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15 février 2014 6 15 /02 /février /2014 15:33

harpignies.jpg


L'art pictural, tout comme la sculpture, est souvent présent dans l'œuvre littéraire de François Darnaudet : Les Dieux de Cluny, Trois guerres pour Emma, Le Fantôme du Quai d'Orsay, Art et artistes en pays catalan... aussi n'est-il point étonnant qu'il s'intéressa à la vie d'une peintre paysagiste méconnu : Harpignies.

Henri-Joseph HarpigniesMais cette bande dessinée, si elle narre le parcours d'Henri Harpignies (1819 - 1916), n'est pas à proprement parler une biographie même si l'on suit l'artiste tout au long de sa carrière, est également le prétexte à mettre en scène un jeune descendant du peintre confronté à un quotidien pas forcément rose. D'autant que tout comme son ancêtre il préfère le bleu cobalt, le vert Véronèse, le vert émeraude, l'ocre jaune, la terre de Sienne naturelle, la terre de Sienne brûlée, le brun rouge et le blanc d'argent.

Le jeune Eric vient de perdre sa grand-mère et s'il a du chagrin, il ne le montre pas, contrairement à d'autres membres de sa famille. Et en regagnant le domicile de ses parents à Perpignan, il croit qu'un cambrioleur s'est introduit dans leur logement. Un tableau a disparu. Sa mère, confuse, est obligée de lui expliquer qu'à cause de besoins pressants d'argent elle a été obligée de vendre la toile signée Harpignies. Toutefois il reste un carnet de dessins qu'elle lui donne.

Eric doit rentrer à Paris afin de poursuivre ses études mais un problème de train (C'est devenu d'une banalité !) l'oblige à passer le restant deHenri_Harpignies-paysage.jpg la journée à Montpellier. Sa prochaine correspondance n'étant prévue que pour le lendemain matin aux aurores. Il décide alors de visiter le musée Fabre et il rencontre une jeune fille, Marie, qui prépare une thèse sur l'école de Barbizon. Ils sympathisent, il lui montre les dessins de son trisaïeul, ils papotent, elle l'invite à passer une nuit blanche... dans une boîte de nuit. De retour à Paris, Eric se morfond. Il pense à Marie, il communique avec elle par mails et joue de la guitare, tentant de composer des chansons.

Profitant du prétexte de rencontrer son directeur de thèse à la Sorbonne, Marie retrouve Eric. Un rapide passage chez le jeune homme pour déposer ses affaires ensuite direction le musée du quai d'Orsay où il peut croquer rapidement un Harpignies, puis retour chez Eric. Et ce qui devait arriver arrive, mais ceci ne nous regarde pas ! Eric se met à peindre un tableau à la façon de son ancêtre tout en réfléchissant à sa situation avec Marie qui est retournée chez elle.

Je ne la connais pas mais j'ai envie d'être avec elle. C'est aussi parce que je ne la connais pas que j'en ai envie. D'ailleurs j'ai peur de la connaître et d'avoir envie de ne plus être avec elle.

C'est en exprimant cette profonde pensée qu'il continue son tableau. Son père arrive à l'improviste, le félicite pour son coup de pinceau et lui remet un vieux chapeau qui trainait dans une malle et avait appartenu à Henri Harpignies. Ainsi chapeauté, Eric peut s'imprégner de l'esprit du peintre. D'ailleurs Marie, revenue s'installer avec Eric lui fait une proposition étonnante qui bouleverse le train-train quotidien de notre peintre amateur.

harpignies2.jpgLes deux histoires, celle d'hier et celle d'aujourd'hui, s'imbriquent sans que le lecteur perde le fil de l'intrigue. L'humour est souvent présent, surtout dans les dialogues ou dans les pensées de notre jeune héros. Ainsi lors de l'enterrement de sa grand-mère, qui est en fait une crémation, une des personnes présentes demande, comme si cela avait une importance vitale, à Eric : Dis-moi, tu sais pourquoi elle n'a pas voulu être enterrée ? Eric répond en toute sobriété : Elle disait qu'elle était claustrophobe.

Le dessin signé Elric est clair, sobre, dépouillé, épuré même parfois, mais en même temps travaillé finement, au service du scénario qui par ailleurs comme je l'ai déjà écrit ne manque pas d'humour. Nous ne sommes pas loin de la ligne claire de l'école belge. Afin de mieux comprendre comment travaille Elric je vous conseille de vous reporter à un entretien accordé à Nicolas Vadeau lors de la sortie de Marche ou rêve (Dargaud - 2011) et mis en ligne sur Bulle d'encre. Un autre article lui est consacré dans les pages de l'Indépendant.


ELRIC & DARNAUDET : Harpignies. Collection Blandice, éditions Paquet. Parution 12 février 2014. 80 pages. 15,50€.

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16 février 2013 6 16 /02 /février /2013 13:48

Petit prix, grand plaisir !

 

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L’association Etre humain – Animal existe depuis toujours, même et surtout en bandes dessinées. Et il ne s’agit pas uniquement d’animaux ordinaires. Ils sont de compagnie, non apprivoisé ou d’origine sauvage, et ils parlent. Ou savent s’exprimer et se faire comprendre de leurs compagnons à deux pattes.

Ainsi Alfred le Pingouin, dans la série Zig et Puce d’Alain Saint-Ogan. Puis Tintin et Milou d’Hergé. A ce propos il est amusant de constater que bon nombre de propriétaires de ces canidés appellent Tintin leur animal, pensant peut-être que Milou est le patronyme du jeune reporter. Le Marsupilami, animal imaginaire certes dont le nom est composé de marsupial, qui lui existe, et d’ami, dans la série Spirou et Fantasio crée par Franquin en 1952. Rantanplan, le chien quelque peu niais, simplet et godiche, et surtout Jolly Jumper, le fier destrier de Lucky Luke, des histoires dues à la plume de Morris dès 1947. Sans oublier Boule et Bill, Boule étant le petit garçon et Bill le cocker, on pourrait confondre, et leur tortue Caroline, dont le géniteur est Roba. Petit aparté, les trois dernières séries paraissaient ou paraissent toujours dans Spirou, le magazine qui fête cette année ses soixante-quinze ans d’existence. Ceci n’est qu’une piste d’étude et je me garderai bien d’établir un recensement complet et d’établir une liste exhaustive.

Après ces prolégomènes didactiques qui vous auront éventuellement ennuyés, j’arrive gaillardement au sujet de cet article : Calvin, le gamin qui proteste tout le temps, d’où peut-être son nom.

En effet Calvin, qui n’aime pas l’école, est un gamin râleur, bougon, frondeur, jamais satisfait, volontiers blagueur pour ne pas dire taquin, et qui trouve en Hobbes, sa peluche, un confident tout oreille. Hobbes est un tigre, câlin quand il le faut, mais railleur et moqueur parfois, n’hésitant pas à contrarier Calvin. Mais entre les deux, le petit d’homme et la peluche, c’est l’amitié qui prime et l’un devient le confident de l’autre. Calvin possède un atout inné : son sens de la rhétorique et de la dialectique imparable.


D’ailleurs, son institutrice madame Wormwood, qui en a vu d’autres, craque devant son insolence :

Madame Wormwood est au tableau noir. Calvin l’appelle :

Madame Wormwood ?

Oui, Calvin ?

Vous pouvez toujours présenter vos informations, mais vous ne pouvez pas m’obliger à m’y intéresser.

Peu après, Calvin est sur une balançoire, apparemment tout guilleret.

La rumeur prétend qu’elle est passée à deux paquets par jour. Sans filtre.

Ou alors elle a recours à une médicamentation propice à calmer les maux de tête.


Peu de personnages figurent au générique des aventures de Calvin. Outre sa peluche Hobbes, on peut dénombrer ses parents bien évidemment, Madame Wormwood, déjà citée, monsieur Spittle le principal de l’école, Susie sa copine d’école plus quelques autres qui apparaissent de façon évanescente. Sa copine, c’est vite dit. Plutôt son souffre-douleur mais qui a du répondant, heureusement pour elle, et qui ne s’en laisse pas compter. Elle répond du tac au tac, à sa manière qui est plutôt musclée.

Peu de personnages donc, ce qui fait que les historiettes qui sont décrites en trois ou quatre cases sur une ligne, parfois sur une page, sont ramassées et percutantes. Une bande par jour, une planche hebdomadaire en couleurs (couleurs qui ici ne sont pas reproduites), durant dix ans, de 1985 à 1995 ont fait de Calvin un phénomène mondial repris par plus de 2400 journaux. Pourtant le graphisme est simple, dépouillé, épuré mais non dénué de charme.

C’est la vie au quotidien de Calvin, qui n’est en réalité qu’un gamin solitaire et inventif, dépourvu de frères et sœurs, à l’esprit vif et imaginatif ; qui en a fait le succès. Hobbes est un jouet, un tigre en peluche pour tout le monde, et seul Calvin lui donne vie. Il est son complément indispensable. Mais ce transfert n’est pas un cas unique : souvenez-vous quand vous étiez gamin ! Ou quand vous surprenez vos enfants, surtout les filles (désolé, ce n’est pas du machisme mais une simple constatation) qui jouent à la poupée. Celle-ci devient leur enfant et elles n’hésitent pas à la gronder pour des vétilles imaginaires.

Le thème central de cet épisode est l'hiver, avec son lot de boules de neige, de bonhommes de neige, mais aussi avec un personnage incontournable : le Père Noël. Et le Père Noël n'a qu'à bien se tenir, déposer au pied du sapin des jouets intéressants et non pas des vêtements comme l'année précédente, sinon il risque de se voir sermonner épistolairement.

Je ne connaissais Calvin et Hobbes que pour en avoir vu quelques planches ici ou là. Mais je crois que je commence à en devenir accro. Est-ce grave, docteur ?

La traduction a été assurée par Laurent Duvault.


Bill WATTERSON : Gare au psychopathe à rayures. Série Calvin et Hobbes. N°18. Editions Hors Collection. 64 pages. 6,90€.

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1 décembre 2011 4 01 /12 /décembre /2011 15:31

PiedsNickeles.jpgQui de nous, je pense aux quadragénaires et plus, n’a jamais lu durant son enfance et son adolescence, au moins une aventure des Pieds Nickelés, version Forton, le créateur, ou Pellos, le successeur et continuateur. Croquignol, Filochard et Ribouldingue, notre fameux trio de Pieds Nickelés, sont nés en 1908 dans le Journal L’Epatant. Pellos reprend le flambeau en 1948, après quelques essais d’Aristide Perrée, en 1934 et Badert en 1939 qui firent évoluer notre trio vers des chemins moins politiques et moins crapuleux. Après Pellos d’autres continuateurs essayèrent de prolonger l’œuvre mais sans être vraiment convaincants.

Alors que nous promet cette nouvelle tentative de réhabilitation de nos joyeux drilles de cambrioleurs ? Pieds-Nickeles1.JPG

Nous retrouvons nos joyeux drilles dans une maison d’arrêt, une fois de plus, à la différence près que Croquignol manque à l’appel. Ribouldingue et Filochard sont inquiets de son sort. C’est le moment de découvrir pourquoi ils en sont arrivés là. Quelques semaines auparavant, le trio se demandait comment se remettre à flots. Depuis leur sortie de prison trois mois auparavant, les trois lascars n’avaient rien trouvé afin de se renflouer lorsqu’ils entendirent la voix (mélodieuse ?) d’une présentatrice des infos télévisées susurrer la dernière nouvelle du jour : L’Elysée vient d’annoncer que notre président, loué soit-il, débutera une tournée de dix jours sur les cinq continents afin de promouvoir la démocratie et les droits de l’homme dont notre cher pays est la patrie…. Ce qui immédiatement ramone les neurones de Croquignol et une idée en jaillit. De leur précédent séjour en tôle, Croquignol a su profiter. Il a suivi des cours d’informatique et il s’empresse de donner une nouvelle identité à Ribouldingue, lequel devient grâce à l’inscription sur des réseaux dits sociaux, un spin docteur. La définition qu’il en donne est simple : Un spin docteur, c’est un branleur en Maserati avec chauffeur qui te dit toujours le contraire de ce que tu penses pour paraître intelligent.

Muni de son CV bidon, Ribouldingue est accueilli par le secrétaire général du palais présidentiel et il fait si bonne impression que dès le lendemain les trois amis se retrouvent sur le tarmac prêts à embarquer pour le Burumburi, sous l’œil pointilleux, suspicieux et méfiant d’un agent féminin de la sécurité. Un cinéma en plein air vient d’être incendié, suite à la projection de l’intégrale de Christian Clavier, le centre culturel français ayant imposé cette diffusion à la place de celle de Jean-Claude Van Damme. Evidemment les spectateurs en colère n’ont pas apprécié le changement de progrPieds-Nickeles2.JPGamme. C’est sans compter sur les idées lumineuses de Croquignol.

Lorsque la suite présidentielle part pour le sultanat d’Oktar, leur prochaine destination, quelle n’est pas la surprise des passagers de découvrir que le plancher est recouvert de tapis et que les fauteuils ont disparu. Et ainsi de suite tout au long de leur voyage, les Pieds Nickelés vont procéder à des échanges qui semblent prometteurs. Le secrétaire général de l’Elysée est aux anges, quoique interloqué par les procédés peu diplomatiques, ou trop, de ses nouveaux conseillers. Vins de grand cru aux talibans, camemberts supposés bactériologiques à l’armée américaine, les 35 heures suggérés aux dirigeants chinois… Je ne dévoile rien puisque c’est écrit en quatrième de couverture.

Une aventure des Pieds Nickelés haute en couleur qui nous montre le visage de la France en plein effort de conquête des parts de marché. Evidemment le lecteur pourra reconnaître quelques figures politiques dont Claude Guéant souriant (étonnant non !) ou Alain Juppé surnommé Crâne d’œuf. Quant au président, dont je n’ai pas besoin de citer le nom, il n’apparaît qu’en mini silhouette, ou caché derrière une tribune sur laquelle sont installés les micros, ou encore derrière un garde du corps, et alors on ne voit que le bout du commencement de début de fragment d’embryon de pas grand-chose de morceau du visage. Une aventure débridée mais il est évident que dans quelques décennies les lecteurs ne pourront pas toujours identifier tous ces personnages qui gravitent actuellement dans la sphère politique.

Nos Pieds Nickelés toujours aussi jeunes ont évolué physiquement. Croquignol n’a plus sa tête en forme d’ogive, ou de suppositoire, quoique son appendice nasal soit toujours aussi développé, Ribouldingue ne possède plus une coiffure et une barbe hirsutes, quant à Filochard, fini le bandeau sur l’œil. Il met des lunettes de soleil dont l’un des verres est amovible.

Personnellement je trouve cette nouvelle aventure, avec des auteurs qui possèdent un sérieux métier, prenante, hilarante, ancrée dans notre époque, et fidèle à Forton, jubilatoire, roborative, délicieusement iconoclaste, irrespectueuse et sarcastique. Mais au lieu d’écrire page 1 : Une aventure rocambolesque de Malka-P’Tiluc-Luz, rocambolesque étant un adjectif bien entendu issu du personnage de Ponson du Terrail, Rocambole, j’aurais tout simplement mis : Une aventure croquignolesque et croquignolette…

A noter que les Editions Vents d’Ouest proposent également le meilleur des Pieds Nickelés en 9 tomes. Une idée de cadeau pour Noël (J’en rêve !). A suivre…

Les Pieds Nickelés de Malka, P'Tiluc et Luz. Editions Vents d'Ouest. 48 pages. 13,50€

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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