Oh mon bateau...
Planté devant sa fenêtre, Louis Gonidec scrute l’horizon, la mer en proie à la colère du vent de décembre.
Malgré le tiraillement qu’il ressent dans le bras gauche, il stationne jusqu’à ce qu’enfin il aperçoive ce qu’il espère et redoute à la fois. Une barque, une fluorescence qui flotte rapidement sur l’eau, entre Erquy et Fréhel. Absorbé, il ne voit pas le temps passer.
Viviane, sa maitresse… de maison, monte se coucher tandis que lui reste devant la croisée, avant de s’intéresser à ses documents et ses tableaux. Des marines, dont des toiles de Méheut et Böcklin, puis il sort.
Lorsqu’il rentre il se retrouve nez à nez avec deux personnages qui sont en train de dévaliser sa bibliothèque. Une attaque, une douleur dans la poitrine et Louis tombe à terre. Viviane réveillée par le vacarme descend précipitamment, mais ne peut que constater le départ des intrus et apercevoir Louis gisant. Les gendarmes procèdent aux premières constatations mais Viviane ne peut accompagner Louis plongé dans le coma à l’hôpital, n’étant pas de la famille.
Irène, la fille de Louis et Armel son mari armateur, ainsi que Mona une de ses petites-filles, arrivés aussitôt sur les lieux du drame, doivent procéder à un inventaire. Entre Mona et ses oncle et tante, l’entente ne règne guère. Ils ne voient que par Murielle, leur fille, mariée à un homme destiné à la politique et à un avenir prometteur.
L’inventaire est long, mais avec un peu de méthode, Mona et Murielle se rendent compte que des dossiers contenant des documents et deux tableaux ont disparu. Murielle repart, ses parents aussi, ils ont autre chose à faire, et Mona s’accroche. Elle était attachée à Grand-Pa, et des photos réveillent ses souvenirs. Murielle, la pleurnicheuse, Richard et elle sur la grève. C’était il y a vingt ans de cela. Depuis Mona est étudiante en histoire de l’art, elle a des problèmes financiers, mais malgré tout elle s’accroche à ce larcin et l’énigme qui en découle.
Les deux voleurs ont perpétré leur forfait à la demande d’un certain Kovalsk, mais les inimitiés, les dissensions s’installent dans le petit groupe et l’un d’eux s’enfuit, jetant dans une benne à ordures le sac contenant les documents, ne gardant par devers lui qu’un paquet assez volumineux.
Dans une ambiance frisant le fantastique, Denis Flageul nous entraîne dans une histoire dont l’un des éléments principaux est le Bag Noz, la barque de nuit, censée convoyer les personnes péries en mer.
Et la dernière victime de l’année, tout comme pour l’Ankou sur terre, deviendra le nouveau marin, le pilote de cette embarcation. Une superstition, une légende qui est ancrée dans l’imaginaire populaire breton.
Mais est-ce vraiment une affabulation ? Tout pourrait porter à le croire, sauf que les témoignages concernant la vision de cette barque flottant au dessus de l’onde par des personnes apparemment dignes de foi et relatée dans différents journaux locaux dans les années 1960 abondent.
Le fantastique nous entoure, il suffit pour le percevoir de montrer un peu de bonne volonté. L’intrigue qui en elle-même est plaisante, nous permet de voyager dans les Côtes d’Armor avec des intrusions en Ille et Vilaine, entre terre et mer.
Le Grand-Pa, Louis Gonidec, recherche ses racines et possède une quantité impressionnante de livres, de documents sur la vie maritime des siècles précédents, des tableaux achetés dans des brocantes et qui se révèlent être de valeur.
Et de nombreux lecteurs acharnés pourront se retrouver en ce personnage sympathique. Sûrement plus que certains de ses ancêtres. L’épilogue peut éventuellement laisser sur sa faim, mais avec un peu de fantaisie imaginative, vous pouvez continuer l’histoire en lui collant le dénouement qui vous agrée.
Denis FLAGEUL : Fantôme de mer. Collection Polar & Grimoire. Edition Terre de Brumes. Parution 20 octobre 2011. 160 pages.
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