Une bande dessinée sans bulle mais qui pétille !
Tout le monde connait La Famille Fenouillard, Le Sapeur Camenber, Le Savant Cosinus, mais qui a lu ces histoires illustrées, signées Christophe, parues en feuilletons à la fin du XIXe siècle ?
La Famille Fenouillard, qui à l’origine s’intitulait la famille Cornouillet, figure pour la première fois dans le Journal de la jeunesse, le 12 février 1889 puis dans Le Petit Français illustré. Elle est même considérée comme la première bande dessinée française, sans bulle mais avec le texte sous les vignettes.
Cette série était destinée aux jeunes, mais les adultes pourront se replonger, s’ils trouvent ce livre dans les différentes versions qui lui ont succédé, en se délectant des aventures et mésaventures pédagogiques et farfelues d’Agénor Fenouillard, bonnetier à Saint-Rémy-sur-Deule (Somme inférieure), de sa femme Léocadie, coincée aux entournures mais qui mène son mari par le bout du nez, et ses deux filles, niaises, Artémise et Cunégonde.
Un soir, madame Fenouillard décide de sortir du train-train quotidien et propose que dès le lendemain ils partent tous en voyage. A la gare, M. Fenouillard s’enquiert de l’heure de départ du premier train pour Bruxelles, ce qui nous amène à constater que l’amabilité des cheminots à cette époque n’était pas usurpée, comme l’on peut se rendre compte sur la vignette ci-dessous qui nous offre un aperçu du talent de dessinateur et de rédacteur de Christophe :
Une attitude qui a bien évolué depuis, mais ce n’est qu’un aparté.
Nous suivons donc la Famille Fenouillard dans des pérégrinations mouvementées, aventureuses, périlleuses, burlesques, qui vont les mener à Paris, le Mont-Saint-Michel, au Havre. Dans la ville portuaire, désirant visiter un navire, ils se retrouveront malgré eux en Amérique et comme madame Fenouillard ne veut pas renouveler l’expérience maritime, ils traverseront le continent pour passer en Asie via le détroit de Béring, sur une plaque de glace, et subiront bien d’autres avanies avant de regagner leur foyer.
En cours de route ils feront la connaissance du docteur Guy Mauve, qu’ils retrouveront sur leur chemin à plusieurs reprises.
Jeux de mots, calembours, antiphrases, situations burlesques se suivent en un rythme effréné dans cet ouvrage à tendance plus ou moins pédagogique, mais véritablement écrit dans un but de distraire les lecteurs.
Cela pourrait sembler un peu désuet de nos jours, quelque peu suranné, tant la bande dessinée a évolué, tant au point de vue graphisme que rédactionnel, mais cela apporte un témoignage, une vision sur une époque, sur les mœurs et le comportement des différents protagonistes, sur les vêtements et les technologies.
L’étonnement de la Famille Fenouillard pourrait être comparé au nôtre dans certaines circonstances et leur approche d’un monde qu’elle découvre. Ainsi lorsqu’ils sont au Japon, ils sont interloqués, un peu par manque de culture, par la synthèse entre traditions et modernisme, un mélange culturel et une adaptation à un mode de vie qui allient le folklore, les coutumes et l’intégration à une époque moderne.
Le pseudonyme de Christophe n’a pas été choisi au hasard puisque de son véritable patronyme l’auteur s’appelait Georges Collomb !
CHRISTOPHE : La famille Fenouillard. Bibliothèque du Petit Français. Librairie Armand Colin. Parution 1927. 272 pages.
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