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31 juillet 2012 2 31 /07 /juillet /2012 08:41

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Longtemps considéré comme un personnage de légende, héros de roman, le Chevalier de Saint-George est une figure emblématique des descendants issus de liaisons entre colons blancs et esclaves noires.

Alexandre Dumas dans son ouvrage intitulé tout simplement Georges mettait en scène Georges Munier, riche mulâtre de l’île de France, aujourd’hui l’île Saint Maurice, qui tout enfant « voulait tuer à lui seul le préjugé qu’aucun homme de couleur n’aurait osé combattre ». Dumas, dont le père, le général Alexandre Dumas, était lui-même un métis et eut maille à partir avec Bonaparte du seul fait de ses origines, s’est peut-être inspiré du Chevalier de Saint-George pour écrire son roman.

Aujourd’hui on commence à reconnaître les mérites de Joseph de Bologne né à la Guadeloupe le jour de Noël 1745, dans une habitation sucrière nommée La Coulisse en la paroisse du Baillif, d’un père issu d’une lignée de commerçants hollandais et de Nanon, née dans la servitude. Marié, le père de Joseph avait élevé Nanon au rang de compagne officielle. Agé de huit ans, le jeune Joseph arrive en France, à Bordeaux très exactement en compagnie d’Elizabeth de Saint-George, la femme officielle de son père. Il fait ses premières armes à Paris, et devient un escrimeur de renom et un musicien dont la virtuosité en tant que violoniste et compositeur lui ouvre bien des portes. Il troque son nom de Bologne pour celui de Chevalier de Saint-George, au grand dam du parti colonialiste, un changement d’identité qui lui occasionnera quelques problèmes lors de la Révolution, et plus exactement sous la Convention. Il se liera avec Choderlos de Laclos, l’auteur du roman épistolaire Les Liaisons dangereuses, côtoiera le Chevalier d’Eon, Marie-Antoinette, Mirabeau, le général Dumas et quelques autres qui marquèrent leur époque.

Il est intronisé franc-maçon comme bon nombre de personnages influents et devient un intime du duc d’Orléans. Toutefois il n’oublie pas ses origines, et espère l’abolition de l’esclavage, malgré le parti colonialiste très influent. Tellement influent que Louis XVI signe, peut-être sans l’avoir seulement lu, un texte de Monsieur de Sartine qui déclare que : Les affranchis, à quelque distance qu’ils soient de leur origine, gardent toujours la tache de l’esclavage et qu’ils doivent en conséquence être écartés des honneurs et des fonctions publiques. Ce texte faisait suite à un autre signé auparavant qui stipulait l’interdiction à tous les sujets blancs des deux sexes de contracter mariage avec les noirs, les mulâtres ou gens de couleur.

L’espoir généré par la Déclaration des Droits de l’Homme, promulguée par l’Assemblée du 26 Aout 1789, ne reste qu’au stade d’espoir, car pour l’Assemblée, les esclaves, n’étant pas des hommes, n’étaient pas concernés.

Le Chevalier de Saint-George s’intéresse de près à l’intégration, aujourd’hui mise à mal, et sur la condition des esclaves et des affranchis. Il n’est pas le seul. Monsieur Smith, célèbre économiste, soutenait que le travail forcé ne s’accorde pas plus avec le progrès des sociétés qu’avec la justice.

Les exemples ne manquent pas dans ce livre qui se déclare roman, mais est une biographie déguisée du Chevalier de Saint-George et surtout une leçon de philosophie sur la condition des Noirs, esclaves ou affranchis, dont l’intégration dans la société était (est ?) mise à mal. Qu’en est-il aujourd’hui, où l’on parle d’intégration et obligation de se plier aux lois de la République alors que les colonisateurs obligeaient les autochtones à se plier à leurs lois. Un livre qui amène le citoyen de bon sens et sans préjugés à réfléchir et Claude Ribbe qui prête sa plume au Chevalier de Saint-George nous livre un ouvrage profondément humain, humaniste, et qui devrait être non seulement lu, mais analysé par de nombreux hommes politiques.

Vous pouvez retrouver Claude Ribbe sur son site et lire ma chronique sur son précédent ouvrage : Le Diable noir, la biographie du général Dumas. Voir également le site du Chevalier de Saint-George.

Claude RIBBE : Mémoires du Chevalier de Saint-George. Roman. Collection Ethiopica. Editions Alphée/Jean-Paul Bertrand. 206 pages. 19,90€.

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commentaires

L
A choisir je commencerais par Dumas, beaucoup plus connu et père de l'un des auteurs préférés de mon enfance.<br /> <br /> Le Papou
Répondre
O
<br /> <br /> Oui, mais si j'ai mis ma chronique sur le Chevalier de Saint-George, ce n'est pas anodin, comme tu pourras le constater<br /> <br /> <br /> Amitiés<br /> <br /> <br /> <br />

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