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1 juin 2019 6 01 /06 /juin /2019 04:19

Une parodie vampirique…

Paul FEVAL : Ann Radcliffe contre les vampires : La ville-vampire.

Dans ce roman paru dans le Moniteur universel du 12 septembre au 25 octobre 1874 et intitulé La ville vampire – Aventure incroyable de madame Anne Radcliffe, Paul Féval retrouve la veine incroyable du délire maîtrisé qui se dégageait déjà dans La fabrique de crimes.

Une parodie du roman noir ou gothique dont une des pionnières fut Ann Radcliffe avec son plus célèbre ouvrage : Les mystères d’Udolphe (ou Udolpho), et auquel Féval se réfère dans ce court ouvrage. Mais afin de donner du crédit à son récit, il se met en scène dans l’entrée en matière de la façon suivante.

 

Mylady, une amie anglaise de l’auteur, propose à celui-ci de l’emmener, en compagnie de sa femme (ouf, l’honneur est sauf !) dans son château sis dans le Shropshire. Elle désire lui faire rencontrer une vieille dame, qui change de nom tous les ans à Noël. Actuellement elle se nomme Mlle 97. Trois ans auparavant, elle était Mlle 94. Pour la petite histoire, signalons toutefois que cette brave dame s’appelle Jebb et vit dans un cottage non loin du château de Mylady. Et vivaient dans cette région M. et mistress Ward, les parents d’Anne Ward, plus connue sous le nom de son mari, William Radcliffe.

Jebb narre alors une aventure extraordinaire survenue bien des années, des décennies même auparavant, à la jeune Anna ou Anne (je respecte l’orthographe des patronymes employé par Paul Féval), qui était amie avec Cornelia de Witt, accompagnée de sa gouvernante, la signora Letizia, et d’Edward S. Barton, lequel était suivi de son répétiteur Otto Goëtzi.

Pour tous, il était évident qu’Anne et Ned Barton allaient unir leur destinée, mais il n’en fut rien. Cornelia et Ned Barton se fiancent tandis que William Radcliffe demande la main d’Anne. Mais en attendant les deux mariages, la signora Letizia a rejoint à Rotterdam où elle tient la maison du comte Tiberio, le tuteur de Cornelia. Rotterdam où devait avoir lieu le mariage entre Ned Barton et Cornelia. Seulement, une mauvaise nouvelle leur parvient. La comtesse douairière de Montefalcone, née de Witt, vient de décéder en Dalmatie et Cornelia en est l’unique héritière d’une fortune immense. Tiberio se trouvant être l’héritier de Cornelia si, éventuellement, il arrivait quelques chose de fâcheux à la jeune fille.

Pendant ce temps Anne prépare activement son mariage, pas seule je vous préviens car il faut du monde pour coudre une robe de mariée, et elle reçoit quelques lettres dont une de son ami Ned. Elle s’endort et elle est la proie d’un rêve, ou plutôt d’un cauchemar. Elle se trouve dans un paysage qui n’est pas anglais, une église et des sépultures, des tombes jumelles sur lesquelles sont inscrites deux noms : Cornelia et Edouard !

Selon les autres missives, les liens qui unissaient Letizia, Goëtzi et leurs supposés protégés sont très distendus. Il se trame une sorte de complot et le mariage de Cornelia et Ned est retardé. D’après Ned, Cornelia a été enlevée par son tuteur et emmenée en Dalmatie, puis il a été atteint d’une fièvre qui lui procurait des hallucinations, à moins que ce ne fût la réalité. Il aperçoit dans le noir des prunelles vertes et des personnages incongrus. Anne décide alors de rejoindre Ned en compagnie de son factotum, Grey-Jack, un véritable hercule, qui déclare que Goëtzi n’est autre qu’un vampire.

Débute alors une course poursuite qui les entraîne jusqu’en Dalmatie où ils vont connaître des aventures effrayantes en compagnie de Cornelia et Ned, des épisodes réglés par Letizia et Goëtzi qui sont en très bon terme, se trouver face à une araignée géante aux yeux verts, jusque dans une ville surnommée la Ville-vampire, une vaste nécropole réservée au repos de légions de vampires.

 

Ce roman, qui débute comme une paisible relation amoureuse ou amicale entre quatre jeunes gens, devient peu à peu une succession d’aventures où l’angoisse se le dispute à une accumulation de péripéties toutes plus ou moins grotesques les unes que les autres, tout en étant périlleuses. La vie de nos principaux protagonistes est très souvent mise en danger à cause des manigances des deux lascars nommés Letizia et Goëtzi.

Dans la dernière partie de l’ouvrage, celle où les protagonistes évoluent en Dalmatie, dans la Ville-Vampire, le lecteur a l’impression de se trouver face à un dessin animé adapté d’après des comics de Marvel, avec une araignée géante, des personnages aux yeux verts qui se dédoublent, et des combats féroces.

L’épilogue pourrait n’être qu’une immense farce, mais Paul Féval s’en sort avec une pirouette, promettant ne pas utiliser un aspect déjà usé jusqu’à la corde, et fournissant une excuse aléatoire.

Dans cette véritable parodie de roman gothique ou roman noir comme étaient définis à l’époque ce genre de romans, La Ville-vampire ou Aventure incroyable de Madame Anne Radcliffe, titre originel de ce texte, Paul Féval accumule des situations que l’on pourrait qualifier de nos jours d’ubuesques, rocambolesques, surréalistes qui rejoignent dans la démesure La fabrique de crime, lui-même roman parodique qui joue dans le cauchemar halluciné et dont l’épilogue propose lui aussi un retournement de situation insensé.

Il innove en quelque sorte le roman loufoque dont Cami, auteur notamment de Loufock Holmès, le détective idiot, ou Pierre Dac et Francis Blanche, avec les Aventures de Furax, en furent les principaux chantres.

Editions Marabout. Bibliothèque Marabout Fantastique N°408. Parution 1972.

Editions Marabout. Bibliothèque Marabout Fantastique N°408. Parution 1972.

Paul FEVAL : Ann Radcliffe contre les vampires : La ville-vampire. Postface d’Adrien Party. Editions Les Moutons électriques. Parution le 7 juin 2018. 144 pages. 13,00€.

ISBN : 978-2361834654

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