Jean-Claude Izzo nous a quitté le 26 janvier 2000. Afin de lui rendre hommage, au lieu de mettre en ligne sa trilogie de Fabio Montale, j'ai préféré vous proposer l'un de ses livres les plus émouvants.
Relégué au bout du quai Wilson, sur la digue du Large, L’Aldébaran est arrimé sur le port de Marseille depuis des mois, attendant qu’on tranche sur son sort. L’armateur a fait faillite et à bord ne survivent que le capitaine, Abdul Aziz, un Libanais, le second, Diamontis, un Grec et le radio, Nédim, le Turc. Oubliés de tous ou presque. Nédim a reçu un petit pécule pour regagner sa patrie comme les autres membres d’équipage, mais en attendant le camionneur qui devait le transporter, il s’est laissé embringuer dans une arnaque. Deux jolies femmes Lalla et Gaby l’ont emmené dans une boîte de nuit. Il s’est retrouvé avec une ardoise et obligé de laisser ses papiers et son baluchon. Abdul et Diamontios ressassent leurs souvenirs. Abdul pense à sa femme Céphée, qui l’a quitté parce qu’il aimait trop la mer. Diamontos pense lui aussi à sa femme mais surtout à Amina qu’il a connu à Marseille, bien des années auparavant, dont il garde la réminiscence enfouie au plus profond de lui-même et qu’il recherche. Diamontos s’est lié avec Toinou, un gargotier et sa fille Mariette. Nédim réintègre le cargo et leur narre ses avatars nocturnes. Diamontis se propose de recupérer ses affaires. Tout à ses transactions, il n’aperçoit pas Gaby qui le reconnait. Elle n’est autre qu’Amina. Des inconnus le tabassent et lui conseillent de ne pas pousser plus loin ses recherches concernant Amina. Il est hébergé par Mariette qui le soigne puis il regagne le cargo. Un message d’Amina l’attend lui demandant de la rejoindre sur la corniche. Nédim y est déjà en compagnie des deux femmes et lorsque Diamontis les retrouve, Amina est partie. Elle avait rendez-vous avec Ricardo, son protecteur, homme de la Mafia.
Ode à Marseille, à son port, et à ses habitants venus des différents pays bordant la Méditerranée, Les Marins perdus est également le témoignage de ses marins qui se retrouvent à quai, dans un pays qu’ils ne connaissent pas et qui sont prisonniers sur leur navire par la faute d’un armateur indélicat. Izzo décrit avec sensibilité les moments de doute, de tourments, de retours sur leur passé, de trois hommes obligés à vivre en communauté, mais dans une communauté qui n’est plus celle de la navigation. L’amitié qu’ils se vouaient se transforme peu à peu à cause de l’éloignement du pays natal et de leurs racines, familiales principalement. De petits instants de bonheur enchâssés dans de grands moments de solitude, de tristesse, d’espérance gâchée.
Jean-Claude IZZO : LES MARINS PERDUS. Flammarion, coll. Gulliver. Réédition J’Ai Lu.