Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
2 décembre 2018 7 02 /12 /décembre /2018 04:28

Deux Dumas méconnus !

Alexandre DUMAS : Le Sphinx rouge suivi de La Colombe.

Initialement intitulé Le Comte de Moret, Le Sphinx rouge fut publié pour la première fois en feuilleton dans Les Nouvelles en 1865. La première version intégrale en volume fut éditée dans la collection Marabout Roman, aux éditions Gérard en 1960 sous son nouveau titre, qui est plus conforme au contenu du roman.

Si ce volume comporte en outre une longue nouvelle, La Colombe, c’est parce qu’elle reprend deux personnages du Sphinx rouge, le Comte de Moret et Isabelle de Lautrec. Or cette nouvelle fut publiée en 1850 et donc antérieure au Sphinx rouge, mais l’action se situe quelques années après la fin du Comte de Moret. Il s’agit donc d’une suite anticipée et les deux textes peuvent se lire indépendamment l’un de l’autre sans que cela nuise à la lecture.

Toutefois, désirant me mettre dans la peau et la tête du lecteur à l’époque de la parution de ces deux romans, j’ai lu en premier La Colombe puis j’ai continué par Le Sphinx rouge. Ce qui ne m’a pas du tout perturbé, comme ces romans qui narrent un épisode de la saga d’un héros en cours d’existence puis la série connaissant du succès, un roman dit des origines est rédigé afin de mieux cerner le ou les personnages. Mais ce n’est qu’un choix personnel.

 

La Colombe :

Dans ce roman épistolaire, le lecteur ne sait pas quelle est l’identité des deux correspondants. Cela sera dévoila au fil des échanges, expéditions et réceptions des missives qui sont acheminées par une colombe.

Le scripteur masculin, qui se révèlera être le Comte de Moret, remet en liberté une colombe qu’il a recueillie, plaçant sous son aile un billet, daté du 5 mai 1637, destiné au légitime propriétaire du volatile.

Quelques jours plus tard, par la même messagère, il reçoit une missive de remerciements, mandant dans quelles conditions cette colombe prénommée Iris est parvenue jusqu’à lui. Et comme Iris se morfond apparemment de son sauveteur, elle l’a renvoie avec la réponse à ce message, espérant qu’une liaison épistolaire puisse s’établir dans la durée.

Et c’est ainsi qu’au fur et à mesure des échanges des révélations sont effectuées par les deux épistoliers qui se rendent compte que non seulement ils sont éloignés de quelques dizaines de lieux, qu’ils sont tous deux dans un couvent en attendant de prononcer leurs vœux mais qu’ils se connaissent.

Ils s’aimaient mais les événements, qui sont décrits, les ont séparés, et ils souhaitent ardemment se retrouver et pouvoir s’aimer au grand jour. Seulement… Eh oui, il y a un seulement car le jour de la prononciation des vœux du comte de Moret est proche, et Isabelle de Lautrec ne sait si elle parviendra à temps et si elle-même pourra être relevée de son engagement.

Les événements décrits dans cet échange de missives se sont déroulés cinq ans auparavant et donc quatre ans après l’épisode au cours de laquelle ils se sont connus.

Un roman d’amour charmant et épistolaire, dont le suspense est toujours entretenu et qui aurait pu être écrit en collaboration avec la comtesse Dash, selon le site Dumas père.

 

Le début de l’intrigue historique du Sphinx rouge se déroule le 5 décembre 1628, soit quatre jours après le retour du cardinal de Richelieu, siège de La Rochelle qui a fait l’objet d’un des épisodes du roman d’Alexandre Dumas Les Trois Mousquetaires, ce que ne manque pas de rappeler l’auteur.

La première a pour décor l’auberge de La Barbe peinte, rue de l’Homme-Armé, à Paris (actuellement une partie de la rue des Archives). Un homme est allongé sur un banc en bois attendant de trouver de l’argent pour régler ses dépenses à son hôtelier. Il s’agit d’Etienne Lathil, homme de main, sbire, spadassin, prêt à donner de sa personne lors de duels et même à suppléer le cas échéant l’offensé.

Surgissent trois hommes qui veulent lui confier une mission contre une forte somme d’argent, des pistoles qui lui permettraient de vivre durant quelques semaines et rembourser ses dettes auprès de l’aubergiste. Seulement il refuse, car l’homme qu’il doit combattre n’est autre que le comte de Moret, fils naturel d’Henri IV et de Jacqueline du Bueil. S’attaquer à la personne sacrée d’un fils du défunt roi Henri IV n’entre pas dans ses projets, dans sa morale pourtant élastique. S’engage alors un combat au cours duquel il est blessé grièvement, les agresseurs s’enfuyant en le laissant sur le sol de l’auberge. Mais ses trois offenseurs en viennent eux-mêmes aux mains, ou plutôt à la pointe de l’épée à cause d’un malentendu amoureux. Et l’un d’entre eux, sinon tous plus ou moins, sont proches du cardinal de Richelieu, pour des raisons dont il a le secret.

En parlant de secret, découvrons le comte de Moret, qui lors de cet incident, se trouvait dans une des chambres de l’auberge, en compagnie de Madame de Fargis, l’une des dames d’honneur de la reine Anne d’Autriche, à qui elle a été présentée par la reine mère Marie de Médicis. Le comte de Moret revient d’Italie et il est chargé de remettre trois lettres aux deux reines. Il se rend au Louvre et est convoyé dans le dédale des couloirs par une jeune personne dont il tombe tout de suite amoureux, alors qu’il est déjà l’amant de deux autres attitrées de la cour. Il s’agit d’Isabelle de Lautrec, qui alors n’a que seize ans, mais qui elle aussi ressent plus que de la sympathie envers ce jeune homme.

C’est ainsi que nous faisons la connaissance de ces deux protagonistes qui figuraient dans la Colombe mais qui n’apparaissent qu’épisodiquement dans ce roman. Car tout est axé sur le cardinal Armand Duplessis, duc de Richelieu, lequel est au centre d’une conspiration menée par la reine mère, la reine Anne d’Autriche et Gaston d’Orléans, le frère de Louis XIII et quelques autres favoris qui n’apprécient pas la prépondérance du ministre auprès du roi.

Se greffe alors l’épisode tragique de l’assassinat du roi Henri IV, le 14 mai 1610, par un fanatique charentais, François Ravaillac. Une scène bien connue des écoliers mais qui garde toujours une partie de son mystère, et dont les historiens abordent des solutions, souvent logiques mais laissent planer le doute. Ravaillac se serait confié avant d’être exécuté à une personne qui aurait consigné ses révélations sur une lettre. Depuis la dépositaire de cette missive est gardée au secret dans une geôle d’un couvent, survivant depuis dix-huit ans de pain sec et d’eau, dans des conditions insalubres. La lettre n’a jamais été retrouvée, et Richelieu met tout en œuvre pour délivrer cette femme et connaître le fin fond du drame afin de pouvoir avoir prise sur les deux reines et leurs partisans, et en informer, si besoin est Louis XIII.

 

De nombreux critiques littéraires et historiens sont unanimes lorsqu’ils déclarent qu’Alexandre Dumas détournait l’histoire de France dans ces romans. Le fait est que si le Comte de Moret a réellement existé, de même que la plupart des protagonistes de ce roman, il n’est pas présenté tout à fait comme il le fut et des zones d’ombres entourent sa mort.

Ce roman fourmille d’anecdotes, de retours sur le passé, d’explications nécessaires à la bonne compréhension du récit et l’analyse des personnages évoluant dans un contexte de suspicions et des événements qui se sont déroulés des décennies auparavant.

Comme nous avons la prétention que nos livres deviennent, sinon de notre vivant, du moins après notre mort, des livres de bibliothèques, nous demanderons à nos lecteurs de leur faire passer sous les yeux au commencement de ce chapitre une revue de la situation de l’Europe, revue nécessaire au frontispice de notre seconde partie et qui, rétrospectivement, ne sera point inutile à l’intelligence de la première.

 

Et Alexandre Dumas justifie quelque peu ce que l’on a appelé des distorsions historiques en ces termes :

L’histoire est curieuse et mérite que nous ouvrions une parenthèse pour la raconter, cette parenthèse dut-elle être un peu longue. Il n’y a pas de mal d’ailleurs que l’on apprenne chez les romanciers certains détails qu’oublient de raconter les historiens, soit qu’ils les jugent indignes de l’histoire, soit que probablement ils les ignorent eux-mêmes.

Il aurait pu ajouter que l’on peut parfois douter de l’impartialité de certains historiens surtout du vivant de ceux qu’ils encensent ou au contraire dénigrent pour des raisons politiques.

 

Louis XIII est montré comme un personnage ennuyeux, triste, effacé, mais il possède ses raisons pour se conduire ainsi. La reine mère, Marie de Médicis, et la reine Anne d’Autriche sont décrites comme des intrigantes, aidées en cela par des proches tout acquis à leur cause, mais également par jalousie.

Mais le personnage principal, autour duquel tourne toute l’intrigue, est bien ce cardinal de Richelieu, qui grâce à de nombreux indicateurs, est au courant de tout, ou presque, ce qui se trame en cachette. C’est un joueur d’échecs qui parfois a des doutes sur le placement de ses pions, sur les tactiques à envisager, mais qui ne se laisse jamais débordé. Si dans les Trois Mousquetaires, la reine Anne d’Autriche était dessinée à son avantage et le cardinal comme un homme implacable et parfois antipathique, ici c’est tout le contraire, déjouant les intrigues et les complots de la cour. Il aide Louis XIII a s’affirmer en tant qu’homme et roi.

Ce dialogue entre le comte de Moret et la duchesse de Chevreuse est assez explicite à ce sujet :

Ah ! que vous êtes bien le fils – légitime s’il en fut – de Henri IV ; tous les autres ne sont que des bâtards.

Même mon frère Louis XIII ? dit en riant le comte.

Surtout votre frère Louis XIII, que Dieu garde ! Que n’a-t-il un peu de votre sang dans les veines !

Nous ne sommes pas de la même mère, duchesse.

Et, qui sait, peut-être pas du même père non plus.

 

Et au détour des pages on retrouvera des personnages qui n’influent guère sur le récit mais feront parler d’eux, Marion Delorme en tant que courtisane, maîtresse du marquis de Cinq-Mars et de Richelieu selon des historiens, et Pierre Corneille, qui débutait comme auteur de pièces de théâtre et qui, dans le récit, aide Richelieu en compagnie de quelques autres poètes, à écrire une tragédie en cinq actes dont il a ébauché quelques scènes et écrit une partie des dialogues : Mirame. Un aspect méconnu du ministre de Louis XIII.

Edition Marabout Géant n°42.

Edition Marabout Géant n°42.

Alexandre DUMAS : Le Sphinx rouge suivi de La Colombe. Editions du Cherche-Midi. Parution le 11 octobre 2018. 720 pages. 22,00€.

ISBN : 978-2749159072

Partager cet article
Repost0
26 novembre 2018 1 26 /11 /novembre /2018 06:01

Sherlock Holmes creuse son sillon…

Jean-Claude BOLOGNE : Sherlock Holmes et le secret des lettres.

Sherlock Holmes, le plus fameux de tous les détectives, a été pastiché et parodié à maintes reprises, en bien ou en mal, et il continue à faire les choux gras de bon nombre d’auteur qui pensent que le public suivra uniquement sur le nom du célèbre locataire de Baker Street.

Parmi les derniers émules de Conan Doyle, Jean Claude Bologne s’attaque au mythe mais d’une façon particulière puisque Sherlock va se trouver confronté à des personnages aussi célèbres que Charles Cros, Rimbaud et quelques autres. Mais prenons par le début :

Tandis que sept victimes ont été dénombrées au Vatican en huit jours, atteintes de crise cardiaque, un cardinal, accompagné d’un représentant des forces de l’ordre rend visite à Sherlock. Il lui réclame une poterie antique volée au Saint Siège. Sherlock ne nie pas posséder ce vase qui n’est en fait qu’un tesson, au contraire il le remet à l’homme d’église. Celui-ci brise la relique, à la stupéfaction de tous, puis décède, victime lui aussi d’une crise cardiaque.

Heureusement Sherlock avait pris soin de photographier le débris sur lequel figuraient des sillons, tracés par le potier, ainsi qu’une inscription hébraïque. Et s’il s’agissait d’un sillon qui aurait été gravé à l’audition de la voix du Christ ? La réponse ne peut être donnée que grâce à l’aide de Charles Cros, inventeur du phonographe et spolié par l’industriel américain Edison. Voici pour Le Chanteur d’âme, premier volet de cette histoire.

Dans Le Testament de sable, alors que Sherlock s’instruit auprès des forces de police française, il s’intéresse à une curieuse affaire de testament qui aurait été dérobé dans un couvent de la région parisienne. Or une plainte similaire a été déposée par un certain Darasse, banquier, qui accuse les sœurs de détenir illégalement ce testament. Un testament destiné à Charles Cros déposé par un nommé Ducasse. Le fils de ce dernier est poète mais a écrit quelques années auparavant un livre sulfureux sous pseudonyme. Une étrange affaire qui permet à Sherlock de faire la connaissance de Charles Cros et côtoyer Lautréamont par le biais d’un livre blanc.

Quant à la dernière histoire, La rectificatrice, l’action se déroule toujours à Paris, dans le quartier de Montmartre, connu pour ses rapins et son cabaret du Chat Noir dont une des tables est réservée à un autre poète, Rimbaud. C’est également l’occasion de découvrir un étrange appareil que mettront au point les fameux frères Lumière.

 

Sherlock Holmes et le secret des lettres est un roman en trois parties dont les deux premières sont déjà parues séparément, qui ont subi quelques modifications afin d’obtenir un ouvrage homogène. Jean-Claude Bologne met en scène un héros connu de par le monde entier pour écrire un ouvrage qui privilégie plus les réflexions mystiques que l’action et les déductions qui ont fait la renommée du personnage de Conan Doyle.

Un pastiche intéressant qui nous offre la confrontation entre protagonistes fictifs et réels et qui dévoile une autre facette holmésienne, préfigurant entre autres, la passion de Conan Doyle pour le spiritisme.

Jean-Claude BOLOGNE : Sherlock Holmes et le secret des lettres. Editions du Rocher. Parution le 6 mars 2003. 192 pages.

ISBN : 978-2268045139

Partager cet article
Repost0
23 novembre 2018 5 23 /11 /novembre /2018 05:02

Entre Corto Maltèse et Bob Morane…

Georges-Jean ARNAUD : Les Compagnons d’éternité

1936 à Hambourg. Trafiquant d’armes mais pas que, Ugo Cardonne revient dans le port allemand qu’il n’a pas visité depuis 1931.

Depuis son dernier passage, la ville a bien changé. Les soldats nazis traquent les Juifs, et afin d’aider une jeune femme, Myriam Hermann, lui demande de l’aider à exfiltrer une trentaine de personnes, dont des femmes et des enfants. Même s’il est humaniste, Ugo Cardonne ne fait pas œuvre pie sans quelque dédommagent financier.

Comme il doit également procéder à un chargement de charbon. Ugo Cardonne accepte à condition de percevoir dix mille dollars et que les fugitifs soient vêtus comme des dockers, les enfants étant placés dans des sacs. Le transbordement nocturne s’effectue sans problème jusqu’au moment où le quai est éclairé par de multiples projecteurs. L’Obersturmführer Stackering, à la tête d’un détachement de SS, sait qu’Ugo vient d’embarquer illégalement bon nombre de personnes à destination de la Palestine. Certains possèdent des visas, pas tous, mais peu lui chaut. Tout le monde doit débarquer et emmener dans un camp de concentration. Enfin, selon lui, un lieu de détention tout à fait convenable. A la condition que…

Car l’Obersturmführer offre, impose une monnaie d’échange. Un chantage humain inhumain, car il n’ignore pas qu’Ugo est le protégé du cardinal de Naples, Monseigneur Barancoli, ennemi acharné de Mussolini. L’homme d’Eglise devant posséder des informations sur un certain Luigi Spaggio. Stackering souhaiterait ardemment retrouver ce jeune homme d’une vingtaine d’années et dans le cas où Ugo accepterait ce marché, il pourrait appareiller à bord du Vesuvio, son cargo rouillé, livrer les machines-outils qui sont entreposés dans la cale, mais auparavant se rendre à Naples afin que le prélât lui donne tous renseignements utiles sur Spaggio. En contrepartie l’Obersturmführer promet de libérer les Juifs qu’il vient de faire arrêter.

Mais auparavant Ugo doit rencontrer le banquier Bruckner qui soutient financièrement ses démarches. En entretien privé Bruckner confie à Ugo que ce Spaggio n’est autre que le fils du Juif Errant. Direction Naples afin de pouvoir s’entretenir avec le Cardinal Barancoli mais le rendez-vous est manqué. Le prélât décède dans un attentat et ne peut que révéler dans son dernier souffle qu’Ugo doit retrouver son chapeau qui s’est envolé dans la déflagration.

Commence dans Naples une véritable chasse au chapeau, chasse à laquelle participe Myriam, qui a eut la possibilité de voyager, ainsi que les amis et associés d’Ugo, Hassanian, le cuistot et Milfried, le bosco, qui ont du mal à digérer l’affront causé par Stackering et auquel a dû se plier le capitaine. Une fois le couvre-chef récupéré, il leur faut déchiffer un message manuscrit qui leur donne l’indication du lieu où se retrouve Spaggio.

Direction l’Espagne où le jeune combat auprès des Brigades Internationales. Mais Stackering est présent surveillant Ugo et ses amis. Après bien des péripéties, Ugo se rend d’abord à Teruel, où il retrouve notamment un ami combattant les Franquistes du nom d’André Malraux, puis Barcelone, Nice, et enfin dans les environs de Florence où tout se jouera, si l’on peut parler de jeu de piste.

 

Dans ce roman d’aventures teinté d’une grosse dose de fantastique dans le dernier quart du récit, Georges-Jean Arnaud retrouve une fougue historique dans laquelle il déploie son aversion pour le fascisme. Aversion qui imprégnait certains de ses romans d’espionnage avec comme héros Le Commander, mais également certains romans publiés dans la collection Angoisse dont La dalle aux Maudits par exemple.

Mais il ne s’agit pas d’une résurgence nazie, le roman étant placé dans la période trouble de l’année 1936. Il s’agit d’une intrigue inscrite dans le double jeu et le machiavélisme d’un homme, d’un Nazi qui recherche un supposé détenteur de l’immortalité. Mais sous ce phénomène se cache une autre motivation.

La dernière partie du roman est grandiloquente et détonne par rapport au début du récit, lui ôtant une certaine crédibilité, mais en phase avec le principe de cette collection Aventures & Mystères qui ne connaîtra que la parution de seize titres avec pourtant au catalogue d’excellents auteurs comme G.-J. Arnaud, François Sarkel qui est devenu depuis Brice Tarvel, Michel Pagel, Gilbert Gallerne, Brice Pelman, Christian Vila, Pierre Pelot…

Mais cette collection oscillait, peut-être trop, entre deux lectorats et le public ne savait s’il s’agissait de romans pour la jeunesse ou pour adultes. Une certaine confusion qui ne lui a guère porté chance. Les manuscrits prévus pour paraître avant la disparition de cette collection l’ont été dans la collection SF qui a remplacé Anticipation qui se déclinait en sous-séries, dont SF Mystère, SF Polar et quelques autres.

 

Son cargo, chargé de caisses d’armes, ne pouvait pénétrer sans les eaux territoriales de Gibraltar car les Anglais auraient aussitôt saisi la cargaison, au nom d’un pacte de non-agression signé par plusieurs pays européens, mais il semblait que les armes destinées aux républicains fussent plus souvent visées que celles livrées à Franco par les Italiens et les Allemands.

 

Avec de l’or par poignées, on finit par amollir les consciences les plus fanatiques.

Georges-Jean ARNAUD : Les Compagnons d’éternité. Une aventure d’Ugo Cardonne. Collection Aventures et Mystères N°7. Editions Fleuve Noir. Parution le 02 septembre 1995. 192 pages.

ISBN : 2-265-05370-8.

Partager cet article
Repost0
9 novembre 2018 5 09 /11 /novembre /2018 06:09

N’est pas une patte de lapin même s’il a été trouvé près des abattoirs…

Claude IZNER : Le talisman de la Villette.

Le jeune commis de la librairie Elzevir, Joseph Pignot, ne se contente pas de classer, vendre ou réceptionner livres neufs et anciens, il est habité par une passion, outre celle qu’il voue à sa jeune épouse Iris, pour l’écriture. Et il compte bien devenir l’égal, voire plus, de ces feuilletonistes qui fournissent des œuvres pour divers journaux.

Et lorsque le grand patron du Passe-partout, journal qui publie ses récits, lui déclare :

Mon petit Pignot, l’action de votre roman se passe en Transylvanie, et personne ne sait où ça se trouve. Simplifiez, tenez-vous en à l’eau de rose et au mystère, supprimez les descriptions et la psychologie.

Claude Izner en rédigeant ce passage n’a pas réellement suivi les conseils prodigués et ce roman comporte plus de pages de descriptions historiques que le corps de l’intrigue. Si les deux sœurs, oui car sous le pseudonyme de Claude Izner se cachent deux sœurs qui furent bouquinistes sur les quais de la Seine, mais je ne vous apprends rien, si les deux sœurs avaient appliqué leurs préceptes, le livre aurait été diminué de moitié, au moins.

Mais quel plaisir de retrouver au fil des pages, des personnages qui ont réellement existé, tels Satie, Lautrec, Anatole France, et bien d’autres qui donnent du corps à ce récit dans lequel nous retrouvons nos amis, un libraire est toujours un ami, Kenji Mori et Victor Legris, et le commis Joseph Pignot qui depuis peu fait partie de la famille, s’étant marié à Iris, la fille de Kenji et la sœur de Victor. Je peux même vous dévoiler qu’Iris attend un heureux événement. Mais Victor Legris délaisse quelque peu la librairie, s’étant entiché depuis peu de la photographie, et développant lui-même ses clichés.

 

En ce 7 janvier 1894, sur la côte nord du Cotentin, à Landemer, petit village entre Cherbourg et Beaumont-Hague, la tempête fait rage. Un bateau balloté par les vagues furieuses est mal en point. Corentin Jourdain, un ancien marin qui à la suite d’un accident est devenu boîteux, vit seul avec son chat Gilliatt. Il recueille une jeune femme qui allait se noyer. Il la soigne en la frictionnant nue vigoureusement et elle sort momentanément de son évanouissement, demandant si elle est à Southampton. Elle porte à une oreille un cabochon bleu, son jumeau manque.

Cette jeune femme ressemble à Clélia, un amour de jeunesse de Corentin, qui est morte vingt ans auparavant. Il la confie à un hospice tenu par des religieuses. Il découvre sous son lit le sac appartenant à la malheureuse. L’objet contient les papiers d’identité au nom de Sophie Clairsange, si c’est son véritable nom, et un cahier bleu qu’il s’empresse d’ouvrir. Et ce qu’il lit le laisse pantois. Aussitôt il décide de se rendre à Paris, emmenant avec lui toute ses économies.

Un mois plus tard, Martin Lorson, ancien rond-de-cuir au Ministère des Finances qui a démissionné pour convenances personnelles, se rend à l’octroi de la Villette remplacer un copain. C’est l’un des nombreux petits boulots auxquels il s’adonne et lui laisse du temps libre pour écluser sa fiole de rhum et lire ses romans, Victor Hugo, Stevenson et bien d’autres. Au cours de la soirée, il aperçoit un couple s’approcher. La femme, masquée, a l’air de se moquer de son compagnon qui l’étrangle. Peu après un autre individu, à moins que ce soit le même, Lorson n’est pas très sûr, se penche sur le cadavre. Il l’examine puis à son tour s’éloigne. Lorson se rend sur les lieux et trouve coincé entre deux pavés un médaillon.

 

Quelques jours plus tard, Maurice Laumier, un peintre, entre dans l’échoppe de Victor Legris et demande au libraire d’enquêter sur une affaire de disparition. Son amie Mireille a lu dans le journal que le cadavre d’une femme aurait été découvert près de la Villette, et il faut absolument que Legris se rende à la morgue afin de déterminer si le cadavre est celui de sa cousine disparue ou non.

Et voilà Victor Legris et Joseph, son commis et beau-frère, lancés dans une nouvelle enquête qui les mènera de la Villette et ses abattoirs, au quartier Monjol, repaire des prostituées, en passant par les beaux quartiers de Courcelles, aux Buttes-Chaumont et naturellement le quartier Latin. Ils vont côtoyer des personnages hauts en couleurs, comme Laumier le peintre qui pense avoir enfin décroché une parcelle de gloire en brossant le portrait du romancier Georges Ohnet, le père Boniface qui tel le docteur Schweizer le faisait dans la brousse africaine, soigne les tapineuses, les miséreux, leur apportant médicaments, nourriture et réconfort moral.

Des membres de la bonne société, des notables ou considérés comme tels sont assassinés, ponctuant les pérégrinations de nos détectives privés qui mettent du temps pour résoudre cette affaire, mais sont plus rapides toutefois que les policiers.

Bien d’autres personnages, célèbres ou non, gravitent dans cette histoire de mœurs. L’on y rencontre au détour des pages, Thadée Natanson, Erik Satie, et quelques autres qui donnent de l’épaisseur à cette narration historique, à cette balade dans un Paris en pleine mutation, sous l’impulsion donnée par le baron Haussman, et qui voit la transformation de lieux de perdition en lieux de promenade, ou d’embuscade, comme la grotte du parc des Buttes-Chaumont.

 

L’enquête policière est sertie dans un écrin historique, culturel, géographique, et si les aspects descriptifs étaient effacés, il ne resterait de ce roman que la moitié des pages. Et encore. Car nos amis Legris, Mori et Joseph, entourés de leurs femmes, dont Iris qui s’apprête à pouponner, ou maîtresses, et de la chatte de Victor qui offre au couple trois adorables chatons, ne se contentent pas d’enquêter. Ils le font en parallèle de leurs occupations, et heureusement que Victor possède un vélo, cela lui permet de se déplacer en certaines circonstances plus rapidement.

Les notes en bas de pages nous rappellent que Claude Izner place son récit dans un contexte historique comportant sociétés secrètes et procès de femmes ayant eu recours à l’avortement.

 

L’homme qui est apte à promettre est apte à oublier.

Claude IZNER : Le talisman de la Villette. Collection Grands Détectives N°3941. Editions 10/18. Parution le 19 octobre 2006. 352 pages. 8,10€.

ISBN : 978-2264038807

Partager cet article
Repost0
2 novembre 2018 5 02 /11 /novembre /2018 06:07

Elles ne le sont pas toutes ! Heureusement ?

Pierre Alexis PONSON du TERRAIL : La femme immortelle.

Ce roman, publié en 1869 ou 1870 selon certains, tandis que d’autres affirment qu’il aurait été édité en 1852, les dates divergent, est une amusante incursion dans le fantastique vampiresque et historique puisque l’action se déroule durant la Régence de Philippe d’Orléans, qui suppléa le jeune roi Louis XV qui n’avait que cinq à la mort de son père le Roi Soleil. Cette transition historique servit de support à de nombreux romans de cape et d’épée, dont le plus connu peut-être est Le Bossu de Paul Féval, dont le début de l’intrigue se déroule avec les soubresauts du système financier imaginé et instauré par le banquier Law.

Comme tous les soirs, le Régent Philippe d’Orléans a convié à sa table quelques fidèles et favoris. Parmi les présents, le Cardinal Dubois, qui a invité un de ses parents éloignés, le marquis de La Roche-Maubert, qui arrive juste de sa Normandie. Mais un couvert attend un autre convive. Le chevalier d’Esparron, qui a disparu depuis quatre mois. On est sans nouvelle du jeune gentilhomme et les questions vont bon train. On sait qu’il avait reçu une missive émanant d’une femme, le parfum qui se dégageait de cette lettre ôtant les doutes, lui donnant rendez-vous de nuit au bord de l’eau sur l’ancien emplacement de la Tour de Nesles.

La police s’était renseignée et selon les sources, quelques précisions avaient été obtenues. Il se serait rendu dans un cabaret dénommé à la Pomme d’or, tenu par la femme Niolle. Selon la cabaretière, une femme portant un loup et arrivant par barque aurait soupé avec le chevalier puis ils auraient pris une chambre. Pendant ce temps les deux mariniers, masqués également, auraient attendu dans l’embarcation. Au petit matin, l’inconnue serait repartie par voie d’eau laissant d’Esparron dormir. Curieuse l’aubergiste était allée voir dans la chambre et avait aperçu d’Esparron avec au cou comme une piqûre d’épingle. Le soir même la femme était revenue, avait soupé avec le chevalier puis ils étaient repartis ensemble.

La narration de cet épisode remémore quelques souvenirs au marquis de la Roche-Maubert. Quarante-cinq ans auparavant la même mésaventure lui serait arrivée. Mésaventure qu’il narre aux convives ébahis. Après avoir été entraîné, les yeux bandés, au fil de l’eau et amené dans un endroit secret, probablement sous terre dans une salle luxueuse, il avait été nourri et désaltéré de mets et vins fins, puis s’était endormi. A son réveil, il avait ressenti une petite coupure au cou. La femme lui avait confié que c’était une épingle de sa broche qui l’avait effleuré puis déclaré qu’elle avait bu son sang. Elle était plus vieille que son physique charmant le laissait supposer car elle avait affirmé qu’elle avait connu le roi Henri IV.

Il s’agissait pour elle de recueillir du sang afin de devenir immortelle et de transformer ce liquide en or. Convaincue de sorcellerie, elle avait été jugée et brûlée sur un bûcher. Il ne restait plus des cendres quelques heures plus tard.

C’est alors que d’Esparron se présente, comme si de rien n’était et s’installe à table. Il porte au cou comme une petite blessure mais il démontre rapidement que c’est lui-même qui se fait des ponctions à l’aide d’une lancette.

Mais le mythe de la femme immortelle, revenant quarante-cinq ans plus tard et commettant les mêmes méfaits, est lancé. De nombreux protagonistes sont sur ses traces, des policiers, des ennemis, mais des amis également, heureusement pour elle.

 

De nombreux personnages évoluent dans ce roman dense, compact, dont Castirac, jeune chevalier gascon dont l’aspect physique et plus particulièrement son nez n’est pas sans rappeler Cyrano de Bergerac, personnage créé par Edmond Rostand en 1897. D’autres personnages font leur apparition au cours de l’histoire, tel le prince margrave de Lansbourg-Nassau, riche noble apparenté à la famille royale de l’empire germanique. Des femmes, jeunes ou non, belles ou non, avenantes ou véritables mégères damnent le pion à bien des personnages masculins, Ponson du Terrail ne se montrant nullement machiste. Et naturellement cette fameuse femme immortelle qui a traversé les siècles sans aucun dommage physique. Mais il faut se méfier des apparences.

Ponson du Terrail nous entraîne dans une histoire vampiresque d’inspiration fantastique dont tout est révélé à la fin de façon rationnelle, sauf le thème de l’alchimie qui perdure et donne du sel à l’histoire.

Et nous sommes plongés dans une histoire véritablement « rocambolesque » avec de très nombreux rebondissements, des pérégrinations sous la Seine, et des retours en arrière, naviguant allègrement l’époque au cours de laquelle se déroulent l’histoire et sa genèse quarante-cinq ans auparavant, de la romance amoureuse aussi.

Malgré ce que l’on pourrait croire, ce roman n’est pas un fouillis mais une intrigue extrêmement maîtrisée, aux imbrications machiavéliques, et l’auteur retombe sur ses pieds à chaque fois, reprenant le fil du récit bien des chapitres après qu’une action se soit déroulée.

Nonobstant toutes les critiques négatives que l’on lire ici et là concernant Ponson du Terrail et ses fameuses incohérences, je n’ai trouvé dans le récit aucune de ces petites phrases ou descriptions incohérentes dont il serait coutumier à en croire certains. Surtout sachant que l’auteur travaillait sur plusieurs histoires à la fois, qu’il ne se relisait pas et fournissait jour après jour, donc sans correction possible, ses feuilletons.

 

Pierre Alexis PONSON du TERRAIL : La femme immortelle. Collection L’Aube Poche Littérature. Editions de l’Aube. Parution 20 octobre 2016. 472 pages. 14,00€.

ISBN : 978-2815920124

Partager cet article
Repost0
15 octobre 2018 1 15 /10 /octobre /2018 05:15

C'est la romance de Paris
Au coin des rues, elle fleurit
Ça met au cœur des amoureux
Un peu de rêve et de ciel bleu…

Nathalie TOURNILLON : Légendes et récits de Paris.

Paris, capitale de la France, Lutèce pour les Anciens, cité phare des touristes étrangers, ne possède pas un remarquable foisonnement de contes et légendes. Peut-être est-ce dû à l’attrait qu’a suscité la ville dite Lumière envers les provinciaux, attrait souvent exacerbé par le besoin de trouver du travail, un moyen d’existence que la province ne pouvait plus délivrer à ses enfants.

Paris est un véritable conglomérat et les légendes donc qui lui ont propres ne sont pas légion et prennent souvent racine dans son passé, son vécu pour parler moderne, un passé qui s’inscrit le plus souvent dans des évènements qui font partie du patrimoine historique.

Ainsi qui n’a entendu conter dans son plus jeune âge et dans les manuels scolaires, l’action de Sainte Geneviève pour contrer l’invasion des Huns, et des autres. Qui n’a encore en mémoire l’anathème proféré par Jacques de Molay, général des Templiers à l’encontre du roi Philippe Le Bel et du pape Clément V…

Qui n’a lu ou entendu parler des mésaventures des quatre fils Aymon, des amours tragiques de la tour de Nesle (histoire immortalisée par Michel Zévaco dans Buridan, le héros de la Tour de Nesle) ou celles d’Héloïse et Abélard… ou encore qui n’a vibré aux exploits de Cartouche, le Prince des voleurs et le voleur des princes ou ne s’est posé la question de connaître l’identité de l’homme au masque de velours.

Il existe aussi cette légende de l’Homme rouge des Tuileries dont nous retrouvons avec saveur l’influence dans l’excellent ouvrage de François Darnaudet : Le fantôme d’Orsay, ou encore celle du Moine bourru. Mais il existe d’autres légendes, moins connues mais tout aussi noires, frôlant le fantastique, mettant en scène la main du Diable : Le terrible secret des délicieux pâtés de la rue des Marmousets, Les pentures diaboliques de Notre-Dame, La fidélité ou encore Le puits qui parle.

Quant à La leçon du Pont-aux-ânes, aujourd’hui elle ferait vibrer d’indignation les ligues féministes. Quelques-unes ne puisent pas directement leurs racines dans les légendes profondes de Paris, mais sont des récits récents mais qui prennent toutefois leur place dans ce recueil, soit par leur imaginaire comme L’arbre de Modigliani, soit par le lieu qui les ont inspirés comme Les racontars de la Tour Eiffel.

Un livre qui n’est pas réservé aux seuls Parisiens mais que tout un chacun pourra lire avec plaisir même si certaines histoires auraient mérité un développement plus ample. Ces histoires, disons plutôt historiettes, sont précédées d’un plan de Paris avec l’emplacement de l’endroit où elles se déroulent, ainsi qu’une histoire simplifiée des origines mythiques de Paris, alias Lutèce.

Nathalie TOURNILLON : Légendes et récits de Paris.
Nathalie TOURNILLON : Légendes et récits de Paris. Collection Contes et légendes. Editions Ouest-France. Parution le 1er février 2004. 192 pages.

Réédition 22 janvier 2008.

ISBN : 978-2702888957

Partager cet article
Repost0
30 septembre 2018 7 30 /09 /septembre /2018 06:38

T'as voulu voir Vesoul
Et on a vu Vesoul,

Stéphane MOURET : Tanagra.

Les paroles de cette chanson de Jacques Brel se sont incrustées dans la tête de Roger (prononcez Rodjeur !) puis de Marcellin, deux membres de la TAN Compagnie.

Et ce n’est pas par hasard s’ils fredonnent cette rengaine. Ils ont été envoyés en mission dans cette ville de la Haute-Saône car un incident a été enregistré, a même fait l’objet d’un article dans le journal local.

Une jeune femme se complait à parcourir les rues de l’accueillante cité dans le plus simple appareil, danse, se baigne nue dans la rivière, souriante, aguicheuse, s’exhibant devant les badauds ébaubis, et pas uniquement les adolescents, et s’enfuyant lorsque la maréchaussée est envoyée sur place. Cela les change les braves pandores qui préfèrent cette tâche à celle de débusquer voyous, cambrioleurs, lanceurs de projectiles en tous genres.

D’après leurs renseignements, et sur la foi des témoignages, nul doute pour les envoyés de la TAN compagnie qu’il s’agit d’une Tanagra, ces statuettes qui datent de quelques siècles avant J.C. et découvertes en Grèce. Et justement le musée Georges-Garret, installé dans un ancien couvent des Ursulines, possède outre de très nombreux tableaux et sculptures signés Jean-Léon Gerôme, un tanagra de belle facture et qui est représenté en couverture.

Mais Roger a disparu et Marcellin visite ce musée, découvrant la statuette qui ressemble fort à la nymphe qui met les Vésuliens en émoi (et moi aussi !). Alors qu’il déambule, il est abordé par une charmante jeune femme qui lui fournit, sans qu’il ait besoin de le demander (il existe encore des personnes serviables même si elles ont tendance à s’immiscer un peu trop) l’origine de Tanagra et lui explique les symboles des tableaux tel un maître de conférence.

Il est rejoint par Teddy qui lui aussi a son rôle à jouer, car chaque membre de la TAN Compagnie possède sa partition, une association qui comporte des Démineurs, des Chasseurs, des Cafouilleurs. Marcellin s’extasie devant le Tanagra, mais un détail dans un tableau l’interloque. C’est ce que l’on pourrait appeler un tableau vivant. Sa mission va durer quelques jours et il prend, de même que Teddy une chambre dans un hôtel renommé de la cité. Mais il sacrifie à la bonne chère et à la chair, car Anaïs ne se montre pas uniquement une guide très documentée, mais experte également en langue. Elle est notamment professeur de latin.

 

Pollice Verso

Pollice Verso

Ce court roman charmant est tout autant didactique que fantastique et l’intrigue s’insère avec habileté dans la pédagogie. Le lecteur, qui comme moi, ne connaissait pas Jean-Léon Gérôme, découvrira un peintre et un sculpteur d’inspiration classique, un représentant de l’art académique alors que l’impressionnisme détrônait toutes formes d’art pictural.

Le lecteur averti avait déjà eu l’occasion d’apprécier le style de Stéphane Mourret, en collaboration avec son ami Jérôme Sorre, dans des romans ou nouvelles de fort belle facture. Une imagination sans limite et une narration parfois poétique et travaillée, pour un fantastique que l’on peut qualifier de classique. Un peu à la façon de ces vieux maîtres que furent Rosny Aîné, Sheridan Le Fanu, et quelques autres, qui écrivaient avec joliesse. Mais l’on ne peut s’empêcher de penser au Portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde et au Portrait du mal de Masterton, sans que pour autant ce roman soit une parodie de l’un ou de l’autre. Il s’agit bien d’une œuvre personnelle permettant de découvrir un artiste, une ville, et une intrigue judicieusement ficelée.

 

Stéphane MOURET : Tanagra.

Stéphane MOURET : Tanagra. Collection LoKhaLe N°7. Editions de La Clef d’Argent. Parution le 9 septembre 2018. 122 pages.

ISBN : 979-1090662506

Partager cet article
Repost0
25 septembre 2018 2 25 /09 /septembre /2018 07:24

Une autre facette littéraire du créateur

d’Arsène Lupin !

Maurice LEBLANC : La frontière.

Quarante ans ont passé depuis la défaite de Sedan, mais Morestal, maire et conseiller de Saint-Elophe dans les Vosges, examine chaque jour de chez lui la frontière avec l’Allemagne.

Ancien entrepreneur et propriétaire d’une scierie florissante il a fait construire une grande demeure au hameau du Vieux-Moulin d’où il peut surveiller la région, et principalement la partie des Vosges devenue allemande. Il remarque ce matin-là à l’aide de son télescope sur pied qu’un poteau allemand marquant la frontière vient d’être mis à bas. Et ce n’est pas la première fois qu’un tel incident de ce genre se produit.

Un homme arrive en catimini le prévenant qu’un déserteur doit passer la frontière le soir même. Mais Morestal n’aime pas trop ce Dourlowski à la mine chafouine. D’autant que son fils, professeur quadragénaire et sa femme Marthe doivent arriver bientôt. Ils résident à Paris et ne se sont pas vus depuis un certain temps. Justement ils sont aux portes du jardin. Les retrouvailles vont toutefois se teinter d’acrimonie.

En effet, autant Morestal est un revanchard, n’acceptant pas la spoliation d’une partie du territoire français par l’Allemagne, autant Philippe est un pacifiste convaincu, ayant déjà deux ouvrages à son actif. Il vient d’en publier un troisième, La Paix quand même, sans nom d’auteur. Bientôt la conversation tourne autour de ce sujet qui divise les deux hommes, mais Morestal ignore que c’est son fils qui a publié cet ouvrage qu’il déclare tendancieux et antipatriotique.

L’arrivée de Jorancé, le commissaire spécial, et de sa fille Suzanne, clôt les débats. Philippe est content de retrouver la jeune fille qui vit seule avec son vieux père, sa mère étant partie en goguette à sa naissance. Suzanne a vécu quelques temps avec Marthe et Philippe à Paris, le professeur la promenant dans la capitale à la découverte des monuments et l’emmenant à des spectacles.

Mais entre Suzanne et Philippe se sont tissés des liens qui pourraient faire éclater le ménage. Philippe tente de résister aux assauts de la belle Suzanne, mais avec de plus en plus de difficultés.

Morestal a le malheur de dessiner un croquis sur lequel il dessine un passage dans la frontière, puis qu’il jette dans une corbeille. Alors qu’il a le dos tourné Dourlowski s’empare du document. Morestal et Jorancé se rendent de nuit dans le bois où doit passer le déserteur, et ils sont accompagnés pendant un certain temps de Philippe qui les quitte afin de rejoindre Suzanne. Mais erreur ou pas, ils sont faits prisonniers par des Allemands qui leur reprochent d’avoir franchi la frontière.

 

Toute l’intrigue de ce roman tourne autour de la personne de Philippe Morestal et propose deux histoires passionnantes. La confrontation entre le père qui prône la revanche en aidant les déserteurs dans un esprit belliqueux envers les Allemands et le fils pacifiste convaincu, et l’amour qui s’instaure entre Philippe et Suzanne sous les yeux de Marthe.

Ce fait divers marque d’une façon négative les relations franco-germaniques. Morestal est libéré mais est obligé d’être soigné par le docteur de famille à cause d’un cœur défaillant. Cela ne l’empêche pas de vilipender les Uhlans qui détiennent son ami Jorancé. Cet incident remonte jusqu’aux plus hautes instances gouvernementales, aussi bien du côté français que du côté allemand. Et le spectre de la guerre est ressenti différemment. Comment réagira Philippe dans ce conflit qui se prépare ? Un cas de conscience qui le divise.

 

La Frontière est un roman prémonitoire car publié en 1911, il anticipe certains événements qui vont précéder la guerre de 1914/1918. Evidemment la déclaration de guerre n’est pas sujette à cet épisode, mais c’est la confrontation entre les esprits belliqueux et les pacifistes qui est ici analysée. Et il faut bien reconnaître que la frontière entre les deux pays était une véritable passoire. Et les soldats Alsaciens intégrés de force dans l’armée allemande n’avaient qu’une envie, celle de franchir la ligne bleue des Vosges.

Roman de guerre, roman d’anticipation non scientifique, roman de paix et roman d’amour également, La Frontière n’a pas subi les outrages du temps, et se lit avec plaisir. Ce roman pourrait très bien avoir été écrit par un auteur actuel, seul le style littéraire différencie car aucune fausse note n’est à relever, aucune vulgarité, aucune grossièreté, aucune scène équivoque n’est à déplorer. C’est également un reportage, un témoignage sur l’état d’esprit d’une partie de la population française.

 

Ceux qui regardent en avant peuvent encore comprendre les croyances d’autrefois, puisqu’elles furent les leurs quand ils étaient jeunes. Mais ceux qui s’accrochent au passé ne peuvent pas admettre des idées qu’ils ne comprennent pas et qui heurtent leurs sentiments et leurs instincts.

Mais la chasse mon garçon, c’est l’apprentissage de la guerre.

Toutes les douleurs individuelles, toutes les théories, tout disparraissait devant la formidable catastrophe qui menaçait l’humanité, et devant la tâche qui incombait à des hommes comme lui, affranchis du passé, libres d’agir suivant une conception nouvelle du devoir.

Le monde aura entendu la protestation de quelques hommes libres, de professeurs comme moi, d’instituteurs, d’écrivains, d’hommes qui réfléchissent et qui n’agissent que d’après leurs convictions, et non comme des bêtes de somme qui vont à l’abattoir pour s’y faire égorger.

Si vous préférez la version pour liseuse, vous pouvez télécharger gratuitement le texte de La Frontière sur le site suivant :

A découvrir également :

Maurice LEBLANC : La frontière. Collection Mikros Classique. Editions de l’Aube. Parution 5 avril 2018. 296 pages. 14,00€.

Première publication dans L’Excelsior du 16 décembre 1910 au 23 janvier 1911. Publication en volume chez Lafitte en septembre 1911.

ISBN : 978-2815927949

Partager cet article
Repost0
4 septembre 2018 2 04 /09 /septembre /2018 07:29

Des copines de Poupée de cire, poupée de son ?

Robert DARVEL : Femmes d’argile et d’osier.

Créé par George Lucas, Indiana Jones a réellement vécu mais sous une autre identité.

En effet l’explorateur et scientifique Hiram Bingham a servi de modèle pour mettre en scène ce héros populaire symbolisé par Harrison Ford qui lui a donné les traits physiques inscrits dans la mémoire des cinéphiles.

Mais Robert Darvel, dans ce roman, met en scène le véritable Hiram Bingham dans des aventures réellement vécues. Celles de la découverte du Machu Picchu dans les Andes péruviennes.

Au petit matin du 19 juillet 1911, l’expédition Yale-Pérou quitte Cuzco, la ville surnommée le Nombril du monde, pour les lointains, à la conquête de l’inconnu. Elle est composée de naturaliste, topographe, géologue et autres savants ainsi que d’assistants, d’un muletier, et en avant pour l’aventure sur l’Altiplano.

Dans la montagne, vivent de nombreuses personnes, dont Ambrocio qui dans une autre vie, pas si longtemps, était un colporteur. Mais à la suite d’un accident le voici affublé d’une jambe de substitution. Sa femme est malade, ce qui n’empêche pas l’homme de la maltraiter. Quant à Anacleto, le paysan, il est seul à apercevoir les quatre Campas, des invisibles scarifiées. Et la messagère, à peine vêtue de cuir rouge, qui dispose sur le sol des poupées d’osier habillées de minces lanières de cuir rouge.

Magdala, l’égarée d’osier, est ainsi décrite :

La jeune femme recueillit un peu de glaise tassée dans une fente de la roche et s’en frotta les mains pour les affiner de nouveau. Portée par sa coquetterie, elle inspecta son corps où son délicat vêtement de cuir rouge le laissait apparaître nu, c’est-à-dire partout sauf sous les pieds, sur les fesses, la poitrine et le visage. Elle trouva une estafilade derrière sa cuisse gauche, caressa du doigt deux tiges de son armure d’osier au fon de l’égratignure et frissonna aussitôt d’une émotion où se mêlèrent plaisir et inquiétude. Elle s’empressa de la combler avec minutie, veillant à se tenir immobile le temps que l’argile sèche et acquière son élasticité. Une fois retournée dans l’en-deçà, Magdala s’oindrait de glaise aux pigments soigneusement choisis de manière à corriger la teinte trop ocre du cataplasme. Le moment était moins à l’afféterie que de s’éperdre en griseries nouvelles.

 

Nous entrons dans le domaine du fantastique qui va jalonner le parcours de Hiram Bingham et ses compagnons dans un paysage proche de la fantasmagorie :

Un voyageur esseulé, venir s’y rafraîchir, n’aurait saisi la folle caractéristique de l’endroit qu’au terme d’une longue errance du regard. Détaillant la belle ouvrage, l’œil subitement intrigué aurait cherché en vain les abouts et les mortaises d’un assemblage architectural, la jointure des blocs d’un parapet : venelles, murs, fontaines, marches, arcs-boutants, pilastres, linteaux, terrasses, rigoles, égouts, autels et remparts, tout est ciselé d’une seule pièce, salamandre, saurien, condor, puma, rampe d’escalier, chambranle, mortier et jusqu’à la panne où glisser l’anse des cruches. Une montagne entière sculptée en une ville grandeur nature. Un chou n’offre pas plus de circonvolutions. D’un endroit vers un autre, le lacis lithophage propose un itinéraire tout sauf hasardeux.

Mais comment est arrivée Magdala dans notre monde ? Tout simplement en s’égarant hors de l’œil de la montagne. Un œil, un passage gardé, disputé par des hommes de rouille et de fers, perdus dans les brumes de l’en deçà. Mais je mets la charrue avant les bœufs, ce qui n’est pas conseillé lorsqu’on progresse dans la montagne, tout autant en descente qu’en montée.

Le lecteur a l’impression de voyager, en compagnie de Hiram Bingham et son équipe, dans un monde parallèle, qui serait pareil au nôtre mais avec des variantes que l’on n’ose appeler créatures humaines.

 

Robert Darvel pousse à l’extrême le défaut de ses qualités. A l’instar de ces romanciers du XIXe siècle, début du XXe, il privilégie l’écriture à l’intrigue. Je pense à, toutes proportions gardées, à des auteurs tels que Gustave Flaubert, Emile Zola, Anatole France et quelques autres qui oscillaient entre deux genres. Il n’a pas écrit un roman populaire mais un roman littéraire.

Les descriptions des paysages, des personnages, sont fouillés, travaillés, ralentissant quelque peu le rythme de la narration, et le lecteur lit, bercé par les mots, les phrases qui s’enchaînent comme ces alpinistes grimpant une montagne abrupte accrochés les uns aux autres, se défiant des périls, sûrs d’eux et de l’effet qu’ils produisent sur les spectateurs qui les suivent dans leurs ascensions. Robert Darvel s’érige en premier de cordée avec le pied assuré, avançant lentement mais sûrement dans son récit.

On se laisse entraîner au fil des pages, nonchalamment allongé dans ce bateau-livre qui nous emmène au gré du bon vouloir du narrateur-capitaine dans des phrases qui se catapultent parfois tels des récifs émergeant des flots tour à tour quasi immobiles ou s’écoulant en gros bouillons rafraîchissants.

On pourrait user de toutes les métaphores possibles mais il n’en reste pas moins que ce parcours se grave dans l’esprit, des phrases poétiques qui effacent parfois l’intrigue.

 

Robert DARVEL : Femmes d’argile et d’osier. Collection La Bibliothèque voltaïque. Editions Les Moutons électriques. Parution 1er mars 2018. 264 pages. 19,90€.

ISBN : 978-2361834470

Partager cet article
Repost0
21 août 2018 2 21 /08 /août /2018 07:35

Au moins cela fait plaisir de voir quelqu’un sourire !

Gyles BRANDRETH : Oscar Wilde et le cadavre souriant

Parti aux Etats-Unis où il a été invité pour des conférences, auréolé de la parution récente de son recueil de poèmes publié en 1881, Oscar Wilde est aussi connu pour son excentricité vestimentaire. Il débarque le 2 janvier 1882 à New-York puis il va parcourir le pays, le succès le boudant au début de sa tournée mais allant grandissant.

A Leadville, dans le Colorado, il fait la connaissance dans une situation critique pour son portefeuille d’un professionnel des jeux de cartes. Un certain Eddie Garstrang qu’il retrouvera, à la fin de son périple, dans les bagages d’un homme de théâtre français, Edmond La Grange, dont la tournée a été triomphale. Garstrang, ayant perdu aux cartes contre La Grange, est devenu son secrétaire. Et comme le vieil habilleur de l’homme de théâtre vient de décéder, ce sera Traquair, le serviteur noir américain d’Oscar, qui le remplacera.

Mais ce qui unit Oscar à La Grange, c’est la proposition que ce dernier a faite au poète. Traduire Hamlet afin que la pièce de Shakespeare soit jouée à Paris, au Théâtre La Grange. Oscar embarque fin décembre en compagnie de la troupe La Grange afin de regagner l’Angleterre puis la France. Autour de la table, Edmond La Grange, Liselotte La Grange, sa mère qui pour tout le monde est Maman et est affublée d’un détestable caniche nommé Marie-Antoinette. Richard Marais est l’homme d’affaires de la compagnie. Il est chauve, terne, sans personnalité ni point particulier sauf celui d’être atteint de surdité. Carlo Branco, descendant d’une longue lignée d’acteurs portugais, est le plus vieil ami d’Edmond et l’acteur principal. Enfin, Gabrielle de La Tourbillon, actrice trentenaire et maîtresse officielle d’Edmond qui possède le double de son âge. Juste une petite remarque comme cela en passant et qui ne prête pas à conséquence, quoi que Gabrielle soit attirée par les hommes jeunes.

Les deux enfants d’Edmond, issus d’un précédent mariage avec Alys Lenoir, décédée, les jumeaux Bernard et Agnès, vingt ans, ne sont pas présents sur le navire, mais leur rôle dans la pièce qui sera montée à Paris est déjà défini.

Si le voyage se passe bien, l’arrivée à Liverpool est mouvementée, à cause de l’humour d’Oscar Wilde, humour pas apprécié par les douaniers. Et en ouvrant la malle du poète, ils découvrent non pas des livres comme Oscar le prétend, mais de la terre et Marie-Antoinette morte étouffée. Le premier cadavre de la liste qui sera suivi par bien d’autres, et des humains cette fois, lorsque tout ce beau monde sera arrivé dans la capitale française.

C’est au commencement du mois de février 1883 (à Paris, au début du printemps ?!) que Robert Sherard, le narrateur, rencontre par hasard dans le foyer du théâtre La Grange celui qui deviendra son ami et dont il écrira les mémoires. Mémoire peut-être défaillante ou approximative comme on peut le lire, puisque février est considéré comme le début du printemps. Ne nous formalisons pas pour si peu et continuons notre lecture.

Traquair, l’habilleur de La Grange est retrouvé décédé dans une petite pièce attenante à la loge du comédien. Il se serait asphyxié au gaz. Suicide, meurtre, accident ? La Grange et ses proches décident de ne pas prévenir la maréchaussée, et le soin de procéder aux premières constations et aux formalités administratives est confié aux bons soins au docteur Ferrand ami et médecin de la troupe. Et par voie de conséquence, Robert Sherard devient l’habilleur d’Edmond La Grange, ce qui lui permet de côtoyer l’univers théâtral de l’intérieur.

 

Et cet univers, Sherard ne le dédaigne pas, au contraire. Outre son amitié avec Oscar Wilde, et ses relations privilégiées avec Gabrielle de La Tourbillon, un véritable tourbillon, il sera amené à faire la connaissance d’autres personnages, parfois hauts en couleurs, telle Sarah Bernhardt et sa ménagerie, ses fêtes, ses exigences, sa beauté, son talent.

L’auteur, via son personnage de Robert Sherard qui a réellement existé, nous entraîne dans une histoire dont Oscar Wilde est le héros. Tandis que Wilde fête ses vingt-huit ans, Sherard lui n’en a que vingt et un et il est subjugué par le poète. Et ils vont ensemble découvrir Paris, ses quartiers louches, mais également les beaux quartiers, dont Neuilly où est située la clinique psychiatrique du docteur Blanche. L’opium et autres produits illicites sont consommés avec abondance. Et surtout l’univers du théâtre, avec ses acteurs qui subissent l’ostracisme de la plupart des gens bien pensants, même si cela reste l’occupation favorite du peuple.

L’intrigue est presque mise de côté, et ne trouve une véritable résolution que dans l’épilogue, quelques années plus tard, et qui donne véritablement son sens au titre. Le récit est enchâssé en effet dans une scène se déroulant lors de la visite chez Madame Tussaud, un musée de cire antérieur à celui du Musée Grévin, avec comme protagonistes, nos deux amis et Conan Doyle. Lequel est mystifié par le sens de l’observation et de la déduction d’Oscar Wilde.

Wilde possède bien d’autres qualités dont l’humour qui parfois lui joue de bien mauvais tours. Mais il ne peut s’empêcher de manier l’ironie. Il pratique aussi les aphorismes ce qui se trouve être le sel d’une intrigue où le côté policier est quelque peu dilué mais habilement amené.

 

Pour un poète, le plagiat est véniel et le mensonge presque capital. Mentir, c’est-à-dire formuler de belles contrevérités, est le véritable but de l’art.

 

Quelle que soit sa nationalité, la presse se contente aujourd’hui de narrer avec une avidité obscène les inconduites de gens médiocres et nous rapporte avec la minutie des ignorants le détail précis et prosaïque de l’existence de personnes absolument sans intérêt.

 

L’œil est le carnet de notes du poète, et celui du détective.

 

Il y a un sujet sur lequel les hommes et les femmes sont d’accord. Ni les uns ni les autres ne font confiance aux femmes.

 

Réimpression le 19 septembre 2013, dans une nouvelle traduction de Carine Chichereau.

Réimpression le 19 septembre 2013, dans une nouvelle traduction de Carine Chichereau.

Gyles BRANDRETH : Oscar Wilde et le cadavre souriant (Oscar Wilde and the Dead Man’s Smile – 2009. Traduction de Jean-Baptiste Dupin). Collection Grands Détectives N°4412. Editions 10/18. Parution le 4 février 2010. 416 pages. 8,10€.

Réimpression le 19 septembre 2013, dans une nouvelle traduction de Carine Chichereau.

ISBN : 978-2264046512

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
  • Contact

Recherche

Sites et bons coins remarquables