La peau d’Obis (Je sais, j’ai fait mieux !)
Sur Terre, en ce XXVIème siècle, la guerre nucléaire a tout ravagé ou presque. Seuls quelques habitants ont survécu, réfugiés dans des Mégapoles qui n’ont plus de nom mais des numéros afin de les différencier. Vivent également dans des grottes, des souterrains, des conduits d’égouts, des mutants aussi hargneux que laids. Et quelques individus qui entretiennent une rébellion constante envers le pouvoir établi, l’Ultime Alliance, bien calfeutré dans un immense vaisseau d’environ cinq kilomètres de long qui survole la planète en surveillant en permanence les conflits externes.
Parce qu’il a lu sur le couvercle du caisson dans lequel il était allongé CAUTION, il s’appellera désormais ainsi. Caution, donc, se réveille après un séjour indéfini dans un sarcophage, avec des sondes branchées sur la tête. En les arrachant il s’aperçoit qu’il est devenu chauve. Il ne souvient de rien. Il s’extirpe de sa boite et part à la découverte d’un monde inconnu. Il parcourt un labyrinthe souterrain et est bientôt la proie d’hommes vêtus de haillons possédant des armes automatiques. Les réflexes de l’ancien combattant qu’il fut se réveillent et il parvient à annihiler l’attaque. S’il ne possède pas d’arme son cerveau subvient à ce manque. Ses facultés de psy lui permettent de se focaliser sur un adversaire le plus dangereux et de l’anéantir. Il comprend qu’il est capable grâce à ses facultés mentales de se défendre et même de lire dans l’esprit de ses interlocuteurs, malveillants ou non. Il se retrouve dans un désert parsemé de décombres et de ruines. Peu à peu une partie de sa mémoire se reconstitue. Il sait qu’une guerre mondiale généralisée a eu lieu, le monde étant perverti par de fausses valeurs. Les classes aisées avaient toujours besoin de plus d’espace au détriment des pauvres et la haine des uns s’était retournée contre les autres, imprimant la désolation sur Terre.
Caution, le télépathe, rencontre Lewis dit Lox. Un personnage bizarre qui traque ceux qui ont mené le monde à sa perte, les descendants des scientifiques corrompus, des politiciens avides de pouvoir, les magnats bourrés d’argent. Normalement Caution n’aurait pas dû apercevoir Lox qui se recouvre d’une toile le rendant invisible. C’est ce nouveau don de télépathe qui lui a permis de distinguer l’homme. Ils continuent leur chemin de conserve, affrontant les guerriers de l’Ultime Alliance, se défendant contre les attaques des mutants, jusqu’à une nouvelle rencontre, un nouvel allié, Slay.
Dans les sphères du pouvoir, l’archicommandeur Malleus est en proie lui aussi à une forme de rébellion de la part de ses « amis » politiques. Le commandeur Ka-Tau, pour la première fois depuis très longtemps, a droit à une journée de congés. Mais il est inquiet. Il semble qu’il est l’objet d’une filature et il s’inquiète pour sa chère Cha Prime. Pourquoi lui en veut-on ? Serait-ce parce qu’il a eu accès à un dossier confidentiel ?
Avec ce roman d’anticipation Boris Darnaudet se fait un prénom. Certes le début est un peu lent à se mettre en route, comme Caution l’est à reprendre ses esprits et à recouvrer une partie de sa mémoire. Puis alors que je commençais à déplorer un manque de fantaisie, l’histoire s’est débridée, et ses personnages se sont mis à faire le clone. Il s’ensuit des phases dans lesquelles la manipulation, la lutte d’influence, les croche-pieds et mensonges des dirigeants, les faux-semblants, les vrais machiavélismes, les fourberies et l’hypocrisie des uns et des autres, les miroirs faussés et les réelles inquiétudes, font florès et placent l’intrigue dans une subtile incertitude.
Un roman prometteur d’un jeune talent qui doit confirmer très rapidement, et peut-être canaliser son inspiration, suivi de deux nouvelles différentes dans le fond et la forme, ce qui démontre le potentiel de l’auteur qui peut se renouveler et écrire des histoires qui tiennent la route.
Le sas est une allégorie concernant la surpopulation. Heng est un employé un peu particulier. Il est chargé de procéder à l’élimination par injection des personnes qui désirent se faire euthanasier. La population a été classifiée et ce matin-là se présente un vieil homme, un quinquagénaire, un SDF classé Epsilon. Justement ce sont ceux-là qui doivent mourir en priorité. Mais les candidats à la mort sont nombreux et volontaires. On retrouve peut-être l’influence de Aldous Huxley et de Le meilleur des mondes avec cette classification alphabétique grecque des individus.
Celui qui sème nous invite à effectuer un petit voyage en arrière de quelques siècles au moment où les Espagnols tuaient sans état d’âme et avec la bénédiction de la religion les autochtones des nouveaux territoires découverts par les explorateurs intrépides. Mais imposer sa religion par la force, assassiner, exterminer sans vergogne la population locale est sans compter sur les dieux des contrées ainsi conquises.
Boris DARNAUDET : Projet Obis. Collection Blanche N° 2103, éditions Rivière Blanche. 184 pages. 17€.