Après quatre années passées, alors qu’il purgeait une peine de sept ans, dans la prison de Libreville au Gabon, Chicano est libéré du jour au lendemain, à la faveur d’une grâce présidentielle. Il ne s’y attendait pas et pense que cette bienveillance n’est que le fait d’une homonymie. Il avait participé à un braquage dans une boutique tenue par un Libanais mais ses comparses avaient réussi à se défiler. Donc lorsqu’il se retrouve à l’air libre Chicano n’a qu’une idée en tête revoir Mira puis trouver du boulot, mais pas chez son frère Gaby installé comme garagiste après des déboires avec la police, devenir quelqu’un de bien. Seulement il lui faut compter sur les impondérables. Par exemple Mira qui l’a oublié dans les bras d’un autre dont elle est enceinte. Ou encore se retrouver nez à nez avec ses anciens comparses, Ozone, Lebègue et Petit Papa. Justement ceux-ci préparent un mauvais coup et ils enrôlent Chicano. Le but du jeu, s’emparer de la solde des soldats à la caserne du camp Baraka. Cinquante millions, de quoi assurer leurs vieux jours. Mais Chicano apprendra bien vite, et à ses dépens, que les amis ne sont pas toujours fiables.
Cette chronique ordinaire de la vie de petits truands, de leurs exploits, de leurs coups bas, de leurs fourberies, a souvent été explorée et exploitée dans les romans policiers et les romans noirs. Mais il y a ce petit plus dû à la plume de Janis Otsiemi, une plume alerte, vive, imagée, proche de celle de San Antonio, et en même temps un style dépouillé. L’exotisme, la couleur locale y est peut-être pour beaucoup, mais l’auteur en homme libre ne manque pas de griffer au passage les institutions, le gouvernement, la prévarication, la corruption, les abus des policiers véreux, de ceux qui ont la loi pour eux et s’en servent souvent à leur profit et non pour protéger la liberté de leurs concitoyens. “ Les flics de Libreville étaient connus pour leur brutalité ”. Cette histoire se passe à Libreville mais le décor pourrait être largement transposé dans des pays dits développés, pas si loin de chez nous, pourquoi pas chez nous d’ailleurs.
Janis OTSIEMI : La vie est un sale boulot. Editions Jigal, collection Polar. 136 pages. 14€.