Pourtant ils ne sont pas sur la paille !
Tout comme son prédécesseur en littérature, John Steinbeck, Richard Martin Stern est né en Californie, et c’est tout naturellement qu’il prend pour décor de l’intrigue dans certains de ses romans cet état de l’ouest des Etats-Unis.
La moisson de la violence est tout proche des thèmes développés par Steinbeck dans A l’est d’Eden et dans Les raisins de la colère, quoique selon Richard Martin Stern ce dernier roman fut dénigré par la plupart des Californiens qui ne s’y reconnaissaient pas. Et qui ne reflétait pas la stricte vérité, ce qui est évidemment un point de vue subjectif. Des analogies évidentes foisonnent entre ces ouvrages mais le développement, l’écriture, ainsi que la période au cours de laquelle ces événements sont narrés, s’avèrent différents.
La crise économique ensuite, et un livre Les raisins de la colère qui exaspéra agriculteurs et industriels dans toute la vallée. Un tas de mensonge, à les entendre, les choses n’allaient pas si mal, pour personne. Peut-être.
En 1849, la ruée vers l’or provoque l’arrivée de nombreux pionniers en Californie. Ces migrants désirent s’enrichir le plus rapidement possible mais bien souvent il ne s’agit que d’un miroir aux alouettes. Les familles Meyer et Stanfield font partie de ces nouveaux venus dans l’état qui a proclamé son indépendance en 1846, interdit l’esclavage et s’est doté d’une constitution en 1849, intégrant l’Union américaine en 1850.
La famille Stanfield préfère investir dans le foncier et lorsque nous faisons la connaissance de ces deux familles, George Stanfield est à la tête d’un immense domaine agricole tandis que Karl Meyer dirige une banque prospère. Ils sont cousins par leurs ancêtres et leurs enfants suivent un parcours différent des parents.
Peter, âgé de vingt ans et le fils de George, est animé d’idées plus ou moins révolutionnaires, anarchistes. Il vit seul en ville dans un taudis, et fréquente très souvent son cousin Paul, le fils de Karl. Sa sœur Ellen, dix-sept ans, est désignée comme la maîtresse de maison, sa mère étant décédée lors de l’accouchement. Elle est plus raisonnable, la tête sur les épaules, mais cela ne l’empêche pas de rejoindre son frère et son cousin, s’ébattant nue dans les eaux du canal d’irrigation.
George possède ses bureaux à San Francisco mais grâce à son frère Scott, le domaine agricole est en pleine expansion. Fruits et légumes sont récoltés, le raisin étant traité, selon son espèce, en consommation de table ou transformé en raisin sec.
Les ouvriers agricoles sont payés avec un lance-pierre, mais sont assez nombreux pour que les patrons refusent d’embaucher même pour une paye au rabais.
Mais l’orage gronde parmi la population et les autres petits exploitants. Outre le domaine agricole, la famille Stanfield possède des puits de pétrole et surtout des forages hydrauliques. Et les fermiers sont ulcérés que leur eau soit détournée au seul profit des Stanfield.
Le bâtiment abritant la déshydrateuse pour fruits séchés est incendié et l’appareil est détruit. Plus grave, il est à déplorer la mort d’un des gardiens, tandis que l’autre est blessé mais incapable décrire les agresseurs. Le shérif est chargé de l’enquête mais d’autres faits se sont déroulés précédemment et se produisent par la suite.
Le père de George, sénateur à Washington, et Jane, sa sœur célibataire et sexagénaire qui vit en Europe, s’installent au domaine. Peter pendant ce temps recueille une routarde, Benji, dix-sept ans, qui paie en nature son hospitalité.
Drames en tous genres et problèmes sentimentaux ponctuent cette intrigue, un peu longuette, d’une saga familiale. La description de l’ascension d’une famille de migrants qui arrive à s’imposer en Californie lors de la ruée vers l’or et à dominer fermiers et hommes politiques. Naturellement, ces parvenus ont empiétés sur leurs concitoyens, moralement, financièrement, sociologiquement non sans laisser de traces indélébiles. Ils règnent en maître sur la Vallée, étant à l’origine de la ville de Stanhope qu’ils contrôlent via des pressions, des dessous de table et des largesses.
Pourtant alors que des attentats sont perpétrés, que des grèves traduisent les revendications des cueilleurs, les tensions familiales enveniment cette union de façade.
Ce roman, cette intrigue, qui n’est pas sans rappeler d’autres ouvrages, dont ceux de Steinbeck déjà évoqués, est proche également dans l’esprit des séries télévisées qui passionneront des millions de téléspectateurs, Dallas et Dynastie à la fin des années 1970 et courant 1980. Le rêve américain dans toute son ampleur et ses méfaits.
Richard Martin Stern a été publié en France en Série Noire, dans la collection L’Aventure Criminelle et aux Presses de la Cité.
Richard Martin STERN : La moisson de la violence (Standfield Harvest - 1972. Traduction Alexandre Ralli). Collection Toison d’or N°26. Editions Jean Goujon. Parution 2e trimestre 1980. 448 pages. Première édition : Editions de Trévise 1975.
ISBN : 286291099
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