Que je l’aimeuuuu, que je l’aimeeeem !
Quadragénaire célibataire, Hubert Corday, qui n’a aucune parenté avec Charlotte jusqu’à preuve du contraire, n’a pas pour habitude de prononcer cette phrase à tout venant ni même aux autres.
Ce qui ne veut pas dire qu’il n’a pas de relations, dans son travail il n’en manque pas, mais ce ne sont que des épisodes charnels, genre Je t’aime moi non plus, bonjour madame, au revoir madame et on passe à autre chose. C’est ce que l’on appelle un en-cas !
Donc Hubert, qui est le dernier de Corday, travaille dans, attention accrochez-vous, l’impalpable complexité protéiforme des ressources humaines. Concrètement il intervient en entreprise ou organise des cours, je résume, pour apprendre aux responsables comment gérer ceux qui sont sous leur coupe, annihiler leurs aspirations, les motiver, leur faire comprendre qu’ils ne sont que des pions. Je passe. Mais cela démontre qu’il a du bagout et qu’il sait parler à ses interlocuteurs. Et que souvent, dans ces réunions, il trouve chaussure à son pied, pour une nuit.
Pourtant, depuis quelques semaines il fréquente assidûment Milady, une jeune femme qu’il a rencontrée lors d’une exposition de peintures abstraites, étant en phase sur la prestation de l’artiste, puis prenant un pot ensembles afin de parfaire leur connaissance et échangeant leurs points de vue. De fil en aiguille, ils se sont revus, ce qui est un peu un exploit de la part d’Hubert qui préfère en général butiner.
Mais il rend visite également la famille, à sa sœur Clotilde, mariée, cinq enfants, dont Marine, l’aînée, est quelque peu déboussolée par son manque d’engouement à perpétrer la descendance des Corday. D’abord il n’aime pas qu’on l’appelle Tonton, ça l’horripile, et puis de quoi elle se mêle, même si lui-même ne se prive pas de lui poser des questions sur son ego.
Il va voir également ses parents, qui vivent depuis vingt-cinq ans séparés, habitant deux maisons qui se font face. La mère dans la demeure familiale, du temps d’avant, et son père dans celle héritée de son père, du Papou d’Hubert.
Et le Papou d’Hubert, ce fut quelqu’un dont le quadragénaire se souvient avec une forme de nostalgie liée à une enfance au cours de laquelle le vieil homme lui a beaucoup appris. L’Internationale par exemple.
Chaque lecteur pourra s’identifier plus ou moins au héros narrateur de cette histoire, soit dans ses rapports familiaux, dans ses conflits, sa gestion sentimentale, ou tout simplement dans son environnement professionnel, tout un chacun ayant eu un jour ou l’autre des réunions d’information, des séminaires, des remises à niveau.
De nombreux retours en arrière émaillent ce roman plaisant, parfois humoristique, souvent nostalgique, voyageant allègrement dans sa région natale, le terroir bas-normand, à Paris, puis en Floride, histoire de se dépayser et de se voir confirmer que le verbe Aimer existe, et qu’il est bon parfois de l’employer.
Des scènes amusantes côtoient les épisodes mélancoliques, la tendresse étant toujours au rendez-vous, le tout dilué dans une bolée de cidre et quelques coups de canon, du rouge de préférence, pour bien montrer l’appartenance politique de certains protagonistes.
Un roman qui engendre la bonne humeur, mais qui également fait réfléchir car tout un chacun se reconnaîtra dans certaines scènes, et si ce n’est toi c’est donc ton frère, qui ne tombent jamais dans le grotesque mais engendrent des réflexions auxquelles il est bon de réfléchir, afin de ne pas s’engluer dans un mode de vie en marge. Sans oublier une grosse dose de tendresse bourrue qui s’impose dans la pudeur des sentiments.
Et Henri Girard, via ses protagonistes, n’hésite pas à souligner combien il est important de s’aimer, pas uniquement avec le cœur et la tête, mais également physiquement, à tout âge, les relations sexuelles n’ayant pas de date de péremption, même si certains, jeunes et moins jeunes, pensent qu’arrivés à un certain âge, voire un âge certain, les galipettes ne devraient plus être autorisées.
Au fait, me direz-vous fort à propos, que vient faire ce Concombre du titre. Disons qu’il s’agit d’un des protagonistes du roman, qui est ainsi surnommé, et qui sous des dehors débonnaires de bon gros vivant, se montre malin en diable.
Et si vous désirez en savoir un peu plus sur l’auteur, qui n’hésite pas à se mettre en scène, partiellement, dans ce roman, cliquez sur le lien suivant :
Henri GIRARD : Sous l’aile du concombre. Editions Atelier Mosesu. Parution le 6 juillet 2017. 200 pages. 13,00€.
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