Les dessous de Barcelone
Amorès, journaliste en passe d'être viré, est racolé dans la rue par une prostituée, mais celle-ci n'est qu'un travesti. En manque d'affection, ou par besoin de s'épancher, il suit son/sa compagne pour découvrir sous le lit une femme morte.
Carlos Bley est lui plus chanceux. Journaliste également, il sait qu'Alma est aussi un travesti, et s'il la fréquente, c'est en toute amitié. L'accompagnant à cette même chambre de passe, c'est pour tomber entre les pattes des policiers et faire un séjour au gnouf. Le corps de Maria Thérésa Pau, la victime, n'est pas vraiment à sa place dans ce décor d'hôtel de passe situé dans le Pueblo Seco, faubourg de Barcelone. Secrétaire de Juan Sanjuan, Maria Thérésa ne se livrait pas à la prostitution, même si son entrecuisse était accueillant.
Sergi Llor, avocat, conseiller juridique, est invité par ses pairs à enquêter sur ce meurtre qui aurait pour origine une magouille financière. Chacun de leur côté le journaliste et l'avocat vont mener leurs investigations. L'inspecteur Mendez, qui se demande bien pourquoi Carlos Bley s'est fait tabassé dans un terrain vague se met lui aussi sur les rangs et commence à renifler les pistes. Le journaliste qui a été transporté à l'hôpital par Ruben, un orphelin de mère, lui sait d'où viennent les coups.
De Juan Sanjuan lui n'apprécie pas une immixtion dans ses affaires. Marina Volpe, riche célibataire côtoyant les milieux bancaires et politiques, s'érige comme le contraire de Maria Thérésa. Elle ne possède aucune exigence, surtout sexuelle. Une nouvelle victime est retrouvée dans un hôtel louche. Mais Lauri ne cachait pas son état de prostituée adolescente. Llor aménage près de chez Maria Thérésa et se lie d'amitié avec Libertad. Bizarrement, et Llor s'en étonne, Libertad n'effectue le ménage que dans un seul appartement ayant vue sur celui de Maria Thérésa, et lorsqu'elle sillonne le quartier, s'affuble de grosses lunettes noires. En évoquant son enfance et une histoire de chien, Llor découvre qu'il a connu Libertad dans sa jeunesse. Mendez, pressé par son chef qui lui fait miroiter une promotion, s'intéresse à tout ce beau monde, effectue des recoupements, se pose des questions sur la connexion entre cette affaire et une fracture de coffre-fort dans laquelle Alfredo Naranjo, proche de Sanjuan, serait impliqué. Mendez sait délier les langues mais surtout il sait écouter et bientôt il peut reconstituer une partie du puzzle.
Mendez, dont on avait fait la connaissance dans Soldados, paru la même année et Chronique sentimentale en rouge est un inspecteur qui n'attend plus rien de la vie. Avec une dégaine à la Colombo matinée de Pinaud (le Débris cher à San Antonio) il promène sa carcasse dans les quartiers populaires et interlopes de Barcelone. Il n'a pas connu d'érection digne de ce nom depuis trois ans et plus. De toute façon les femmes ne l'intéressent plus. Ce roman est un voyage initiatique dans la capitale catalane mais également un hommage au sexe avec un grand X. Hommage trivial parfois, et rares sont les pages qui n'abordent pas la copulation sous toutes ses formes, avec toutefois une nette préférence pour la fellation. Un hommage qui en devient obsessionnel. Ledesma s'amuse à ponctuer les aléas des journalistes par quelques coups de griffes en apparence anodins.
Franscico GONZALES LEDESMA: Les rues de Barcelone (Las calles de nuestros padres ; 1984 Trad. de l'espagnol: Christophe Josse). Première édition : L'Atalante, Bibliothèque de l'Evasion 1992. Réédition Folio Policier N°206. 336 pages. 7,50€.