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10 juillet 2015 5 10 /07 /juillet /2015 13:36

Et les suiveurs trépassent ?

Michel LEBRUN : La caravane passe.

Parmi toutes les caravanes publicitaires qui précédent les coureurs du Tour de France, se faufilent le car, la camionnette et la Traction des cafés solubles Solocafé.

Solocafé, le meilleur et le moins cher des cafés en poudre...

Bernard Portel, une ancienne gloire de la chanson et du cinéma, aujourd'hui sexagénaire, pense que sa carrière est enfin relancée après une quinzaine d'années de galère, d'hospitalisation et de drogue. Il est accompagné du jeune accordéoniste Dominique Quercy qui se produit également en solo pour deux ou trois morceaux lors du spectacle nocturne. Gigi Saint-Elme, la vingtaine, qui a déjà joué dans un cabaret et à l'avenir prometteur, complète la partie variété itinérante.

Metz, cinq kilomètres. Dominique Quercy joue un peu de piano à bretelle juché sur la camionnette puis Bernard Portel prend la relève depuis le car, mimant les chansons enregistrées sur magnétophone. Distribution de babioles avant le spectacle du soir. Léon Terroux, le chauffeur du car, François Ravier, le chef de caravane et madame Micheline, la directrice, sont les autres membres de cette fine équipe.

Tandis qu'André Trochut arrive en tête de cette sixième étape, la première du roman, madame Micheline présente Gigi et Portel à un jeune journaliste localier qui n'a jamais entendu parler de l'ancienne vedette déchue mais portant beau et est plus intéressé par le décolleté de la chanteuse. La foule avide attend le spectacle et la distribution d'échantillons de café. Bref tout ce petit monde est content, heureux, joyeux, les sourires fleurissent, la fête peut commencer, même si madame Micheline se montre parfois un peu cassante et pète-sec. Faut la comprendre cette belle trentenaire, elle a la charge de la bonne organisation sur ses frêles épaules.

Après le repas pris en commun, la prestation musicale peut commencer. Bernard Portel retrouve ses sensations et le public, mitigé au départ l'applaudit chaleureusement. Tout irait pour le mieux si une fissure n'était pas en train de s'installer dans le petit groupe.

Madame Micheline et François Ravier ont beau cacher leur liaison, personne n'est dupe. Portel a récupéré à la permanence du Tour une lettre de sa jeune femme Clémence, une différence d'âge qui se décline en décennies, lettre dans laquelle elle donne des nouvelles de leur fille. Clémence a aidé Portel à sortir du gouffre et ils sont mariés depuis cinq ans. Mais Portel est attiré par Gigi. Faut dire que la gamine lui envoie des œillades qui laissent supposer qu'il ne lui est pas indifférent. Quercy voit justement d'un mauvais œil ce rapprochement et la pointe de la jalousie commence à lui transpercer le cœur. Ils sont amis, théoriquement Portel et lui, mais quand même. Quant à Léon Terroux, il se marre, intérieurement, supposant les événements à venir. Par exemple que Portel et Gigi vont coucher dans la même chambre.

Le lendemain, étape Metz - Colmar. Victoire de Roger Hassenforder. Jacques Anquetil cède son maillot jaune à Nicolas Barone. Tout se déroule normalement, ou presque, chez les membres de Solocafé. Sauf que la fissure s'élargit, devient faille, puis fracture.

La troisième étape, du roman mais qui est la huitième du tour, emmène les coureurs jusqu'à Besançon, la victoire revenant à Pierino Baffi, Jean Forestier endossant le nouveau maillot jaune. Ce sera le terme de cette histoire qui se clôt avec quelques rebondissements et retournements de situation, ce dont Michel Lebrun est spécialiste.

 

Dans une sorte de huis-clos en plein air et itinérant, avec tous les principes d'un vaudeville, Michel Lebrun concocte une histoire dont il a le secret, machiavélique à souhait.

Le tour de France 1957 n'est là que pour servir de décor, de support, à une intrigue intimiste. De même la caravane du tour et ses attractions, ses slogans publicitaires, sa bimbeloterie lancée des voitures ou distribuée à l'arrivée de l'étape, met en valeur le microcosme de ces six personnes embringuées dans une histoire tragique de... cœur.  

Une fin non écrite mais suggérée grâce à quelques indices placés ici et là, que le lecteur peut à loisirs imaginer autre.

Publiée en 1958, Michel Lebrun dénonce déjà cette propension à utiliser par certaines personnes, soit par snobisme, soit par manque de vocabulaire, des expressions anglo-saxonnes.

-Allons dîner, dit François Ravier. Sinon nous serons en retard pour le show.

Cette manie, pour faire moderne, de parsemer ses phrases de termes pseudo-américains !

Près de soixante ans plus tard, il faut aux lecteurs un dictionnaire pour lire certains romans ou même des magazines féminins qui truffent leurs titres ou leurs articles de ces termes censés être à la mode. Pourquoi ne plus se servir du mot rétro mais écrire à la place vintage, par exemple.

Michel LEBRUN : La caravane passe.

Michel LEBRUN : La caravane passe. Collection Un Mystère N°427. Editions Presses de la Cité. Parution juin 1958. 192 pages.

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