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23 juin 2020 2 23 /06 /juin /2020 06:29

Les vignes de la République ne sont pas les vignes du Seigneur !

Catherine GUIGON : Les mystères du Sacré-Cœur. Première partie : Les vignes de la République.

En cet automne 1872, la capitale se relève doucement des affrontements sanglants entre Communards et Versaillais. Pourtant un petit coin respire la tranquillité. Sur les hauteurs de la Butte Montmartre, le café Au Franc Buveur, qui vient tout juste d’être inauguré, accueille un grand nombre de dégustateurs du vin local, produit par son jeune propriétaire Théo Archibault.

Il peut être fier de lui, Théo Archibault, dont le passé fut mouvementé, qui a appris à soigner les vignes en Anjou. Sa récolte est appréciée des consommateurs, lesquels savourent un breuvage qui se différencie des vins aigrelets auxquels ils sont habitués.

A vingt-quatre ans, Théo aurait tout pour être heureux, ou presque, après avoir vécu une enfance difficile. Non pas que ses parents fussent des persécuteurs, le père étant mort à sa naissance durant la révolution de 1848, puis sa mère aimante quelques années plus tard. Et il a été élevé en partie dans un couvent, appelant une religieuse Marraine, et a connu quelques déboires. Mais dernièrement il a hérité de façon mystérieuse de ce lopin de terre accroché à la Butte. Et il y a son ami Armand, typographe et bricoleur. D’autres amis aussi dont le conseiller municipal, le docteur Clémenceau, toujours prêt à aider ses concitoyens, ne comptant pas ses heures. Enfin, il y a la belle et jeune Julie, avenante et souriante, déambulant avec grâce dans les travées pour servir les clients, mais secrète sur son passé.

A un certain moment, Julie regarde au dehors et s’évanouit pour une cause indéfinissable. Puis c’est au tour de Théo d’être la victime d’un accident de la circulation. Un cocher menant à vive vitesse un attelage et lui assénant des coups de fouets, cela marque les corps et les esprits. D’autant que ce cocher possède un faciès repoussant. Le bon docteur Clémenceau répare les dégâts corporels. Ce n’est que le début des avatars subit par Théo, tandis que Julie déserte le café.

 

Pendant ce temps, dans les beaux quartiers de la capitale, le baron Edouard de Gravigny est chargé de récolter des fonds pour l’édification d’une basilique sur la Butte, à l’initiative du Vœu National. Les Catholiques sont majoritaires dans les instances gouvernementales et œuvrent sans vergogne pour contrecarrer les Républicains.

Et ce qui couvait sous la cendre s’affirme au grand jour. Les terrains sur lesquels poussent les vignes de Montmartre seront préemptés afin que les bâtisseurs puissent ériger cette monstruosité, pour certains, ce monument religieux destiné à rétablir l’ordre moral, pour d’autres.

Le premier spolié sera Théo qui va accumuler les déboires. A la recherche d’un manuscrit, il est accusé de meurtre, et ne devra la vie sauve que grâce à Clémenceau qui apporte un témoignage irréfutable sur son innocence. Mais il n’échappera pas à la déportation dans une île de l’archipel de Nouvelle-Calédonie. Il y fera la connaissance de Louise Michel déportée pour avoir participé activement à la Commune en 1871. De retour en France, il deviendra, à l’instigation de son ami Armand, journaliste au Grand Rapporteur.

Quant à Julie, nous suivons en parallèle ses pérégrinations, portant en elle un lourd secret qui l’handicape, devenant une couturière de talent.

 

Ce roman est le parfait exemple du catalogue des thèmes qui servaient de supports aux nombreux et foisonnants ouvrages publié durant le XIXe siècle, sous la plume de Paul Féval, Eugène Sue, Alexandre Dumas, Xavier de Montépin ou encore Alexis Ponson du Terrail.

On y retrouve assassinats, enlèvements, prévarication, séjours au bagne, vengeance et haine, sans oublier l’amour, l’un des vecteurs de ce genre de récits. Et les personnages qui gravitent dans cette histoire, dont on peut se demander quelle est la part du réel et quelle est la part de la fiction, ont pour nom, outre Clémenceau anticlérical convaincu qui tournera mal par la suite, devenant selon sa propre définition le Premier flic de France, n’hésitant pas à employer la soldatesque avec force tirs nourris contre les vignerons et les ouvriers grévistes des carrière de plâtre, outre Louise Michel, cette forte femme, au sens moral, le docteur Sigmund Freud qui fait son apprentissage de psychanalyste, de Paul Féval qui vient de se convertir, détruisant dans un autodafé ses propres ouvrages, et sa femme la mystique madame Féval, ou encore le jeune Valentin le Désossé. Sans oublier quelques figures marquantes de la politique de cette époque mouvementée : le général Boulanger, Jules Ferry, et bien d’autres.

Un roman qui s’échelonne entre 1872 et 1889, lors de l’Exposition Universelle avec l’érection de la Tour Eiffel. Quant au passé des principaux protagonistes, Théo et Julie en tête, il est dévoilé au fur et à mesure qu’avance l’intrigue, avec de nombreux retours en arrière.

Tout autant roman policier, que roman d’aventures, roman historique que roman d’amour, Les vignes de la République, premier volet des Mystères du Sacré-Cœur, vous fera passer un bon moment de détente. Mais à la fin un retournement de situation incite à lire la suite intitulée Le secret de la Savoyarde.

Catherine GUIGON : Les mystères du Sacré-Cœur. Première partie : Les vignes de la République. Editions du Seuil. Parution 27 février 1998. 336 pages.

ISBN : 978-2020334877

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