Vienne le temps des poésies
Qui te videront de ton lit
Quand nos couteaux feront leur nid
Au cœur de ta dernière nuit
Franco la muerte.
Léo Ferré.
Un recueil Franco de porc et de déballage...
Cela fera bientôt quarante ans que l'Espagne ne vit plus sous la férule franquiste !
Afin de le faire se retourner dans sa tombe, vingt auteurs se sont mobilisés sous la houlette de Gérard Streiff, afin de commémorer non pas Franco mais sa mort qui signifiait la délivrance de l'Espagne. Un événement fêté comme il se doit par vingt plumes qui nous ramènent quelques décennies en arrière, lorsque l'ombre du franquisme obscurcissait le ciel ibérique.
Patrick Amand nous offre avec Moi et Franco une histoire personnelle, un récit qu'un ancien Espagnol lui aurait confié alors que Patrick Amand racontait à une tablée que Gérard Streiff, le coordinateur de l'ouvrage, lui avait commandé un texte. L'homme avoue que son père avait rêvé tuer Franco au lieu que celui-ci décède tranquillement sur son lit.
Et c'est bien cette envie de se débarrasser de Franco, les tentatives avortées, qui ont inspiré quelques-uns des auteurs ayant participé à ce recueil. D'autres attentats sont narrés dont deux mettant en scène le personnage du général Luis Carrero Blanco, premier ministre espagnol, décédé le 20 décembre 1973 dans une opération menée par l'ETA. Version officielle. La mise en scène de cet épisode est particulièrement bien décrite par Gildas Girodeau tandis que Patrick Fort s'empare de cette histoire pour nous fournir une vision plus personnelle avec une femme qui a toutes les raisons de déplorer la mort d'un individu honni par une grande partie de la population.
Si de nombreux Espagnols ont franchi la frontière au début de la guerre civile de 1936 puis après, lors de la Retirada par exemple, ou profitant de différentes situations pour quitter le sol natal, Franco pouyvait compter sur de nombreux soutiens, surtout parmi le clergé et les catholiques intégristes, mais également les racistes, les anticommunistes.
L'abbaye de Santa Cruz del Valle de los Caídos, un monument commandé par Franco pour rendre hommage aux héros et martyrs de la Croisade, c'est à dire les Nationalistes regroupés sous sa bannière, puis transformée en mausolée à l'intention de tous les combattants Nationalistes et Républicain à condition qu'ils soient de confession catholique (!) est tous les ans le lieu de pèlerinage des fervents du régime franquiste. De ceux qui perpétuent la mémoire du général, et de ses exactions, tout comme les nouveaux nazis sont fanatiques des emblèmes hitlériens. Mais se déplacent également les curieux, les touristes, et certains vieux Espagnols qui veulent vérifier que le Caudillo est bien décédé. Max Obione, dans Los Caídos, nous en présente un, dans une histoire dont le dénouement est à pisser de rire.
Si la plupart de ces nouvelles sont situées durant la dictature franquiste, quelques-unes sont plus contemporaines, ainsi que nous le démontre Jeanne Desaubry. Une nouvelle dans laquelle l'héroïne est une jeune provinciale, guère délurée, montée à Paris afin de suivre les cours à la Sorbonne. Elle désire voir le film de Carlos Saura, Cria Cuervos, dont la musique du film, Porque te vas a été immortalisée par Jeanette en 1976. Valérie l'étudiante en subira des dommages collatéraux.
Roger Martin s'attaque au GAL, Groupe Antiterroriste de Libération, des commandos para-policiers et paramilitaires dont le but était de contrer les offensives de l'ETA en employant des méthodes illégales et dont le nom était significatif comme les Guérilleros du Christ-Roi. Roger Martin s'est spécialisé dans la dénonciation du fascisme en général et avait déjà mis en scène le GAL dans un épisode du Poulpe, Le GAL... l'égout.
On ne pourra manquer rapprocher le titre de la nouvelle de Jean-Hugues Oppel, Je ne suis pas Franco, à des déclarations formulées en début d'année, un mantra que répète inlassablement un prisonnier face à ses bourreaux. Tandis qu'Alain Bellet préfère tourner en dérision la mort de Franco le catholique, Antoine Blocier revient sur un des épisodes du franquisme, la construction de barrages inutiles destinés à déplacer la population.
Résumer chaque nouvelle est un peu fastidieux, je le concède, aussi je vous propose un regard d'ensemble grâce au sommaire ci-dessous puis si vous désirez en savoir plus, je vous conseille un petit tour chez mon ami Pierre de BlackNovel1 qui les présente une par une avec talent.
Avant-propos de Gérard Streiff.
Patrick Amand : Moi et Franco.
Alain Bellet : Le banquet du bas monde.
Antoine Blocier : Mon village fantôme.
Frédéric Bertin-Denis : Mauricio Lopez est communiste.
Didier Daeninckx : Le raid du F-BEQB.
Jeanne Desaubry : Porque te vas.
Pierre Domenges : Le cimetière des deux mères.
Maurice Gouiran : L'ombre de la Santa Cruz.
Gildas Girodeau : El Ogro (L'Ogre).
Patrick Fort : A quelques minutes près...
Hervé Le Corre : Franco : la muerte.
Sophie Loubière : Gratia plena.
Roger Martin : GAL-OAS.
Jacques Mondoloni : Les couacs Franco.
Ricardo Montserrat : Decimas.
Chantal Montellier : Garrots-gorille.
Max Obione : Los Caídos.
Jean-Hugues Oppel : Je ne suis pas franco.
Gérard Streiff : La faute du toubib.
Maria Torres-Celada : Les vivants et les morts.
C'est un fait inédit : on annonce la sortie d'un recueil de nouvelles pour fêter les 40 ans de la mort de Franco. Vingt nouvelles écrites par vingt auteurs, au format imposé mais au sujet libre...
https://blacknovel1.wordpress.com/2015/08/26/franco-la-muerte-arcane-17/
COLLECTIF : Franco la muerte. Editions Arcanes 17. Parution le 27 aout 2015. 280 pages. 21,00€.