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11 juin 2017 7 11 /06 /juin /2017 08:02

Qu'est-il de pire pour un écrivain que le syndrome de la page blanche ?

Daniel CARIO : Les yeux de Caïn.

Celui de ne pas retrouver son vocabulaire, d'être obligé de rechercher ses mots, d'utiliser la fonction synonymes sur son ordinateur.

Peu à peu Lucas Macaire, romancier quinquagénaire renommé sent son lexique lui échapper et si au début il n'y prête guère attention, bientôt cet état lui pèse. Une situation qui l'handicape.

Sa femme Michèle, plus jeune que lui de dix ans, architecte travaillant chez elle pour un cabinet, s'inquiète. D'autant que ses absences mémorielles s'amplifient et peu à peu il devient dépendant. Il n'est plus que l'ombre de lui-même, ne marchant plus, ne se souvenant de rien, devenant inexorablement une loque, ratatiné dans son fauteuil.

Le couple est ami avec Levesque, un neuropsychiatre qui accepte d'étudier ce cas qui n'atteint théoriquement que les personnes plus âgées. Et après des examens, un texte que doit écrire Lucas sans se relire et sans recourir à un subterfuge quelconque, la dégénérescence neuronale de Lucas est démontrée. Les premières fois, l'expérience est probante, mais sans plus, mais plus le temps passe, rapidement, le texte devient rapidement une rédaction de gamin, puis du grand n'importe quoi. Le verdict tombe : maladie d'Alzheimer.

Un stage à l'hôpital est envisagé, mais pour Lucas, c'est comme si sa femme l'abandonnait. Une autre solution est envisagée. Levesque connaît un directeur de recherche qui vient de mettre au point une molécule susceptible de redonner la mémoire à Lucas. Mais celui-ci est de plus en plus atteint et il faut à Michèle et au neuropsychiatre employer des ruses pour que celui-ci soit soigné.

Un séjour à l'hôpital ne pouvant être envisagé dans l'état actuel, Lucas sera soigné à son insu dans une dépendance de l'établissement qui pour l'occasion est transformée en chambre d'hôtel. Lucas est accompagné par Michèle, comme si le couple partait en vacances. Le risque réside lors des promenades du patient dans le parc, mais Lucas est trop affaibli pour se promener. Une infirmière, jouant le rôle de serveuse, lui fait ingurgiter des boissons droguées et lorsqu'il est endormi, lui fait des injections hypodermiques contenant la molécule. Et comme Michèle est présente, le malade se méfie moins.

La molécule est efficace, trop peut-être. Lucas recouvre sa mémoire et même plus, seulement un inconvénient s'installe. Il souffre de migraines terribles. Mais s'il ne prend plus son traitement, il retombe dans son manque de mémorisation. Bientôt Lucas est en proie à de subites réminiscences, des reviviscences qui s'imposent comme des images issues de son enfance. Peut-être même d'avant. Comme des agressions qui entraînent le couple jusqu'à Guéret puis à Montluçon sur la piste d'yeux vairons, comme ceux que possèdent Michèle. Pas vraiment vairon, mais une hétérochromie qui donne à Michèle un charme particulier. Un cœur marron est dessiné dans ses iris vert.

 

La première partie du roman est axée sur la longue dégradation de Lucas, longue relativement puisqu'elle s'étale sur quelques mois. Et le lecteur se surprend à souffrir avec ce héros atteint d'une maladie de plus en plus courante qui atteint le cerveau et lui obère les souvenirs proches.

Le processus de perte de mémoire nous pend aux yeux et l'on est en droit de se demander, parfois lorsque l'on cherche un mot, si nous ne sommes pas atteint de cette maladie neurologique insidieuse.

Si cette partie repose plus sur l'aspect psychologique et les rapports du patient avec sa maladie, la seconde nous entraîne sur la piste d'un tueur en série et le ton change, même si Lucas se trouve confronté à un problème qui le touche particulièrement. Une seconde partie qui nous emmène du côté de Stephen King, avec une approche légèrement fantastique, tout en relevant du domaine policier.

Autant la première partie est intimiste, la seconde est plus mouvementée et donne le frisson. Un roman agréable qui nous offre une autre facette du talent de l'auteur, évoluant entre Bretagne, Creuse et Allier.

Daniel CARIO : Les yeux de Caïn. Groix Editions & Diffusion. Parution mai 2017. 384 pages. 14,90€.

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commentaires

A
L'auteur nous propose une belle promenade dans ce roman.
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O
Une double promenade dans l'esprit et géographique

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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