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12 mars 2013 2 12 /03 /mars /2013 16:10

A salopard, salopard et demi.

 

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Car on ne roule pas comme ça dans la farine, Giorgio Pellegrini. Ce n’est pas une pâte à pizza, qu’on manipule en un tour de main. Il est un peu niais, un peu long à la détente, sauf lorsqu’il lui faut utiliser une arme à feu, mais lorsqu’il s’aperçoit qu’il est le dindon de la farce, il concocte un plan qui risque de faire des dégâts, beaucoup de dégâts.

Si Georgio a pignon sur rue, possédant un restaurant fréquenté par les plus hautes personnalités et spécimens en vue de cette ville de Vénétie, il possède un lourd passé de truand et d’ancien combattant de l’extrême-gauche durant les années soixante-dix. Mais il s’est refait une virginité grâce à son « ami » l’avocat et député Brianese. D’ailleurs, la période électorale pour le renouvellement du parlement est bien lancée. Brianese reçoit ses supporters dans le petit salon qui lui est réservé en permanence. Giorgio met à sa disposition des jeunes femmes afin que les soirées se passent agréablement.

Car outre le restaurant, Georgio est titulaire d’un petit cheptel de quatre prostituées que lui fournit un Russe. Des étrangères, plus sûres, capables de garder un secret et qui ne s’épanchent pas dans les médias, évitant par la même de causer du tort à leurs clients. Il les garde durant six mois environ puis il les revend à des Maltais, en empochant au passage un joli bénéfice. Ce qu’elles deviennent après, ce n’est pas son problème, même s’il sait qu’elles ne seront pas à la noce dans l’usine d’abattage qui leur est promise. Il a pour partenaire et associée Nicoletta, qui aurait garde de le faire chanter.

Brianese espère bien être réélu, ainsi que son parti, dont le premier ministre est ami avec Poutine. Une référence. Aussi il fait tout pour s’assurer des voix indispensables. Dans le salon privé il organise des réunions auprès d’industriels qui ne pensent qu’à grossir leurs bas de laine. Et tout est bon pour fructifier leur capital : les rejets d’une décharge déversés en mer pour économiser sur les coûts de gestion, des pots-de-vin pour truquer les données des services sanitaires sur les tumeurs provoquées par un incinérateur, d’autres pour convaincre des grands pontes de l’université de soutenir le nucléaire et le charbon, des prothèses défectueuses mais à bon prix, qu’il serait un jour nécessaire de remplacer mais deux interventions chirurgicales coûtent plus cher qu’une seule, des études truquées pour construire deux tronçons d’autoroute absolument inutiles… Mais je vous rassure, nous sommes dans une œuvre de fiction.

Georgio a confié deux millions d’euros à Brionese pour qu’il les fasse fructifier dans un investissement situé à Dubaï. Hélas, il apprend par une de ses connaissances que ceci n’est qu’une vaste fumisterie, et qu’il s’est fait gruger. Alors il réclame son dû mais Brionese refuse. C’est le début de la mésentente entre les deux hommes.

D’autant que Brionese lorgne du côté du restaurant de Georgio et qu’il se l’accapare, imposant des séides de la Mafia, la ’ndrangheta. Commence alors un bras de fer entre les deux hommes, mais Georgio ne veut pas se découvrir et préfère passer en douceur. Quelques cadavres vont s’échelonner dans le temps, et par la bande, comme au billard.

Le livre terminé, non pas forcément à la fin d’un jour ennuyeux, je suis resté dubitatif. Le personnage de Giorgio est franchement détestable, mais il est élevé à la stature d’un héros, tout comme Fantômas en son temps. Dominateur, cynique, il manipule les femmes, les rendant esclaves. C’est ainsi qu’il séduit Gemma, la meilleure amie de sa femme, la prévenant toutefois : Tu n’es qu’un passe-temps, Gemma, Martina est et sera l’unique femme de ma vie. Provocation à laquelle Gemma rétorque : Passe-temps, jouet, poupée, amusement, distraction… Je suis ce que tu veux, Roi de Cœur, il suffit que tu te serves de moi.

Lorsqu’il rentre chez lui et qu’il veut réfléchir, il ordonne à sa femme de faire du vélo d’appartement, comme ceux utilisés par les coureurs lors de leurs entrainements. C’est quelqu’un de bien Georgio, il pense à la forme physique de sa femme !

De plus Georgio n’apprécie pas les Noirs. Son ami le Russe lui a trouvé quelqu’un pour l’aider momentanément dans un travail délicat. Lorsqu’il voit un individu s’engouffrer dans sa voiture à l’injonction du Russe, il s’insurge : Mais c’est un nègre ! De toute façon, une fois le petit travail effectué, il s’en débarrassera. Alors il vaut mieux ne pas avoir d’état d’âme.

Je ne comprends vraiment pas l’engouement de certains envers ce genre de personnage malsain, alors qu’ils se proclament dans le même temps antiraciste, anti-machiste, vertueux en quelque sorte. Mais après tout, ce n’est qu’une fiction n’est-ce pas ? Si cela existait, si la réalité forgeait la fiction, cela se saurait n'est-ce pas?


Un petit tour sur  Action-Suspense ? Vous pourrez découvrir l'avis de Claude Le Nocher.


Massimo CARLOTTO : A la fin d’un jour ennuyeux. ( Alla fine di un giorno noioso – 2011. Traduit par Serge Quadruppani). Editions Métailié. 192 pages. 17,50€.

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commentaires

P
Salut Paul. Il faut que je le lise ! je l'ai acheté et je suis un grand fan de Massimo Carlotto ! As tu lu Rien, plus rien au monde ? Mon préféré de lui. Quel auteur de roman noir ! Amitiés
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O
<br /> <br /> Bonjour Pierre<br /> <br /> <br /> C'est le premier roman de Carlotto que je lis et son personnage ne m'a pas convaincu du tout... Trop de complaisance, à mon avis, concernant cet homme qui n'est pas une référence. Mais je sais<br /> que c'est à prendre au second degré... Pour moi ce fut une "honnête" lecture, sans plus. Désolé de te décevoir.<br /> <br /> <br /> Amitiés<br /> <br /> <br /> <br />

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