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6 juin 2016 1 06 /06 /juin /2016 12:43

Hommage à Frédéric Dard, décédé le 6 juin 2000.

François RIVIERE : Frédéric Dard ou la vie privée de San-Antonio.

Romancier, scénariste de bandes dessinées, critique littéraire, François Rivière est également l’auteur de biographies consacrées à des auteurs éclipsés parfois par leurs personnages.

Ainsi s’est-il penché sur l’œuvre et la vie d’Agatha Christie, d’Enid Blyton et James M. Barrie, le créateur de l’immortel Peter Pan. En mars 1999 il publiait au Fleuve Noir une biographie dédiée à un auteur vivant : Frédéric Dard ou la vie privée de San-Antonio, ouvrage qu’il avait terminé en novembre 1998.

Le 6 juin 2000 disparaissait Frédéric Dard, physiquement, mais son héros, le commissaire préféré de ces dames, vit toujours non seulement sous la plume de Patrice Dard, son fils spirituel et génétique, mais dans les cœurs et les esprits de tous ses nombreux lecteurs et admirateurs.

De la naissance de Frédéric Dard le 29 juin 1921, et même un peu avant, jusqu’à la fin des années 90, François Rivière explore le parcours de cet obsédé textuel qui avant d’être reconnu comme un romancier de talent, aura végété malgré les nombreux encouragements prodigués par ses pairs : Simenon, Max-André Dazergues, Marcel E. Grancher…

L’accouchement de sa mère s’avère difficile et son père craint pour la vie de la parturiente. Il en restera des séquelles, un bras gauche déformé et inerte, que s’emploiera à soigner avec persévérance, abnégation et un amour quasi exclusif, sa grand-mère paternelle Claudia, se substituant aux parents accaparés par leur travail. La carrière de Frédéric Dard débute en 1940 avec la parution de La Peuchère chez Lugdunum, mais cet ouvrage comme les suivants, ne connaîtra qu’un succès d’estime. Véritable bourreau de travail, il enchaine les titres et les pseudonymes, pour la plupart empruntés à l’américanisme ambiant, écrivant dans de petites revues dont les illustrations sont signées Roger Sam, son beau-frère, lequel récidivera beaucoup plus tard pour des romans publiés au Fleuve Noir, mais c’est la galère.

Selon la légende, Armand de Caro, découvrant chez un bouquiniste Réglez-lui son compte édité chez Jacquier en 1949 et signé San Antonio, lui donnera sa véritable première chance et en 1950 débute une carrière qui ira crescendo. Croire que San Antonio a phagocyté son géniteur serait presque une erreur ou une hérésie. Car les premiers romans publiés chez cette maison d’édition qui sera « sa » maison furent bien sous les noms de San Antonio (Laissez tomber la fille) dans la collection Spécial Police et de Frédéric Charles pour un roman d’espionnage en 1950 (Dernière mission), le premier Frédéric Dard ne l’étant qu’en 1951 toujours en Spécial Police avec Du plomb pour ces demoiselles.

Et il faudra bien des années pour que la corrélation entre Frédéric Dard et San Antonio soit effective pour les critiques et les lecteurs. Mais il faut avouer que le style littéraire était complètement différent et pouvait désorienter. Pendant ce temps, Frédéric Dard ne chômait pas car le succès qu’il connaitra par la suite n’était pas encore au rendez-vous. Et toujours en point de mire comme l’eut longtemps Simenon, la reconnaissance du public en tant qu’auteur à part entière et non pas forcément catalogué dans un genre considéré comme mineur.

Ainsi il accumula les romans en parallèle du Fleuve Noir chez d’autres éditeurs dont Jacquier ou La Pensée Moderne (sous le pseudonyme de l’Ange Noir) et les pièces de théâtre, des adaptations tirées de ses propres romans ou de ceux de Simenon, seul ou avec la collaboration de son ami Robert Hossein. Robert Hossein avec lequel il signera également quelques ouvrages dont Le sang est plus épais que l’eau en 1962.

Si la gloire, la notoriété et l’aisance financière sont enfin au rendez-vous, Frédéric Dard subira des accrocs, des coups durs qui laisseront des traces. Une tentative de suicide en 1965 alors que L’histoire de France vue par San Antonio bat des records d’édition ou encore l’enlèvement de sa fille Joséphine en 1983.

François Rivière ne pouvait pas ne pas évoquer ces douloureux moments de la vie privée et familiale de Frédéric Dard. Mais il relate également et surtout le parcours littéraire et établit lorsque le besoin s’en fait sentir afin de mieux plonger son lecteur dans l’époque des débuts, le parallèle entre les romans noirs de Frédéric Dard et ceux de Boris Vian, sa rencontre avec James Hadley Chase dont il a adapté La Chair de l’orchidée en 1955 au théâtre ou encore Jean Bruce, l’auteur phare du Fleuve Noir avec Paul Kenny, un auteur bicéphale, et quelques autres. Le tirage des romans de Frédéric Dard avoisine bientôt ceux du créateur de OSS117, et Josette Bruce, femme et collaboratrice de l’écrivain, le complimentera en ces termes : vous êtes un écrivain, mon mari, lui, n’est qu’un fabricant.

De nombreux ouvrages, de nombreuses études ont été consacrées à Frédéric Dard et à son jumeau San Antonio, mais François Rivière a écrit un livre sensible, parfois émouvant, richement documenté, proche de l’homme et du romancier, peut-être le plus abouti de tous ceux qui ont été publiés. Et il était normal, logique, indispensable même que ce document soit réédité dix ans après la disparition de Frédéric Dard.

Première édition : Fleuve Noir. Parution 10 mars 1999. 320 pages.

Première édition : Fleuve Noir. Parution 10 mars 1999. 320 pages.

François RIVIERE : Frédéric Dard ou la vie privée de San-Antonio. Editions Pocket. Nouvelle édition revue et augmentée. Parution Juin 2010. 376 pages.

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commentaires

S
Bonjour Paul.<br /> 16 ans déjà, merci pour le souvenir. Toujours un San Antonio à portée de lecture, telle est ma devise, et je m'en porte très bien. A signaler ces jours-ci, la réédition en un volume des romans qu'il signa Kaput. Peut-être son oeuvre la plus noire...<br /> Amitiés.
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O
Bonjour Serge<br /> L'occasion idéale pour relire l'unique Kaput que je possède : La dragée haute... <br /> Amitiés
X
Je l'ai acheté récemment, mais pas encore lu - cet article lui fait gravir quelques degrés de ma PAL! Le timing est en tout cas excellent au moment où un éditeur anglais, Pushkin Press, entreprend de faire découvrir l'oeuvre "noble" de Dard (les San-Antonio sont je pense intraduisibles et de toute manière trop franco-français) au public anglophone. Espérons que la greffe prenne!
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O
Effectivement les San Antonio sont difficilement traduisibles, surtout la seconde partie de sa production, car les premiers, même s'ils sont ancrés dans leur époque, pourraient l'être, les jeux de mots et autres digressions, notes aux lecteurs étant plus facilement compréhensibles. A mon avis. Mais les Frédéric Dard oui car se sont de véritables romans noirs.

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