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21 décembre 2015 1 21 /12 /décembre /2015 13:17

Un fantôme peut aussi avoir mal, mais on ne l'entend jamais se plaindre...

CANESI & RAHMANI : La douleur du fantôme.

Tout comme le sparadrap colle au doigt du capitaine Haddock, la mort colle à l’existence de Charlotte de Montbrun.

Cette jeune fille de dix-huit ans, accro à Internet et aux services de messagerie en ligne, assiste en direct à la noyade de Pierre Mande aux pieds de la statue de la Vierge à Biarritz. Elle récupère, surgie de l’eau en colère, une page du livre que tenait dans ses mains le noyé lorsqu’il fut englouti. Seuls quelques mots ont échappés au lavage de l’écume présente en abondance : Une dame enveloppée dans le soleil…. Dragon rouxson enfant fut enlevé et conduit….

Charlotte était en villégiature avec son père dans un hôtel de la cité basque lorsque des éclats de voix provenant de la chambre contiguë la mirent mal à l’aise. Dans la salle de restaurant les deux protagonistes mangent près de leur table et elle peut les détailler. Une jeune femme en compagnie de son oncle âgé qu’elle suivra peu après, assistant à ce qui pourrait ressembler à un accident, ou encore à un suicide, à moins qu’il s’agisse d’un meurtre.

Elle appelle les secours mais se garde bien de révéler son identité. De retour à Paris dans l’appartement familial déserté par sa mère depuis quatre ans, vivant avec son père architecte renommé qui voue une passion peu commune à tout ce qui touche la période Napoléon III, elle assiste en direct à la télévision à la retransmission d’une émission consacrée à un jeune magicien. Celui-ci décède en ingérant de l’azote liquide dans le cadre de l’un de ses tours.

Charlotte se lie d’amitié avec Hélène Weinstein, la nièce du noyé, et assiste à sa prestation dans Le Lac des cygnes à l’Opéra Garnier en compagnie de son père. Hélène aspire à devenir danseuse étoile et elle en a tous les moyens. Seulement une flèche lancée du plafond ne lui permet pas de terminer le ballet.

Charlotte requiert les services d’un correspondant dont elle ne connait que le prénom, Roland, avec lequel elle échange de nombreux mails, qui va l’aider dans ses recherches. Mais le plus souvent ses réponses sont obscures et elle doit les interpréter. Toutefois elle apprend que le texte énigmatique est emprunté à la Bible.

Les assassinats mystérieux se suivent et Charlotte établit un tableau recensant les points communs reliant ces morts. Chaque défunt possédait un livre à la couverture blanche, livre qui a disparu après leur mort, ils possédaient un tatouage triangulaire sur l’épaule et leur corps recelait une dose importante d’amphétamines. Et à chaque fois Charlotte en a été le témoin, en direct et seule comme pour Mande, soit en compagnie d’autres personnes.

Or c’est bien cette coïncidence qui la chagrine, d’autant qu’elle apprend par Roland que les grands-parents d’Hélène sont morts en déportation et non d’un accident comme la jeune danseuse le croyait. Une fiche mise à jour par sa mère ! D’autres faits la troublent comme d’apprendre que Mande, qui œuvrait afin que les Juifs spoliés durant la dernière guerre puissent récupérer leurs biens, était profondément antisémite.

 

Dans une ambiance baroque, rappelant l’univers littéraire et réel de la fin du XIXème siècle, avec de nombreuses références à l’époque du Second Empire et haussmannien, tout en étant résolument plongé dans notre monde assujetti à l’informatique, évoluent des personnages rêveurs, esthètes, petits génies de la téléinformatique, artistes voués à exalter une culture en décalage avec la frénésie musicale actuelle.

Les auteurs jouent sur l’ambivalence, entre réel et virtuel, culture du passé et technologies de pointe, machiavélisme, manipulation et candeur, haine et amour, beauté et laideur psychique et physique, réalité et virtuel, froideur de l’intelligence et chaleur du cœur, force et vulnérabilité, certitude et incertitude, mâle ou femelle ou plutôt mâle et femelle…

Un roman qui joue avec les nerfs, principalement dans la première partie, quant au début de la seconde, il se laisse glisser, nonchalant, comme le luxueux paquebot qui fend les eaux de la Méditerranée avec à son bord Charlotte, son père et Hélène. Le calme avant la tempête. Un roman à l’intrigue puissante, décalée et fort documentée.

CANESI & RAHMANI : La douleur du fantôme. Editions Phébus. Parution 25 mars 2010. 320 pages. 23,35€.

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  • : Lectures de l'Oncle Paul
  • : Bienvenue dans la petite revue de la littérature populaire d'avant-hier et d'hier. Chroniques de livres, portraits et entretiens, descriptions de personnages et de collections, de quoi ravir tout amateur curieux de cette forme littéraire parfois délaissée, à tort. Ce tableau a été réalisé par mon ami Roland Sadaune, artiste peintre, romancier, nouvelliste et cinéphile averti. Un grand merci à lui !
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