femmes enceintes respectives et se lancer sur les brisées du malfaisant qui distribue des petits cochons en pain d’épice mortifères. Leurs soupçons se portent sur Melchior, mais se référant à leurs anciennes enquêtes, ils se méfient des coïncidences. Melchior est le tueur idéal aux pains d’épice, mais comme le déclare Joseph :

Il est compromis jusqu’aux narines, exact, à moi aussi mon instinct le souffle. Mais je me souviens de nos déboires relatifs à des déductions hâtives, voire malavisées.

Cinq ou six suspects sérieux sont donc recensés mais il leur faut trier le bon grain de l’ivraie.

Sans qu’ils s’en doutent, les deux beaux-frères sont suivis dans leurs démarches par un inspecteur du Quai des Orfèvres, Augustin Valmy, ce qui a du bon et du moins bon.

 

Ce nouvel épisode de la saga des membres de la librairie Elzévir est semblable aux autres pour la construction mais pas pour l’intrigue. En effet cette intrigue est diluée dans les nombreux faits-divers qui se déroulent en cette année 1897, dans les nombreuses références souvent littéraires mais pas que, et dans la vie familiale et professionnelle de nos protagonistes et de leurs compagnes.

Mais le lecteur pourra visiter l’Opéra Garnier, assister à un concert spirituel et profane dans les Catacombes, à s’immerger dans la foire du Trône et se perdre dans les dédales des quartiers miséreux, aujourd’hui dénommés pudiquement quartiers défavorisés, assister à des séances du cinématographe, surtout Victor Legris qui est intéressé par les nouvelles techniques et les appareils adéquats, ou encore d’une pythonisse âgée mais toujours extra-lucide, dont le salon accueille quelques personnalités dont José-Maria de Heredia.

Le tout sur fond musical de Coppélia, d'Arthur Saint-Léon, sur un livret de Charles Nuitter, musique de Léo Delibes, d'après le conte d'Hoffmann L'Homme au sable, et de La Danse macabre de Saint-Saëns d'après le poème Égalité-Fraternité d'Henri Cazalis, tiré des Heures sombres, quatrième partie de son recueil L'Illusion paru en 1875.

 

Roman policier, roman historique, roman social, documentaire reflet d’une époque qui connu bon nombre de tragédies, dont l’incendie du Bazar de la charité, des rebondissements dans l’Affaire Dreyfus, et des nouvelles technologies, aussi nombreuses que celles d’aujourd’hui, le tout dans un environnement touristique en vélocipède en compagnie de Victor Legris, lorsqu’il est seul à se déplacer. Sans oublier l’humour qui se glisse parfois dans la narration.

Claude IZNER : Le petit homme de l’Opéra. Collection Grands Détectives N°4345. Editions 10/18. Parution 20 mai 2010. 352 pages.

ISBN : 9782264049193

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14 mai 2020 4 14 /05 /mai /2020 04:07

Attention à ne pas se faire plumer…

Marie MOREAU-BELLECROIX : Le perroquet pourpre.

En cette année 1520, cinq à six gamins visitent le château de la Garde-Villemontel, en Provence, Jean-Blaise, le fils du propriétaire des lieux leur servant de guide. Ils ont environ seize ans et sont fort curieux. L’un d’eux est plus particulièrement vindicatif lorsque Jean-Blaise refuse d’ouvrir une porte bardée de bronze. Cette pièce est la salle d’armes et il lui est interdit de pénétrer aussi il se montre catégorique. Gaspard et Jean-Blaise en viennent aux mains lorsque le noble chevalier Gédéon de la Garde-Villemontel survient.

Au grand étonnement de Jean-Blaise, il leur propose de visiter son antre et les adolescents sont tout pantois. D’autant que dans le fond de la pièce, quelque chose bouge. Il ne s’agit que d’un oiseau dans une cage. Mais quel oiseau ! Un magnifique perroquet pourpre dans une cage d’or. Un présent destiné à Philippe Villiers de l’Isle-Adam, le Grand-Maître des chevaliers hospitaliers de Saint-Jean dont le siège est à Rhodes, et grand-oncle de Jean-Blaise.

Le soir un grand repas est donné en l’honneur d’Arnauld Villiers de l’Isle-Adam, frère du Grand-Maître, et les garçons ébaubis écoutent les échanges entre les deux hommes, notamment sur les menaces concernant la terre de Rhodes convoitée par Soliman. Les adolescents proviennent tous d’horizons divers et doivent embarquer de Fréjus le lendemain pour Rhodes, en constituant la Caravane de la Religion.

Le lendemain matin donc, Jean-Blaise et ses compagnons, habillés de noir avec une croix blanche aux huit pointes sur le devant, descendent vers le rivage, accompagnés de Siphorien, l’homme de confiance du chevalier Gédéon, portant la cage d’or et le perroquet pourpre. Seulement en route, Frimouille, le cheval monté par Gaspard, s’emballe, au grand étonnement de Jean-Blaise qui sait que la monture est le plus calme et le plus pacifique des écuries. L’accident est funeste aussi bien à la monture qu’au cavalier. Dans la selle qui s’est détachée un clou a été fiché.

Puis c’est l’embarquement à bord de la caraque Santa-Anna. Siphorien qui a le goût du jeu délaisse le perroquet pourpre et l’un des marins s’en empare, car l’oiseau possède un secret selon les ouï-dire, et le caresse. Un âpre pugilat s’ensuit et le marin touché au menton s’écroule, mort. Selon le médecin du bord, ce décès n’est pas consécutif au coup de poing. Dans l’algarade l’oiseau s’enfuit et Siphorien se jette à l’eau. Puis la tempête fait rage et des Barbaresques arraisonnent la caraque qui prend feu.

Jean-Blaise est emmené à bord d’une pinasse mais il arrive à se défaire de ses liens. Il plonge échappant aux marins qui ont goûté à la boisson qu’il transportait dans une gourde que lui avait remise son père et qui contenait un cordial alcoolisé. Heureusement, la côte tunisienne n’est pas loin et il parvient à aborder une plage complètement épuisé. Il est recueilli quelques heures plus tard alors qu’il sort péniblement de son étourdissement par un gamin qui le présente à ses parents, lesquels accueillent Jean-Blaise chaleureusement. Minchaoui, le gamin, a vécu quelques temps à Marseille et il s’exprime à peu près en français, un avantage car Jean-Blaise le Provençal est mis en confiance.

Mais le voyage de Jean-Blaise n’est pas terminé, car il n’a pas rempli sa mission. Le village où vit Minchaoui est tout proche de Sfax, et le marchand qui avait vendu le perroquet pourpre vit justement dans cette ville. Lorsque Jean-Blaise s’enquiert auprès de l’oiseleur d’un volatile de substitution ressemblant au perroquet, le vendeur lui propose un lori à collerette. Il est certes ressemblant, mais ce qui perturbe Jean-Blaise ce sont les confidences du marchand. Des confidences qui font réfléchir l’adolescent sur la mort subite du marin et sur l’avenir du Grand Maître des chevaliers hospitaliers, et surtout sur le rôle de son père dans une supposée conspiration.

 

Ce roman d’aventures est également un roman historique s’inspirant de faits et de personnages réels.

En effet, la compagnie des chevaliers hospitaliers de Rhodes, qui devint plus tard lors de leur déménagement forcé celle de Malte, ont existé, et existent encore, le grand-maître Philippe Villiers de l’Isle-Adam, Don Amaral et quelques autres personnages sont inscrits dans l’Histoire de ces compagnies religieuses et dans l’Histoire tout court. Avec toutefois quelques nuances puisque Philippe Villiers de L’Isle Adam ne fut élu Grand Maître de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem qu’en janvier 1521. Quant à la caraque Santa Anna, elle fut construite et lancée à Nice le 21 décembre 1522 juste quand l'Ordre est chassé de Rhodes, remplaçant la caraque Santa Maria.

Et Marie Moreau-Bellecroix a brodé autour de ces épisodes véridiques, malgré quelques petites distorsions, une intrigue dont le Perroquet pourpre devait servir de meurtrier.

Si le roman met en scène des religieux, il ne sert pas pour autant de vecteur prosélyte, et il est à noter que l’accueil de Jean-Blaise par Minchaoui et ses parents est tout à fait remarquable, alors que bien souvent les contradictions religieuses et raciales servent de support à ce genre d’histoire, et reflète la réalité de l’époque concernant l’hospitalité. Peut-être.

 

Marie MOREAU-BELLECROIX : Le perroquet pourpre. Illustrations de Jacques Pecnard. Collection Idéal-Bibliothèque N°87. Editions Hachette. Parution 4e trimestre 1955. 192 pages.

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21 avril 2020 2 21 /04 /avril /2020 04:30

Après, le leitmotiv fut : Faites l’amour, pas la guerre !

Frank G. SLAUGHTER : Non pas la mort, mais l’amour

Désabusé et cynique, le capitaine Richard Winter est chirurgien dans l’armée américaine et pour l’heure il se trouve dans le camp du 95e Hôpital américain de campagne, près de la côte anglaise où sont regroupés médecins et infirmières.

Avant pour l’embarquement le lendemain vers une destination inconnue, il se tient au bar, ingurgitant quelques boissons alcoolisées.

C’est un solitaire qui a participé comme chirurgien dans les combats en Espagne ainsi qu’à la bataille de Dunkerque. Pourtant il s’est lié avec un jeune lieutenant, Terry Adams, qu’il connait seulement depuis six mois. Or Winter apprend que la célèbre journaliste Linda Adams est non seulement sa sœur, mais qu’elle va participer à la mission qui leur sera dévoilée lorsqu’ils auront quitté le port. Il retrouve également un condisciple de la faculté de médecine, Bill Coffin, spécialiste du cerveau.

De nombreuses infirmières sont également présentes dans ce camp et un bal est prévu la veille de l’embarquement. Par elles, Gina Cole et son amie Carolyn Rycroft, qui espèrent bien faire bonne impression sur le beau chirurgien dont la popularité liée à sa séduction n’est pas passée inaperçue du personnel médical féminin. Et en effet elles n’ont aucun mal à se faire inviter pour quelques danses, échanger des baisers au clair de lune, et Linda Adams n’échappe pas à cette attirance.

Rick Winter donne rendez-vous à la belle Gina Cole dans sa chambre, mais les éléments belliqueux contrarient ce qui devait la concrétisation d’une soirée réussie. Les avions allemands pilonnent la base, et le black-out est décrété. Il se réfugie dans la pièce en compagnie d’une jeune femme inconnue qui vient de le percuter au dehors. Les bombes se rapprochent, ils se glissent sous la table afin d’éviter les projections diverses, et les corps en profitent pour se rapprocher au point de conclure dans un artifice dont il gardera le souvenir. Au petit matin la belle inconnue est partie, emmenant un vêtement appartenant à Rick et laissant sa cape sur laquelle figure un monogramme.

Enfin l’embarquement se réalise et au revoir l’Angleterre et bonjour l’inconnu. Gina Cole dépitée jette son dévolu sur Terry Adams, car même en temps de guerre les besoins charnels se font ressentir. Terry Adams est en proie à un cruel dilemme. Jeune marié, il a laissé sa femme au pays, aux Etats-Unis, et il ne veut pas la tromper. Pourtant Rick Winter, toujours cynique, lui a fait la leçon. Il l’a même encouragé à profiter des bonnes occasions s’ils s’en présentaient.

Le convoi à peine parti, au large de l’Espagne, des avions allemands survolent les navires. Des dégâts sont enregistrés et Rick doit s’occuper des blessés. D’ailleurs il est là pour ça. Le navire sur lequel les chirurgiens toubibs et infirmières ont embarqués a été détourné de sa fonction première, celle des croisières, et a été transformé en hôpital maritime. D’autres incidents les guettent et enfin arrivés en vue d’Alger la Blanche, c’est le débarquement sur la plage, une répétition générale du Débarquement de Normandie. Puis l’unité médicale s’enfonce dans le désert rejoignant la Tunisie avec tous les aléas que cela comporte. Jerry, diminutif de German équivalent à notre Boche français, ne se laisse pas empiéter sur le terrain conquis sans riposter et les Stukas, via la voie des airs, ou les chars, contrarient la marche de l’armée américaine.

Rick peut apprécier en cours de route le professionnalisme de ceux qui sont partagent cette épopée héroïque, dont les infirmières Carolyn, Gina, et même Linda qui ne perd en aucun cas son sang-froid. Ce qui n’est pas toujours celui de son frère Terry.

 

Publié en 1950 aux Etats-Unis, ce roman est ancré dans des épisodes de la Seconde Guerre Mondiale, dont l’Opération Torch qui vit la prise d’Alger le 8 novembre 1942.

Le titre, qui est emprunté à un poème de Robert Browning, pourrait laisser croire qu’il s’agit d’une histoire d’amour comme bon nombre en ont été écrites et considérées souvent comme des bluettes. L’extrait de poème récité par Rick lorsqu’il batifole sous la table avec son inconnue, et celle-ci décline le dernier vers : Non pas la mort, mais l’amour.

Mais s’il fallait un support pour cette histoire, c’est bien la guerre qui est en première ligne, avec ses morts et ses blessés. Rick Winter pratique de nombreuses interventions chirurgicales, différentes les unes des autres, s’attirant l’ire du chirurgien-chef Strang. En effet il opère et soigne selon des protocoles qui sortent de l’ordinaire, ce qui n’est pas du goût de Strang. L’éternel problème des méthodes nouvelles pas encore admises par les anciens qui se réfèrent à de vieilles pratiques qui souvent sont plus mortifères que les expérimentales.

Non pas la mort, mais l’amour est un documentaire puisé à la source, écrit alors que la guerre faisant encore rage, agrémenté d’une histoire d’amour mais également un hommage au courage du personnel médical qui œuvre sur le terrain, étant souvent en première ligne. Et Rick Winter se trouve plus à l’aise lors de ses interventions chirurgicales que dans l’aménagement de sa vie sentimentale.

 

Il est cruel à l’homme qui va au feu pour la première fois de rester dans l’attente et l’indécision.

Frank G. SLAUGHTER : Non pas la mort, mais l’amour (Battle Surgeon – 1944. Traduction de Doringe). Collection Romans. Editions Presses de la Cité. Parution 3e trimestre 1960. 428 pages.

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14 avril 2020 2 14 /04 /avril /2020 04:20

Duperies, mensonges et conspirations en tout genre à la Cour de France.

Alexandre DUMAS : La Reine Margot.

Le dix-huit août 1572 aurait pu être une date marquante de l’histoire de France si elle n’eut été éclipsée par une autre beaucoup plus tragique. En effet le Louvre en effervescence célébrait le mariage entre Marguerite de Valois, fille de Catherine de Médicis, et d’Henri de Bourbon, roi de Navarre, fils de Jeanne d’Albret. Cette union devait sceller celle des Catholiques et des Huguenots.

La nuit de noce, au lieu d’honorer sa jeune épouse, Henri de Navarre va rejoindre sa maîtresse, Charlotte de Sauve, femme d’atours de la reine mère, Catherine de Médicis. Quant à Marguerite, dite Margot, elle reçoit dans sa chambre le Duc de Guise, son amant auquel elle a sauvé la vie et qui lui rend quelques lettres et lui signifie leur rupture.

Entre Marguerite nouvellement reine de Navarre et Henri son époux, s’il n’y a pas eu consommation du mariage, il existe toutefois un respect réciproque qui ne tardera pas à se muer en complicité sous les assauts venimeux de la reine mère et des trois frères de Margot. Principalement Charles IX, le duc d’Anjou futur Henri III et le jeune duc d’Alençon.

 

Charles IX est un jeune roi violent, emporté, difficilement canalisable, et subordonné à sa mère qui œuvre en coulisse. Hypocrite, il affirme que l’amiral de Coligny est son père, spirituel évidemment, mais dans le même temps il agit pour le désigner comme cible à quelques sbires chargés de l’abattre dans une rue à l’aide d’arbalètes. C’est le 24 août 1572, de sinistre mémoire. Le début de la Saint-Barthélemy au cours de laquelle les Catholiques, des Chrétiens parait-il, se chargent de passer de vie à trépas les Huguenots qui résident dans la capitale. Un véritable carnage qui amène Henri de Navarre à abjurer sa religion. Au grand dam de bon nombre de ses fidèles. Mais il faut se montrer diplomate.

 

Pendant ce temps, deux hommes entrent dans Paris, chargés d’une mission. L’un, le comte Joseph Hyacinthe Lerac de la Mole, un Provençal, est chargé de remettre une missive à Henri de Navarre, tandis que l’autre le comte Annibal de Coconnas dit le Piémontais, est porteur d’un message pour le duc de Guise. Ils arrivent ensemble rue de l’Arbre-sec, non loin du Louvre, et repèrent une auberge qui leur semble fort accueillante, A la Belle-Etoile. Ils sympathisent, remplissent leur mission et s’installent malgré leur manque de laquais, ce qui déplait à La Hurière, l’hôtelier.

Seulement Coconnas est catholique et La Mole huguenot et lors des événements du 24 août 1572, ils se regardent en chien de faïence, en venant aux armes. Blessés tous deux ils seront pris en charge par un personnage qu’il n’est pas de bon ton de fréquenter. Nonobstant, ayant appris la profession mortifère de cet inconnu, qui ne le restera pas longtemps, Coconnas lui serre la main. Geste dont l’homme, touché et ému, se souviendra plus tard.

Duels, guet-apens, empoignades, méfiance, empoisonnements, duperies, mensonges, duplicité, hypocrisie, complots, retournements de situation, autant de faits d’arme et d’épisodes sanglants qui imprègnent ce roman, sans oublier intrigues politiques, familiales et amoureuses. Catherine de Médicis œuvre pour que le roi de Navarre soit éliminé de la course du trône, au cas où il serait amené à régner. Car Henri, duc d’Anjou est officiellement roi de Pologne et se doit donc à son nouveau royaume. Et la santé de Charles IX laisse à désirer. Et mentalement, il n’est guère fiable. Alors elle a recours aux bons services de Rémi Florentin, parfumeur, alchimiste et occasionnellement fabricant de poisons en tous genres mais mortels.

Complots, alliances et mésalliances, se tissent comme des toiles d’araignées dans les cabinets secrets et les couloirs labyrinthiques du Louvre. Des passages secrets qui favorisent les amours adultérines entre la reine Margot et La Mole, ou Henriette de Nevers, l’amie de Margot et Coconnas.

 

Ce roman est le premier d’une trilogie, les deux autres étant La dame de Monsoreau et Les Quarante-cinq, romans qui se lisent indépendamment les uns des autres. Certains personnages disparaissent, d’autres continueront leur chemin et leurs méfaits.

Alexandre Dumas, et son complice non crédité Auguste Maquet, nous offrent leur vision de la France lors des guerres de religion et plus particulièrement du massacre de la Saint-Barthélemy. Et apportent un éclairage saisissant sur la mort de Charles IX, officiellement décédé d’une pleurésie, constat effectué par Ambroise Paré.

Au milieu des épisodes sanglants d’égorgements, d’étrippements, de massacres, surnagent des scènes d’amitiés et d’amour. En effet entre La Mole et Coconnas s’établit une amitié plus forte qu’une fraternité, parfois au détriment de leurs amours avec la reine Margot et Henriette de Nevers. des amours contrariées par les manigances royales, plus particulièrement de la part de Catherine de Médicis, tandis que le futur Henri IV entretient avec sa femme une complicité qui n’est pas amoureuse mais sincère.

Un livre qui se lit avec plaisir et malgré le nombre de pages, à la police de caractère réduite, on ne voit pas le temps passer.

Roman d’action et d’amour, ce roman a été adapté en film par Patrice Chéreau en 1994 avec Isabelle Adjani.

Alexandre DUMAS : La Reine Margot. Bibliothèque Marabout Géant N°138. Editions Gérard. Parution 1962. 504 pages.

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