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16 janvier 2019 3 16 /01 /janvier /2019 05:48

Entre Daniel Defoe et Jules Verne,

une autre robinsonnade…

André LAURIE : L’héritier de Robinson.

Tel père, tel fils, affirme un dicton populaire. Cela ne se vérifie pas toujours. Alors que Benjamin Gloaguen est un admirateur passionné d’antiquités grecque et romaine et fervent archéologue, son fils Paul-Louis vient d’obtenir son diplôme d’ingénieur civil et s’intéresse à tout ce qui se rapporte aux nouvelles technologies. Et leurs conversations tournent autour de ces deux sujets, sans pour cela que leurs propos s’enveniment. Alors qu’ils discutent dans l’appartement parisien de Gloaguen père, leur valet de chambre leur remet une lettre en provenance de Calcutta.

La lecture de cette missive est édifiante. Le correspondant, un cabinet de solicitors, leur apprend le décès du colonel George Plantagenet Crusoë Robinson, commandant un régiment de fusiliers de sa Majesté Britannique en poste dans cette ville indienne. Y est joint le testament de ce brave militaire qui est, fut, le beau-frère de Gloaguen.

Il demande à l’archéologue de servir de tuteur à ses deux enfants, Florence et Chandos, leur mère étant décédée, décompose sa succession et avoue qu’il possède des motifs sérieux de croire que sa vie est en danger. La lettre est datée du 14 juin 1882, le testament du 19 mars de la même année. Selon toute vraisemblance, le colonel craignait pour sa vie et ce qu’il redoutait est arrivé.

L’archéologue est stupéfait et fort intéressé par la description de la succession, surtout des manuscrits, des notes sur l’architecture khmer et des dessins et photographies ramenées d’une exploration au Cambodge. Gloaguen est dans son élément et immédiatement il décide de partir, en compagnie de Paul-Louis pour Calcutta. Le voyage maritime se déroule normalement mais arrivés dans le port de Calcutta, ils assistent à un incident qui aurait pu être tragique.

En effet, un gamin d’une quinzaine d’années, qui s’avère être Chandos, rejoint le bateau en instance d’accostage à bord d’un canot. Seulement il est percuté par une embarcation qui s’enfuit sans s’occuper des dommages. Chandos est récupéré et c’est le début d’une succession d’incidents divers, toujours perpétrés par ce qui s’avèrera être le même personnage malfaisant.

Les deux adolescents, Florence, dix-huit ans, et Chandos, sont recueillis en attendant par la femme du major O’Molloy, le commandant par intérim du régiment de fusiliers, un alcoolique qui ne comprend pas pourquoi il est malade du foie. Khasji, l’ancien serviteur du colonel veille sur les enfants tout comme il veillait sur leur père, couchant sur le sol à l’entrée de leur chambre. En compagnie des solicitors, Gloaguen fouille dans le bureau du défunt, afin de récupérer les papiers et notes du colonel. Il découvre même une petite plaquette en or sur laquelle sont gravés des mots en Chaldéen qu’il ne lui reste plus qu’à déchiffrer.

Le colonel avait subi plusieurs incidents préjudiciables à sa santé et le dernier fut le bon (si je puis dire !) mais il semble que cette plaquette attise les convoitises. Si Khasji la regarde avec répugnance et terreur, il n’en va pas de même de celui qui a introduit de nuit un cobra dans la chambre de Florence. Aux cris poussés par celle-ci en découvrant le reptile, la maisonnée intervient rapidement. La jeune fille est sauve mais il n’en va pas de même pour le petit ouistiti familier de la maison.

Alors qu’il envisageait de prolonger son voyage en visitant les pays voisins, Cambodge, Cochinchine et autres, l’archéologue décide de rentrer en France par la voie maritime, mais le seul navire disponible immédiatement à l’embarquement est un cargo dont la destination est contraire à celle qu’il désirait. Qu’importe, que ce soit dans un sens ou dans un autre, comme la Terre est ronde, et que tous les chemins mènent à Rome, il y en aura bien un pour les conduire à Paris. Et la famille Gloaguen, les enfants Robinson et le couple O’Molloy partent vers de nouvelles aventures maritimes qui ne seront pas sans danger.

La traversée n’est pas de tout repos, car le malfaisant qui est difficile à repérer à cause des nombreux déguisements dont il use, est toujours sur leurs basques. Après bien des péripéties et un accident provoqué qui conduit à un naufrage, tout ce petit monde et quelques centaines d’hommes d’équipage dont le capitaine, échouent sur une île déserte mais qui auparavant fut habitée. En témoignent les nombreuses constructions qui s’érigent encore et les diverses plantes potagères et céréalières qui prolifèrent grâce au climat favorable à une agriculture bio. Comme leur navire a chaviré, il ne leur reste plus qu’à en construire un autre et c’est sous l’impulsion de Paul-Louis, et de ses connaissances d’ingénieur, que ce travail de longue haleine va être réalisé.

 

La suite constitue ce qui peut être considéré comme une seconde partie, une prolongation des premières aventures, mais un épisode à part et complémentaire. En effet Chandos est obnubilé par une idée fixe, celle d’être le descendant de Robinson Crusoë, le véritable naufragé dont l’histoire a été narrée par Daniel Defoe. Alexandre Selkirk n’étant qu’une affabulation. D’ailleurs, il s’appelle Robinson, et possède parmi ses prénoms celui de Crusoë, tout comme son père, son grand-père et tous ses ascendants.

Ce n’est qu’un des aspects de ce roman qui aborde les thèmes chers à Jules Verne. D’ailleurs il existe un cousinage littéraire certain entre les deux romanciers. En effet André Laurie avait vendu deux romans à l’éditeur Hetzel, L’héritage de Langevol qui deviendra sous la plus de Jules Verne Les 500 millions de la Bégum, et Le diamant bleu publié sous le titre L’étoile du Sud.

Mais contrairement à Jules Verne, André Laurie ne s’attarde pas dans de laborieuses et encyclopédiques descriptions géographiques ou autres, mais s’intéresse à l’aspect sociologique et à la psychologie des personnages. Il n’hésite pas à comparer l’éducation des jeunes filles en France et en Grande-Bretagne, octroyant des bons points à l’éducation anglaise plus performante et moins machiste. Mais il ne se montre pas non plus colonialiste, dénonçant en deux ou trois phrases le mépris affiché par les militaires et leurs familles envers la population autochtone.

André LAURIE : L’héritier de Robinson. Illustrations de Henri Faivre. Collection Bibliothèque de la Jeunesse. Editions Hachette. Parution 1933. 256 pages.

Première édition : Hetzel 1884.

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